Jules Falquet, Anette Goldberg-Salinas et Claude Zaidman
« Femmes en migrations. Aperçus de recherche »

Cahiers du Cedref (Centre d’études, de documentation et de recherches pour les études féministes), n° 8/9, 2000, 385 p., 15,24 €, port : 2,4 €.

Livre lu par Nicole Fouché, CNRS (CRH-EHESS).

Octobre 2002 .

Cet ouvrage a été réalisé, pour l’essentiel, par des sociologues. Il traite de femmes migrantes contemporaines, émigrées depuis les années 1970, en France ou dans d’autres pays. Les questions principales posées par ce livre sont : existe-t-il des rapports sociaux de sexe et des stratégies différenciées entre hommes et femmes dans les processus migratoires ? Ces différences jouent-elles un rôle heuristique dans la compréhension et l’explication de ces phénomènes ? La réponse est clairement oui.
Fruit d’un réseau de chercheurs dit « Femmes en migrations » et d’un séminaire de plusieurs années (1995-1998), cet ouvrage fut pionnier en sociologie – il l’aurait aussi été en histoire – car, dans ces deux disciplines, les articulations entre le champ scientifique concernant le genre et le champ scientifique concernant les migrations (l’ethnicité) étaient encore, au début des années 1990, impensables en France. Il fallait évidemment qu’émergent les recherches sur le genre pour qu’on se pose la question de l’autonomie des femmes et de ses conséquences sociales en amont, pendant et en en aval des mouvements de populations (les États-Unis, comme souvent, avaient donné l’exemple en déclinant classe et ethnicité, puis classe et genre, puis ethnicité et genre, puis les trois variables).
Bien entendu cet ouvrage collectif pose plus de questions qu’il n’en résout. Quatorze textes ont été réunis autour d’une grande diversité de problématiques : spécificité des femmes en migrations, du point de vue des langues, des pays d’origine ou d’accueil, du travail, de la place dans la famille, des féminismes, des États, etc., toutes questions qui se posent pour les migrations en général et qui ont été revues, complétées voire corrigées, en fonction du paramètre « femmes » et des conséquences sociales impliquées par cette prise en compte.
On peut donner ici un aperçu des problématiques générales abordées dans ce livre (à l’aune, pour chaque article, de cas particuliers) :

L’ensemble se termine par des considérations plus théoriques : littérature, femmes et migrations ; importance du choix du vocabulaire de la recherche ; émergence des variables sexe et origine culturelle.
Les historiens ne peuvent pas reprendre la méthodologie telle qu’elle est explicitée dans ce livre car les sources concernant le passé ne sont pas de même nature que celles qui ont été utilisées pour ces travaux. Entretiens, statistiques administratives récentes, observations de terrain, témoignages, ne pourront être invoqués : il faudra trouver, voire inventer et construire de nouvelles sources.
Il est d’ores et déjà certain que dans certains ouvrages généraux déjà publiés et concernant une nationalité immigrée ou un lieu d’accueil, ou une période, des spécificités féminines émergent qui pourraient être rapidement mises au jour et exploitées. Dans les travaux en cours, oublieux de la contribution féminine, il serait souhaitable que la question des sexes soit posée et qu’on cesse de considérer naturellement le « migrant universel » comme un personnage – un travailleur – masculin : il ne s’agit pas seulement de rendre les femmes visibles, il s’agit de mesurer et de comprendre leur importance et leur part relatives dans la migration. Ce livre incite les chercheurs en sciences sociales à aller de l’avant.

Sommaire


Migrantes et mouvements de femmes
Cathie Lloyd, Genre, « Migration et ethnicité : perspectives féministes en Grande-Bretagne », p. 17-42
Anette Goldberg-Salinas, « Brésiliennes en exil : de femmes migrantes à féministes étrangères », p. 43-68
Jeanne Bisilliat, « Migration féminine comme parcours initiatique : la conquête d’une nouvelle identité (São Paulo, Brésil) », p.69-85
Immigration et travail salarié
Laura Oso, « L’immigration en Espagne des femmes chefs de famille », p.89-140
Liane Mozère, « Les difficultés des assistantes maternelles étrangères face au chômage. Quelques indications concernant leur usage de la langue », p.141-165
Stéphanie Condon, « Migrations antillaises en métropole : politique migratoire, emploi et place spécifique des femmes », p. 167-199
Trajectoires
Fabienne Rio, « Les variations identitaires nationales : le cas de quelques Franco-Algériennes », p. 203-218
Sabah Chaïb, « Rapports sociaux de sexe au sein des familles immigrées : l’exemple des retours dans le pays d’origine et leur impact sur les trajectoires scolaires », p. 219-239
Noria Boukhobza, « Mémoire de filles, histoires de quartier : un regard ethnologique », p. 241-254
Regards sur la littérature et la recherche
Claude Liauzu, « Guerre des Sabines et tabou du métissage : les mariages mixtes de l’Algérie coloniale à l’immigration en France », p. 257-280
Maïr Verthuy, « Enfance immigrée et intégration : la parole des femmes », p. 281-294
Gabrielle Varro, « Femmes immigrées et autres désignations problématiques ou comment parler des immigré(e)s sans pérenniser un statut transitoire ? », p. 295-318
Claude Zaidman, « Fait migratoire et genre : le jeu des variables en sociologie de l’éducation », p. 319-339
Témoignages
Madjiguene Cissé et Catherine Quiminal, « La lutte des sans-papières », p. 343-353
Anne Golub, « Un itinéraire », p. 355-376CEDREF Université Paris-VII – Denis-Diderot
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