Ouvrir un commerce à son compte, se faire un nom…
Itinéraires de migrants subsahariens installés au " marché de Noailles " (Marseille, Ier) : 1980-2000

Marie Sengel

Petites entreprises et petits entrepreneurs étrangers. Préactes du colloque d'octobre 2003

A Lucette


Un quartier, des itinéraires


Noailles, premier arrondissement marseillais. Tracés anciens et rues sinueuses, immeubles parfois dégradés. Ce petit quartier qui était décrit comme «populeux, populaire, le plus commercial de Marseille » s'est progressivement fané. Les années 1970 ont vu les commerçants d'antan partir un à un. Bottiers, tripiers, liquoristes et corsetiers ont pris leur retraite. Malgré la position centrale du quartier, les fermetures de fonds se multiplient, et les valeurs foncières trébuchent. Dès le début des années 1980, un renouveau commercial s'opère : de nouveaux acteurs s'installent dans les espaces laissés vacants, modifiant l'inscription migratoire du quartier. Les commerçants d'origines maghrébine et orientale s'implantent, en forte majorité. Ils côtoient les Européens toujours présents et quelques rares, mais remarqués, commerçants venus d'Asie. Des établissements tenus par des entrepreneurs subsahariens s'ouvrent progressivement, regroupés sur quelques rues centrales du quartier. C'est sur eux que mon attention a été attirée. Nulle part ailleurs, ni dans la ville ni dans la région, on ne trouve un tel agencement commercial, une telle concentration d'entrepreneurs subsahariens. L'attrait sur la clientèle africaine, pourtant très dispersée, est important. «Chacun de nous va à Noailles, ne serait-ce que pour y trouver les produits indispensables comme les produits des cheveux, mais c'est aussi pour rencontrer les autres, parler, avoir des nouvelles. Même moi je vais à Noailles pour acheter les produits dont j'ai du mal à me passer, et là-bas je croise forcément des connaissances, des fois par hasard, ou des fois sur rendez-vous ”, explique un client camerounais, cadre supérieur.

Par cette particularité, Noailles devient «le marché africain », avec son sautoir de dix, vingt, actuellement quarante boutiques, toujours en maturation. Et l'on trouve de tout dans ce marché. Le gérant de l'épicerie subsaharienne se vente d'avoir «les condiments de l'ensemble de l'Afrique, d'Est au Sud, du Nord à l'Ouest ». La dizaine de restaurateurs s'organise pour proposer des spécialités diversifiées. Vendeurs de tissus et d'objets artisanaux, commerçants de musique, tailleurs, coiffeurs, multiplient une offre moins exotique que culturelle et «existentielle ». Et l'on défie quiconque de ne pas trouver dans la quinzaine de boutiques de cosmétique les mèches à tresser qui lui conviennent exactement... frisées, raides, épaisses ou fines, couleurs n° 1 à 32 dans cette marque, n° 0 à 40 dans cette autre... Un panel qu'aucune boutique, prise isolément, n'est en mesure de proposer. Voilà donc un espace urbain qui a reçu la patte de ces entrepreneurs d'un autre continent. Ils ont su enrichir l'identité de ce quartier assez malléable, s'organiser, structurer un approvisionnement et une diffusion de produits et de services, être représentés dans la ville...

Dans le même temps, pourtant, un mouvement contraire s'exécute à Belsunce, ce quartier entre port et gare et qui a offert l'hospitalité à bien des migrants venus dans la ville. Des ressortissants de la Vallée du Fleuve Sénégal y tenaient, depuis les années 1950 surtout, des établissements commerciaux. Mais ils ferment les uns après les autres, appuyés, c'est vrai, par la réhabilitation. Cependant, personne n'est prêt, de toute façon, à assurer la relève des «vieux » qui incarnent une première «génération » de commerçants subsahariens de Marseille. Celle-ci est représentée par des hommes surtout - anciens militaires, marins reconvertis, dockers retraités ou chômeurs – qui ont progressivement investi leur capital dans des petits entreprises commerciales[1]. Ensemble, ils ont formé une organisation commerciale masculine, fortement inscrite dans l'Islam et référée à la confrérie mouride. Oligarchique, resserrée sur une appartenance partagée, cet agencement a cependant été placé sous la tutelle du puissant dispositif maghrébin décrit par Alain Tarrius[2]. Pourtant cette formation commerciale subsaharienne se délite à partir des années 1980 : le départ des plus âgés est aggravé par le détachement des plus jeunes qui prennent leur distance et tentent de multiplier leurs ancrages[3]. Très peu réclameront une filiation et une succession commerciale. Falla, jeune commerçant mouride quitte Belsunce où il était employé et s'installe à Noailles, à deux pas de la nouvelle salle de prière de la confrérie. Cependant, il n'entretient avec son groupe religieux que les contacts nécessaires pour «garder les liens », et sans lui vouer son entreprise.

Car le contemporain des jeunes entrepreneurs subsahariens prend place ailleurs : à Noailles, de l'autre côté de la Canebière. Ce quartier actualise avec ponctualité l'événement migratoire national tel qu'il se dessine depuis le début des années 1980. Il incarne – à son échelle – les nouvelles circulations de l'Afrique subsaharienne vers la France marquées par un éclatement et un renversement des tendances[4]. Les nouveaux commerçants qui s'installent à Noailles représentent l'ensemble du vaste territoire situé au sud du Sahara. Et ce sont des femmes, beaucoup. Leur présence est survisibilisée dans ces boutiques de Noailles et l'on peut estimer à 80 % les acteurs féminins qui y interviennent. Mais il s'agit également de personnes jeunes, âgées d'une trentaine d'années. De l'un ou de l'autre sexe, ils ont vécu, un moment au moins, dans les grandes capitales africaines. Les petits points que forment ces acteurs sur la carte commerciale du quartier revendiquent presque autant de villes : Bangui, Brazzaville, Ouagadougou, Lagos, Douala, Yaoundé, Bamako, Lomé, Cotonou, Dakar, Abidjan... autant de langues, de religions, de cultures... et de croisement d'itinéraires singuliers. Mais tous se disent compatriotes. Cette composante, qui respecte la photographie tirée des statistiques migratoires, s'en éloigne pourtant sur un point : ces jeunes adultes ont été, pour la plupart, déscolarisés assez tôt et ne peuvent revendiquer d'acquis professionnels valides en France. Les démarches administratives, institutionnelles et comptables exigées par leur entreprise n'en sont que plus contraignantes... et soldent de nombreuses cessations. Cette première fragilité contribue au turn-over important d'acteurs, de fonds, de partenaires et d'itinéraires commerciaux qui traversent successivement ces boutiques, rebondissent d'un établissement et d'une activité à l'autre.

Ces nouveaux entrepreneurs, malgré leurs disparités, convergent vers un objectif qui marque une rupture avec la génération précédente et les éloigne du système fortement hiérarchisé rencontré à Belsunce. Ils ont, selon leurs termes, «tout laissé derrière eux », «tout abandonné » pour «chercher l'aventure », «chercher la vie », «chercher l'argent », «se chercher soi ». S'efforçant d'atténuer les contraintes liées aux systèmes de pouvoir et d'obligation, ils poursuivent des projets plus personnels[5] et tentent de les réaliser au travers d'une nouvelle émergence commerciale, le plus souvent sans véritable capital. Ceux qui veulent «à tout prix » incarner l'image idéalisée de l'homme ou de la femme d'affaires, misent «le tout pour le tout », s'élancent au «coûte que coûte » vers le succès comme vers l'échec. Serait-il que ces aventuriers n'aient rien à perdre ? Emilie se bat, «je veux gagner la vie. La vie, ça veut dire l'argent, l'amour (...) C'est trouver un nom », un nom, plus personnel encore qu'une renommée. L'engagement de Lucette dans le commerce est une aventure pour «se réaliser ». Selon Lisa, le commerce est un «épanouissement ». Pour Sylvain, c'est «une drogue, qui permet de tenir ». Soya, elle, parle d'un «fortifiant ».

On peut légitimement s'interroger sur la place que l'initiative commerciale occupe dans ces itinéraires, s'interroger sur les projets qu'elle soutient. Si, comme le rappelle Lucette, «le commerce c'est un métier, c'est d'abord pour manger à notre faim », c'est également une motivation qui permet d'étayer d'autres projets, plus intimes. Mais tout commence par l'aventure...


II Les écumeurs d'opportunités



Qui sont-il exactement ces commerçants d'une deuxième génération ? Certains se désignent prestigieux, mais se présentent aux premiers regards comme «gens de peu ». L'import-export dont l'un s'enorgueillit est un mélange de projets grandioses et fantasques qui capotent presque toujours. La boutique qui fait la fierté d'une commerçante est un local humide. Pour tout avouer, je l'ai même trouvé assez dégradé et difficilement déchiffrable : Une marmite cuit à côté des quelques «échantillons du pagne », des poissons séchés et autres denrées destinées à la vente. Car la boutique composite sert aussi de restaurant. La gérante y fait tout bouillir pour joindre «les deux bouts ». Elle anticipe mes questions, me lance, comme un défi d'honneur : «Moi, je suis partie à l'aventure, je suis une aventurière, nous les commerçants ici ».

La question rebondit. Qui sont, alors, ces aventuriers ? Mais les réponses ne se profilent qu'au détour d'entretiens, de rencontres, d'échanges ; en fait, de paroles et de confiance étonnantes par leur hardiesse, et riches, parce qu'à la recherche d'une ligne conductrice. Chacun des cheminements, né d'une convergence des itinéraires, migratoire, familial, commercial et conjugal, est très particulier. Mais, en amont, ces acteurs partagent une faille, une brèche qui a fait naître une tension et les a éloignés de leurs sociétés et familles d'origine. Ces contraintes sont telles qu'elles ont pu inciter un départ, à l'allure de fuite. Falla se sauve du mariage qu'on voulait lui imposer, Juliette parvient à divorcer, Elaine échappe à la polygamie, Sylvain, mal protégé par ses aînés, veut échapper à sa condition de “ boy » et à la domination professionnelle et familiale. «Petits », «cadets », démunis des moyens sociaux et économiques capables d'assurer leur protection ou une médiation, ils tentent de contrer un «anonymat qui permet à n'importe qui de vous faire n'importe quoi »[6]. Partant vers l'eldorado occidental, ils poursuivent l'espoir d'affirmer une existence, une reconnaissance, d'accomplir une réconciliation dégagée des contraintes du groupe.

Se dessine, alors, le portait de migrants désaffiliés. Isolés, en rupture, ils ne tiennent pas le fil conducteur que représente un réseau migratoire et d'accueil. Ils n'ont pas de guide, personne «de sûr sur qui se reposer », aucun filet de protection lorsqu'ils arrivent en France[7]. Calixte Beyala, dans un de ses romans, décrit un personnage qui parvient en Europe en suivant la trace d'un bout de papier où figure une adresse... livrée lors d'une rencontre de voyage. L'on m'a, à moi aussi, parlé de «l'adresse » qui désigne un inconnu... pour qui le nouvel arrivant sera probablement une surcharge indésirable, voire un concurrent.

«C'est de l'inconscience » s'énerve Amina. Elle vient d'ouvrir la porte avec surprise à un «copain » de son petit frère et est «bien obligée de le prendre en charge... » le moins longtemps possible. Directement ou par ces hôtes obligés, les désaffiliés, faute d'ancrages plus solides - ou solidaires - sont dirigés vers Noailles, le point phare des économies et des sociabilités, le ressort vers les perspectives commerciales et la renommée.


III «Le commerce c'est avant tout un métier »... et un parcours



Lorsque Falla, tailleur à son compte à Dakar, arrive en France, ses hôtes «obligés » refusent la surcharge financière qu'il représente. En quelques jours, le maître de maison négocie pour lui un emploi chez un tailleur, lui aussi Sénégalais et une chambre d'hôtel, les deux situés à Noailles. Tu n'as pas le choix soupire Falla. Pierrette, femme d'affaires en difficultés, hébergée chez son frère, est considérée comme un poids par l'épouse de celui-ci. Elle doit contribuer à sa dépense et devient cuisinière dans un restaurant ivoirien de Noailles. Lorsque, soutenue par son ami, elle doit accueillir chez elle un petit frère, elle le placera à son tour dans un restaurant... et lui demandera de prendre l'hôtel.

Arrivant en France, les aventuriers qui ne sont pas «attendus » doivent, rapidement, trouver un travail pour défrayer les hôtes ou prendre un logement. Mais ces migrants ne sont pas les bienvenus non plus sur le marché officiel de l'emploi. Dans un contexte d'inhospitalité[8], la création d'une activité commerciale permet une issue et évite un premier précipice : celui d'une éviction - institutionnelle ou idéologique - du marché rémunérateur du travail, liée au statut de migrant, à des situations de faibles qualifications. Lorsque la voie du travail précaire, mal ou irrégulièrement rémunéré se profile, lorsque le marché formel de l'emploi offre à peine plus de sécurité que l'informel ou lorsque l'expérience acquise n'est pas reconnue, la création d'un commerce apparaît comme une échappée. Parfois la seule envisageable. C'est le cas de Fred : footballeur professionnel au Cameroun, devenu agent de sécurité par intérim en France, finalement restaurateur, après une période de chômage prolongée. «J'ai une lourde charge familiale. Ce n'était pas possible de rester là à attendre, alors j'ai crée ». Trop rapidement sans doute. Il accepte avec son prédécesseur, un Zaïrois, des compromis qui au final déstabilisent son activité.

Le commerce représente donc «avant tout, un métier » et la possibilité de se créer un emploi. Et ce rôle n'est pas novateur. Dans le contexte de crises multiformes qui touchent l'Afrique subsaharienne, c'est actuellement le créneau de «survie » adopté par ceux qui n'ont pas d'autre perspective d'emploi. Auparavant les femmes surtout étaient concernées[9]. Désormais, les hommes «déflatés » les rejoignent[10], ce qui ne va pas sans provoquer certaines rivalités[11]. En Afrique comme en France, l'engouement vers cette voie s'explique par la faible qualification réclamée, par le capital restreint exigé et par sa forte flexibilité. Rares sont ceux qui - comme Lisa - en ont fait l'apprentissage. Et les affirmations fusent, selon lesquelles, le commerce, «c'est dans le sang », «c'est un don », «c'est héréditaire »... Si le commerce est un métier, il reste peu professionnalisé. Du plus loin qu'elles se souviennent, ces commerçantes ont été exercées à rentabiliser les gestes transmis par leur aînées et ont acquis une certaine dextérité. Pour beaucoup, la création d'un fonds constitue la possibilité de puiser dans une expérience et un savoir-faire préalablement acquis et immédiatement mobilisable. Lisa, comme tant de petites filles de Côte d'Ivoire ou d'ailleurs en Afrique, a appris à tresser dans la rue. D'autres, comme Elvire, ont été initiées dès leur plus jeune âge à la vente ou la préparation des «petits produits », souvent pour soulager leur mère ou leur grand-mère dont elles étaient à charge... Fréquemment, «l'expérience de la rue » s'est faite au détriment d'une scolarisation régulière. Les «conjoncturés » de Noailles exploitent alors encore une fois ce savoir-faire, cette expérience, la seule qui semble monnayable dans l'itinéraire de la migration.

Arlette, Camerounaise, a participé, dès l'enfance, à «la vente à emporter » de sa mère. Plus tard, elle s'est vue obligée de créer son propre petit commerce «sur les chemins de l'école » pour sauver sa scolarité. Elle abdique lorsque sa bourse est supprimée. Avec l'aide de sa famille, elle parviendra à mobiliser une somme qui lui permet de partir mais que personne n'a voulu miser sur sa réussite universitaire. Arrivée en France, elle ne trouve pas de travail. Le commerce est à nouveau «comme une seconde issue ».

Mais le commerce n'apparaît pas uniquement comme une solution individuelle. Il construit également une réponse collective en proposant une organisation commerciale d'une relative indépendance. Là où se trouvent des formations commerciales africaines, ces acteurs ont su créer des espaces marchands autonomes[12]. Localement, à Noailles, ils se sont progressivement affranchis du dispositif maghrébin et s'organisent assez librement. Essentiellement tournée vers une clientèle africaine, cette concentration commerciale agit comme une plaque tournante de l'échange marchand, de sociabilité, d'information mais aussi de l'échange d'offres et de demandes professionnelles. L'activité qui se situe en marge des propositions commerciales du quartier mais aussi de la ville constitue de ce fait un réservoir de main-d'œuvre inédit et vers lequel peuvent affluer les acteurs en quête d'un premier ancrage. Employés et commerçants ne sont d'ailleurs pas les seuls. A l'occasion, peintres, électriciens mais aussi blanchisseurs, comptables, bijoutiers au porte à porte... peuvent trouver de quoi se rémunérer. Aussi bas que soit le salaire, il permettra toujours de manger et de régler les frais d'hôtel. Mais aussi d'espérer, ce qui incite à la patience. Car ce monde marchand, contrairement à d'autres espaces de travail, peut reconnaître ses membres. Ce qui, à force d'attente, peut être un des seuls atouts.

Falla enchaîne les engagements à contrats oraux et variables, alterne les «patrons » sénégalais, ivoiriens, camerounais... «Ce sont des amis, des Africains »... Mais ils cumulent les impayés qui lui permettent à peine de régler ses frais d'hôtel et de vie. «A qui tu veux te plaindre ? Ils [les patrons] profitent. Ils savent que tu n'as pas une bonne situation. Quand tu n'as pas ce que tu veux, il faut que tu acceptes, ça ne sert à rien de s'énerver, sinon de se faire des ennemis. C'est le temps qui apporte. Il faut croire que ça va marcher, c'est ce qui me fait supporter ». (Une reproduction du système de l'apprentissage où il revient au «patron » de libérer les apprentis méritants ? Falla explique sa «libération » à Dakar : «Chaque personne dit comment il te voit, si tu es gentil. Des témoignages quoi (...) Quand j'étais là-bas, ils m'ont bien témoigné, «un jeune, il est gentil, toujours le respect, il n'a jamais de problème avec personne ». Alors le patron m'a dit, «maintenant tu peux prendre un atelier, comme moi »). Lorsqu'il obtient un titre de séjour, après dix années de vie en France, il ouvre son établissement. Pour pouvoir bénéficier des loyers peu élevés de Noailles, et s'implanter dans cet espace intéressant pour son projet, il accepte de payer un dessous de table conséquent. Mais pourquoi cette obstination au commerce ? Ce qui est certain, c'est que, commerçant à son nom, Falla est à son tour devenu l'image de la réussite qui fera patienter les «petits ».

Malgré le turn-over important des acteurs, l'idée d'une carrière commerciale fait miroiter. Du plus bas de l'échelle, chacun souhaite l'ascension qui fera de lui le futur propriétaire du fond. Car les commerces de Noailles sont transparents pour ceux qui y circulent. La parole qui s'y échange, les récits qui passent de bouche à oreille sont rarement anonymes. C'est un espace d'interconnaissance, où chacun - ou presque - peut nommer ses interlocuteurs et retracer les cheminements. Les parcours des uns et des autres sont racontés. Certes, simplifiés, arrangés, parfois construits à la façon des «légendes ». La préférée, c'est celle du migrant qui «parti de rien est devenu propriétaire à son nom ». Mais il est possible également de suivre, très concrètement, le parcours d'employés qui, comme Falla, Lisa, coiffeuses, tailleurs, restaurateurs ou vendeurs ont «supporté » et sont parvenus à devenir, eux aussi, commerçants. A quel prix, suis-je parfois tentée de me demander ? Mais s'agit-il vraiment de prix lorsque cette voie apparaît comme la seule progression possible ? Ceux qui ont pu bénéficier d'autres opportunités ont le plus souvent bifurqué. Encore fallait-il qu'ils puissent bénéficier ailleurs d'un capital symbolique. Car atteindre le statut de commerçant indépendant, c'est aussi s'assurer le respect dû à cette position.


IV Les preuves de la réussite et la réputation commerciale



«En Afrique, les plus grands, ce sont les commerçants ». Et l'on parle effectivement des grands commerçants dont la renommée circule de bouche à oreille et emplit les marchés, les rues, l'espace public. «Moi depuis toute petite je voulais être commerçante », se souvient Elvire. «Quand vous rentrez au Bénin, si vous voyez les plus belles maisons, c'est des gens qui font du commerce (...). De tous, ce sont les commerçants qui sont les plus respectés ».

Exercer un commerce, gérer un établissement, se trouver au cœur des échanges marchands et sociaux constitue le gage d'une réussite. L'établissement, physiquement, matériellement présent dans l'espace urbain permet d'imposer à tous, clients et passants, inconnus ou intimes, les signes d'une prospérité sociale et économique. Il en est la preuve. La perception des richesses est immédiate, s'évalue à la taille de la boutique, aux marchandises qui y sont exposées, aux employés qui travaillent... «On vous voit comme responsable d'un fonds, on vous voit propriétaire de tout ce qu'on voit dans votre boutique, désormais, les gens travaillent pour vous », soupire une employée. Il n'est pas rare d'ailleurs que les richesses personnelles et commerciales, les domaines public et privé soient mêlés : ainsi cette commerçante expose en vitrine les dons qu'elle a reçus pour la naissance de son dernier enfant. Une autre organise son anniversaire dans l'espace qu'elle gère, à la façon d'une parade où sa notoriété se mesure à la quantité et à la qualité des personnes présentes et aux cadeaux offerts. Ce faisant, les commerçants se placent à la convergence des réseaux d'échanges et en tirent une valorisation symbolique.

La pratique d'un commerce fait appel à des registres qui mettent en scène la personnalité et la moralité des commerçants et provoquent la réputation. Cela, alors que, beaucoup de sociétés africaines contrôlent et codifient l'expression des individualités et les réfèrent au groupe. Mais l'acte marchand a cette particularité de reposer sur la confiance accordée au commerçant et devient le gage de ses qualités. Exercer un commerce devient synonyme d'intégrité, de moralité, de sens relationnel, de courage aussi, et affirme la respectabilité de l'entrepreneur. C'est le signe par lequel les individus vont exprimer leurs propres valeurs, s'extraire de l'anonymat et imposer une réévaluation des parcours dans un sens positif. Les assertions fusent et se recoupent «moi j'ai réussi parce que »... suit une protestation de volonté, de ténacité, de combativité de la part de personnes qui s'auto-qualifient comme sympathiques, aimantes, accueillantes, chaleureuses, discrètes mais attentives, vivantes, réconfortantes, conciliatrices... L'énergie de ces récits importe au moins autant que leur exactitude... L'important et de faire circuler une représentation de soi. Partie prenante de l'espace et des échanges publics, l'activité commerciale devient un engagement stratégique qui permet à ces jeunes en rupture de banc de réaffirmer une place, une existence valorisée au cœur des réseaux de relations.

Cette respectabilité se juge concrètement à la source des revenus. Ils ont une origine à priori connue de tous, ce qui écarte les médisances, les suspicions, les accusations : «le commerce, c'est très honorifique. Tout simplement parce que tu t'es battu et que tu as atteint un objectif recherché par tous les Africains. Tu as des revenus fiables et honorables ». «Il y a la vitre, moi je suis là derrière, je coiffe. C'est le cinéma ! Les gens regardent, tout le monde voit comment je gagne l'argent, et personne ne peut venir me reprocher quoi ou quoi ” affirme Lisa avec humour. C'est à cette intégrité symbolique que se mesure le respect, que se concrétisent les réputations, et que se consolide la reconnaissance sociale.


V Commerçants et médiateurs : le jeu des notoriétés



A Noailles, on peut aller se restaurer chez «Tonton Fred » («mes clients se sont des amis »), manger chez «Mama Africa » («je suis une mère pour ceux qui viennent »), se coiffer chez «Tata Monique » («tu dis Tata Monique, c'est mon nom de commerce, tout le monde me connaît ”). Nom de commerce, nom de guerre ? Eliane de Latour qui travail sur l'Afrique subsaharienne rappel le lien entre l'imaginaire du héros guerrier, le patronyme chargé des exploits et la renommée[13].

Ces enseignes ne désignent pas uniquement une position dans l'espace public, le fort degré de proximité entretenu avec les interlocuteurs, l'étendue des réseaux sur lesquels circule le nom. Elles affirment également et surtout un statut d'aîné et un pouvoir de médiation. Les commerces forment une scène sur laquelle se traitent la plupart des négociations et des tractations : tontines, associations commerciales ou culturelles, opérations d'import-export, mais aussi mariages «pour le faux » ou «pour le vrai »... Dans ce maelström d'accords sur paroles, le commerçant apparaît comme un orchestrateur informé des contrats oraux, pouvant être sollicité, par la suite, pour départager les partenaires et régler les conflits qui peuvent émerger. Cette position de régulateur ou de «notaire sur parole » apparaît nettement à la position que certains commerçants adoptent dans leur commerce : assis à une table en face de la porte d'entrée, ils ne participant pas à l'activité de l'établissement. Ils «sont là », accueillent les salutations et les nouvelles de leurs «enfants », leur accordant parfois des entretiens «privés » ... mais visibles par tous.

Un homme de loi marseillais d'origine subsaharienne gère les affaires des uns ou des autres. Il m'explique : «Ces gens sont impécunieux, on n'a pas d'argent, donc pas de capital, donc ce sont des gens qui s'installent dans des contrats qui n'existent que par la parole donnée (...). Quand les gens ne s'entendent pas, on va voir ensemble quelqu'un de la communauté qui ayant autorité - en qui tout le monde a confiance et qui écoute à la fois l'un et l'autre - n'est ni juge ni arbitre mais donne son point de vue (...). C'est la transposition de la palabre à l'africaine, avec un chef choisi, ou un guide choisi, sauf qu'en Afrique en général c'est imposé. Le juge en question, le grand, le vieux, l'adulte, l'ancien, le sage, sa parole est d'autorité. Ici elle n'est pas tout à fait d'autorité, c'est plus un médiateur qu'un juge ». Médiateurs donc, ces commerçants. Et les acteurs, en empruntant cette définition, arrivent à se présenter au travers d'autres manifestations que celles qui leur étaient assignées. Ce sont des personnes d'autorité et de confiance choisies pour tenir ce rôle d'«adulte », de «grand », parfois dans leur propre réseau de parenté. Fred, qui a fui les siens, n'hésite pas à prendre l'avion lorsqu'on le réclame «pour des affaires de famille ». A ce stade, rien ne pouvait davantage marquer la réussite de ceux qui sont partis «petits » et «cadets ».

Les «obligés » sont devenus des personnes ressources, à plus d'un titre. Consultés pour résoudre les problèmes, ils sont également sollicités pour des aides financières. Dans leur famille, ils organisent méticuleusement une redistribution qui renforce leur réputation. «On a tous la même idée quand on commence à réussir. Mon magasin, c'était pour aider ma famille » dit Soya. «Moi je suis celle qui envoie le plus (...) Mes parents savent qu'ils peuvent compter sur moi. Ils sont contents de moi, ils disent que je suis leur seule fille » se réjouit Magguie. Autrefois désavouée, elle se présente désormais comme «l'héritière ». «Les gens savent que tu es à l'abri de tout besoin. Parfois ils viennent à toi pour te demander certaines aides, pour eux tu es bien, tu es arrivée alors qu'eux se cherchent encore... », explique Lisa. Comme Fred, Elvire et la plupart des autres entrepreneurs, Lisa est le chef de sa famille restreinte à Marseille. Elle est également considérée comme le chef de sa famille large en Afrique et appelée à résoudre les litiges comme les problèmes financiers. Ce qui n'empêche que ce poids peut être lourd pour des réussites commerciales sommes toutes très relatives. Il y a les moments de lassitude de ceux qui malgré leurs efforts n'arriveront jamais à envoyer suffisamment de médicaments, n'arriveront pas à régler les soins médicaux nécessaires à leurs frères, sœurs et collatéraux, ne pourront installer le confort chez l'ensemble des plus âgés, n'arriveront pas, quoiqu'ils fassent et quels que soient leurs sacrifices, à organiser la scolarité de tous les plus jeunes ... Ils n'arriveront pas non plus à combler totalement leur «obligation », ni à répondre à d'autres demandes de secours toutes aussi essentielles, intarissables.

Une question se pose... lorsque la dette initiale des cadets, lorsque les brèches et les ruptures, sont, malgré tout, atténuées, que reste-il de l'individu ? Lorsque l'existence sociale est affirmée, cède-elle à l'existence de la personne ?


VI Négociations et autonomie



La réussite tient-elle à cette combinaison de pouvoir économique et social, à cette reconnaissance d'un statut ? Où, alors, se situe l'individu ? Et, particulièrement, les migrants subsahariens ? Les parcours de ces entrepreneurs qui se sont inscrits à Noailles touchent au vécu le plus intime des individus. Et leur inscription dans la sphère commerciale a permis à beaucoup de «se construire » et de «sauver » leur autonomie. Celle-ci se situe dans un équilibre délicat entre différents domaines de vie, et notamment conjugal.

Soya a épousé un Français pour échapper au mariage traditionnel que lui a imposé son père. «C'est très grave, il n'allait pas me pardonner ». Ce choix l'oblige à suivre son époux en France. A peine scolarisée, elle passe ses journées à «tourner en rond dans la maison » et se laisse sombrer. «Faire du commerce, ça m'a sorti de la maison. Ça m'a sorti de la solitude (...). Ca m'a beaucoup apporté parce que sinon je n'allais pas connaître tout ce monde, j'allais m'enfoncer toujours (...) avec ça je suis de très bonne humeur le matin, je retrouve mon monde... ». Mais ce commerce de tissu et d'artisanat lui permet également de justifier les fréquents voyages dans son pays d'origine que son conjoint accepte difficilement. Et cette proximité maintenue, renforcée par les cadeaux, les aides, lui a également valu le pardon de son père, «mort trop tôt »... Finalement, dit-elle, «il allait devenir hyper-moderne ». Elle conclut, «ce commerce m'a aidée à me retrouver moi-même ».

La petite activité économique permet-elle l'intégration en France ? La question a sans doute son importance mais semble être balayée par un revers des cheminements. Les petites activités économiques telles que celles qui émergent dans ce monde commercial africain de Noailles permettent une insertion réfléchie à la société d'origine, une autonomie choisie dans la société de migration. Elle trace un pont entre les deux et affirme le lien que l'individu entend maintenir à sa culture, à son monde. L'activité économique donne, dans l'une et l'autre société, une marge de manœuvre et une possibilité de choix que les acteurs sont prompts à combiner. Dans le contexte africain, une source de revenu assure un échange plus équilibré entre l'individu, son groupe, son partenaire conjugal. Cela, de façon relative et subordonnée aux hiérarchies[14]. Exercée en France, et dès lors devenue plus prestigieuse, l'activité commerciale tournée vers le monde africain renforce cette même capacité de négociation ici et là-bas. Jouant des marges de manœuvre que cette activité leur accorde dans chacune des sociétés, les sujets se constituent un espace de liberté dans lequel ils approchent l'individualisation. Ils se dégagent mais maintiennent leur lien au groupe tout en échappant aux dispositifs répressifs mis en place : une mort symbolique ou sociale déjà frôlée par la plupart[15].

Avoir «un commerce à son nom » se conjugue avec une autre expression tout aussi usitée : «se faire un nom ». Pour ces femmes et ces hommes, il s'agit, justement, de parler et s'exprimer en son nom, sortir de l'anonymat du groupe, parvenir à une réalisation, une existence sociale qui, comme leur nom, leur soit propre.

Pour Lucette, il n'est pas question de représenter et de promouvoir les cultures de sa région d'origine. Il n'est pas question non plus de s'inscrire définitivement dans un groupement commercial et de mettre ses capacités au service d'une collectivité. Elle utilise ces opportunités - comme Noailles - pour créer une marque «à son nom » et se réaliser. «C'est pour qu'on me connaisse moi. OK je suis Africaine. Mais encore j'ai un nom. C'est pour qu'on me connaisse moi, avec ma marque. Et non pour qu'on nous connaisse ensemble. Qu'on me connaisse. C'est la finalité quoi. ». Elle tente de m'expliquer, avec beaucoup d'émotion, «un moment donné je doutais de moi. Ce commerce, ça a été un moyen pour moi de vaincre tout ça. Je me suis dit, je vais vaincre cette maladie... et ce n'est pas seulement vaincre la maladie. Je vais me réaliser. Et complètement... je dois me battre contre tout ça... pour m'en sortir. C'est un défi. Et il faut que j'aille jusqu'au bout. »


VII D'une émergence à l'autre



En 1977 déjà, à Abidjan, une «dame » affirmait : «ton travail, c'est ton père, c'est ta mère, c'est ton mari »[16]. Cette dame prophétisait aussi que «Abidjan, c'est fini ». Elle-même était trop âgée pour poursuivre ailleurs... Mais elle a enfanté. Peut-être est-ce sa petite-fille qui, en 2000 expliquait : «Mon père m'a donné un métier. Et il m'a montré l'indépendance. Mon mari, non. Il m'a donné l'argent, il l'a repris ». Pour le suivre en France, Lisa a abandonné le salon de coiffure, avant d'être abandonnée à son tour. «Maintenant je ne regrette plus, je veux concrétiser mon expérience, je veux me relancer avec ce que j'ai appris depuis la Côte d'Ivoire. (...) J'ai appris plein de choses et maintenant je peux les mettre en jeu. Je vais faire mon projet, mais maintenant, ce sera mon commerce, mes enfants et moi. ». Lisa, maintenant âgée d'une cinquantaine d'années renonce à sa carrière de femme d'affaires internationale dont elle s'était prise à rêver. Son périple lui apprend encore à «construire sa propre vie », à sa mesure.

Une sorte de filiation, de recherche et d'expérience commune rejoint ces deux femmes. Un saut de génération à permis une réalisation différente. Lisa, plus jeune, a eu la possibilité de «tirer les leçons, de reculer pour réfléchir ». Il n'en demeure pas moins que ce qui rapproche les acteurs dont il vient d'être question est étroitement lié à une conjoncture et à un contexte migratoire particuliers. Actuellement, d'autres entrepreneurs d'origine subsaharienne apparaissent. Ils évitent le centre de Noailles dont les commerces sont jugés trop «traditionnels », peu agréables et refermés sur l'Afrique. Ils préfèrent la lisière du quartier, les zones de transition qui mènent aux espaces branchés et festifs de la ville. Jeunes à leur tour alors que les commerçants de Noailles vieillissent, ils sont scolarisés, universitaires, nés en France de parents africains ou en plein cœur des capitales africaines. Leur connaissance des institutions leur permet de trouver quelques subventions, et leur offre un emplacement plus valorisé. Au Cours Julien et à la Plaine, loin des emblèmes du port et de la gare, ils sont quelques-uns à se fondre dans l'activité fluide de cet espace standing. Ils jouent d'une identité culturelle et parfois communautaire pour ouvrir des restaurants «exotiques », voués à la mixité culturelle, à la rencontre et au dialogue. Ils créent des salons de coiffure «branchés et modernes » faits pour attirer une clientèle française comme la jeunesse africaine. Il y a des songes de fast-food africain... De «La Plaine », d'où l'on surplombe Belsunce et Noailles, c'est encore une nouvelle génération de commerçant d'origine subsaharienne qui se profile, tournée vers les devenirs personnels.


Notes

[1]. Brigitte Bertoncello, «Les marins africains de Marseille, Histoire d'un ancrage », Hommes et Migrations, N° 1224, 2000 : 22-28.
[2] Alain Tarrius, Arabes de France dans l'économie mondiale souterraine, La tour d'Aigues, 1995.
[3] Sophie Bava, Routes migratoires et itinéraires religieux. Des pratiques religieuses des migrants sénégalais mourides entre Marseille et Touba. thèse de doctorat de troisième cycle, EHESS, 2002.
[4] Jacques Barou, «Les immigrations africaines en France au tournant du siècle », Hommes et Migrations, 1239 : 6-18, 2002.
[5] Mahamet Timara, «Les migrations des jeunes sahéliens : affirmation de soi et émancipation », Autrepart, 18, 2001 : 37-49 ; Isabelle Bardem, «L'émancipation des jeunes, un facteur négligé des migrations inter-africaines, Cahiers des Sciences Humaines, 29, 2-3, 1993 : 379-393.
[6] Marc Le Pape, L'énergie sociale à Abidjan. Economie politique de la ville en Afrique Noire, 1930-1995, Karthala, 1995.
[7] On retrouve ces thèmes dans les travaux de Christophe Z. Guilmoto et Frédéric Sandron, «La dynamique interne des réseaux migratoires dans les pays en développement », Population, 55, 1, 2000, 105-136 ; Engbersen, «Sans-papiers. Les stratégies de séjour des immigrés clandestins », Actes de la recherche en sciences sociales, 129, 1999 : 26-38...
[8] Sous la direction de Didier Fassin, Alain Morice, Catherine Quiminal, Les lois de l'inhospitalité, La Découverte, 1997.
[9] Catherine Coquery-Vidrovitch, Les Africaines, histoires des femmes en Afrique Noire du XIXe au XXe siècles. Desjonquère, 1994.
[10] Né au Cameroun, le néologisme «déflaté » désigne un «agent de l'état mis au chômage avec une petite somme d'argent pour s'installer à son propre compte, s'inscrivant ainsi dans le train de mesures structurelles, législatives et réglementaires mises sur pied pour encourager les initiatives de création de nouveaux emplois salariés et indépendants » (Edjenguèlè Mbondji, «les déflatés » du développement. De la tradition de dépendance à l'autogestion », APAD, N°18, 1999 : 19). Mais l'expression peut s'étendre à la fois aux régions et aux hommes sans emploi.
[11] Voire par exemple l'ouvrage collectif dirigé par Jeanne Bisillat, Face au changement des femmes du sud, L'harmattan, 1997.
[12] A un niveau national et international, ce commerce reste dépendant des plus grandes entreprises de fabrication et d'import-export, notamment françaises et asiatiques.
[13] Eliane de Latour, «Du ghetto au voyage clandestin : la métaphore héroïque », Autrepart, N°19, 2001 : 255-176.
[14] A titre d'exemple : Isabelle Bardem et Isabelle Gobatto, Maux d'amour, vies de femmes, L'Harmattan, 1995.
[15] Sous la direction d'Alain Mari, L'Afrique des individus, Karthala, 1997.
[16] Claudine Vidal, «Pour un portrait d'Abidjan avec dames », Cahiers Internationaux de Sociologie, LXIX, 1980 : 305-312.


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