L'Internet fait coexister des services marchands et non marchands. Or si les
premières contributions à l'Internet étaient largement non marchandes et
coopératives via des réseaux de chercheurs, de plus en plus d'acteurs
marchands entrent sur les réseaux et proposent des services marchands ou
gratuits. Le but de cette présentation sera d'expliciter les logiques
économiques du Net et de montrer notamment que le gratuit n'est pas forcément
non marchand...
Quelques caractéristiques économiques du réseau
- Les effets de réseau - Les économistes parlent d'effet de réseau ou
d'externalité de réseau lorsque l'utilité que chacun tire du réseau croît avec
le nombre d'utilisateurs de ce même réseau. Si il n'y a aucune contrainte, la
taille optimale du réseau est infinie. On peut citer plusieurs types de
contraintes (congestion du réseau; coût de connexion; sécurité).
- Le coût marginal nul - Pour que les théorèmes classiques de l'économie
de marché fonctionnent, il faut qu'à partir d'un certain point le coût de
fabrication d'une unité supplémentaire d'un bien soit non-nul. Or sur le
réseau, une fois le bien produit, son coût de réplication est nul. Ce résultat
viole la plupart des intuitions économiques traditionnelles et est à la base
de l'économie de l'Internet (comparaison entre uneentreprise industrielle et
un fabricant de logiciel).
Le problème de la valeur des biens
- La nature des biens échangés - L'émergence du réseau a entraîné la
normalisation des échanges d'information au format TCP/IP. Chaque information
échangée sur le réseau peut se résumer à un échange de bits. Au vu des
caractéristiques techniques des biens échangés, on peut en inférer les
caractéristiques économiques. Les biens informationnels échangés sont
homogènes et durables et leur valeur décroît exponentiellement avec le temps
(exemple des informations d'un journal quotidien). L'absence de rareté des
biens informationnels conduit en théorie à leur attribuer un prix nul; les
économistes parlent de biens publics (exemple l'air).
- La privatisation des biens publics - Intuitivement on voit que ces
prédictions ne sont pas réalistes; on est parfois prêt à payer très cher pour
être le premier à avoir une information. La théorie prédit que la valeur est
non nulle au moment de la délivrance et devient nulle juste après. De plus
chaque information à une valeur différente suivant les utilisateurs; un
turfiste sera intéressé par le résultat des courses tandis qu'un investisseur
préférera payer pour connaître les cours de la Bourse.
Comment résoudre le problème de l'absence de valeur des
informations?
Deux voies sont possibles, la régulation ou la quantité:
- La régulation consisterait à privatiser les biens publics en
créant des droits de propriété sur ses biens et un mécanisme pour les faire
respecter (exemple les droits d'auteur en France).
- La quantité consiste à ne pas fournir une information unique mais
un flux d'information afin de répondre au caractère évanescent de la
demande de bien. Il y a deux dimensions pour le bundling de ces
informations, le temps (cours de bourse à la seconde près) et l'espace (je
mets tellement de données ensemble que je suis sûr que chacun y trouvera son
compte). Le journal quotidien traditionnel est une application de ce
principe.
- L'analyse de la transaction - Toutes les opérations sur un réseau
normalisé sont faites de 0 et de 1. Dès lors, leurs transfert, duplication,
traitement, se font à un coût très faible. Une transaction électronique n'est
donc pas équivalente à une transaction papier car le coût de son agrégation
est nul (en théorie, ou tout du moins très faible), dans la mesure où les
informations sont de nature homogène. On peut donc écrire un autre chapitre
de l'analyse traditionnelle de la transaction après le troc et la vente; on
entre dans l'ère de l'échange d'information.
La nature de la production et de la consommation d'information, qui
était l'exception dans l'économie réelle devient la norme dans l'économie
virtuelle. Il est donc temps de revoir les analyses économiques
traditionnelles.
Ce document a été traduit de LATEX par HEVEA.