Catherine Collomp et Bruno Groppo (dossier édité
par)
" Les Etats-Unis et les réfugiés politiques européens
des années 1930 aux années 1950 ", Matériaux pour
l’histoire de notre temps
n° 60, octobre-décembre 2000, 76 p.
Catherine Collomp et Mario Menéndez (dir.)
Exilés et réfugiés politiques aux Etats-Unis, 1789-2000
Paris, CNRS Editions, " coll. Histoire ", 2003, 303 p
Livre lu par Nicole Fouché
Avril 2004
Le livre dirigé par Catherine Collomp et Mario Menéndez, paru en 2003, couvre deux siècles d’histoire (1789-2000). Il fait suite au dossier publié trois ans plus tôt dans la revue Matériaux pour l’histoire de notre temps (éditée par l’Association des amis de la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine, BDIC, de Nanterre) qui était limité aux années trente, quarante et cinquante du vingtième siècle. Ces deux publications doivent être présentées ensemble car elles sont les fruits séparés d’un colloque unique organisé en novembre 2000 par deux groupes de recherches – le CESAM (Centre d’études sur l’Amérique du Nord) et le CIRNA (Centre interdisciplinaire de recherche sur l’Amérique du Nord) – des universités Paris-XII et Paris-VII.
Toute la question de ces
publications (vingt-cinq articles au total formant un ensemble très
cohérent contrairement à de très nombreux ouvrages
collectifs) est de comprendre comment les Etats-Unis, pays d’immigration
par excellence, ont traité la question spécifique des "
réfugiés " ou des " exilés " ? Pendant
longtemps, la distinction entre immigrés et réfugiés
ne fut pas nécessaire : tous ceux qui arrivaient, quelles que fussent
leurs motivations, pouvaient trouver aux Etats-Unis un asile temporaire
ou permanent. Les émigrés de la Révolution française,
les républicains français de 1848 ou de 1851, les communards
français expérimentèrent cette ouverture. Au vingtième
siècle, le vide juridique autour de la notion de refuge et d’exil,
alors que l’immigration était sévèrement restreinte,
dans les années vingt, trente et quarante, joua au détriment
de l’asile et des persécutés, alors que le besoin atteignait
un sommet avec le fascisme et le nazisme. Une reconnaissance tardive du
statut de réfugié advint enfin au cours du second vingtième
siècle, dont purent bénéficier des exilés d’Europe
centrale, d’Asie ou des caraïbes.
La politique fédérale en matière d’immigration
est liée à la politique étrangère des Etats-Unis
qui est, on le sait, productrice d’exclusions. Les restrictions légales
n’ont pas empêché les initiatives privées, les
chaînes de sauvetage, les tentatives diplomatiques, les réseaux
de solidarité mis en place par des institutions, des organisations
non gouvernementales ou des groupes américains soucieux d’accueillir,
d’aider et d’organiser ceux qui étaient contraints à
l'expatriation.
Avec ces deux ouvrages, nous avons une bonne idée du large spectre
des populations concernées : des Allemands, des Tchécoslovaques,
des Juifs, puis des Cubains, des Vietnamiens, des femmes (persécutions
liées au sexe), et aussi des Français qui, de la Révolution
à la Deuxième Guerre mondiale s’expatrièrent
aux Etats-Unis (sept contributions).
Au total, cette question n’est pas un épisode glorieux de l’histoire américaine. C’est peut-être pour cela que l’historiographie n’en avait pas fait une priorité. D’un côté, ces deux publications, en même temps qu’elles mettent au jour les efforts faits par la société civile américaine en faveur du refuge, marquent bien les limites des politiques fédérales. D’un autre côté, la partie concernant les Français était la pièce manquante du puzzle actuellement en reconstruction des émigrations françaises vers les Etats-Unis. .