Sociologie historique des pratiques administratives à l’égard des étrangers en France après 1945

Alexis Spire, chargé de recherches en sociologie CRAPS-Lille 2

Compte-rendu de la conférence du 8 mars 2003

La présente communication repose sur un ensemble d'interrogations et de résultats issus d'une thèse de doctorat intitulée "Sociologie historique des pratiques administratives à l'égard des étrangers en France"'. L'ambition initiale de cette recherche était d'envisager les relations entre Etat et immigration, non pas en centrant l'attention sur tel ou tel groupe d'étrangers, mais en privilégiant une approche socio-historique des pratiques des agents de l'Etat, et plus particulièrement des pratiques d'attribution de titres de séjour, de titres de travail et de naturalisation.

Ces pratiques fondent leur légitimité sur l'application de règles juridiques encadrant strictement l'action de l'administration, mais elles relèvent également d'un pouvoir discrétionnaire, compris comme la sphère d'autonomie à l'intérieur de laquelle les agents de l'administration peuvent prendre différentes décisions, tout en agissant conformément à la loi. Dans cette perspective, notre objectif consistait à se donner les moyens de pouvoir étudier l'articulation entre les principes établis par le droit et l'activité des agents mandatés pour le mettre en oeuvre.

La réalisation d'un tel projet a été rendue possible par l'exploitation d'un matériau archivistique constitué par des échantillons de dossiers individuels de séjour. Matérialisé par l'ensemble des titres et des statuts acquis par l'étranger au cours de son séjour en France, chaque dossier individuel de séjour constitue la trace visible du produit des interactions entre l'étranger et les représentants de l'Etat et permet de retracer autant de scénarios individuels. Pour ne pas nous en tenir à la logique d'instruction propre à chaque cas particulier, nous avons soumis l'ensemble de ces dossiers à une investigation statistique, afin de rendre compte des logiques pratiques mobilisées pour classer les étrangers et leur attribuer des titres et des statuts différents.
La dimension rétrospective contenue dans chaque dossier offre la possibilité de connaître l'issue de chacune de ces trajectoires et de restituer chacune d'elles dans sa dimension temporelle. Le recours à des séries complètes de dossiers de séjour peut alors permettre de distinguer différentes trajectoires, d'évaluer quantitativement leurs poids respectifs et de tenter de dégager les déterminants sociaux de chacune d'elles.

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