DICTIONNAIRE

ANALOGIQUE

DE LA

LANGUE FRANÇAISE

RÉPERTOIRE COMPLET

DES MOTS PAR LES IDÉES ET DES IDÉES PAR LES MOTS

PAR

P. BOISSIÈRE

Ancien Professeur

 

UTILITÉ DU DICTIONNAIRE PLUS QUE DOUBLÉE

ET ADAPTÉE À TOUS LES BESOINS POSSIBLES DE CEUX QUI LISENT OU ÉCRIVENT,

entendent parler ou parlent eux-mêmes en français

 

Cinquième édition

 

 

PARIS

AUG. BOYER ET Cie, LIBRAIRES-ÉDITEURS

49, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS, 49

 

Tous droits réservés


OUVRAGES DU MÊME AUTEUR

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REVUE ANALOGIQUE DES MOTS FRANÇAIS

Études sur le fond même de la langue, avec de nombreux exercices

1° sur les mots qu’il n’est pas permis d’ignorer quoiqu’ils n’appartiennent pas au langage le plus usuel ; 2° sur l’étymologie dans ce qu’elle a de vraiment utile ; 3° sur la recherche des mots oubliés ou inconnus ; 4° sur la création des mots propres à exprimer des choses nouvelles. 2e édition.

Livre de l’Élève, 1 fr. 50. — Livre du Maître, 2 fr.

 

REVUE SYNTAXIQUE

Études sur les règles de la grammaire française ramenées

A une exactitude rigoureuse, avec de nombreux exercices. Cette Revue n’est point faite pour les commençants ; elle ne doit être étudiée que par des hommes faits ou par des élèves assez avancés pour qu’on n’ait plus besoin, avec eux, de sacrifier l’exactitude au désir d’être compris sans le moindre effort.

Livre de l’Élève, 1 fr. 50. — Livre du Maître, 2 fr.

 

CLEF DES DICTIONNAIRES

Ce petit livre est une sorte d’appendice destiné à faciliter beaucoup

De recherches presque impossibles dans un dictionnaire alphabétique quelconque. Lorsque, soit à cause d’une orthographe très irrégulière, soit parce que l’idée seule à exprimer est connue, les mots sont très loin de la place où l’on croit devoir les chercher, la CLEF ouvre en quelque sorte le dictionnaire à l’endroit même où ces mots peuvent être trouvés. C’est comme une table des matières, composée de manière qu’elle peut servir pour un dictionnaire quelconque.

1 volume in-18, cartonné : 1 franc.

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PUBLIÉS SOUS LE PSEUDONYME SIÈREBOIS.

La Morale fouillée dans ses fondements, Essai d’anthropodicée. Brochure in-8° 6 fr.

Force et faiblesse de la religion devant le siècle. Brochure gr. In-18 1 fr.

 

 

Paris. — Imp. Vve P. Larousse et Cie, rue Montparnasse, 19.

 


 

PRÉFACE

 

Un bon dictionnaire serait celui où l’on trouverait facilement tous les mots de la langue, leur nature et leur signification, l'étymologie quand elle offre quelque intérêt, la prononciation quand elle est irrégulière, et enfin la solution des difficultés grammaticales auxquelles l'emploi des mots peut donner lieu. Personne ne contestera l'exactitude de cette définition, et beaucoup penseront probablement qu'elle s'applique très-bien à tel ou tel dictionnaire dont ils se servent tous les jours. Mais ils se feront illusion en ce point, car la définition ne s'applique en réalité à aucun des dictionnaires actuellement existants, à moins qu'on n'en détourne le sens, dès le commencement, par une misérable équivoque. On trouve dans les dictionnaires la signification et la nature des mots quand c'est cela même qu'on ignore, quand c'est là précisément l'objet de la recherche : trouver veut dire ici apprendre ce qu'on ne sait pas, en acquérir la connaissance par une recherche couronnée de succès. Mais pour ce qui regarde les mots eux-mêmes, trouver se prend nécessairement dans un autre sens, puisque les mots sont toujours connus avant qu'on ouvre le dictionnaire ; tout ce qu'on veut dire alors, c'est qu'on arrive aisément à la place où sont les mots, mais, mais on ne vient à cette place que pour y trouver réellement les explications que le lexicographe a dû y mettre, et non pas les mots. Cependant les mots échappent à la mémoire aussi souvent au moins que les significations; il peut très-bien arriver, par exemple, qu'on ne sache plus ou qu'on n'ait jamais su comment s'appelle l'art d'élever des abeilles et de leur faire produire le plus de miel possible : ce serait alors évidemment qu'il faudrait pouvoir trouver le mot (sans équivoque, cette fois); mais on ne le trouvera pas, ou du moins ce sera à peu près aussi difficile que de trouver une aiguille dans une charretée de foin. La signification elle-même est quelquefois presque impossible à trouver quand on ne connaît les mots que par les sons dont ils frappent l'oreille; et l'enfant, l'homme peu instruit, ou l'étranger qui, après avoir entendu prononcer œuf, hypocrite, physique, rhétorique, phthisie, aurait la curiosité de chercher ces mots, perdrait probablement son temps, car il a nécessairement entendu euf, ipocrite, fizique, rétorique, ftisie. Ainsi donc les dictionnaires, tels qu'on les a faits jusqu'ici, sont des livres où l’on trouve la signification et la nature des mots que l’on a rencontrés dans ses lectures ; rien de plus.

Est-ce assez ? Non, évidemment. Les dictionnaires devraient se prêter à toutes les recherches que l'on peut avoir à faire sur les mots, et comme il y a dans les mots deux choses essentiellement différentes, la forme et la signification, un dictionnaire, pour être complet, devrait se diviser en deux parties distinctes dont l'une pût servir à trouver la signification, et l'autre à trouver la forme. La première de ces parties a été faite mille fois; c'est le dictionnaire de l'Académie, c'est celui de Boiste, de Laveaux, de Bescherelle et de beaucoup d'autres. Mais l'autre partie n'a jamais été faite, et pourtant elle n'est pas moins indispensable que la première, car il importe autant pour le moins de pouvoir exprimer toutes ses pensées que de pouvoir comprendre toutes les pensées exprimées par les autres.

Lorsque l’Académie Française donna la première édition de son dictionnaire, en 1694, elle ne suivit pas absolument l’ordre alphabétique, mais elle plaça les dérivés et les composés après les mots primitifs, qu’elle appelait chefs de famille. Elle fit pour cela, non pour faciliter la recherche des mots, mais pour en montrer la filiation par des rapprochements qui ne pouvaient guère être goûtés que des philologues ou des grammairiens. Elle avait pourtant reconnu la double nature des services que doivent rendre les dictionnaires, puisqu’elle dit au commencement de sa préface : «Tous ceux qui ont étudié les langues grecque et latine n’ignorent pas les secours qu’on tire des dictionnaires pour l’intelligence des auteurs qui ont écrit en ces langues, et pour se mettre soi-même en état de les parler et de les écrire. » Aider à comprendre, puis aider à parler et à écrire : voilà bien la double utilité constatée par l’Académie ; et pourtant son dictionnaire, comme tous les autres, semble fait uniquement pour aider à comprendre.

L’objet principal du nouveau dictionnaire est de combler cette lacune énorme de la lexicographie et de fournir, pour la première fois, un moyen commode de trouver les mots quand on a seulement l’idée des choses. Mais cette prétention de baser une recherche sur une pure idée n’est-elle pas chimérique ? Quel ordre fixe peut-on assigner à des idées ? Certains philosophes, il est vrai, ont autrefois cherché à expliquer la génération des idées ; mais ils n’ont produit que de vains systèmes, et leurs méditations, qu’ils croyaient transcendantes, n’ont été que de nuageuses rêveries dont personne ne s’occupe aujourd’hui. Veut-on ressusciter un de ces vieux systèmes, et espère-t-on que, pour trouver le mot correspondant à une idée, on ira perdre son temps à rechercher d’abord quelle place la philosophie assigne à cette idée parmi toutes les autres ? Pour répondre à cette objection, il est nécessaire d’entrer dans quelques détails sur les premiers éléments de la parole humaine et sur la manière dont chacun de nous en acquiert la connaissance. Toute langue vivante forme en réalité deux langues, l'une usuelle et connue des plus ignorants, l'autre complète et renfermant, outre les mots compris déjà dans la première, une foule de termes qui n'entrent dans l'intelligence et dans la mémoire qu'à mesure que les connaissances s'élèvent au-dessus du niveau commun. Les termes de la langue usuelle s'apprennent dès les plus jeunes années, non dans les livres ni par les leçons d'un professeur, mais par les rapports de toute nature qui s'établissent entre l'enfant et tous ceux qui l'entourent; on n'a pas besoin d'expliquer les mots à l'enfant, on les emploie devant lui et il en devine le sens par une sorte d'intuition dont il ne se rend nullement compte, mais qui s'impose à lui par le fait même des circonstances extérieures. Il n'y a pas un enfant de trois ans qui ne comprenne parfaitement le mot fois, par exemple, et ce mot n'a jamais pu être clairement défini, ne le sera probablement jamais. Quelques années de cet enseignement vivant qui se fait de lui-même en quelque sorte, ou plutôt qui vient de tout le monde et de toutes choses, amassent dans la mémoire naissante de l'enfant une somme de mots qui s'y gravent d'une manière ineffaçable et qui s'identifient tellement avec les choses mêmes, qu'ils en deviennent la forme propre, la couleur, le vêtement naturel, et que jamais celles-ci ne se présentent plus à sa pensée sans porter les mots avec elle; il ne pense plus en quelque sorte que par les mots. Donc, par cela seul qu'une chose devient l'objet de notre pensée, elle se formule à notre esprit en termes usuels quelconques, et ce qui peut seul nous faire défaut, c'est le terme précis, spécial, appartenant à la langue non usuelle. Mais dans cette formule usuelle qui est le vêtement, la couleur inséparable de l'idée, il y a nécessairement quelques termes saillants dont l'importance efface en quelque sorte tous les autres, et qu'il est toujours aisé de reconnaître ; il n'en faut pas davantage pour fournir un moyen très-simple d'assigner un ordre aux idées, sans recourir aux classifications transcendantes des philosophes. Cet art dont, il n'y a qu'un instant, nous voulions trouver le nom dans le dictionnaire, se présentait à notre esprit sous une formule dans laquelle il est aisé de voir que les mots miel et abeille ont une importance capitale : l'un ou l'autre de ces mots marquera précisément la place où il faudra venir chercher le terme inconnu apiculture, et il en sera de même pour tous les autres cas semblables.

Environ deux mille mots usuels ont été choisis comme marquant ainsi la place où il faudra venir chercher l'expression de certaines idées. A la suite de chacun de ces mots, on a réuni tous les termes qui s'y rattachent d'une manière évidente, soit par une communauté d'idées, soit par des relations d'emploi habituel, de cause, de moyen, d'effet, etc., en un mot, par une analogie quelconque. Pour former tous ces groupes, il a fallu, pendant de longues années, compulser avec soin beaucoup de dictionnaires, lire journellement les feuilles périodiques, les œuvres des écrivains, jeter même quelquefois les yeux sur les prospectus et les annonces du commerce, remarquer partout pour chaque mot les relations qu'il peut avoir avec d'autres, et, dès qu'une de ces relations venait à se manifester, en prendre note à l'endroit nécessaire, rassembler ainsi un à un ces milliers de matériaux qui existaient épars et divisés, mais qui n'avaient jamais été réunis : tel est le travail qu'a exigé la partie principale du Dictionnaire Analogique, celle qui doit conduire avec la plus grande facilité d'une idée quelconque, même conçue vaguement, à son expression précise et souvent à plusieurs expressions synonymiques entre lesquelles il sera permis de choisir.

Ce plan n'a rien de chimérique, on le voit, il parait même très-simple, et il ne fallait, ce semble, pour le mettre à exécution, qu'une bonne dose de patience soutenue par une conviction forte. Néanmoins il offrait, dans sa réalisation, une difficulté grave qu'il importe de signaler. La limite qui sépare la langue usuelle de l'autre langue est loin d'être fixe; ce qui est usuel pour l'un ne l'est pas pour l'autre ; bien plus, ce qui semble usuel aujourd'hui parce que l'esprit subit certaines influences, ne le semblera plus ou le semblera moins demain parce que les influences seront modifiées, et l'idée qui se présentait hier à l'esprit sous telle formule vient aujourd'hui sous une autre formule : comment fixer ce qui est essentiellement mobile, et comment l'auteur, quel qu'il soit, peut-il espérer que ce qui lui a paru usuel à un moment donné le paraîtra à tout le monde et dans tous les moments? Il n'a jamais eu cette espérance, comme il n'a jamais eu la pensée d'empêcher la rivière de couler, le vent de souffler tour à tour dans toutes les directions. Heureusement, il y avait un moyen, sinon de fixer la langue usuelle, au moins de briser promptement toutes les entraves que sa mobilité peut produire. Quelle que soit en effet cette mobilité, la langue usuelle ne peut jamais se mouvoir que dans l'espace embrassé par la langue complète ; or, celle-ci est tout entière soumise au pouvoir du lexicographe ; il peut donc suivre la langue usuelle dans ses évolutions les plus capricieuses, et partout où elle s'arrête, il peut s'arrêter avec elle pour lui indiquer la bonne route quand elle s'est égarée. Voilà précisément ce qui a été fait dans les petites colonnes, que l'on peut voir à la partie supérieure de toutes les pages du dictionnaire. Ces petites colonnes renferment, par ordre alphabétique, tous les mots de la langue complète, tous ceux du moins qu'il n'a pas paru entièrement inutile d'y mettre (il y en a presque le double du nombre admis dans le dictionnaire de l'Académie), et chaque mot y est suivi de l'indication des groupes où l'on peut le trouver réuni à tous ses corrélatifs. Dès lors, il n'importe guère qu'une idée se présente à votre esprit sous telle forme usuelle ou sous telle autre : quelle que soit cette forme, vous la trouverez certainement dans les petites colonnes, et là vous apprendrez à quel endroit précis doit se faire votre recherche. Pour rendre encore plus claire cette explication, supposons que vous ayez la pensée de chercher un mot qui, selon vous, doit être un corrélatif de ballon : vous ne trouverez pas ballon parmi les chefs de groupes ; mais dans la page même où ce groupe aurait dû être placé, vous trouverez, aux petites colonnes, Ballon, V. aérostat; ceci veut dire qu'au jugement de l'auteur aérostat était le mot usuel; il s'est trompé peut-être, mais qu'importe? puisque voici l’erreur immédiatement réparée. Autre exemple : vous voulez trouver un mot qui exprime une certaine nuance de crainte, vous cherchez vainement le groupe crainte, mais à la page même où vous venez de vous arrêter, les petites colonnes vous renvoient, pour ce mot crainte, aux groupes peur, défiance; choisissez celui des deux qui répond le mieux à votre idée, et vous allez arriver très-vite à votre but, quoique vous ayez pris d'abord une route différente de celle que l'auteur avait choisie pour vous y conduire.

On voit que le Dictionnaire Analogique ne pouvait atteindre son but principal sans le secours de cette partie alphabétique qui, au premier coup d'œil, a pu sembler un hors-d'œuvre. Mais puisqu'il fallait une partie alphabétique, il était naturel de chercher à en tirer toute l'utilité possible, et ce mariage en quelque sorte forcé de l'ordre ancien avec un ordre nouveau a enfanté un livre qui, tout en créant un genre essentiellement nouveau de recherches, pourra presque remplacer les autres dictionnaires pour toutes les recherches qu'on avait l'habitude d'y faire. On trouvera la nature des mots. On trouvera aussi la signification des mots : ceci sera contesté peut-être, surtout quand on aura remarqué que, dans les groupes, les corrélatifs ne sont pas toujours définis ; mais ils le sont toutes les fois que leur signification offre quelque chose d'exceptionnel, et dans les autres cas la place même qu'ils occupent dans tel groupe plutôt que dans tel autre en fait sentir la valeur réelle, comme les circonstances dans lesquelles on emploie les mots suffisent souvent pour en faire deviner le sens, même à de très-jeunes enfants. De plus, un nouveau système de lettrines conduira infailliblement à trouver la nature, l'orthographe ou la signification des mots les plus irréguliers, quand c'est par l'oreille seule qu'on en acquiert la connaissance, et ici c'est encore une lacune de la lexicographie qui se trouve comblée. L'étymologie sera expliquée dans ce qu'elle peut avoir d'utile à tout le monde [1]. On trouvera, pour chaque mot, la solution des difficultés grammaticales dont il est l'occasion. Enfin les contradictions entre l'orthographe et la prononciation seront indiquées. Tous ces avantages seront, un peu plus loin, l'objet d'explications plus développées.

On a quelquefois donné au dictionnaire le nom de Trésor de la langue, mais trop souvent ce n'était qu'un trésor fermé dont le possesseur ne connaissait pas, ne pouvait jamais saisir les richesses. Sur vingt personnes qui ont entre les mains le dictionnaire de l'Académie, il y en a bien quinze qui ne se doutent pas qu'on y trouve le mot mégalanthropogénésie, qui ne pourraient pas l'employer si, par un hasard peu probable à la vérité, elles avaient besoin d'exprimer l'idée dont il est le signe. On doit croire que ce mot est une des richesses de la langue, puisque l'Académie l'a jugé digne d'entrer dans son ouvrage; mais on voit que c'est une richesse enfouie, perdue, et combien de mots plus utiles restent de même ignorés! Ceux qui possèdent le dictionnaire de Napoléon Landais ou de Bescherelle sont bien plus riches encore; mais il y a dans ces livres des milliers de mots qu'ils ne connaîtront jamais, qu'ils ne pourront jamais trouver, lors même qu'ils auraient l'idée de les chercher. Ils peuvent, il est vrai, se dire qu'ils ont le livre où tous ces mots occupent leur place et sont expliqués; mais c'est comme s'ils possédaient un coin de terre au-dessous duquel une mine de diamants serait enfouie à une grande profondeur : ils seraient riches s'ils pouvaient creuser un trou de 1,000 mètres, par exemple, mais jusqu'à ce que le trou soit creusé, ils restent pauvres. Cette critique, il faut le dire, tombe d'elle-même dès qu'on ne demande plus à ces dictionnaires que de faire connaître la signification ou la nature des mots que l'on rencontre en lisant; on possède alors la clef du trésor, on peut l'ouvrir, on peut y puiser à volonté. Mais n'est-ce pas doubler la valeur réelle d'un trésor, que de l'ouvrir d'un côté où jusqu'ici ses richesses n'ont jamais pu être atteintes? Votre trésor renfermait des mots et des significations; les significations étaient toutes à votre disposition, et vous vous trouviez déjà riche; mais les mots étaient insaisissables, et voici qu'on vous offre le moyen de les saisir : votre richesse est doublée.

On ne sent pas aujourd'hui toute l'importance qui s'attache réellement à cette recherche des mots inconnus. Comme elle est toujours restée impraticable, faute de l'instrument qu'elle nécessitait, il a fallu se passer de la faire, et l'on a si bien pris l'habitude de s'en passer, que, dans les cas mêmes où elle serait le plus nécessaire, c'est à peine si l’on s'aperçoit qu'on manque de quelque chose. Cependant il ne se passe guère de jours sans qu'on entende un enfant dire à son père : Papa, comment nomme-t-on ceci ou cela? et le père répond quelquefois : Je n'en sais rien. N'est-il pas évident que, s'il avait un dictionnaire où l'on pût trouver facilement les mots inconnus, il s'en servirait pour ne pas laisser sans réponse la question de son fils, ou il dirait à celui-ci d'y recourir lui-même? Mais, sans que les questions nous soient adressées extérieurement par des enfants ou par d'autres personnes, nous nous les posons souvent à nous-mêmes intérieurement, et le besoin des mots se manifeste en mille circonstances. Quel est celui qui, en écrivant une lettre, ne s'est jamais senti embarrassé pour finir une phrase commencée? Quelquefois on voudrait présenter certaines choses sous un jour plaisant, et toutes les expressions qui viennent se placer au bout de la plume sont sérieuses. Ou bien on voudrait adoucir ce qu'il y a de trop rigoureux dans un refus qu'on est obligé de faire, et tous les mots qui se présentent ont quelque chose de sévère et de dur. Ou bien encore on se trouve, bien malgré soi, engagé dans une affaire litigieuse ; il faut exposer les faits, et les termes de procédure ou de loi dont on aurait besoin ne sont pas présents a la mémoire, etc., etc., etc. Il est vrai que dans tous ces cas-là, quels que soient les obstacles, on finit par les franchir et l’on arrive à compléter sa lettre; mais on n'a pas dit exactement ce qu'on voulait dire, ou on ne l'a pas dit comme on aurait voulu le dire.

Les hommes de lettres, les traducteurs, les versificateurs, les orateurs qui préparent d'avance leurs discours, se creusent quelquefois longtemps la tête pour trouver l'expression qui doit faire ressortir une nuance délicate que leur pensée a saisie, et ils ne réussissent pas toujours. Ils trouveront cette expression très-vite et sans aucune peine dans les groupes du Dictionnaire Analogique. C'est en eux-mêmes, je le sais, que les hommes de génie trouvent leurs plus belles pensées, et c'est de leur propre imagination qu'ils tirent les brillantes couleurs dont ils les parent; mais d'abord, tous ceux qui écrivent ne sont pas des hommes de génie, et puis le génie lui-même a ses heures de défaillance, pendant lesquelles il peut avoir besoin de quelque secours étranger. S'il est trop fier pour admettre la possibilité même d'une telle défaillance, il reconnaîtra bien, au moins, que sa mémoire peut lui faire défaut pour certains termes qui n'ont rien de littéraire ni de philosophique, qui se rapportent aux arts les plus humbles, qui ne sont guère connus que dans certains lieux, etc. Qu'y a-t-il de commun, par exemple, entre le génie et la connaissance du nom Audomarois donné aux habitants de Saint-Omer? Tout le monde sait que les plus grands poètes sont quelquefois très-heureux de recourir au dictionnaire de rimes, et il est bien permis de penser que la réunion par groupes de tous les mots qui expriment la joie ou la douleur, l'amour ou la haine, offrira, non-seulement aux poètes mais à tous les écrivains, des ressources aussi précieuses que la réunion des mots finissant par teur ou par ice. Quand il ne s'agit que d'écrire sur un sujet très-connu, les idées et les mots viennent aisément et tout secours étranger est inutile, je le veux bien; mais si le sujet sort des habitudes, des connaissances pratiques de l'auteur, si par exemple un romancier, qui ne s'offensera pas si je l'accuse de n'être le fils ni d'un meunier ni d'un tisserand, est amené par la suite des incidents à raconter une scène qui se passe dans un moulin ou chez un pauvre tisseur de toile, croyez-vous que son imagination aura la puissance de lui faire deviner tous ces termes du métier qu'il n'a jamais entendus, tous ces noms d'outils ou de matériaux qu'il n'a jamais vus et dont pourtant il faudrait parler ? Qu'il place ailleurs les scènes de son roman, dira-t-on peut-être. Oui, mais alors il faut qu'il perde beaucoup de temps à refaire ce qu'il a déjà fait, et son imagination refroidie ne produira plus peut-être qu'une œuvre pâle et dénuée d'intérêt; tandis que, s'il avait pu trouver dans le dictionnaire une dizaine de mots seulement, son premier travail ne serait pas perdu. Ce qui est incontestable, c'est que l'homme qui a l’habitude d'écrire se suffit ordinairement à lui-même, que sa plume suit naturellement le cours de ses pensées, que les mots viennent se ranger à la suite des mots, sans qu'il ait à faire le moindre effort. Oui, tout cela est vrai ordinairement, comme il est vrai que l'homme instruit sait l'orthographe de presque tous les mots, qu'il connaît sa langue et qu'il n'a presque jamais besoin de recourir à une grammaire. Cependant, si je regarde parmi les livres qu'il a devant lui, j'y trouverai presque toujours un dictionnaire ordinaire et une grammaire : cela prouve, il me semble, que très-rarement, mais quelquefois pourtant, il peut avoir besoin de vérifier l'orthographe d'un mot ou de relire une règle de grammaire. Je n'en demande pas davantage; ce ne sera aussi que très-rarement qu'il aura besoin du dictionnaire analogique, mais je suis sûr de le voir un jour sur sa table de travail, entre les deux livres dont je viens de parler, et c'est précisément là tout l'honneur auquel j'aspire.

Indépendamment de cette recherche des mots inconnus, dont le besoin se fait sentir à tout le monde, les groupes analogiques pourront encore rendre de très-grands services pour l'étude des mots, qui deviendra une branche essentielle des études grammaticales. Si jusqu'aujourd'hui cette branche est restée dans un oubli presque complet, c'est que le seul livre où l'on pouvait trouver réunies toutes les richesses matérielles de la langue ne présentait ces richesses qu'avec un effroyable pêle-mêle où l'esprit des jeunes gens ne pouvait se fixer nulle part, tant l'ordre alphabétique et la raison sont étrangers l'un à l'autre. Mais c'était néanmoins une chose fort étrange, que de jeunes enfants dussent étudier avec tant de soin la grammaire, c'est-à-dire l'art d'employer les mots, sans qu'on s'occupât jamais de leur faire apprendre les mots eux-mêmes. Cette inconséquence disparaîtra sans doute quand on pourra mettra entre les mains des élèves un dictionnaire où les mots seront groupés selon les rapports naturels des idées et des choses, puisque, dans cet ordre nouveau, basé sur la réalité des choses et non plus sur la forme seule, le chaos se débrouille, la lumière remplace les ténèbres et le bon sens est substitué au hasard : dès lors évidemment l'étude devient possible, et, si elle est bien dirigée, elle ne peut manquer d'être fructueuse. Chaque groupe est comme un chapitre distinct qui peut faire l'objet d'une leçon à part, et tous les mots que cette leçon renferme, rattachés entre eux par un lien commun, se gravent sans effort dans la mémoire. Au point de vue de l'étude, comme à celui de la recherche des mots, le dictionnaire alphabétique peut être comparé à l’une de ces forêts vierges du Nouveau-Monde, où l'homme n'ose pénétrer, dont il n'essaye pas même de connaître et d'utiliser les immenses richesses, parce qu'il sait d'avance qu'il se perdrait dans leurs profondeurs inconnues ; mais la formation des groupes ouvre en tous sens, dans cette forêt, des chemins faciles qui permettent de l'explorer dans toutes ses parties, dans tous ses détails. Si quelques points écartés pouvaient offrir des dangers, une barrière a été posée pour fermer le passage aux imprudents, et les jeunes gens qu'une mauvaise pensée pousserait à chercher l'un de ces groupes où, par la nature même des choses, ils pourraient espérer de trouver réunies un grand nombre d'expressions sales et grossières, verraient leur attente trompée : ces groupes n'ont point été mis dans le corps du dictionnaire, ou ils n'y ont été donnés que très-incomplètement. On en formera un petit supplément qui se vendra à part et qui se vendra cher, afin qu'il se vende peu, et que ceux-là seulement puissent l'avoir entre les mains qui en auront un besoin sérieux [2].

Malheureusement, le Dictionnaire Analogique ne pourra rendre à tout le monde les services divers qui viennent d'être signalés, que lorsqu'il aura vaincu un ennemi bien puissant, un de ces ennemis contre lesquels les traits de la Vérité elle-même restent souvent sans force, un vieux préjugé. «Quoi! va-t-on s'écrier de toutes parts, voilà un livre qui ose s'appeler dictionnaire et qui n'est pas alphabétique, purement alphabétique! Mais il est jugé par cela même, et nous n'irons pas perdre notre temps à l'examiner. Que, dans un siècle où l'on savait peut-être à peine ce que c'est qu'un dictionnaire, sous l'empereur Commode, un lexicographe, nommé Julius Pollux, se soit avisé de ranger les mots par séries d'idées analogues, on peut l'excuser, parce que c'était alors l'enfance de la lexicographie; mais si Julius Pollux avait pu connaître les avantages de l'ordre alphabétique, il se serait empressé de l'adopter pour son livre, qu'il appelait Onomasticon, c'est-à-dire recherche des mots. Aujourd'hui toutes ces vieilleries sont mortes, et mortes pour ne plus revivre. Nos savants, nos littérateurs, les professeurs de notre Université et de toutes les universités du monde, reconnaissent et proclament l'immense supériorité de l'ordre alphabétique sur tout autre. La question est jugée sans appel.»

Quelque imposante que soit cette argumentation, il faut essayer d'y répondre. Vous dites que si Julius Pollux avait connu l'ordre alphabétique, il se serait empressé de l'admettre pour son Onomasticon; mais alors il aurait été obligé de changer son titre, car l'introduction de l'ordre alphabétique aurait eu nécessairement pour effet de rendre son livre impropre à la recherche des mots. Vous dites de plus que les professeurs de l'Université ont reconnu et proclamé l'immense supériorité de l'ordre alphabétique sur tout autre. En êtes-vous bien sûr? Voyons. Venez, s'il vous plait, avec moi dans une salle d'étude d'un lycée ou d'une institution quelconque. Ouvrons le pupitre d'un élève. Voici deux dictionnaires qui servent l'un et l'autre à l'étude du latin ; l'un est intitulé : Dictionnaire latin-français; comment les mots latins y sont-ils disposés? Je vois qu'on a suivi l'ordre alphabétique, cela est constant, mais cela ne m'étonne pas, car je remarque en même temps que chaque mot latin est suivi de sa signification en français ; or, je n'ai jamais nié que l'ordre alphabétique ne soit excellent pour conduire des mots à leur signification. L'autre livre est intitulé : Dictionnaire français-latin; dans quel ordre a-t-on rangé les mots latins? J'ouvre la première page et je suis tout surpris d'y trouver d'abord derelictio, qui ne commence pas par un a; un peu plus bas je vois demittere, et ma surprise redouble, car dans l'ordre alphabétique demittere précède derelictio; plus loin encore je trouve abbatia, et je m'y perds tout à fait, car c'est ce mot-là qui aurait dû précéder les deux autres. - Mais vous n'y entendez rien, me dit-on; ce ne sont pas les mots latins qui sont ici par ordre alphabétique, ce sont les mots français abandon, abattre, abbaye. - Ah! dans un dictionnaire fait pour la langue latine, les professeurs de l'Université reconnaissent donc qu'on doit quelquefois suivre un ordre qui n'est pas alphabétique pour les mots latins eux-mêmes, pourvu qu'il le soit pour quelque autre chose; eh bien! restons-en là, car ma cause est gagnée et votre argumentation tombe d'elle-même. Le Dictionnaire Analogique ne fait précisément qu'introduire dans la lexicographie française cette duplicité d'ordre et de dictionnaire qui a toujours existé dans la lexicographie universitaire. Il y a la même différence entre un dictionnaire ordinaire et le dictionnaire analogique, considéré dans ce qu'il a de plus neuf, qu'entre ces deux dictionnaires que nous avons trouvés dans le pupitre de l'élève; l'un est fait pour enseigner la signification des mots, l'autre est destiné à faire trouver les mots ; le premier dispose les mots selon leur ordre alphabétique, l'autre les dispose selon l'ordre des idées : remarquez que ceci s'applique parfaitement au dictionnaire français-latin ; car, par rapport à la langue latine, les mots français ne sont rien autre chose que des représentations arbitraires d'idées. Qu'on ait pu encore suivre une espèce d'ordre alphabétique pour le placement respectif de ces représentations d'idées, ce n'est là qu'un point secondaire, et d'ailleurs le Dictionnaire Analogique a fait de même, puisqu'il a aussi rangé ses groupes alphabétiquement. La ressemblance est complète, et bien loin que l'autorité des chefs de l'Université puisse tourner contre lui, il l'invoque maintenant avec confiance et il dit hautement : Pour l'étude du latin, comme pour celle de toute autre langue étrangère, il est reconnu qu'il faut deux dictionnaires dont l'un est la contre-partie de l'autre ; donc la langue française doit avoir aussi ses deux dictionnaires ; vous avez depuis longtemps le premier, je viens occuper la place du second, qui jusqu'ici est toujours restée vide.

On a relevé des fautes dans tous les dictionnaires, mais il est extrêmement probable qu'on n'a relevé qu'une faible partie de celles que tous ces ouvrages renferment. Beaucoup de ces fautes ont dû rester inaperçues, et c'est la dissémination même produite par l'ordre alphabétique qui lés a protégées contre les atteintes de la critique. Quand on verra rapprochés, réunis sous le même coup d'œil, tous les termes qui se rapportent au même art, à la même espèce d'êtres, une foule d'erreurs auxquelles jusqu'ici personne n'avait fait attention seront facilement remarquées. Dans le domaine des idées générales elles-mêmes, les rapprochements analogiques rendront saillantes certaines inconséquences que les lexicographes alphabétiques pouvaient se permettre impunément, qu'ils se permettaient d'ailleurs sans le savoir, selon toute apparence. Si vous cherchiez dans le dictionnaire de l'Académie la signification des mots économie, épargne, étonnement, surprise, étendue, dimension, gratis, gratuitement, vous trouveriez qu'économie signifie épargne, et qu'épargne signifie économie dans la dépense ; qu'étendue se traduit par dimension en longueur, largeur et profondeur, tandis que dimension se traduit par étendue ; que gratis veut dire gratuitement, et réciproquement. Toutes ces définitions paraissent excellentes quand elles sont éloignées les unes des autres : si l’on en trouve deux de cette nature dans un même groupe, tout le monde remarquera qu'elles enferment le lecteur dans un cercle sans lui donner aucun moyen d'en sortir. Il est donc très-probable que le Dictionnaire Analogique sera l’objet de nombreuses critiques, auxquelles il ne pourra opposer que ces trois excuses : 1° le travail était neuf et ne pouvait être comparé avec aucun autre ; 2° nul ne possède la science universelle ; 3° quand, depuis longtemps, les erreurs passent de livre en livre sans être remarquées, le premier pas a faire pour en amener le redressement, c’est de les mettre en évidence.

 

 


 

EXPLICATIONS INDISPENSABLES

POUR MONTRER COMMENT CE DICTIONNAIRE RÉPOND A TOUS LES BESOINS POSSIBLES DE CEUX QUI LISENT,

ENTENDENT PARLER, PARLENT EUX-MÊMES OU ÉCRIVENT EN FRANÇAIS.

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Tout le monde connaît les recherches qui se font habituellement dans les Dictionnaires de la langue française. Nous montrerons plus loin que le dictionnaire analogique se prête aux mêmes recherches; mais comme il a été fait spécialement pour offrir des avantages tout nouveaux, il est naturel de commencer nos explications par ce qui le distingue de tous les autres livres du même genre.

On y trouve très-facilement les mots inconnus.

Le besoin d'un mot inconnu suppose évidemment l'idée plus ou moins précise d'une chose qu'il s'agit d'exprimer. Or, rien n'est isolé dans la nature, tout se tient, tout s'enchaîne, dans le monde intellectuel aussi bien que dans le monde matériel : il est donc impossible que l'idée à exprimer, quelle qu'elle soit, ne se rattache pas à d'autres idées, parmi lesquelles on distingue aisément celle dont l'expression est le mieux connue. Dès que cette distinction est faite, on tient le fil conducteur, et l'on arrive sans peine au mot désiré. Précisons cela par quelques exemples.

Vous savez que depuis quelques années, lorsque nos plus habiles chirurgiens ont à faire une opération très-douloureuse, pour épargner au patient d'atroces souffrances, ils lui font respirer du chloroforme et le plongent ainsi dans une insensibilité complète. Vous savez aussi qu'ils ont un mot spécial pour désigner cet état particulier d'insensibilité; ce mot, vous l'avez lu, vous l'avez entendu, vous l'avez peut-être employé vous-même plusieurs fois, mais en ce moment il échappe à votre mémoire, et vous essayeriez vainement de le retrouver dans un Dictionnaire ordinaire. Hé bien! puisque, dès le premier moment, la chose que vous voulez exprimer s'est présentée à votre esprit comme un certain état d’insensibilité, rien de plus simple que de chercher le groupe insensible à sa place alphabétique dans la partie synthétique [3] du Dictionnaire, et, ce groupe une fois trouvé, de parcourir rapidement la série des corrélatifs qui le composent : vous arriverez bientôt ainsi à connaître le mot anesthésie.

Supposons maintenant que le mot inconnu soit corolle. Vous savez peut-être qu'il s'agit de désigner la partie la plus brillante de la fleur, ou bien que c'est la réunion de toutes ces petites pièces brillamment colorées, souvent odorantes, qui se détachent quand on effeuille la fleur ; ou, si votre idée est trop vague pour être nettement formulée, vous savez au moins qu'elle se rattache à l'idée d'une fleur. Cherchez donc le groupe fleur, et vous y trouverez corolle, avec une définition conforme à votre pensée.

Vous faites des vers, vous avez à exprimer l'idée d'une marque ineffaçable, et vous voudriez un mot qui rimât avec habile; vous croyez savoir qu'il existe un synonyme remplissant cette condition, mais il vous est impossible, en ce moment, de vous le rappeler. Cherchez le groupe effacer, vous trouverez indélébile.

Vous parlez d'une personne qui, ayant été appelée près d'un riche vieillard pour le soigner dans sa dernière maladie, a su prendre sur lui un tel empire qu'il a fait un testament en sa faveur, au préjudice des héritiers naturels, et vous voudriez exprimer cette pensée que le testament peut être cassé comme ayant été obtenu par... Mais le mot vous manque pour achever la phrase ainsi commencée. Cherchez le groupe testament, vous y trouverez captation.

Nous ne multiplierons pas davantage les exemples de ce genre, persuadé que nos lecteurs comprennent déjà parfaitement la marche à suivre pour trouver les mots inconnus. Mais nous reviendrons un instant sur la première des suppositions que nous venons de faire, afin de prévenir une petite difficulté qui pourrait quelquefois paraître embarrassante. Celui qui veut arriver au mot anesthésie aura peut-être l'idée de chercher le groupe chloroforme, au lieu du groupe insensible. Mais ce groupe chloroforme n'existe point dans le Dictionnaire. Comment fera-t-il alors? - Quand il aura trouvé la page où l'ordre alphabétique devrait amener le groupe, sans quitter cette page même il cherchera chloroforme dans les petites colonnes supérieures, et il y trouvera ce mot suivi de l'indication : V. insensible; par là il sera averti qu'il doit maintenant chercher le groupe insensible, et le retard qu'il aura éprouvé sera fort court.

En parcourant les groupes, on remarquera ça et là quelques corrélatifs imprimés en petites capitales, et d'autres qui sont précédés d'un chiffre. Les corrélatifs imprimés en petites capitales sont des mots qui pourraient être cherchés comme chefs de groupes, si par hasard on éprouvait le besoin de connaître les corrélatifs spéciaux qu'ils peuvent avoir. Quant aux chiffres, ils sont destinés à faire trouver très-promptement dans un groupe les mots qui sont liés entre eux par des rapports tout particuliers, sans qu'on soit obligé pour cela de lire le groupe tout entier. Si, par exemple, on voulait trouver tous les noms par lesquels on désigne les arbres que l'on réserve habituellement dans la coupe des bois, ou chercherait l'un des groupes arbre ou foret, n'importe lequel; en parcourant le groupe on arriverait bientôt an corrélatif baliveau (arbre réservé), et comme ce corrélatif est précédé d'un chiffre, ou reconnaîtrait aussitôt l'inutilité d'achever la lecture du groupe, et il suffirait dès lors de jeter les yeux sur les autres corrélatifs précédés du même chiure, ce qui ferait trouver presque instantanément les quatre autres mots : lais (jeune baliveau), moderne (baliveau de deux ou trois âges), pérot (baliveau de deux coupes), tayon (baliveau de trois coupes). Supposons encore que le mot inconnu soit celui dont on se sert pour désigner le soldat qui abandonne son drapeau et passe à l'ennemi : on cherchera le groupe abandon, et l'on arrivera bientôt au corrélatif déserter, dont la signification se rapproche évidemment de celle qu'on a en vue; mais comme ce corrélatif est précédé du chiffre 3, ou ira tout de suite à un autre chiffre 3, et l'on trouvera transfuge.

Enfin, on remarquera que les groupes pourront quelquefois servir à suggérer des idées, auxquelles on ne songeait pas d'abord et qui pourtant sont naturellement appelées par l'idée première, sans laquelle aucune recherche ne serait possible : ainsi l'idée de pauvreté conduit à celles de l’humilité, de la honte, des dettes; l'idée d'esclavage amène celle des nègres, des gladiateurs, etc., etc.

On peut trouver, quand on ne les connaît pas, les dérivés géographiques
qu'on chercherait vainement même dans les ouvrages spéciaux,
et beaucoup de
noms historiques que la tradition a consacrés
comme rappelant certaines idées ou certains faits.

Tout le monde sait que l'habitant de Paris est un Parisien, celui de Rome un Romain, que l'homme né en Europe est un Européen, en Chine un Chinois, etc. Beaucoup de personnes savent encore que l'habitant de Bordeaux se nomme Bordelais, celui du Pérou, Péruvien, etc.; cependant il ne serait déjà plus exact de dire que tout le monde le sait. Quant aux noms Jérusalem, Madagascar, Madrid, Palerme, Candie, Lisieux, Saint-Omer, Saint-Malo, duché de Posen, Kamtschatka, et beaucoup d'autres, il est peu de personnes qui sachent que les dérivés correspondants sont : Hiérosolymite ou Hiérosolymitain, Madécasse ou Malgache, Madrilène, Palermitain, Candiote, Lexovien, Audomarois, Malouin, Posnanien, Kamtschadale. Lorsqu'on voudra trouver un de ces dérivés géographiques dans le nouveau Dictionnaire, on cherchera le deuxième groupe géographie (car le Dictionnaire contient deux groupes ayant ce mot pour chef), et l'on y trouvera les noms propres les plus importants, rangés par ordre alphabétique, avec leurs dérivés placés à la suite de chacun d'eux.

Tout le monde sait aussi que Samson et Hercule rappellent la force, qu'Achille est le type de la bravoure, Protée celui des changements de forme ou métamorphoses, etc. Mais la mémoire est capricieuse, ce qu'on savait hier parfaitement peut être oublié aujourd'hui, et il peut arriver qu'ayant à exprimer l'idée de la force, de la bravoure, d'une métamorphose, on cherche vainement à se rappeler les noms historiques qui en sont les symboles. Or le dictionnaire analogique doit venir au secours de la mémoire dans toutes ses défaillances, et les noms que le langage ordinaire peut emprunter à l'histoire occupent leur place dans les groupes parmi les corrélatifs appartenant à la langue proprement dite.

On peut trouver les principaux noms de baptême ou prénoms,
soit quand on les a oubliés, soit quand on a des doutes sur leur orthographe.

Jusqu'à présent les noms de baptême ou prénoms ne sont jamais entrés dans aucun Dictionnaire de la langue. Il est certain cependant qu'ils appartiennent au langage commun, puisqu'on les entend tous les jours dans la bouche de tout le monde; on a aussi très-souvent l'occasion de les écrire, et plusieurs d'entre eux ont une orthographe assez irrégulière pour embarrasser même les personnes instruites; enfin il peut arriver qu'on ait besoin de se rappeler certains prénoms d'un emploi plus rare que les autres, et que la mémoire se trouve eu défaut : on voit donc que ces mots donnent naissance exactement aux mêmes besoins que tous les autres; et comme nous avons cherché à flaire un Dictionnaire qui fût le répertoire complet du langage, nous avons dû les donner tous par ordre alphabétique dans le groupe 2 nom, c'est-à-dire dans le deuxième groupe ayant pour chef le mot nom.

4° On trouve par un procédé infaillible /'orthographe
et, par suite, la signification des mots les plus irréguliers
dont la prononciation seule est connue.

Personne n'ignore que les lettrines sont des lettres capitales, généralement au nombre de trois, qui se placent au haut des pages dans la plupart des Dictionnaires, et qui servent à mettre mieux en évidence le progrès de l'ordre alphabétique dans tout le cours du livre. Nous avons respecté cet usage, mais en l'étendant; car nous avons placé dans l'intérieur même des colonnes beaucoup d'autres lettrines, et nous avons donné après chacune d'elles les lettres phoniquement équivalentes que l'usage a fait admettre au commencement de certains mots. Donnons quelques exemples pour montrer l'utilité de cette innovation.

Vous savez que le mot par lequel on désigne la coiffure de nos soldats d'infanterie se prononce chako, et comme l'orthographe vous est inconnue, vous consultez un Dictionnaire : vous cherchez d'abord chako, puis chaco, ou chacot, puis encore chaquo, chaquau, etc.; rien de tout cela ne vous réussit, vous avez perdu votre temps, et vous êtes réduit à écrire le mot au hasard. Mais si vous avez entre les mains le dictionnaire analogique, vous procéderez d'une autre manière : vous commencerez par chercher dans les quatre colonnes supérieures la lettrine cha, formée des trois premiers éléments du mot tel que vous l'avez conçu d'abord, et comme à la suite de cette lettrine vous trouverez son équivalent sha, vous serez averti que, dans le cas où le mot cherché ne commencerait point par les trois lettres qui se sont présentées les premières à votre pensée, il pourrait commencer par sha, et c'est en effet sous cette forme que vous trouverez enfin shako.

Autre exemple : vous avez entendu prononcer deux mots dont l'orthographe et la signification vous sont inconnues, et qui, pour le son, peuvent être représentés par ceptique, ieuze. Si vous recourez à un Dictionnaire ordinaire, il vous arrivera peut-être de chercher, pour le premier, ceptique, cèpetique, septik. saiptique, etc., pour l'autre, ieuze, ieuse, hieuze, hieuse; rien de tout cela n'amènera le mot, et vous ne pourrez connaître ni l'orthographe ni la signification. Mais avec la dictionnaire analogique vous cherchez d'abord les lettrines cep, ieu , vous remarquez les équivalents scep, yeu, et vous arrivez bientôt aux mots sceptique, yeuse, suivis des indications nécessaires pour vous eu faire trouver la signification.

Comme on le voit, les lettrines intérieures ne serviront pas à faire voir au haut de la page ce qu'il serait à peu près aussi simple de laisser voir au bas; mais elles serviront à faire disparaître les principaux inconvénients qu'entraîné l’irrégularité, on pourrait presque dire la barbarie de notre orthographe. Elles auront une utilité moins contestable assurément que ne l'est celle des lettrines supérieures.

On peut étudier la langue dans ses richesses matérielles,
sans confusion, avec méthode et par conséquent avec fruit.

Il suffit de jeter les yeux sur quelques-uns des groupes qui constituent la partie synthétique du Dictionnaire, pour comprendre combien il sera facile d'apporter un ordre rationnel dans l'étude des mots, étude qui, jusqu'aujourd'hui, n'a jamais pu se faire, parce qu'il n'existait point de livre convenable. On a composé pour les enfants une foule de grammaires, où ils peuvent apprendre les règles qui président à l'emploi, à l'association des mots; mais on a laissé au hasard le soin de leur enseigner les mots eux-mêmes. C'est à peu près comme si, pour faire construire une maison, on donnait au maçon la truelle, le marteau, l'échelle et les autres instruments nécessaires, sans songer à lui donner en même temps de la chaux, du sable et des pierres. Rien de plus facile désormais que de combler cette lacune de notre enseignement grammatical : on fera toujours étudier les règles sans doute, mais auparavant, ou tout au moins en même temps, on fera étudier les mots, qui sont les matériaux mêmes du langage. Le maître dira à son élève : Aujourd'hui vous étudierez les richesses que fournit la langue pour exprimer l'amour, demain vous apprendrez tout ce qui peut exprimer la haine, puis la douceur, puis la colère, etc., etc. Si la profession à laquelle un jeune homme se destine exige qu'il connaisse d'une manière spéciale, certaines séries de mots, on les trouvera triés d'avance dans un ou plusieurs groupes faciles à reconnaître, qui sont tout prêts pour l'étude et qu'on pourra lui faire lire, copier, apprendre par cœur, autant de fois qu'on le jugera nécessaire. En un mot, à la place du chaos alphabétique, on aura l'ordre, on aura une classification naturelle et logique, au moyen de laquelle l'attention se fixera tour à tour sur tel ou tel point spécial, et la mémoire pourra graduellement s'enrichir.

Tels sont les avantages nouveaux que présente le dictionnaire analogique. Mais il ne perd, pour cela, aucun de ceux qu'on est accoutumé à rencontrer dans les Dictionnaires ordinaires : ceci demande encore quelques explications.

6° NATURE DES MOTS, GENRE DES SUBSTANTIFS, etc.

La partie alphabétique renferme tous les mots de la langue dans l'ordre même qu'ont adopté tous les auteurs de Dictionnaires; de plus, chaque mot amène après lui l'indication abrégée de sa nature grammaticale. Sous ce rapport l'identité est parfaite entre le dictionnaire analogique et tous ceux qui l'ont précédé. Donc les recherches relatives à la nature des mots peuvent se faire dans les quatre colonnes supérieures, absolument comme on les a toujours faites jusqu'ici.

7° DIFFICULTÉS GRAMMATICALES.

Quand un mot donne lieu à quelque difficulté de grammaire, il faut le chercher dans la partie alphabétique et remarquer le numéro ou les numéros dont il est suivi. Ces numéros font connaître l'endroit précis où l'on pourra lire les règles nécessaires, clairement exposées dans un Résumé de grammaire qui terminera le volume. Ce résumé sera comme un dernier groupe où l'on aura synthétisé, non plus des mots, mais les principes qui constituent la science grammaticale elle-même.

8° PRONONCIATION.

Lorsque la prononciation est irrégulière, on la trouve indiquée entre parenthèses, toujours en cherchant le mot dans la partie alphabétique. Mais pour bien comprendre les indications dont il s'agit, il faut se rappeler que chaque partie correspondante à une syllabe distincte est séparée du reste par un trait, et que tout ce qui n'est pas séparé doit se prononcer en une seule syllabe. Ainsi lorsque, après abdomen, on verra (mène), il ne faut pas croire que cela représente les deux syllabes me, ne; cela n'en représente qu'une seule, dans laquelle l'e final sert seulement à marquer la valeur sonnante de la lettre précédente. De même quand, après anguiné, on trouvera (guï), il ne faut pas s'imaginer qu'a cause du tréma gui forme deux syllabes; ce tréma n'est mis ici que pour conserver à chacune des voyelles u, i sa valeur propre dans la diphtongue que renferme la syllabe, et pour empêcher de prononcer cette syllabe comme on prononce le gui du chêne. Quand on trouvera le signe (m), cela indiquera qu'il y a dans le mot une ou plusieurs lettres qui représentent une articulation mouillée, simple ou double : c'est, par exemple, la dernière lettre seule dans péril; ce sont les deux l dans pillage ; ce sont les trois lettres ill dans bataille, feuille; ce sont les deux consonnes gn dans montagne. Enfin le signe (asp) marque que l'h initiale doit être aspirée.

9° ÉTYMOLOGIE.

Il y a des Dictionnaires savants qui donnent l'étymologie de tous les mots, sans exception. Mais la science étymologique est souvent bien incertaine, et quand elle s'égare dons de lointaines conjectures, elle ne peut être d'aucune utilité pratique. Le dictionnaire analogique, qui vise à l'utilité par-dessus toute chose, se contente de donner, après les principaux chefs de groupes, les mots latins ou grecs qui servent évidemment de racines à plusieurs mots français exprimant des idées analogues. Les professeurs qui adopteront ce Dictionnaire comme livre d'étude pourront indiquer à leurs élèves, ou mieux encore ils pourront les charger de distinguer eux-mêmes, dans chaque groupe, tous les corrélatifs dont l'origine et la signification s'expliquent aisément par chacun des mots latins ou grecs donnés après le chef de groupe; ce sera un exercice très-utile et très-propre à graver dans la mémoire des jeunes gens les seules notions étymologiques qui aient une réelle importance.

10° SIGNIFICATION DES MOTS

Pour trouver la signification des mots, on s'y prendra de deux manières différentes, selon les circonstances : 1° si l'on croit déjà savoir à peu près ce que le mot doit signifier, si au moins on en sait assez pour juger qu'il se rattache à telle ou telle idée générale ou usuelle, ce qui est le cas le plus ordinaire, on cherchera directement le groupe consacré à cette idée, et l'on y trouvera, par ordre alphabétique, le mot suivi de sa définition; 2° si la signification est tout à fait inconnue, on commencera par chercher le mot dans les quatre colonnes supérieures, et la lettre indicative V annoncera le groupe dans lequel on pourra définitivement trouver la signification. Soit pour exemple le mot hyémal; on le cherche d'abord dans la partie alphabétique, et là on remarque qu'il est suivi de V. saison, on est donc renvoyé au 'groupe saison, et c'est là qu'en effet on trouve hyémal suivi de cette définition : «Qui se rapporte à l'hiver.»

Quelquefois le V indicateur est suivi de plusieurs chefs de groupes : c'est qu'alors le mot cherché a plusieurs significations, et pour les connaître toutes il faut recourir aux différents groupes indiqués. Mais si l'on veut s'en tenir à la signification la plus générale, le premier groupe indiqué suffit; et lorsque, au contraire, on a besoin de connaître une des significations spéciales, la lecture seule des différents chefs de groupes fait presque toujours reconnaître aisément celui qui doit être consulté dans le cas particulier où l'on se trouve.

Les autres Dictionnaires donnent la signification des mots d'une manière plus directe, peut-être; mais il n'en est pas moins vrai que le dictionnaire analogique peut les remplacer tous, même pour cette dernière recherche, tandis qu'il offre de nombreux avantages pour lesquels l'impuissance de ses rivaux est complète. Il existe, nous le savons, un préjugé assez général qui fait regarder la recherche des significations comme la plus importante de toutes celles qui se font dans les Dictionnaires. Mais sur quoi se fonde cette manière de juger? ce n'est pas sur des faits, nous le montrerons bientôt, c'est uniquement sur le souvenir confus de certaines impressions qui nous viennent du collège. C'est au collège que nous avons passé nos premières années, c'est-à-dire le temps de la vie où commencèrent à se former nos idées, nos opinions, nos croyances; et là, chacun de nous se rappelle en effet que, pour faire ses premières versions, il lui fallait chercher dans le Dictionnaire la signification de presque tous les mots. Mais ce n'est pas ainsi que les choses se passent quand il s'agit de la langue maternelle : sur dix recherches que nous faisons dans un Dictionnaire français, il n'y en a pas deux peut-être qui aient pour objet la signification; c'est le plus souvent l'orthographe qui nous est mal connue; souvent aussi c'est le genre masculin ou féminin d'un substantif sur lequel nous ne sommes pas fixés; ou bien, c'est la prononciation, l'étymologie : voilà presque toujours ce qui nous force à recourir au Dictionnaire. Quant à la signification, comme un mot ne se présente jamais seul, comme celui qui nous est inconnu se trouve toujours précédé et suivi de plusieurs autres qui nous sont parfaitement connus, le sens général suffit ordinairement pour nous faire deviner ce que nous ne savons pas; et si, dans ces circonstances, nous ouvrons quelquefois le dictionnaire, c'est plutôt pour vérifier un jugement porté d'avance que pour apprendre réellement quelque chose. D'ailleurs, puisque les souvenirs du collège ont tant de pouvoir sur nos esprits, nous devrions nous rappeler qu'outre le Dictionnaire de version, où nous trouvions la signification des mots latins, nous avions aussi un Dictionnaire de thème, où nous cherchions les mots inconnus, et plus tard un Dictionnaire de versification (le Gradus ou le Thésaurus), où nous trouvions, non-seulement des mots, mais des idées et des phrases. Il est donc réellement difficile de s'expliquer que tant d'années, de siècles même se soient écoulés sans qu'on ait remarqué l'insuffisance des Dictionnaires français, qui n'ont jamais pu servir à trouver les mots inconnus ni les idées. De nos jours, cette lacune a pourtant frappé quelques esprits : Charles Nodier rêvait un Dictionnaire ontologique et rationnel qui pût servir d'instrument à la pensée humaine; M. Léger Noël a commencé, il y a quelques années, la publication d'un Dictionnaire mnémonique, et M. Robertson a publié plus récemment un Dictionnaire idéologique, qu'il ne nous appartient ici ni de louer ni de critiquer, et dont le plan, d'ailleurs, est bien différent du nôtre. Le dictionnaire analogique, commencé il y a plus de vingt ans, n'est l'imitation d'aucun autre; c'est le fruit d'un travail tout spontané, qui devait nécessairement être long et pénible, mais dont l'utilité était assez manifeste et assez grande pour inspirer le courage de persévérer jusqu'à ce que le but fût atteint


 

TABLE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS.

 

a. Adjectif.

adv. Adverbe, ou locution adverbiale.

art. Article.

(asp) Aspirez l'h.

Bios. Terme de blason.

Bot. Terme de botanique.

conj. Conjonction, ou loc. conjonctive.

int. Interjection.

Inus. Mot inusité, ou peu usité.

(m) Mouillez l, ll, ill, ou gn.

Mar. Terme de marine.

Pal. Terme de palais ou de loi.

part. Participe.

Pop. Populaire.

prép. Préposition, ou locution prépositive

pron. Pronom.

s. Substantif des deux genres.

sf. Substantif féminin.

sfp. Substantif féminin pluriel.

sm. Substantif masculin.

smp. Substantif masculin pluriel.

suiv. Suivants.

t. Terme.

v. Verbe.

V. Voyez.

(vx) Vieux mot ou vieux mots.


 

DICTIONNAIRE ANALOGIQUE

DE LA

LANGUE FRANÇAISE

RÉPERTOIRE COMPLET

DES MOTS PAR LES IDÉES ET DES IDÉES PAR LES MOTS.

 

 

ABA

A, 3e personne du v. avoir.

A, prép. V. but, lieu,241 et suiv.

Aabam (bame), sm. V. plomb.

Aavora, sm. V. palmier.

ABA, abba.

Abab, sm. V. matelot.

Ababouiné, a. V. arrêt.

Abaco, sm. V. tableau, coiffure.

Abacus (eusse) sm. V. bâton, calcul.

Abaddon, sm. V. diable, enfer.

Abadir ou Abaddir, sm. V. Saturne.

Abaisse, sf. V. pâtisserie.

Abaissement, sm. Abaisser, v. V. bas, humilité, tracer, 2 œil.

Abaisseur, sm. a. V. muscle.

Abait (bé), sm. Abaiter, v. V. appât.

Abajoue, sf. V. museau, visage.

Abalourdir, v. V. sot, lourd.

abandon, sm. Abandonnataire , s. Abandonné, a. Abandonnement. sm.

Abandonner v. (*). V. aussi don, céder, confiance, hasard, nature, débauche.

Abannation (bane-na), sf. V. bannir.

Abaptiste (ba-tis-te), sm. V. 2 chirurgie.

Abaque, sm. V. tableau, colonne, or, armoire.

Abarticulation, sf. V. articulation

Abas (basse), sm. V. poids.

Abascante, sm. V. magie.

Abasourdir (zour), V. Abasourdissement, sm. V. trouble.

Abassi, sm. V. 2 monnaie.

Abat (ba), sm. V. boucherie.

Abatage ou Abattage, sm. V. bas, tailler, tuer.

Abatant, sm. V. meuble.

Abâtardir, v. Abâtardissement, sm. V. gâter, médiocre.

Abat-chauvée, sf. V. laine, 49.

Abatée, sf. V. navire.

Abatellement, sm. V. prohiber.

Abat-faim, sm. V. mets, 49.

Abat-foin, sm. V. étable,

Abatis (ti), sm. V. bas, boucherie, volaille détruire.-

Abat-jour, sm. V. fenêtre, lumière, 49.

Abat-sons, sm. V. cloche,

Abattage. V. Abatage, sm. V. bas, tailler, tuer.

abattement, sm. (*), V. aussi bas, détruire.

Abatteur, sm. V. bas, travail.

Abattoir, sm. V. boucherie.

Abattre, v. V. bas, détruire, tuer, prompt, percher, navire, (*).

Abattu, a. (*). V. aussi bas.

Abattue, st. V. sel.

Abattures, sfp. V. trace.

Abat-vent, sm. V. vent, cloche, 49.

Abat-voix, sm. V. prêcher.

Abauga, sm. V. palmier.

Abbatial (abe-ba-cral), a. V.

Abbaye (a-bé-i), sf. V. moine.

Abbé (a-bé), sm. V. moine, prêtre.

Abbesse (a-bèce), sf. V. moine.

ABC, abs, absc

Abcéder, v. V. pus, tumeur, 132.

Abcès (ce), sm. V. tumeur.

Abdalas ou Abdallah, sm. V. Perse.

Abdélavi, sm. V. courge.

Abdest (dèste), sm. V. laver.

Abdication, sf. Abdiquer, v. V. abandon, destitué.

Abditolarve, sm. V. 2 insecte.

Abdomen (mène), sm. V. ventre.

Abdominal, a. V. ventre, poisson, 36.

Abducteur, a. Abduction, sf. V. hors, muscle, manœuvre.

ABE, abbe, abat, abbay, habe.

Abe, sm. V. 2 habillement.

Abécé ou abc, sm. Abécédaire, sm. A. V. lettre, commencer, ignorance.

Abécé ou Abc, sm. Abécédaire, sm. A. V. lettre, commencer, ignorance.

Abéchement, sm. Abécher, v. V. bec, manger, 132.

Abecquement, sm. Abecquer, v. V. bec, manger.

Abée, sf. V. 2 moulin.

Abeillage (m), sm. Abeille, sf. Abeillère, a. Abeillon, sm. V. miel, étoile.

Abélanier, sm. V. noix.

Abèle, sm. V. peuplier.

Abélir, v. V. flatter.

Abélonite, s. V. 2 secte.

Abénévis (vi), sm. V. eau.

Abéone, sf. V. partir.

Abèquement, sm. Abéquer, v. V. bec, manger, 132.

Abéquiter (kui), v. V. équitation.

Aber (bere), sm. V. rivière. Aberration, sf. V. erreur,écart.

Abésum (zamrne), sm. V. chaux.

Abet, sm. V. pin.

Abêtir. V. sot.

Abhorrer, v. V. horreur, haine

ABI, habi, aby

Abianneur, sm. V. saisie.

Abiétiné, a. V. pin.

Abigeat (gé-até) sm. V. bestiaux.

Abîmé, a. Abîmer, v. V. gâter; fond, blâme, 2 réfléchir, chagrin.

Abîme, sm. V. gouffre, enfer, merr obscur, cuve, blason, malheur.

Abject, a. Abjection, sf. V. vil.

Abjuration, sf. Abjuratoire, a. Abjurer, v. V. renier, abandon.

ABL, habl.

Ablactation,sf. V. nourrice.

Ablais, sm. V. blé.

Ablanier, sm. V. 2 arbre.

Ablaque, sf. V. soie.

Ablaquéation (kùé), sf. V. vigne, jardin.

Ablateur, sm. V. queue.

Ablatif, sm. V. grammaire.

Ablation, sf. V. ôter, couper.

Ablativo, adv. v. amas.

Able, sm. V. poisson.

Ablecte, sm. V. 2 soldat.

Ablégat, sm. V. diplomatie.

Ablégation, sf. V. bannir, diplomatie.

Ablepsie, sf. V. sot.

Ableret, sm. V. filet.

Ablette, sf. V. poisson.

Abluant, a. Abluer, v. Ablution, sf. V. laver, pur.

Abnégation, sf. V. oubli, généreux.

ABO, abau, abho

Aboi, sm. Aboiement, sm. V. 2 cri.

Abois, smp. V. malheur, mort.

Abolir, t. Abolissable, a. Abolissement, sm. Abolition, sf. V. annuler.

Abolitioniste, sm. V. esclave.

Abomasum ou Abomasus (zomme, zusse), sm. V. estomac.

Abominable, a. Abominablement, adv. Abomination, sf. Abominer, v. V. mal, haine, horreur, méchant.

Abondamment, adv. abondance, sf. Abondant, a. Abonder, v. (*). V. aussi parler, éloquence, approuver, boisson.

Abonnataire, s. Abonné, sm. Abonnement, sm. Abonner, v. V. souscrire.

Abonnir, v. V. bon, mieux.

Abord (bor), sm. Abordable, a. Abordage, sm. Aborder, v. Abordeur, sm. V. près, rencontre, attaque, entreprendre.

Aborigène, sm. V. pays.

Abornement, sm. Aborner, v. V. limite.

Abortif, a. V. naître, imparfait, prompt, 25.

Abot (bo), sm. V. cheval.

Abouchement, sm. Aboucher, v. V. entrevue, emboîter.

Abouement, sm. V. emboîter.

Abouffer, v. V. respiration.

Abougri, a. V. court, difforme.

Abou-hannis, sm. V. 3 oiseau.

Aboulomri (lomme-ri), sm, V. 4 oiseau.

Abouquement, sm. Abouquer, v. V. sel.

About, sm. V. extrême, charpente.

Aboutement, sm. Abouter, v. V. extrême.

Aboutir, v. Aboutissant, a. sm. Aboutissement, sm. V. extrême, finir, limite, but, effet, tumeur.

Aboyer, v. Aboyeur, sm. V. 2 cri, cri, désir, 3 oiseau.

Abra, sm. V. 2 monnaie.

Abramide , sf. V. 2 habillement, poisson.

Abraquer, v. V. tirer.

Abrasion, sf. V. déchirer.

Abraxas (xasse), sm. V. amulette.

Abre, sm. V. plante.

abrégé, sm. a. Abrègement, sm. Abréger, v. (*). V. aussi orgue, 132.

Abreuvage, sm. Abreuver, v. Abreuvoir, sm.

(*) ABANDON

(En latin, desertio.)

Abandonnataire, celui à qui l'on fait l'abandon; - Abandonné, laissé dans l'abandon; -Abandonnement, action d' - Abandonner, se séparer de, faire abandon, laisser dans l'isolement et sans secours.

Abdication, action d' - Abdiquer la royauté, la couronne, y renoncer.

Abjurer une opinion, une croyance, y renoncer pour toujours.

Abnégation, renoncement par humilité, par bonté.

abstenir (s') ; -Abstention; etc.

Adieu : dire adieu, dire bonjour à.

Ariane fut abandonnée par Thésée.

Bannir toute contrainte, toute pudeur, la chasser, la mettre de côté.

Bas : mettre bas toute retenue.

Brûler la politesse à quelqu'un, le quitter.

Camper là quelqu'un, le quitter brusquement.

Changer d'amis, de maître, d'opinion, etc.

1 Clefs : mettre les clefs sur la fosse , abandonner une succession.

Congé : prendre congé de quelqu'un.

Couper court à un sujet de conversation, le quitter ou le faire quitter brusquement.

Croc : mettre ou pendre au croc une chose dont on ne veut plus se servir. On peut dire aussi serrer.

Débarrasser (se), se défaire de, ne pas conserver.

Défection, abandon lâche d'un parti; - Défectionnaire, qui fait défection.

1 Déguerpir un héritage, s'en dessaisir; - Déguerpissement, action de déguerpir.

Délaissement, abandon; - Délaisser, abandonner.

Démettre (se) d'un emploi; - Démission; - Démissionnaire ; etc. V. DESTITUÉ.

Démordre (en), renoncer à soutenir une chose.

Démunir (se), - se Dénantir de, ne pas garder.

Départir (se) d'une prétention, y renoncer.

2 Déport, action de - se Déporter, se désister.

Déposer, quitter, mettre bas.

Dépouiller le masque, le vieil homme ; - se Dépouiller de ce qu'on possédait.

Dépourvoir (se), se démunir.

Désappropriation, action de - se Désapproprier, ne pas conserver la propriété.

Desemparement, action de - Désemparer une ville, un camp, les quitter.

désert, non habité, etc.

3 Déserter, abandonner son corps comme soldat : déserter à l'ennemi, à l'intérieur, avec armes et bagage; - Déserteur, celui qui déserte; - Désertion, action de déserter.

2 Désertion d'appel, sorte de désistement. Pal.

2 Désistement, action de - se Désister d'un droit, d'une plainte, eu faire l'abandon.

Dessaisir (se), ne pas garder ; - Dessaisissement, action de se dessaisir.

Dévêtir (se) d'une propriété ; - Dévêtissement.

4 Divorce, séparation des époux; - Divorcer, se séparer, en parlant de deux époux.

Dos : tourner le dos à quelqu'un.

Écart : mettre ou laisser à l'écart.

Écarter (s'), s'éloigner, quitter.

3 Embauchage, .action d’- Embaucher, débaucher, engager à déserter; - Embaucheur, celui qui embauche.

Esseulé, qui est seul et abandonné, (vx)

Évacuation, action d' - Évacuer un lieu, en sortir.

1 Exponce, abandon d'un héritage trop chargé d'hypothèques. Plus souvent on l'accepte sous bénéfice d'inventaire.

5 Exposer un enfant, l'abandonner dans un lieu isolé ou public ; - Exposition, action d'exposer.

Fausser compagnie à quelqu'un. fuir ; - Fuite; - Fuyard; etc.

1 Guerpie, action de - Guerpir, déguerpir.

infidèle; inconstant; etc.

1 Jacent : succession jacente, que personne ne réclame.

Jêter le froc aux orties, quitter le couvent, renoncer à la prêtrise, etc., - Jeter sa langue aux chiens, renoncer à chercher le mot d'une énigme à deviner ; - Jeter le manche après la cognée, renoncer tout à fait à une chose dont les difficultés font perdre courage.

Lâcher, laisser aller, ne pas retenir: lâcher prise ; etc.

Lais ou - Laisses, relais, terres laissées par la mer.

Laisser, abandonner : laisser là, laisser aller, laisser échapper, etc.

2 Levé : donner Mainlevée, renoncer à une hypothèque, à l'opposition qu'on avait mise.

2 Lever une opposition, une défense, etc., la retirer.

Mourir au monde, à ses passions, etc.

Négligeable, qui peut être négligé ; - Négligement, action de - Négliger, laisser, ne pas tenir compte de ; - Négligible, qui peut être négligé.

Non-usage, désuétude, délaissement, oubli dans lequel tombe une loi, etc.

partie, s'en aller ; départ ; etc.

3 Passer à l'ennemi, déserter.

5 Perdre un enfant, l'égarer, le conduire dans un lieu écarté pour l'abandonner; - Perdre patience, s'impatienter et renoncer.

5 Perdu, abandonné, qui ne peut retrouver ses parents, son maître.

Planter là; Planter là pour reverdir.

Quitter, abandonner, se séparer de : quitter la partie, son drapeau; qui quitte sa place (ou la partie) la perd.

Rebut: mettre au rebut; - Rebuter, rejeter loin de soi, repousser avec dédain ; - se Rebuter, renoncer par dégoût, par lassitude.

Reculer, renoncer.

Renâcler, n'avoir pas le courage de persévérer.

renier sa croyance; renégat; abjuration; etc.

Renoncement, action de - Renoncer à, abandonner, cesser de; - Renonciation, action de renoncer.

4 Répudiation, action de - Répudier une femme, la renvoyer.

2 Retirer une observation qu'on avait faite, une opposition, etc. - se Retirer, s'en aller, ne pas rester; - se Retirer dans sa tente comme Achille.

Retraite, action de se retirer : faire retraite.

Sacrifice, abandon fait par résignation, par dévouement; - Sacrifier, faire le sacrifice de.

4 Séparation, - se Séparer etc.

seul, isolé; isolement, etc.

5 Tour, armoire tournante à l'extérieur d'un hospice, où l'on expose les enfants.

3 trahison; trahir; traître; etc.

3 Transfuge, celui qui passe à l'ennemi.

5 Trouvé : enfant trouvé, recueilli après avoir été abandonné; champi ; enfants assistés.

vacant, non occupé ; - Vaquer; etc.

Vider les lieux, les quitter.

Vouloir : ne vouloir plus de, avoir assez de.

(*) ABATTEMENT

Perte du courage, de l'ardeur, de l'énergie.

Abattre, faire perdre tout courage, toute énergie.

Abattu, tombé dans l'abattement.

Accable, abattu ; - Accablement, abattement; - Accabler, abattre.

Affaissé, qui est dans 1' - Affaissement, abattement; - Affaisser, abattre ; s'Affaisser.

Anéanti, abattu entièrement ; - Anéantir, priver de toute force ; - Anéantissement, abattement complet.

Aplatir, écraser ; - Aplatissement.

Appesanti, rendu lourd et pesant; - Appesantir, - Appesantissement. - Athymie.

Atonie, défaut de ton, relâchement.

Atterré, abattu ; - Atterrer, abattre.

Baisser l'oreille, avoir l'oreille basse.

Brisé, broyé; - Briser, broyer.

Casser bras et jambes.

chagrin, tristesse, désespoir, etc.

Collabescence, - Collapsus, t. de médecine.

Coma vigil, lourde somnolence.

Consternation, chagrin profond qui abat; - Consterné; - Consterner.

Déconcerter, troubler, mettre dans l'embarras.

Réconfort, abattement; - Déconforté, abattu; - Déconforter.

Décourageant, qui décourage; - Découragement, perte de tout courage; - Décourager, et se Décourager.

DÉGOUT; - Dégoûté de tout; spleen; etc.

Démâter, démonter, désagréer, faire perdre tous les moyens de salut et décourager.

Démoralisant; - Démoralisateur, qui démoralise, - Démoralisation, état démoralisé, ou action de - ; Démoraliser, priver de toute énergie morale.

Dépression, abattement; - Déprimer, abattre.

Dysthymie, abattement maladif.

Ébranler le courage.

Écraser, broyer, piler.

Engourdissement; engourdi; etc.

faible de caractère ; - Faiblesse ; etc.

fatigue; - Fatigué, las ; etc.

honte, confusion, etc.

lache; - Lâcheté; relâchement; etc.

Laisser (se) aller, se laisser abattre.

langueur ; - Languissant, etc.

Léthargie, mort apparente, sommeil profond; - Léthargique, qui tient de là léthargie.

lourd; - Lourdeur; etc.

Lypémaniaqne, atteint de - Lypémanie, sorte de folie triste.

Morne ou - Morose, triste et abattu; - Morosité, tristesse et abattement.

Mort, sans vie, sans vigueur; - Mort, absence de toute énergie : avoir la mort dans l'âme. mou; mollesse; amollir; etc.

Prolapsus, abattement, chute, t. de médecine.

Prostration, abattement complet.

sommeil; - Somnolence; etc.

Stupéfaction, état de - Stupéfait, qui est dans la stupeur; - Stupéfier, frapper de - Stupeur, abattement causé par la surprise.

Terrasser, abattre.

Tomber : les bras m'en tombent; faire tomber les bras.

Torpeur, abattement et engourdissement; - Torpide, qui tient de la torpeur.

Typhomanie, maladie dans laquelle chaque accès de frénésie est suivi d'un profond abattement.

(*) ABONDANCE

Opposé à. disette, manque, peu.

(En latin, copia, ubertas, abundantia.)

Abondamment, en abondance ; - Abondant, qui abonde; - Abonder, être en abondance.

assez, suffisamment, etc.

Bauge (à), avec abondance.

beaucoup; nombreux, etc.

Bouche : à bouche que veux-tu.

Cocagne (pays de), où règne l'abondance.

Combler de, donner en abondance.

Commun, qui se voit partout, souvent.

Copieusement, avec abondance; - Copieux, abondant.

Coq : être comme un coq en pâte.

Corne d'abondance, ou d'Amalthée.

Couvrir de, donner ou mettre en abondance.

Crever de biens, de richesses.

Discrétion (à), tant qu'on veut., à cœur joie.

Donner : la vigne donne ; les fruits ont bien donné cette année.

Drap : tailler en plein drap, sans ménager.

Eldorado, lieu plein de richesses, Éden, paradis.

Exubérance, exces; - Exubérant, etc.

fertile, fécond, etc.

Flots : couler à. flots.

Poison, abondance : à foison ; - Foisonnement, action de - Foisonner, être très-commun, très-abondant.

Gogo (à), tant qu'on en veut.

Gras : il y fait gras, on y est dans l'abondance ; - Grassement, en pleine abondance.

Inépuisable, - Inépuisablement; - Inépuisé.

Intarissable, - Intarissablement.

Large, abondant, généreux; - Largement : vivre largement.

Luxuriance, abondance ; - Luxuriant, abondant ; - Luxurier, être luxuriant.

Manquer (ne) de rien.

Marge : avoir de la marge, n'être pas à court.

Mer (une), un océan, une grande quantité.

Nager en grande eau, en pleine eau, dans l'abondance.

Or : âge d'or, siècle d'abondance et de bonheur.

Par-dessus les yeux, par-dessus la tête.

Pataud : être à nage-pataud.

Plantureusement, abondamment;- Plantureux, abondant.

plein; - Pleinement, à pleines mains; - Plénitude, réplétion, etc.

Pluie : une pluie de ; il pleut des.

Profusément, avec - Profusion, action de prodiguer, répandre, etc.

Promise : terre promise ou de - Promission.

provision; approvisionné; etc.

rassasier, saturer; à satiété; etc.

Regorger de. - avoir d'une chose à Revendre.

riche;-Richement; etc.

Ruisseaux de lait et de miel; - Ruisseler, couler eu ruisseaux.

Souhait (à), autant qu'on veut.

Surabondamment, avec - Surabondance, abondance excessive; - Surabondant; - Surabonder.

Torrents, torrentiel; etc.

TRÉSOR; thésauriser; etc.

Vaste, grand; grandeur; etc.

(*) ABRÉGÉ

Ce qui est réduit à de petites proportions.

(En grec, sténos, brachus.)

Abrégé, diminué, réduit.

Abrègement, action d' - Abréger, rendre plus court, plus petit.

Abréviateur, celui qui abrège; - Abréviatif, qui forme une - Abréviation, action d'abréger, ou signe abrégé; - Abréviativement, d'une manière abrégée.

Analysable, susceptible d' - Analyse, compte-rendu succinct; - Analyser, expliquer sommairement; - Analytique; - Analytiquement.

Aperçu, explication abrégée.

Appendix de Diis, abrégé de mythologie qu'on ajoute à certains ouvrages classiques.


Notes

1. L'étymologie n'offre aucun caractère d'utilité actuelle quand elle ne sert qu'à satisfaire cette curiosité savante qui aime à suivre les mots de siècle en siècle pour remonter jusqu'à leur origine première : il en est autrement quand elle sert à expliquer, dans la langue, certaines inconséquences qui semblent choquer le bon sens. Je puis me passer de connaître l'origine de père; ma raison comprend qu'il fallait un mot quelconque, et père est aussi bon qu'un autre; mais, ce terme une fois admis, pourquoi dire paternel et non pérel, paternité et non pèreté ? L'honneur même de la langue exige que toutes divergences de cette nature soient expliquées.

2. Quelque» personnes penseront peut-être que l'auteur, par un sentiment analogue à celui qu'il exprime ici, aurait dû s'abstenir de jeter dans ses groupes beaucoup de termes d'argot, qui sont toujours étrangers à la langue. Mais les termes d'argot qu'il a fait connaître ne se rapportent pas à des idées sales en elles-mêmes, et il s'est borné d'ailleurs à mettre ceux qui lui ont paru les plus curieux, soit par leur étrangeté, soit par une certaine finesse d'esprit et d'observation dont ils portent l'empreinte, et qu'on est tout étonné de rencontrer chez ceux qui parlent ce bizarre langage.

3. Il y a deux parties bien distinctes dans tout le cours de l'ouvrage : 1° la partie alphabétique, disposée sur quatre colonnes au haut des pages ; 2° la partie synthétique, disposée sur deux colonnes jusqu'au bas des pages.