Le malade mental étranger durant l'entre-deux-guerres : une double aliénation médico-administrative.

John Ward (Institut Supérieur d'Intervention Sociale (ISIS)/Université Paris XIII)

Novembre 2002

Sommaire

I Un patriotisme humaniste teinté d'eugénisme

- Le patriotisme scientifique
- Formes de l'Eugénisme
- La phénoménologie des émotions embryon du courant ethnopyschiatrique d'après guerre
- Le vécu de l'étranger méconnu
- Le cadre de référence familial français prédomine

II Une politique de rapatriement à visée économique

- L'étranger << profite >> de la psychiatrie française
- Des aliénés étrangers trop nombreux ?
- Un règlement potentiellement discriminatoire et mais mollement appliqué


Conclusion

Notes


L'asile psychiatrique est souvent présenté comme un univers carcéral coupé de son environnement social, loin des grandes questions politiques et sociales qui agitent la nation. Ainsi, le monde de la folie constitue un univers à part, vivant en autarcie et oublié jusqu'à la révolution des psychotropes et de la psychiatrie communautaire intervenue au cours des années cinquante. Son organisation, ses méthodes de traitement s'inscrivent dans la continuité par rapport au << jardinage >> de la folie du 19ème siècle caractérisé par le développement d'une nosographie médicale complexe[1] et par la gestion rationalisée d'énormes établissements fermés placés à l'écart de la ville.

L'aliéné, exclu de tout lien avec le monde extérieur par ce << grand enfermement >>, est-il épargné aussi par la montée du nationalisme ? Quel regard porte le médecin aliéniste sur les malades étrangers, nombreux à fréquenter les établissements psychiatriques de cette époque et avec quelles conséquences pour leur traitement ? Dans quelle mesure l'institution asilaire, dépendant de l'autorité administrative préfectorale, a-t-elle contribué au contrôle démographique et sanitaire de la population qui se renforce au cours de cette période en réponse à la montée du nationalisme[2]?

Une étude des traces laissées dans les archives hospitalières[3] du département de la Seine permet de suggérer que le malade mental fut victime d'une sorte de << double aliénation >> du fait de sont statut de malade et d'étranger. Même si l'analyse de la littérature scientifique et administrative permet de relever certains discours tenus par des médecins autorisés qui confinent à la xénophobie (du moins pour un lecteur contemporain), il ne semble pas, en revanche, qu'il ait fait l'objet de pratiques ouvertement discriminatoires. Nous insisterons aussi sur le mouvement de protection dont bénéficie également l'aliéné immigrant durant cette période et qui fait contrepoids aux discours parfois ambigus tenus par certains représentants de la psychiatrie.

Après avoir mis en lumière quelques éléments du discours psychiatrique dans ses implications pour l'aliéné étranger, nous nous proposons d'explorer deux aspects de ce double statut << d'aliéné mental >> et de <<malade étranger >> [4] : la posture et l'attitude médicale à son égard ; les règles et la pratique administratives le concernant.

I] Un patriotisme humaniste teinté d'eugénisme

Le patriotisme scientifique

Comme le montre les travaux notamment de Paul Bercherie et de Georges Lanteri-Laura[5], les grands psychiatres français de l'entre-deux-guerres, rédacteurs de manuels et auteurs d'articles savants, se placent tous dans la continuité du grand maître Magnan pour qui l'origine de la pathologie mentale est organique et transmissible par l'hérédité. Cette tradition donne lieu à une nosographie foisonnante (de très nombreuses catégories de symptômes et de classes de maladies dont certaines comme la << psychose hallucinatoire chronique >> ne seront pas reconnues par la communauté scientifique internationale et prête encore aujourd'hui à débat) et une référence grandissante à l'hérédité interprétée davantage en des termes Lamarckiennes (qui croit à la transmissibilité des facteurs acquis) que darwiniennes[6].

Cependant, les auteurs au sommet de leur carrière durant le milieu du siècle, parmi lesquels Paul Guiraud, Maurice Dide[7], Eugene Minkowski[8], Rogues de Fursac, Gaëtan De Clérambault[9], vont chercher à faire évoluer ce cadre théorique en fonction de leur activité clinique en contribuant à un débat épistémologique qui bat son plein. L'ambition des écoles de psychiatrie française est de produire une explication compréhensive et unifiée de la pathologie applicable à tout être humain, à défaut de pouvoir identifier avec précision ses causes organiques. La période est ainsi très productive en << traités >> de psychopathologie dont la dernière en date et le plus exhaustif reste celui de Henri Ey[10]. Sa théorie de l'organodynamisme se propose comme une ultime synthèse pour surmonter la tentation dualiste. En effet, comme ses prédécesseurs, Ey refus de dissocier l'explication du symptôme psychique de son origine corporelle en s'opposant à tout dualisme, se plaçant dans une perspective philosophique inspirée de la phénoménologie, là où ses collègues se déclarent << moniste >> (Gide) ou bergsonnien (Minkowski). Il est frappant de relever qu'aucun des traités que nous avons pu consulter (la plupart comportant plusieurs tomes) n'aborde la question des spécificités de l'étranger malade, ni dans un contexte colonial, ni par rapport à leur vie en métropole.

Dans ce contexte, la << race >> du malade n'est pas une considération primordiale pour l'activité de diagnostic (pratique qui constitue l'essentiel du travail du clinicien et qui permet sa valorisation scientifique en l'absence de traitements réellement efficaces). Ainsi De Clérambault[11] affirme que :

<< Les psychoses sont les mêmes chez les individus de n'importe quelle race (psychoses systématisées, démence précoce, manie, mélancolie, paralysie générale, maladie du sommeil) : c'est simplement la forme revêtue par le délire de ces psychoses qui varie selon la race. On délire avec les idées qu'on a et celles-ci sont fonction du milieu où l'on a vécu. Ce que l'on peut dire, c'est que chez les primitifs un traumatisme psychologique léger peut déclencher une psychose. C'est ainsi qu'un Sénégalais devint déprimé et mélancolique par le chagrin d'être resté à l'arrière, alors que ses camarades avaient été envoyés au front. C'était une pseudonostalgie, auraient dit les anciens auteurs [12].

Relevons dans ce discours, que le raisonnement scientifique (classement des pathologies suivant le talent d'observation de l'aliéniste) intègre sans la critiquer une idée de << sens commun >> (le Sénégalais est un << primitif >>). Ainsi il devient possible d'expliquer un comportement observé en contradiction avec le postulat de base. Le symptôme psychotique (et donc organique, nécessitant un long traitement) se transforme en << pseudonostalgie >> (n'ayant pas de substrat organique il n'est pas du ressort de la psychiatrie). On justifie ainsi le fait d'avoir renvoyé le soldat Sénégalais au front durant la première guerre mondiale[13].

Des raisonnements similaires sont tenus lors du Congrès des aliénistes et neurologistes tenu à Alger en 1938. Toujours au sujet des Sénégalais, le professeur Hesnard de Toulon[14] fait remarquer qu'il faut insister sur le << facteur ethnique >> pour comprendre << comment le terrain racial façonne le comportement morbide et commande les réactions >>. Son intervention se poursuit :

<< on ne peut manquer d'être frappé de l'extraordinaire impulsivité des Sénégalais transplantés, qui, normalement plastiques à la discipline militaire, candidement dévoués et enfantinement attachés au chef ou au médecin, sont capables, à la moindre imprégnation infectieuse ou à la pus faible réaction anxieuse de transplantation, d'actes soudains et brutaux d'homicide à l'égard des blancs qui les soignent >>[15].

Cette observation de la réaction violente du colonisé et de son << impulsivité extraordinaire >>, n'ébranle en rien la conviction de tous les aliénistes participant au débat que les cadres de référence théoriques et administratifs de la France sont exactement ceux qu'il faut reproduire en milieu colonial[16]. Tel est le sens de l'intervention du médecin commandant Aubin qui oriente son allocution autour de trois points : l'intérêt de promulguer une assistance psychiatrique calquée sur la loi de 1838 , le développement d'asiles et de services sociaux prophylactiques sur le modèle français et la nécessité d'une formation scientifique dirigée par des français formés en métropole. Le << cadre de l'assistance indigène >> pourrait y trouver sa place à condition d'être placée sous l'égide de la << double spécialisation >> dispensée à Bordeaux et à Paris[17].

Ce discours prend des tonalités d'un franc patriotisme. On apprend ainsi que les << devanciers de la psychiatrie coloniale >> ont << diffusé dans le monde la science médicale française >> [18] grâce notamment au grand professeur Régis qui a fondé l'école de Bordeaux pour former des médecins qui,

<< sous tous les climats, sur les bâtiments , en colonne, dans la brousse, des travailleurs aussi modestes que désintéressé et utiles à leur pays >>[19].

Nous voyons à travers ces extraits et en consultant le corpus de théorie psychiatrique, que la référence à la spécificité des << races >> est dissociée de la croyance en l'universalité du savoir scientifique français. Gênante pour la théorie d'une causalité universelle de la pathologie mentale, la notion de << race >> est intégrée comme une évidence de sens commun et réduite au rôle de facteur d'appoint dans le diagnostic. L'aliénation mentale prime sur la différence << raciale >> dans le regard médical sur l'étranger malgré le patriotisme ambiant.

Un eugénisme plutôt non coercitif et peu opérant

Le projet d'une psychiatrie compréhensive, organiciste et à portée universelle prend sa naissance dans la théorie de la dégénérescence mentale du dix neuvième siècle. Ce courant de penséee, comme le montre notamment Ian Downbiggen, porte en germe la théorie eugéniste qui, sous différentes formes, va fortement influencer la psychiatrie de l'entre-deux-guerres. La théorie de la dégénérescence admet une interprétation très large de l'hérédité n'ayant qu'un rapport lointain avec les lois énoncées par Darwin[20]. Ses défenseurs admettent l'hérédité des facteurs acquis et aussi l'hérédité "dissemblable", l'épilepsie venant, par exemple, d'un alcoolisme constaté dans la génération antérieure. Pendant l'entre-deux-guerres la terreur générale de la syphilis est accrue par l'idée qu'elle est héréditaire (et non seulement congénitale) et que sa transmission peut même sauter une génération[21].

Compte tenu de l'état de santé de la population en général, la recherche des antécédents d'un malade a toujours d'assez bonnes chances de révéler une "tare" familiale, facteur causal probable. Le rapport annuel de l'Asile de Ville Evrard 1875 que l'hérédité provenant de père ou de mère est constatée pour 144 malades, sur les 602 pour lesquels il disposait de renseignements. La faiblesse de ce chiffre rapporté à l'effectif de 1457 autres malades pour qui les renseignements font défaut, n'ébranle pas la conviction de l'aliéniste.

<< lorsqu'on pense à la difficulté de saisir, même dans les cas si rares de sincérité et d'aveux des familles, cet ordre de documents en dehors de la ligne directe et au delà de la première génération ; lorsqu'il est avéré que l'hérédité franchit de toutes parts cette limite ; quand enfin l'on se trouve en présence d'un chiffre considérable de cas inconnus, qui, de toute nécessité, en recèle un certaine nombre, il est bien difficile de ne pas supposer, et tout pousse à admettre que l'hérédité ne doit guère embrasser moins de la moitié des nombres dans le chiffre des causes >> [22].

Durant la période qui nous intéresse, la preuve statistique est administrée avec plus de rigueur. Rogues de Fursac, médecin chef à l'asile de Ville Evrard a fait une étude en 1913 visant à montrer l'origine héréditaire de la paralysie générale. Il fait appel à un groupe témoin, comparant ainsi les antécédents qu'il a constatés chez des paralytiques généraux avec ceux de la population aliénée en général[23]. Son échantillon lui permet de conclure que l'hérédité "congestive" (<< apoplexies, démence sénile, paralysie générale, épilepsie, alcoolisme, toutes les maladies organiques du système nerveux, goutte et diabète >>) est légèrement plus fréquente chez les paralytiques généraux. Elle vient plus souvent du côté paternel. Malgré la fragilité de cette conclusion (les attaques congestives sont probablement plus fréquentes de manière générale chez les hommes que chez les femmes, le lien héréditaire n'est donc en rien démontré) de Fursac n'abandonne pas son hypothèse étiologique.

Malgré cette nouvelle prudence dans le maniement de la preuve statistique, la théorie de la dégénérescence reste donc une référence dès le début de la période de l'entre-deux-guerres. Marie[24], affirme en 1923 à partir d'une proportion d'un quart de << dégénérés héréditaires >> admis dans son service que :

<< en aliénation mentale l'hérédité reste la cause des causes. Ceci prouve que la véritable prophylaxie de la folie doit être fondée sur l'Eugénique et la surveillance des procréations >>[25].

A l'évidence, de tels propos peuvent prêter à une interprétation coercitive, qui ne correspond pas nécessairement aux intentions de leur auteur. Durant les années trente il semble qu'une partie au moins de la communauté psychiatrique ait pris conscience de ce danger et, même si nous ne disposons pas de sources détaillées sur les positions de chacun, il semble que certains médecins aient eu une réaction prémonitoire en tentant de se dissocier d'une telle interprétation. Ainsi, par exemple, Henri Ey, proposa à l'Amicale des Médecins en 1939, la création de petits centres "psycho généalogiques". Ils sont destinés, dans la plus stricte confidentialité médicale et respect de la volonté des familles, à étudier l'origine héréditaire des maladies et à concourir à << l'extinction des familles porteuses de tares >>[26]. Il s'agit sans doute d'une sorte de démonstration par l'absurde de l'impossibilité du projet eugénisme d'envergure prôné par certains représentants de la psychiatrie allemande[27] en y substituant une approche fondée uniquement sur l'étude scientifique suivant certains règles de déontologie[28].

Fondée sur un raisonnement scientifique difficile à vérifier par des moyens empiriques comme le démontre Henri Ey, l'eugénisme fait néanmoins partie intégrante du << corpus >> théorique partagée par la plupart des aliénistes. Edouard Toulouse[29] fondateur de la ligue hygiène mentale, du mouvement prophylactique et membre actif de la société française d'eugénique, en fera grand usage dans ses travaux de << prophylaxie >> et dans ses << causeries >> à la radio. L'apparition de la notion de << biotypologie >> permettra, notamment, à la psychiatrie infantile d'introduire des méthodes statistiques fondée sur le fichage. Le dispositif de prévention des grands << fléaux >> : tuberculose, syphilis, alcoolisme, sera fondée sur une rhétorique de protection de la race française faisant largement appel à la crainte populaire d'une transmissibilité héréditaire ou congénitale de ces maladies (la distinction entre ces deux modes de transmission étant laissée dans le flou comme le démontre Nadine Lefaucheur[30]).

En pratique, il ne semble pas que cette théorie dominante ait donné lieu à des actes ségrégatifs ou coercitifs particuliers à l'égard des étrangers aliénés. Il faut dire qu'il serait difficile d'ajouter une forme de coercition supplémentaire à celle dont font l'objet des malades ordinaires - le placement est systématiquement effectué dans un lieu fermé (même dans les services dits << ouverts >> du centre de prophylaxie fondée par Toulouse les portes sont fermées à clé) et le mode de tri et de distribution des malades obéit à des régles purement administratives : les malades << aigus >> restent à Paris, les << chroniques >> sont envoyés en banlieue, puis en province. Les aliéniste reçoivent nombre de familles de malades, mais la méfiance et l'incompréhension réciproque rendent difficile toute communication visant à introduire un << conseil génétique >>[31].

Tout au plus pouvons nous constater qu'une telle consultation est crée au service de prophylaxie mentale. Par ailleurs, une étude parue dans la revue "Prophylaxie Mentale" fait état parmi les << résultats >> des 1 674enquêtes effectuées par cet organisme en 1930 de trois << rapatriements >> effectués à la suite des1 674 enquêtes et démarches diverses, de 3 000 personnes reçues[32]. Comparé aux vastes ambitions prophylactiques et eugéniques affichées par le Dr Toulouse, ce fait paraît maigre, même s'il indique une volonté d'intervenir dans un projet d'ingénierie sociale ouvertement énoncée. Rien ne prouve que ces << rapatriements >> ont été obtenus par des pressions morales ou légales illégitimes.

Faible du côté de son raisonnement scientifique de l'aveu même de certains médecins qui y adhèrent, l'eugénisme psychiatrique nous paraît également faible par ses effets réels sur la pratique médicale, du moins en ce qui concerne les étrangers.

La phénoménologie des émotions embryon du courant ethnopyschiatrique d'après guerre

Par ailleurs, malgré la grande diversité de leurs convictions théoriques, les aliénistes de l'entre-deux-guerres cherchent tous, selon nous, à formaliser une conception de l'homme unitaire en rejetant toute forme de dualisme qui séparera la source psychique d'un symptôme de son support organique.

Par conséquent, les émotions provoquées (par la guerre ou par le parcours migratoire) doivent être interprétées en tenant compte à la fois d'un changement organique intervenant sur un << terrain >> propice autant que comme résultante de l'impact d'un processus psychologique ou social[33]. Ceci est particulièrement évident dans l'interprétation des traumatismes de guerre analysée par Gide qui sont ramenés à un substrat organique. De la même manière, aucun de théoriciens n'évoque le vécu migratoire comme élément singulier de la symptomatologie ou de la clinique à l'exception près de Eugène Minkowski.

Ce médecin, lui-même concerné par l'immigration par son origine juive polonaise a combattu pour la France durant la première guerre mondiale[34]. Son traité de psychopathologie [35]identifie des << phénomènes pathiques >> : la nostalgie, l'inhibition, l'angoisse liées aux << tournants sur notre route, bien que cette route s'étale droit devant nous, ou encore de suivre la bonne route, bien que la route, pour être route humaine, ne puisse être que la bonne route >>[36]. Dans son oeuvre majeure, d'inspiration Bergsonnienne qui donnera naissance au concept de la schizophrénie, il affirme que << Le langage se présente comme un système de références appelé à nous révéler l'essentiel sur la structure de la vie en général et de celle de l'être humain en particulier >>[37]. Il faut par conséquent étudier la structure des langues étrangères, si l'on voudrait comprendre la psychopathologie de l'étranger.

L'originalité de l'approche de Minkowski consiste en l'introduction d'une nouvelle forme de dualisme entre la temporalité du vécu du malade et la structure linguistique qui permet de connaître le symptôme à un moment donnée. Fondateur avec d'autres du mouvement << l'évolution psychiatrique >> cet auteur semble prêter une attention plus vigilante au vécu migratoire que ses confrères. Il dit du moins implicitement en préface de son traité que sa théorisation de l'angoisse, sa conception originale de l'anéantissement du sentiment dans la schizophrénie sont inspiré de son propre vécu de migrant[38]. Il ne semble pas que cette réflexion ait donné lieu à des pratiques psychiatriques particulières avant la guerre, toutefois, l'expérience de la clandestinité et de la résistance ayant été le facteur déclenchant d'une véritable << éthnopsychiatrie >> dont l'avènement attendra les années cinquante[39].

Le vécu de l'étranger méconnu

Voyons maintenant quelques indications relatives à l'attitude médicale au quotidien vis à vis des malades immigrants. Le statut personnel et social d'étranger est-il prise en compte dans le traitement ou l'aliéné fait-il l'objet d'un regard médical purement << nosographique >> ? Même si la théorie psychiatrique laisse peu de place pour une reconnaissance des origines, comme nous venons de le voir, nous pouvons relever plusieurs signes d'une certaine sensibilité << humaniste >> face à des trajectoires migratoires plus ou moins repérés par les aliénistes.

Stigmatisé par Marie, les << domestiques étrangers >> provoquent un discours en apparence xénophobe :

<<La crise des domestiques  a provoqué l'arrivée à Paris d'une quantité de faibles d'esprit, d'étrangers (Polonais, Tchécoslovaques, Italiens, Martiniquais, etc, etc,) séduits par l'appât d'un salaire qu'ils n'auraient jamais espéré obtenir avant la guerre. Ainsi, pour la seule année 1923, 143 femmes, bonnes à tout faire, servantes, sont entrées à l'Admission. Ces femmes, j'y insiste, ne sont pas des ouvrières, mais de simples bonnes à tout faire et ne peuvent être employées qu'aux soins du ménage. Le fait valait la peine d'être signalé au moment où l'on se propose de restreindre leur emploi dans les Asiles, au détriment de leur traitement et de leur réadaptation à la vie sociale. >>[40]

Leur traitement à l'asile ne semble pas pour autant plus inhumain que ceux des français. Ainsi, cette << bonne à tout faire >> péruvienne, issue d'une famille noble internée à la suite d'une bouffée délirante en 1930 et sortie de l'asile après un mois. Les notes médicales non signées relèvent qu'elle << déclare être << comme un sauvage >> isolée du personnel et des malades par l'incompréhension du français >> et <<me demande de ne pas l'oublier et de venir causer espagnol de temps en temps >>. 

Dans un autre cas, le savoir psychiatrique est convié à expertiser une bonne italienne accusé d'escroquerie. Expulsée déjà à trois reprises en 1910, 1923 et 1928 elle se réfugie dans le mutisme au commissariat. Il faut toute l'attention du Pr Henri Claude pour déjouer sa ruse et conclure après deux mois d'hospitalisation qu << elle n'est pas dans un état mental justifiant l'internement et que son comportement est celui d'une simulatrice >>[41]. Rien dans le dossier n'indique que l'on a évoqué avec elle son mari mort durant la guerre ou son fils encore vivant et résidant en Italie.

L'itinéraire fait de ruptures et de deuils de la plupart des immigrants politiques et économiques est soigneusement noté, sans pour autant être pris en considération sur un plan psychopathologique. Cela est particulièrement visible dans les dossiers d'immigrants russes : Voici l'exemple d'une veuve d'un aviateur français internée un mois en 1929 à la suite d'excès d'alcool et de cocaïne et une tentative de suicide. L'observation médicale relève qu'elle

<< a perdu toute sa famille en Russie pendant la révolution. N'a pas d'enfants . Deux fausses couches en quelques semaines. Fille d'officier de marine, famille riche. A pli du coude entaillé large de 5cm superficielle, pas de trouble dans la région des nerfs correspondants... >>

L'enchaînement subit de ce certificat qui passe du vécu douloureux de cette fille à la description de l'état somatique de son coude est typique des observations médicales consignées au dossier pour les étrangers comme pour tous les autres malades. L'histoire sociale est réduite à un symptôme parmi d'autres. Malgré le soin pris dans la rédaction de l'anamnèse la personne n'est pas reconnue comme une veuve immigrante mais classée comme une aliénée présentant un risque de suicide.

La mère d'un autre malade écrit [42]

<< Il avait passé par beaucoup de misères pendant la révolution en Russie, il a fait la prison, on l'a poursuit. Son père et son frère sont fusillés par les bolcheviques et il les aimait très tendrement. Il a passé par la famine et beaucoup de fatigue De toutes les maladies nommées il avait seulement la grippe. Début de la maladie : il y a quatre ans il a des hallucinations d'oui (sic) il se plaignait qu'on lui raconte par le TSF toutes sortes de récits qui l'énervait et l'inquiétait beaucoup. Il entendait continuellement des voix qui lui racontait quelque chose et qu'on a tué quelqu'un

Motif il restait toute la journée seul par ce que je m'enallait (sic) à 7h et demi du matin travailler et je rentrait très souvent à 10 heures du soir. Il s'en allait aussi pour toute la journée ne mangeait rien de 7h12 jusqu'à 1 heure ou 2 de la nuit >>

Ce récit est accompagné de la mention lapidaire :

<< note : dit ne rien pouvoir payer pour son fils >>

Autre exemple, cette veuve russe admise pour un délire de persécution en 1934 et transférée vers l'asile de Plougernevel après 2 ans, malgré les visites régulières qu'elle reçoit de sa mère.

<< Elle croyait être persécutée, elle et son fils tantôt par les bolcheviks tantôt par les monarchistes ; et surtout par les hommes pour raison de viol. >>

L'observation médicale relève que :

<< L'illusion auditive, simple représentation mentale au début tout au moins, destinée à valider sa réponse à elle spontanée, survenait d'une façon parasite aux heures de la journée où elle était nerveuse - et elle entend par là une série de manifestations de caractère basdowien ; angoisse, palpitations, douleurs sourdes précordiales, accompagnés d'irritabilité, de violences - (illisible) de force au domicile de sa mère - (illisible... ) signale le caractère familial de ces troubles. S'accompagnant de sentiment d'incapacité, de rumination de faits pénibles, de fatigue réelle. Elle pense qu'un médecin russe consulté il y a qq années pour la glande thyroïde lui a enlevé la volonté en l'hypnotisant.

Circonstances sociales pénibles ; vit dans une chambre d'hôtel avec fils âgé de 15 ans, grand déjà un seul lit; promiscuité, sous alimentation >>,

Dans ces exemples l'itinéraire de migration soigneusement reporté au dossier, ne semble avoir de fonction que la recherche méticuleuse des aspects héréditaires (<< le caractère familial des troubles >>) ou phénoménologique (<< le processus intra psychique à l'oeuvre : << l'illusion mentale >>). A aucun moment l'itinéraire social n'est analysé en tant que source de souffrance.

Le cadre de référence familial français prédomine

Dans leurs rapports avec les parents de malades, l'asile est soucieux de tenir à distance la famille Deux exemples de correspondances avec la famille peuvent illustrer cette fermeture par rapport au cadre de référence familial étranger :

Une mère de vingt et un ans, française d'origine italienne se voit empêchée de rejoindre son mari américain. Ecrivant au préfet son père lui prie << de demander à ce susdit personnage (le médecin M.) qu'il a déclaré que si le mari américain venait la chercher il ne la livrerait qu'à la police qui devrait s'assurer que ma fille soit embarquée à destination d'un vapeur pour New York, car selon lui, ma fille qui est française, n'aurait pas le droit de rester en France. >> La jeune mère, souffrant de << démence précoce >> sera transférée vers Montauban après un an et demi, rendant encore plus difficile les relations tant avec le père qu'avec le mari.[43]

Une lettre écrite par un soldat de parents français qui se dit << chyite >> (suivant son propre orthographe) et << né à la Mecque en Irak >> , lieutenant de réserve interné à la suite d'une crise mystique qu'il décrit lui-même par la suite comme délirant. Il explique à sa soeur en des termes en apparence très sensés son projet d'étudier au sein du futur institut musulman en projet pour l'année suivante à Paris, mais s'engage de façon contradictoire << à quitter Paris >> (souligné en bleu par l'autorité médicale) aussitôt avoir obtenu son élargissement.

<< Je suis orphelin. Ma jeune femme est musulmane et ne sera française que lorsque mon mariage aura été régularisé devant la loi française, ce que je compte faire dès que je le pourrai maintenant que ses parents, longtemps opposés à une union devant la loi française y sont consentants depuis peu. >> Le certificat établi en 1926 fait peu de cas de son discours religieux et conclu à une << hypomanie, idées de grandeur, personnalité dissociée. Il est arabe et Français en même temps, ne peut donner son identité seconde qu'en arabe. >> Sorti en liberté après deux mois il est remis aux << agents du sud africain >> pour être conduit vers l'Algérie. Le contact avec la famille se limite à des engagements à le conduire à la frontière pris par un de ses frères.

Dans ces deux cas, malgré la différence symbolique entre le ressortissant d'un pays développé comme l'Amérique et celui d'une colonie, l'Algérie, la réaction de la psychiatrie semble reposer essentiellement sur un même réflexe : garantir la protection de l'intérêt familial français : il s'agit de protéger la ressortissante française face aux demandes de son mari étranger et de rapatrier au plus vite l'étranger susceptible de faire naturaliser sa future épouse. Les deux lignes de conduite ayant comme seule justification explicite le raisonnement scientifique en matière de psychopathologie.

Au regard de ces extraits, l'aliéniste apparaît comme emmuré dans une culture professionnelle qui interdit toute explication psychologique ou sociologique de la maladie pouvant inclure le parcours d'immigration comme source de l'aliénation. L'exil et le vécu de l'immigration, les traumatismes liés au voyage, les séparations et les pertes de proches, la pauvreté enfin sont pris en compte seulement comme le décor d'apparition du symptôme ou comme le signe d'un éventuel antécédent héréditaire. Ces destins souvent tragiques rencontrent la même réponse que celle réservée à la plupart des autres aliénés : recherche d'un diagnostic classificatoire, transfert vers les asiles de province une fois que la chronicité de l'affection est avérée. Le raisonnement psychiatrique s'appuie essentiellement sur sa tradition psychiatrique qu'au risque d'anachronisme nous pourrions qualifier << d'ethnocentrique >>, car il tient compte ni du droit étranger (le mari américain), ni de la religion (la foi musulmane qui justifie son projet de sortie aux yeux du malade Chiite apparemment revenu à la raison est contrarié par une décision abrupte de rapatriement dont les raisons n'apparaissent pas au dossier).

II] Une politique de rapatriement à visée économique

Le traitement des malades par les médecins s'inscrit, par ailleurs, dans un système administratif qui va progressivement favoriser l'éloignement du pays de l'étranger. L'administration des asiles de la Seine poursuit une politique de tri de malades cherchant à spécialiser les différents établissements par catégorie, par type de symptôme, par chances de guérison et vers la fin de la période par origine nationale[44]. La politique de rapatriement poursuivi avec une vigueur croissante s'inscrit dans ce cadre.

Voyons ce qu'il en est sur un plan statistique, dans les propos médicaux et, pour autant que nous puissions la cerner, dans l'application au quotidien de cette politique.

L'étranger << profite >> de la psychiatrie française

Face à l'arrivée de nouveaux groupes d'immigrants au début des années vingt, certains aliénistes cherchent déjà à mettre en << alerte >> les autorités publiques sur la charge qu'ils représentent. Ainsi, en 1921, A Marie dénonce l'exploitation du service public par des étrangers méditerranéens en évoquant l'attrait de la région parisienne où l'on trouvera de meilleurs soins :

<< Dans les villes du bassin de la Méditerranée, lorsqu'un malade est une non-valeur économique et qu'il risque de demeurer longtemps à la charge des siens, c'est par une sorte de réflexe instinctif qu'on cherche à se débarrasser de lui, en l'envoyant en France. On voit les familles, les sociétés, les communautés se cotiser pour envoyer X.. se faire soigner à Paris, signifie lui donner juste l'argent nécessaire pour arriver à la capitale et lui remettre une lettre de recommandation pour un compatriote débrouillard qui saura le diriger sur l'hôpital ou la clinique où il sera admis gratuitement >>[45].

Quelle réalité de telles affirmations recouvrent-t-elles ? Au regard des rapports annuels, le nombre d'aliénés d'origine nord-africaine paraît infime comparé aux européens si bien qu'à partir de 1920 les immigrants algériens et tunisiens ne figurent plus dans la statistique. Rien non plus n'est conservé dans les dossiers de malades italiens ou espagnols qui pourrait indiquer l'attitude ou les intentions de leurs familles.

Dans ces discours médicaux, l'étranger est présenté avant tout comme un travailleur, prêt à exploiter les opportunités du marché d'emploi et les vertus du système médical français.. La << crise du logement >> et le chômage s'aggravant, l'asile sera de plus en plus sollicité. Qu'en est-il dans la réalité de la demande d'internement psychiatrique ?

Des aliénés étrangers trop nombreux ?

Les statistiques reproduites dans les rapports annuels mettent en lumière une légère augmentation du nombre d'étrangers dans les asiles de la Seine jusqu'en 1929. En revanche, nous releveons seulement un léger ralentissement de l'augmentation de la proportion d'étrangers bénéficiant du traitement psychiatrique vers la fin de la période alors que leur nombre dans la population générale diminue fortement à partir de 1931[46]. En réalité, la proportion des étrangers parmi la population asilaire n'a subi que de légères variations depuis l'avant première guerre mondiale. Théodore Simon, médecin chef du service de l'Admission chargé du tri de tous les malades arrivant dans les asiles de la Seine, fait part d'une étude statistique plus approfondie et rigoureuse en 1933 montrant que 11,49% des hommes admis et 7,60% des femmes[47] sont étrangers. Les rapports des années 1910 jusqu'en 1939 relèvent des proportions comparables. Il semble donc que la proportion de malades étrangers suit celle de la population générale et que la politique rapatriements produit seulement une léger ralentissement de cette tendance.

La composition de cette population est similaire aussi à celle de la population générale de la Seine. Aux Belges, Suisses et Espagnols viennent s'ajouter vers le milieu des années vingt les immigrants de l'Europe centrale et en moindre nombre ceux des pays nordiques et des amériques. En 1926 les Italiens occupent la première place suivis par ordre d'importance des Belges, Polonais, et Espagnols et en proportions bien moindres des Turcs et des Suisses. A partir de 1928 les Russes supplanteront les Espagnols à la troisième position[48].

Si le nombre global d'étrangers à l'asile est seulement légèrement supérieur à ceux dans la population de la Seine, les Polonais et les Russes d'immigration plus récente sont proportionnellement plus nombreux à partir du milieu des années vingt. Le rapport de Simon, fait état d'une proportion d'aliénés étrangers internés en 1933 pour 10 000 étrangers en résidence dans le département plus élevée que pour la population en générale (à l'exception des Turcs), fait particulièrement marqué chez les Polonais et les Russes (18,3 et 13,4 admissions pour 10 000 hommes dans la population contre 9,3 dans population d'ensemble)[49].

Plusieurs études menées dans le service du Centre de Prophylaxie, voisin de celui de Simon, confirment cette prédominance statistique notamment chez les malades souffrant de << démence précoce >>[50]. Selon une recherche de André Courtois publiée en 1935, sur 200 aliénés souffrant de démence précoce 55 sont étrangers, 28 de << race israélite >>[51]. Courtois écarte toute explication simpliste et met en garde contre des interprétations xénophobes de ses résultats, mais ajoute néanmoins que << ces constatations indiquent le rôle de prophylaxie et d'eugénique qu'aurait à jouer une commission psychiatrique chargée du contrôle médical de l'immigration >>.

Des conclusions similaires seront tirées d'une enquête menée par Georges Mauco en 1928 et cité par lui dans un article publié après la deuxième guerre mondiale Le nombre de Polonais à l'asile atteindrait proportionnellement le double de celle des Français[52] ; un travail de prophylaxie visant à réduire leur isolement et à favoriser leur assimilation est préconisé.

Un règlement potentiellement discriminatoire et mais mollement appliqué

En écho au discours médical, mais suivant sa propre logique, l'administration cherchera à limiter les frais engagés en instaurant une politique de rapatriement plus vigoureuse.

<< Démence précoce, peut et doit être rapatrié le plus tôt possible. Deux infirmiers sont nécessaires >> (dossier d'un malade Polonais transféré en province en 1936)

<< Etranger indésirable, à rapatrier >> (dossier d'un malade turc)

<< reste un hypomaniaque susceptible d'excitation aussitôt après la sortie, il ne pourrait être mis en liberté qu'à la condition que sa mère le reconduise immédiatement à la frontière italienne, son pays d'origine[53] >> (dossier d'un malade italien)

<< Est actuellement guérie... elle conserve sa mentalité primitive : il y aurait intérêt à provoquer le rapatriement de cette femme et de son mari qui vivent dans la misère à Paris >>[54] (certificat reproduit sur le registre de placement, l'origine nationale de la malade n'est pas précisée)

Ce type de mention figure régulièrement dans les certificats de transfert des malades étrangers notamment au cours des années trente[55]. Tantôt il s'agit de contacts avec la famille à l'étranger qui est sommé d'accueillir la malade, tantôt d'un malade qui demande lui-même de retourner au pays. Les << indésirables >> (mention figurant sur le certificat de sortie reproduit sur le registre de placement) sont pour la plupart des internés d'office ayant troublé l'ordre public, sans que nous puissions rapprocher la décision de rapatriement de la gravité de l'infraction mentionné sur le certificat.

Les règles administratives qui gouvernent le rapatriement se révèlent complexes. Cette pratique concerne les aliénés résidant depuis moins de cinq années en France et dont le pays d'origine a signé de convention de réciprocité pour le paiement des frais d'internement.

En effet, la prise en charge de l'étranger repose sur deux dispositifs juridiques [56] :

* le paiement des frais hospitaliers par l'Etat en l'absence de domicile de secours [57]qui permettrait la prise en charge par l'aide sociale départementale si l'aliéné y réside depuis cinq ans ou plus (loi du 13 juillet 1911)

* les conventions d'assistance réciproque signées avec la Belgique en 1931, le Luxembourg en 1923, La Pologne en 1920 la Suisse en 1931 l'Italie en 1919 le Portugal en 1940 la Roumanie en 1930, l'Espagne en 1932 (suite à une convention antérieure de 1862). Ces conventions autorisent la facturation des gouvernements débiteurs de tous les frais engagés en France à partir du 60ème jour d'hospitalisation[58].

Pour les pays avec lesquels la France a passé une convention d'assistance le rapatriement est demandé par le pays d'origine par voie consulaire et transmise par le préfet. L'administration de l'asile a le choix entre demander le rapatriement ou réclamer le paiement des frais hospitaliers.

<< Même pour les pays qui ont passé avec la France des conventions générales d'assistance réciproque, un rapatriement effectué dans un délai normal, avec les frais élevés qu'il peut entraîner, vaut mieux, dans bien des cas, que l'espérance lointaine d'un remboursement des frais d'entretien >>[59].

Selon un rapport d'inspection de 1931, ces rapatriements se font plus facilement pour les pays ayant une frontière limitrophe, notamment, la Belgique, la Suisse, l'Espagne et l'Italie. La Pologne et les pays du milieu de l'Europe posent plus de problèmes.

Par ailleurs, contrairement à la Seine, dans les départements limitrophes la pratique est poursuivie plus vigoureusement. Pour les aliénés internés en Alsace et en Lorraine le rapatriement est demandé systématiquement, quelle que soit la durée de séjour en France. Ainsi, l'asile de Hoerdt dont << la population au 31 décembre 1931 était inférieure à 400 aliénés a rapatrié 26 étrangers au cours de l'année 1926 >>[60].

La préoccupation principale de l'administration de l'asile, telle qu'elle apparaît à travers les dossiers consultés, est celle du recouvrement des frais. La menace éventuelle que présente l'aliéné étranger à l'ordre public sera évoqué en cas de turbulence à l'asile ou en rapport à l'intervention de l'autorité judiciaire. L'Etat cherche certes à limiter la charge que représente l'aliéné étranger pour le budget de l'aide sociale. Mais le rapatriement et le transfert des charges n'interviennent qu'en cas de convention de réciprocité et suivant un avis médical sur l'état de santé[61]. Malgré des discours médicaux parfois ambiguës et une opinion publique ouvertement xénophobe, la << préférence nationale >> ne se lit qu'en terme économique et non ouvertement répressif. En effet, sous réserve d'investigations plus approfondies dans des archives hospitalières et préfectorales non encore inventoriées, il semble que le dispositif juridique permettant le rapatriement s'applique durant cette période de manière très aléatoire dans le département de la Seine.

Conclusion

En attendant des recherches plus approfondies, notamment sur l'influence des théories eugénistes et sur la pratique à l'égard des malades mentaux dits << dangereux >>, nous pouvons affirmer que les représentants de la psychiatrie publique ont adopté pour la plupart une position républicaine, non ouvertement xénophobe, mais néanmoins imbue des sentiments et des tendances nationalistes qui prédominent dans la société à cette période. Ce nationalisme se lit à travers la recherche d'un savoir sur l'homme qui se veut << universel >>. Il est présent dans le regard médical sur l'étranger fait d'une bienveillante indifférence face à son parcours migratoire. Enfin, il sous tend, selon nous, l'application méfiante d'un règlement d'aide sociale complexe donnant une priorité de principe pour les soins psychiatrique aux nationaux.

Plus tard, l'asile offrira un lieu de protection pour bien des réfugiés politiques et immigrants économiques devenus aliénés. Par ailleurs, il s'est déjà ouvert à des médecins aliénistes étrangers, tels Minkowski, même si celui-ci est resté << l'interne le plus âgé de France >> n'ayant pu gravir les échelons[62]. L'asile constitue ainsi le lieu de formation et d'exercice de nombre de personnalités qui vont s'illustrer dans la résistance. Mais cette institution est traversée aussi par une exacerbation du sentiment nationaliste qui imprègne bien des théories et des pratiques au sein de l'hôpital. Comme d'autres instances, son discours et sa pratique que l'on pourrait caractériser d'ethnocentrisme scientifique sont encadrés par une administration soucieuse du coût et de l'observance d'un règlement à la fois protecteur, mais aussi discriminant à l'égard de l'aliéné étranger.

En guise de conclusion, ajoutons que le sentiment national est un élément fréquemment rencontré dans les écrits << libres >> des malades conservés aux dossiers. Ainsi cet extrait d'un poème écrit par une malade nous semble mériter notre attention car, malgré son destin sombre d'un internement à long terme, elle nous offre une vision de la France victorieuse et noble[63]. La même France que celle célébrée par les psychiatres coloniaux ?

<< Polytechnicien

Grand enfant ! La guerre pour toi lasse des chimères

Tes charmes que je préfère sont moins éphémères

Enfant surpassé Volontaire ! prends en l'assurance

Mai qui sourit fait des surprises sous ses plis l'espérance

Merveille triomphante ! 1914-1918 C'est la France ses couleurs

pour te donner la joie, joie du bien être croit à ta candeur

T'appel toi le Polytechnicien de 1830 comme aujourd'hui

ta tête pale sous la nuit, glacial en toutes choses endormies >>

[1] Edouard Zarifian, Les jardiniers de la folie , Paris, Paris, Odile Jacob, 1988. [Retour au texte]

[2] Nous nous référons pour les besoins à la définition proposée par Stanley Benn, << Nationalism >>, Paul Edwards, in The Encylopedia of Philosophy, vol 5 et 6, Macmillan press, 1972, ainsi qu'aux réflexions de P. Birnbaum, Sociologie des nationalismes, Paris, PUF, 1997. Ces auteurs retiennent plusieurs critères : le sentiment de loyauté à la patrie, une propension à prendre en compte les intérêts de sa propre nation (exprimé à l'extrême par le terme de << préférence nationale >>), une importance accordée aux caractéristiques distinctives de la nation et de leur préservation (<< l'ethnocentrisme >> et le << conservatisme >> ou la référence à la << tradition >> ), enfin, une théorie anthropologique fondée sur la distinction universelle entre membre d'une même nation (à l'extrême une théorie de la division raciale). Comme la plupart des institutions sociales de cette époque, la psychiatrie de l'entre-deux-guerres présente, selon nous, de nombreux traits correspondant à ces critères malgré sa forte tendance à vivre en autarcie.[Retour au texte]

[3] Recherches effectuées pour l'essentiel à la S.E.R.H.E.P., Société d'histoire de la psychiatrie dont le siège se tient à l'hôpital de Ville Evrard, Neuilly sur Marne. Ces travaux ont porté essentiellement sur une lecture exhaustive de la littérature médico-administrative, l'analyse de contenu d'une vingtaine de dossiers de malades et des journaux scientifiques (Les Annales Médico Psychologiques, l'Aliéniste Français, Journal de la société de prophylaxie mentale ayant fait l'objet d'une étude exhaustive dans le cadre d'une thèse soutenue en 1995 par l'auteur, Familles et psychiatrie dans les asiles de la Seine durant l'entre-deux guerres, sous la direction de Georges Lanter-Laura, Université Paris XII/Val de Marne) conservés à la SERHEP et aux sources disponibles aux bibliothèques Henri Ey, St Anne Paris et Maison Blanche, Neuilly sur Marne; [Retour au texte]

[4] Cette deuxième catégorie recouvre les étrangers payants, les étrangers indigents << bénéficiaires des conventions d'assistance >> et les << non bénéficiaires>>, R. Raynier et H. Beaudoin, L'assistance psychiatrique française, Paris, Ed Le François, 1949, 3ème édition, tome III, p. 827 et suivantes.[Retour au texte]

[5] P. Bercherie, Les fondements de la clinique. Histoire et structure du savoir psychiatrique, préface de G. Lanteri-Laura, Paris, Navarin, 1980, G. Lanteri-Laura, "La chronicité dans la société française", Annales, E.S.C. 27, 1972, p. 548.[Retour au texte]

[6] Jean-Christophe Coffin, << L'hérédité et la médecine mentale française au XIXè siècle >> Ethnologie française, XXIV, 1994.[Retour au texte]

[7] Caroline Mangin-Lazarus, Maurice Dide, Paris 1873 - Buchenwald 1944, Toulouse, éditions érès, 1994.[Retour au texte]

[8] Pour la biographie de Minkoswki voir Eduardo T. Mahieu, << Une lecture de Minkowski >>, Cercle Henry Ey, séminaire du 20 Avril 2000 sur http://perso.club-internet.fr/mahwin/index.htm. Voir également, Katy Hazan, << L'OSE une institution multiforme >>, http://www.sdv.fr/judaisme/histoire/shh/ose/ose.htm, pour les activités de sauvegarde des enfants juifs durant la guerre de ce médecin extrait de Les orphelins de la Shoah - les maisons de l'espoir (1944-1960 ) du même auteur, éditions Les belles lettres, octobre 2000. Voir aussi Lantéri Laura (G.), << Introduction à l'oeuvre psychopathologique d'Eugène Minkowski >>, Postface à Eugène Minkowski, Structure des Dépressions, Editions du Nouvel Objet, Paris, 1993.[Retour au texte]

[9] Elisabeth Renard, Le Docteur Gaëtan Gatian de Clérambault, sa vie et son oeuvre 1872-1932, Paris, Synthélabo, Les empêcheurs de penser en rond, 1992.[Retour au texte]

[10] Henri Ey (dir), Manuel de Psychiatrie, Paris, Masson, 1967. [Retour au texte]

[11] Ce médecin, maître de Jacques Lacan, qui servit durant la première guerre mondiale comme médecin aux armées au Maroc et y entrepris une étude qui le passionnera toute sa vie sur les << drapées >>, E. Renard, ibid, p.45.[Retour au texte]

[12] Gatian de Clérambault, << Identité du fondement des psychoses dans toutes les races >>, 1928, in Oeuvre psychiatrique, Presses Universitaires de France, tome II, réédition, 1968.[Retour au texte]

[13] Cinq dossiers de tirailleurs Sénégalais ont été identifiés à la SERHEP, trois de ses soldats sont décédés, un retourne au front et un est proposé pour une réforme numéro 2, Hubert Bieser, Les militaires aliénés à l'asile de Ville Evrard de mai 1915 à décembre 1918, Université Paris XII, Mémoire de CSU sous la direction de l'auteur, p. 59. [Retour au texte]

[14] Médecin ayant servi dans le service de neuropsychiatrie de la Marine.[Retour au texte]

[15] .A Hesnard, in, Pierre Combemale, Comptes rendus, Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des Pays de Langue Française, XLIIè session Alger, 6-11 avril 1938, Masson et Cie Editeurs, p. 183. Voir également, Port et Hesnard, Psychiatrie de guerre, Paris, Alcan, 1919, chapitre III, << Prédispositions et réactions propres à certaines races >>, p. 59-69.[Retour au texte]

[16] H. Aubin, << L'assistance psychiatrique indigène aux colonies >>, in P. Combemale, ibid; [Retour au texte]

[17] Ibidem, p. 168; [Retour au texte]

[18] Ibidem, p. 188; [Retour au texte]

[19] Ibidem.[Retour au texte]

[20]. Ian Downbiggen, "Degeneration and hereditarianism in French mental medicine : 1840-1890 : psychiatric theory as ideological adaptation", in The Anatomy of Madness, Essays in the History of Psychiatry, Londres, Routledge, 1985. [Retour au texte]

[21]. P. Marcais l'affirme notamment dans sa thèse très documentée et fournie en observations cliniques La famille syphilitique, Paris, Thèse de médecine, 1934, p. 52.[Retour au texte]

[22]. Rapport Annuel 1875, Asile de Ville Evrard, non signé, p. 16. [Retour au texte]

[23]. Rogues de Fursac et G. Genil Perrin, "Etude statistique sur les antécédents héréditaires de paralytiques généraux", Annales Médico Psychologiques, 1914, p. 1. [Retour au texte]

[24] Il nous manque des sources biographiques sur ce médecin qui figure seulement dans les rapports annuels qui aurait participé au mouvement de création des centres de prophylaxie mentale après la guerre. Prédécesseur de Simon au service de l'Admission qui sert de << gare de tri >> aux malades au moment de leur admission et avant l'envoi dans les services des asiles de banlieue. Il a présidé une société de philanthropie.[Retour au texte]

[25] Rapport Annuel du Service de l'Admission, Année 1926, p. 49.[Retour au texte]

[26] Henri Ey, "Projet de création de petits centres d'études psycho-généalogiques", l'Aliéniste Français, Mars 1939, p. 147.[Retour au texte]

[27] Cette interprétation de l'article a été suggéré par J.P. Arveiller.[Retour au texte]

[28] Le psychiatre Lucien Bonnafé témoigne de son expérience et sa réflexion à ce sujet sur http://regards.fr [Retour au texte]

[29] J. B. Wojciechowski, Hygiène mentale et hygiène sociale, Paris, l'Harmattan, 1997 pour une description complète de ce mouvement. [Retour au texte]

[30] Nadine Lefaucheur, << La puericulture d'Adolphe Pinard, une voie française de l'eugénisme >> in l'Enfance menacée, Editions de l'Inserm, 1991.[Retour au texte]

[31] Confère la thèse de l'auteur (voir note 3) étude des relations entre les familles et l'asile qui ne relève aucune trace d'une orientation eugénique au delà de l'étude statistique et anamnèstique systématique pratiquée chez les patients français comme chez les étrangers. [Retour au texte]

[32] Dr Roger Dupouy, "Le service social à l'hôpital Henri Rousselle", Prophylaxie Mentale, Sept/Oct, 1931 no 31 p 405. Pour l'organisation générale du Centre de Prophyulaxie on consultera avec intérêt le travail de Andrée Castel, La prophylaxie mentale et le dispensaire de l'hôpital Henri Rousselle, 1922-1932, mémoire de Certificat Supérieur d'Université, Université Paris XII- Val de Marne, mars 1996 dirigé par l'auteur.[Retour au texte]

[33] Mangin Lazarus, ibidem, p. 75, voir également Maurice Dide, Les émotions et la guerre - Réactions des individus et des collectivités dans le conflit moderne, Paris, Alcan, 1918; [Retour au texte]

[34] Minkowski créera plus tard avec sa femme Françoise Minkowska un centre de soins ethnopsychiatrique de renom, avait déjà mené des recherches sur les effets psychiatriques de l'immigration en s'inspirant de son expérience personnelle de déplacement lors de la première guerre mondiale Pour la biographie de Minkoswki voir Eduardo T. Mahieu, << Une lecture de Minkowski >>, Cercle Henry Ey, séminaire du 20 Avril 2000 sur http://perso.club-internet.fr/mahwin/index.htm. Voir également, Katy Hazan, << L'OSE une institution multiforme >>, http://www.sdv.fr/judaisme/histoire/shh/ose/ose.htm, pour les activités de sauvegarde des enfants juifs durant la guerre de ce médecin extrait de l'ouvrage Les orphelins de la Shoah - les maisons de l'espoir (1944-1960) du même auteur, éditions les belles lettres, octobre 2000[Retour au texte]

[35] Eugène Minkowski, Traité de psychopathologie, Paris, Editions PUF, 1966.[Retour au texte]

[36] ibidem, p.690.[Retour au texte]

[37] Eugène Minkowski, La schizophrénie, Desclée de Bouwer, 1927, réédité par Paris, Payot, 1997.[Retour au texte]

[38] ibidem, p. 6.[Retour au texte]

[39] Dans l'édition d'après guerre de son traité, Minkowski pourra illustrer son concept de l'angoisse migratoire par un exemple saisissant : il s'agit de sa propre expérience de médecin vivant à Paris durant l'occupation allemande. Recevant une convocation de la préfecture, il connaît avec sa femme l'angoisse d'une arrestation probable. En réalité, il s'agit << seulement >> de justifier l'internement par placement volontaire de quatre malades juifs pensionnaires à la maison de santé pour qui Minkowski fut le signataire de leur demande de placement volontaire en l'absence de famille présente à Paris. Sans cet internement psychiatrique ces malades auraient été regroupés avec tous les autres malades juifs à l'hôpital Rothchild conformément à une circulaire de l'occupant. Le placement psychiatrique << était pour eux dans ces circonstances une vraie planche de salut >>, ibidem p. 701.[Retour au texte]

[40] Rapport Annuel, 1925.[Retour au texte]

[41] Dossier de malade hospitalisé au service de la << clinique >> de l'hôpital St Anne, dirigé par le pr Henri Claude. Malade née à St Rémo. Le dossier inclut une coupure de presse du Petit Parisien intitulé la << muette de Saint Lazare condamnée à six mois de prison >> datée du 18 septembre 1929.[Retour au texte]

[42] Malade de 33 ans interné en 1928, souffrant de démence précoce, transféré vers la province après 7 mois.[Retour au texte]

[43] L'ambiguïté de cette lettre rend difficile son interprétation mais laisse apparaître en tout cas un fort contentieux quant au destin de la fille dont la seule issu proposé par le médecin reste le maintien à l'asile.[Retour au texte]

[44] Voir notamment, pour des détails sur ce fonctionnement Recherches, no 31 février 1978, L'Asile, Dir. Gaëtane Lamarche-Vadel, Georges Preli. [Retour au texte]

[45]. Rapport Annuel du service de l'Admission, Signé A. Marie, 1921, p. 59.[Retour au texte]

[46] source : serveur clio ENS.[Retour au texte]

[47] Rapport annuel des asiles de la Seine, Service de l'Admission, Théodore Simon, p. 9. (ce service servait de lieu de passage et de tri pour tous les asiles de la Seine).[Retour au texte]

[48] Rapports annuel des asiles de la Seine 1921 à 1938.[Retour au texte]

[49] Rapports annuels, ibid, p. 59. Voir également, Rodiet, R., "Les internements d'aliénés étrangers à Paris depuis la guerre", Aliéniste Français, Janvier 1931.[Retour au texte]

[50] Toulouse, E., Dupouy, R, Moine, M., "Statistique de la psychopathie, Annales .Médico .Psychologiques., 1930, II, p. 390.[Retour au texte]

[51] A. Courtois, << Certains agents étiologiques des syndromes de démence précoce d'après 200 observations >>, Annales Médico Psychologiques, juin 1935. Voir également, Ch. Darlex, Les psychopathes étrangers à Henri Roussel, Thèse de médecine, Paris 1942. [Retour au texte]

[52] Georges Mauco, << L'assimilation des étrangers en France >>, in L'assimilation culturelle des immigrants, INED, assemblé générale de Genève 1949, p. 27.[Retour au texte]

[53] Manoeuvre de 44 ans, transféré vers l'Italie après 10 mois en 1931.[Retour au texte]

[54] Malade souffrant d'excitation maniaque internée en 1928 transférée après 2 mois.[Retour au texte]

[55] Voir l'analyse des certificats d'internement et de sortie figurant au registre dit << livre de la loi >>, mémoire de D.E.A. de l'auteur, université Paris XII, dir G. Lanteri Laura, 1990.[Retour au texte]

[56] R. Raynier et H. Beaudoin, L'assistance psychiatrique française, Paris, Ed Le François, 1949, 3ème édition.[Retour au texte]

[57] Le domicile de secours est la commune de résidence de l'intéressé au cours des trois dernières années, amenée à financer l'internement de l'aliéné suivant la loi sur l'aide sociale de 1893. Cette notion reste applicable bien que l'aide sociale est à la charge du département et non de la commune à partir de 1935.[Retour au texte]

[58] A partir du décret loi du 30 octobre 1935 cette responsabilité est transférée des communes vers les départements, mieux à même d'appliquer avec rigueur la règle du domicile de secours, nécessitant un an de résidence et de rechercher la famille éventuellement soumise à l'obligation alimentaire et à même d'organiser le transfert vers le pays d'origine.[Retour au texte]

[59] ibidem.[Retour au texte]

[60] M. Winter, << Aliénés à la charge de l'Etat, rapport de l'inspection générale des services administratifs >>, J.O. 18 décembre 1930, résumé dans l'Aliéniste Français, juillet 1931, p. 27.[Retour au texte]

[61] M. Winter, ibidem.[Retour au texte]

[62] Mahieu, ibidem.[Retour au texte]

[63] Dossier non classé, SERHEP. Cet écrit est difficilement lisible dans son ensemble : le passage est extrait d'un manuscrit de cinq pages daté vraisemblablement de 1928, conservé au dossier d'une malade française, pensionnaire de la Maison de Santé. [Retour au texte]

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