Marie-Claude Blanc-Chaléard,
Histoire de l'immigration

Paris, L'Harmattan, 2001, collection "repères", 121 pages.

Livre lu par Philippe Rygiel

Janvier 2002

L'ouvrage de Marie-Claude Blanc Chaléard est un manuel concis, qui embrasse deux siècles d'histoire des étrangers en France et d'histoire de l'immigration. Les dimensions de la collection et l'ampleur du thème obligent à des choix dont l'auteur s'explique en introduction.

Le texte privilégie une histoire par le haut, celle des grandes phases migratoires et des politiques, au détriment d'une histoire des lieux de l'immigration et des populations migrantes, même si le lecteur curieux trouvera en fin d'ouvrage une bibliographie d'une centaine de titres lui permettant de poursuivre plus avant ses investigations.

Ce choix conduit à adopter un découpage chronologique scandé par le rythme des flux et des reflux de l'immigration et les transformations du cadre politique et institutionnel. Celui-ci fait la part belle à période post 1945, dont traite un peu plus de la moitié du volume. Un chapitre final décrit la France immigrée d'aujourd'hui et examine les débats et les réalités relevant de l'intégration nationale des populations, tout en pointant les dynamiques et les transformations, construction de l'Europe, renforcement des logiques transnationales, susceptibles de transformer les migrations et la façon dont nous les pensons au cours du vingt-et-unième siècle.

Marque des soucis du temps, Marie-Claude Blanc-Chaléard se penche avec beaucoup d'attention sur les formes de présence à la nation des populations immigrées, ou issues de l'immigration. Elle s'efforce, pour chaque période, de démêler, examinant l'intégration des populations, ce qui ressort de la morphologie sociale (où sont les enfants des migrants, que font-ils, avec qui) des mythes, des représentations, des fantasmes que leur existence ou leur présence suscite, tout en mettant en valeur les éléments du contexte historique permettant de comprendre les formes et la chronologie des phénomènes d'intégration.

Si elle évoque les débats, tant savants que politiques, suscités par la question au cours des vingt dernières années, elle se garde de prendre en la matière de position définitive et ne tranche pas entre ceux qui considèrent que l'intégration des populations issues des dernières vagues migratoires pourra se faire en des termes proches de ceux ayant valu pour les enfants des migrants du premier vingtième ou du dix-neuvième, et ceux pour qui la période récente est marquée par une logique de différenciation des segments de la société française, plus que par une logique unitaire, se contentant de relever que le contexte de la fin du vingtième siècle est sensiblement différent de celui des années cinquante et soixante. La question étant ardue, et le débat passionnel, parce que chacun y engage sa propre conception de la nation et de la société, on ne saurait le lui reprocher dans la cadre d'un manuel, d'autant que celui-ci couvre, malgré sa concision, la totalité de la période étudiée, sans pour autant renoncer à se nourrir d'exemples, qu'il est accompagné d'une bibliographie à jour et qu'il est rédigé en une langue claire. Il trouvera donc tout naturellement sa place parmi les outils de ceux (étudiants, enseignants) qui ont à étudier ou à connaître l'histoire de l'immigration, voire s'avérera précieux pour un plus large public soucieux de trouver une introduction claire et de qualité à ce domaine.

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