BOISTE PARÉ DES PLUMES DU PAN

PAVANE POUR DEUX PANTAGRUÉLISTES DÉFUNTS…

OU NODIER LEXICOMANE

Isabelle Turcan
Université Jean-Moulin – Lyon III
Institut Universitaire de France

Jacques-Philippe Saint-Gérand
ATILF UMR CNRS 7118
Université Blaise-Pascal –Clermont-Ferrand II

 

Dans la longue série des quinze éditions dont bénéficie au XIXe siècle le dictionnaire de Boiste [1], s’inscrit toute une métamorphose de la lexicographie et de la lexicologie françaises, qui mérite attention. Sous cette dénomination illusoirement homogénéisante, de 1800 à 1866, en effet, et contre l’avis d’historiens de la langue tels que F. Brunot et Ch. Bruneau, c'est d'abord l'ensemble du lexique français qui se trouve soumis à des bouleversements considérables, en raison des modifications de l'histoire politique et économique du pays, de l'évolution des sciences et des techniques, des changements des mentalités [2] , et des variations mêmes de définition que subit cet objet spéculatif qu'est le français [3]. Mais, dans la même période, c'est aussi toute une transformation des objectifs et des modes d'être du dictionnaire qui se saisit de la lexicographie française. Boiste…. Gattel…. L'Académie française de 1835 et le Complément de 1838-1839-1842… Bescherelle, Poitevin… avant Littré, Larousse et le Dictionnaire général

Dans cette histoire, une période a été considérée comme déterminante, celle qui sépare la septième édition de 1829 de la neuvième de 1839, et une date a été réputée charnière : celle de 1834, qui, avec la huitième édition du Dictionnaire Universel, voit le titre originel de Boiste substantiellement modifié par l'explicitation d'un prédicat dont la tradition impute faussement la paternité au continuateur de Boiste, alors que ce dernier l’explicitait déjà dans ses réclames. Juxtaposons ces divers titres et analysons les transformations de la théorie et de la pratique métalexicographiques qu'ils impliquent.

De 1800 à 1808, nous trouvons d’abord un intitulé qui revendique sa place au sein d'une filiation et dans un contexte d'analyse critique et rationnelle. À partir de 1829, conformément aux intentions de son premier rédacteur disparu en 1824, mais sous l'influence désormais omnipotente de Nodier, le dictionnaire se présente sous un jour plus nettement holistique et déjà encyclopédique, avec en sous-titre l’épithète de Pan-Lexique, et en fait un argument publicitaire de diffusion. Pour avoir un panorama global de cette évolution, on adjoindra à une telle modification, les anamorphoses que feront subir à l'objet les éditions ultérieures. Par exemple, celles que l'on relève en 1839, qui achèvent de faire du Boiste un ouvrage total, tenant lieu d'une multitude de dictionnaires spécialisés et susceptible de remplacer à soi seul toute une bibliothèque. Ces métamorphoses successives intègrent les révisions et refontes de l'ouvrage de Boiste dans une lignée historique clairement identifiée : l’ambition totalisante est effectivement déjà présente dans bon nombre de dictionnaires antérieurs, même sans que la notion d'universel soit explicitement présente dans leurs intitulés. Mais, peut-être faut-il encore prendre la mesure de ce que le terme de "totalité" recouvre une notion et des réalités bien différentes aux XVIIe et XIXe siècles.

Replaçons donc l'entreprise de Boiste dans la continuité des différentes formes d’expression de la fascination lexicographique pour l’universel observable dès les origines du genre, notamment au XVIIe siècle, puis dans le contexte linguistique, cognitif et épistémique de son époque; nous comparerons ensuite les différences d’intitulés des diverses éditions retenues ici, avant de tirer de ces distorsions les conclusions qui s'imposent pour l'histoire de la lexicographie française du siècle par excellence des dictionnaires...

 

1. L’expression implicite ou explicite d’une fascination pour l’ouvrage lexicographique idéal :

1. 1. Préalable

Les intitulés de quelques dictionnaires des siècles antérieurs à celui de Boiste feront l’objet d’une première série de réflexions, dès lors qu’a été compris et reconnu, dans l’histoire du livre ancien imprimé, le rôle rhétorique des pages de titre. Si la page liminaire offre un moyen banal d’identification des ouvrages, elle permet aussi d’exposer une dimension publicitaire de valorisation du contenu souvent idéalisé de l’ouvrage, qui a été trop largement négligée ou utilisée de façon erronée dans ces dernières décennies, où l’on a vu cataloguer à la hâte des ouvrages sur la seule foi du titre abrégé tel qu’il fut parfois libellé dans les pages dites de faux-titre : sans qu’il soit tenu compte des variantes lexicales ou syntagmatiques d’énoncés équivalant par exemple à celui d’universel ; sans que soit réellement prise en compte, dans l’étiquetage des genres, la relation complexe entretenue entre les intitulés, les modalités discursives choisies par les lexicographes et, évidemment, les contenus proprement dits de ces ouvrages.

Point n’est ici le lieu de développer cette question, vaste et délicate, soulignons seulement que, depuis le dénommé Catholicon (éd. de Tréguier, 1499), la notion de connaissance universelle est indissociable d’un discours de nature lexicographique : la priorité et l’idéal du dictionnaire ancien furent toujours d’offrir une bibliothèque au lecteur d’un seul ouvrage sous la forme d’un ensemble de textes, de discours sur les mots et les choses, d’extraits d’ouvrages choisis pour leur pertinence représentative d’un état des connaissances dans tous les domaines de l’activité humaine susceptibles d’être verbalisés.

1. 2. Le trésor lexicographique : un dictionnaire à vocation universelle.

Si le syntagme de dictionnaire universel équivaut d’abord à la traduction en français de l’adjectif grec catholicon, « général, universel » appliqué au livre, biblion [4], il existe cependant de nombreuses et très anciennes formes de synonymie ou d’expression qui conduisent à une réalité similaire. Ainsi, sur le double plan lexical et syntagmatique, le terme de Thesaurus ou de Thresor / Trésor choisi jusqu’à nos jours comme intitulé d’ouvrages lexicographiques aux visées totales ou universelles en vertu d’emplois séculaires. Rappelons ici l’usage du terme en grec chez Hésiode à propos de la langue [5], ou en latin chez Cicéron à propos de la mémoire définie comme « le trésor de toutes les connaissances » [6], qui a conduit à la conception de thesaurus comme somme des connaissances relevant de domaines diversifiés en vertu du sens premier connu en grec, « magasin où l’on enferme provisions et objets précieux » [7]. C’est ainsi que le dictionnaire de Nicot s’inscrit pour « la langue françoise, tant ancienne que moderne » dans la continuité des monuments lexicographiques que furent les thesauri des Estienne. Pour ceux-ci, comme pour le Thresor de Nicot, la caractérisation du terme thresor par un syntagme nominal défini (« de la »), ouvert sur l’infini de la langue grecque ou de la langue latine comprise chacune dans sa globalité, neutralise la composante sémantique de recueil. Cette modulation de l’intitulé contrevient ainsi à une interprétation restrictive et hâtive du titre sur la seule mention complémentaire d’une forme de spicilège.

En dépit des valeurs étymologiques relevant de l’accumulation, de l’engrangement des éléments précieux d’un domaine, les titres de ce type font toujours apparaître la difficulté de trouver l’équilibre entre des forces assez vivement divergentes. La nomenclature du Thresor de Nicot embrasse ainsi une diversité lexicale si profuse qu’on peut la considérer comme universelle, à tout le moins pré-encyclopédique. Cette ambition d’exhaustivité assure la continuité lexicographique que l’on observe des ouvrages de Nicot à Ménage, puis aux dictionnaires universels de Furetière, de Basnage et des premiers rédacteurs de Trévoux, qui ont préparé la double branche des ouvrages encyclopédiques et universels de la seconde moitié du XVIIIe et du XIXe siècle.

En tant que recueil des mots les plus précieux d’un idiome, le trésor renvoie ainsi à une double représentation socio-culturelle des faits historiques : par le choix de la nomenclature, d’une part, et par l’orientation des discours afférents, d’autre part, qui suivent le passage de l’humanisme à l’âge classique, aux Lumières et enfin au XIXe. L’hétérogénéité est parfois le prix à payer pour cette profusion. À l’instar des modèles du genre, le Tresor dou Felibrige de Mistral, entre 1878 et 1886, réunit ainsi à côté des termes techniques des arts et des métiers, une nomenclature extrêmement diversifiée, associant termes populaires et termes savants, nomenclature géographique et historique avec anthroponymes et toponymes, locutions populaires et proverbes à côté de notices biographiques et bio-bibliographiques propres aux célébrités méridionales, etc… bref, un ensemble à portée universelle. Le seul usage, dans bien des intitulés de dictionnaires anciens, du pluriel indéfini à valeur globalisante est une preuve linguistique tangible de ce souci d’exhaustivité universelle et de la fascination pour un ouvrage total qui, à l’instar d’une bibliothèque, renferme la représentation verbale la plus complète du monde connu.

1. 3. Le dictionnaire-bibliothèque, une autre forme d’aspiration à l’ouvrage total.

En tant qu’épithètes titulaires le général et l’universel servent ici à fonder et justifier d’innombrables projets «cosmologiques ». Nous ne retiendrons que les exemples méconnus des ouvrages de P. Boyer et de C. de Rochefort.

Si le premier exprime clairement son objet dès son intitulé qui établit une adéquation entre dictionnaire et bibliothèque « Dictionnaire servant de bibliothèque universelle […] » (Paris, 1649), en revanche le second, curieusement laissé en retrait par la critique [8], précise ses motivations dans un para-texte assumant une fonction essentielle de complément par rapport au contenu de la page de titre, qui s’avère être là plus que jamais une vitrine :

Dictionaire général et curieux contenant les principaux mots, et les plus usitez en la langue françoise […] ouvrage tres-utile, et tres-necessaire à toutes sortes de Personnes […] qui trouveront dans ce volume une riche bibliotheque […],

Afin de dissiper toute ambiguïté à son sujet, le contenu de ce dernier terme est complété dans l’adresse Au Lecteur :

[…] tout cela n’ôte pas le merite d’une nouvelle composition, ny le prix d’un ouvrage qui est capable de tenir lieu de biblioteque à ceux qui n’ont pas les moyens de se fournir de quantité de livres.

Outre le fait que l’on retrouvera l’expression même de « quantité de livres » à deux siècles de distance sous la plume de Charles Nodier [9], on aura noté que, si l’usage d’adjectifs tels que général ou universel est linguistiquement redondant par rapport au sens d’une détermination grammaticale globalisante [10], il l’est aussi historiquement, et circonstanciellement ici, au moins par rapport à l’objectif précis de l’ouvrage lexicographique et à son statut, lequel doit offrir une compilation de connaissances et viser à la totalité dans sa fonction de représentation du monde. Les définitions classiques du terme bibliothèque sont là particulièrement éclairantes :

Furetière : BIBLIOTHEQUE […] On dit figurément d'un homme sçavant, que c'est une Bibliotheque vivante. Beroalde a été appellé une Bibliotheque vivante par Pic de la Mirandole, & Longin par Wormius.

Durandus témoigne qu'on a appellé Bibliotheques, les livres du Vieux & du Nouveau Testament : c'est un nom qu'on leur a donné par excellence.

… On appelle aussi Bibliotheque, les livres qui contiennent les Catalogues des livres des Bibliotheques. Gesner, Possevin, Photius, ont fait des Bibliotheques.

Académie, 1694 : BIBLIOTHEQUE. s. f. Le lieu où l'on tient un grand nombre de Livres. Faire bastir une bibliotheque.

Il signifie aussi, Les livres mesmes. Belle, grande. nombreuse bibliotheque. la bibliotheque Vaticane. la bibliotheque Royale. garde de la bibliotheque du Roy. vendre, acheter une bibliotheque.

On dit fig. d'Un homme tres-sçavant, que C'est une bibliotheque vivante.

On appelle aussi, Bibliotheques, Des recüeils & compilations d'ouvrages de mesme nature. La bibliotheque des peres. la nouvelle bibliotheque des peres. la Bibliotheque du Droit François.)

C’est dans cette logique d’une tradition lexicographique marquée par la fascination pour le dictionnaire universel, à visée encyclopédique, de l’ouvrage total substitut de bibliothèque, que s’inscrivent naturellement Boiste et Nodier.

 

2. Le contexte linguistique, cognitif et épistémique d’une époque.

La postérité, offusquée par l'éclat de ces phares concomitants que furent les frères Bescherelle, Prosper Poitevin, Émile Littré et Pierre-Athanase Larousse, a rapidement oublié le nom et les ouvrages de Boiste. Seul Charles Nodier [1780-1844], lexicomaniaque d'exception parmi les ardents amateurs de vocabulaire du XIXe siècle, escorté de — Landois, Ackermann, Barré — ses plus fidèles acolytes, à la mort de Boiste, se résolut à poursuivre l'entreprise dictionnairique afin de lui permettre d'atteindre le but que s'était originellement fixé l'avocat parisien devenu imprimeur de ses propres œuvres [1765-1824]. Par là, Nodier débusquait les implicites de cette lexicographie totale que l’Idéologie du début du XIXe siècle soutenait comme le moyen de rendre compte de l’expérience du monde sensible et intelligible, et d’en cartographier les lieux.

2. 1. Lexicomanie

Stimulé dès ses jeunes années par les travaux du Président de Brosses [11], de Court de Gébelin [12] et de l'abbé Copineau [13], Nodier envisagea très tôt la rédaction d'un Dictionnaire de la langue universelle, qui, au bout du compte, s'intégrera aux Prolégomènes de son Archéologue ou système universel et raisonné des langues [14]. Nodier connut ensuite un certain renom de savant et de poète grâce à son ambitieux Dictionnaire raisonné des Onomatopées [15], adopté par la Commission d'Instruction publique pour les bibliothèques des Lycées… Il était devenu en 1809 secrétaire du chevalier Croft [1751-1816], lui-même lexicographe proche de Johnson et réviseur du célèbre Dictionary of the English Language de 1755, et s'acquit — par l'intermédiaire de ce philologue aussi habile en hébreu, en vieille langue saxonne, que versé en littérature grecque, écrivant et parlant couramment l'italien, l'allemand, le français et l'anglais — une compétence réelle de vocabulariste, qu'il chercha à mettre immédiatement en pratique dans un projet de dictionnaire des néologismes littéraires et une amorce de Dictionnaire des difficultés de la langue française, lesquels ne parvinrent cependant jamais à complétion. L'esprit de Croft avait une propension marquée pour les détails de langage les plus petits — cherchant par exemple à expliquer Horace par la ponctuation — qui affecta la méthodologie générale de Nodier. Cette particularité limita son savoir philologique et reversa toute son énergie romantique vers des travaux de type plutôt métalexicographique, tels que le célèbre Examen critique des dictionnaires de la langue française, ou recherches grammaticales et littéraires sur l'orthographe, l'acception, la définition et l'étymologie des mots [16], les préfaces rédigées pour les dictionnaires de Gattel, Verger, Rosily et de Boiste, ou les Notions élémentaires de linguistique, ou Histoire abrégée de la parole et de l'écriture pour servir d'introduction à l'alphabet, à la grammaire et au dictionnaire [17]. Charles Bruneau, après beaucoup d'autres critiques, voyait surtout en lui un lexicologue plein d'esprit, mais d'un esprit faux, et un poète égaré dans la linguistique [qui] se laisse aller aux fantaisies de son imagination [18], bref un illuminé [19]. On ne s'étonne pas qu'un professeur en Sorbonne fustige les fantaisies d'un amateur qui se tint à l'écart de la méthode historique et comparatiste, et qui ne sut pas être suffisamment attentif aux progrès de la science.

2. 2. Magasin et catalogue

Mais, au regard d'une histoire globale de la pensée du langage à l'intérieur de laquelle les élucubrations aux apparences les plus hardies mêmes trouvent à signifier, il n'est pas certain que les pratiques et les théories de Nodier soient si anecdotiques et marginales. Surtout si l'on ne tient pas l'élection de Nodier au 25e fauteuil de l'Académie française, le 24 octobre 1833, pour un insignifiant détail biographique. Cet événement signe la reconnaissance que l'institution témoigne à l'écrivain en lui conférant le droit d'être sa conscience lexicographique. Rapporteur depuis le 14 mai 1835 de la Commission du nouveau Dictionnaire historique de la langue française, en compagnie de Jouy, Droz, Roger, Campenon et Pongerville, Nodier devenait ainsi le lexicographe officiel de l'Académie. C'est dans ce cadre qu'il faut ressaisir la valeur des soins que Nodier a consacrés à la révision et à la refonte du Dictionnaire Universel de Boiste… ce dictionnaire que l'on a trop hâtivement qualifié de vade-mecum du Français moyen [20]…

Or, Monsieur Prudhomme est à cette époque le sujet d'un roi-citoyen qui, selon la formule consacrée, n'est plus le lieutenant de Dieu sur la terre mais seulement le roi des Français et qui règne mais ne gouverne pas. Monsieur Prudhomme est l'impavide bourgeois qui répond à l'injonction de Guizot : Enrichissez-vous… en thésaurisant, en amassant, et en accumulant… dans le domaine du lexique comme dans celui de tous ces biens matériels ou symboliques qui entrent dans le courant des échanges permettant d'instituer en société une axiologie propice à la discrimination des sens et de leurs effets. Et l'ambition de Boiste, prolongée et poursuivie après sa mort, demeure toujours celle de donner au dictionnaire, dans le moindre espace, le plus grand degré d'utilité possible pour toutes les classes d'Ecrivains et de Lecteurs françois, et pour les étrangers qui savent ou veulent étudier le François devenu la langue de l'Europe [21]. Dans ces conditions l'avenir est grand ouvert aux vocabulistes. Comme l'écrit d'ailleurs Nodier lui-même le 15 novembre 1832, dans un article du Temps : Les lexicographes ont de la besogne taillée pour mille ans

2. 3. Holisme et Synopsis

Mais il y a dans cette remarque une circularité autotélique troublante, puisque son auteur, critique et journaliste d'un côté, est aussi le réviseur officiel de l'œuvre de Boiste. Comment peut-on donc être sérieusement juge et partie? Pour comprendre cette double position d'un auteur de contes, d'un journaliste, d'un écrivain lexicomane et d'un lexicographe confondus en une même personne, il faut revenir à la situation de l'histoire du lexique français dans la période 1800-1850. Nous avons montré ailleurs les transformations dont cet ensemble fut l'objet, aussi bien dans les usages littéraires que dans les usages techniques, scientifiques ou socio-politiques de la langue [22], exposé qu’il était alors à de durs contacts avec la réalité quotidienne, engagé par ailleurs dans des transactions que le rapport troublé des signes aux référents rendait parfois problématiques. Les lexicographes se sentirent dès lors tenus de réguler ces mouvements en identifiant, en caractérisant et classant les items par lesquels se réalisaient en langage les accommodements de la société aux transformations du monde. Que Nodier — réputé pour penser beaucoup de mal des dictionnaires existants [23] — prît intérêt au dictionnaire de Boiste n'est donc pas sans signification. Le dessein total de l'entreprise séduisait indéniablement l'écrivain.

Boiste est particulièrement clair à cet égard, non seulement dans l'exergue de son Avis indispensable : Le Dictionnaire Universel d'une langue doit contenir tous les mots de cette langue qui représentent une idée, mais aussi dans le détail de ce texte d'escorte et d'annonce. L'ouvrage qu'il entend livrer au public veut être simultanément : un répertoire total, et une synopsis classée, un compendium utilitaire rassemblant :

— le répertoire de la dénomination en français de toutes les idées susceptibles d'être produites à l'époque des Lumières par un esprit humain, et à ce titre il peut revendiquer l'épithète d'universel;

— le résumé de toutes les connaissances pouvant être extraites de dictionnaires plus spécialisés, et

— l’abrégé utilitaire des formes d'expression auxquelles la pensée doit recourir pour se formuler et être reçue à l'intérieur d'une époque historiquement définie :

L’Auteur de cet ouvrage a entrepris : 1° de réunir sans confusion, pour les LECTEURS et les AUTEURS, tous les genres d’utilité, toutes les richesses communes à tous les Dictionnaires ou particulières à chacun d’eux; 2° de lever les incertitudes que l’on éprouve en consultant plusieurs de ces ouvrages; 3° de délivrer de la pénible nécessité de les consulter tous pour faire un choix ou fixer son opinion.

Il a rassemblé, pour y réussir, tous ces Dictionnaires; il les a comparés les uns avec les autres; il a noté toutes les différences d’Acceptions, de Définitions; d’Orthographe, recueillant avec soin tout ce que chacun d’eux donnait de plus, avec les citations de noms des Lexicographes; opposant le plus grand nombre au plus petit, ou l’autorité la plus respectable aux autorités plus faibles : il doit résulter de ce long et fastidieux travail, s’il a été bien fait, un EXTRAIT COMPARATIF DES DICTIONNAIRES, Extrait qui donne en même temps leur CONCORDANCES GÉNÉRALES, leur CRITIQUES et leur SUPPLÉMENT.

Ce travail n’aurait pas encore suffi pour atteindre le but proposé. Les Dictionnaires ont, en général, été stationnaires; ceux qui les ont publiés n’avaient pas consulté les ouvrages des bons Auteurs anciens, et encore moins les ouvrages des Modernes : cependant le génie des écrivains des 17e et 18e siècles, et du 19e, les progrès des Sciences et des Arts ont apporté de grands changements dans la langue, et l’ont enrichie ou modifiée; ils ont étendu ou éclairé les connaissances humaines : l’Auteur a recueilli dans les Écrivains anciens et modernes ces richesses, et particulièrement d’excellentes définitions négligées par les Lexicographes; il les a caractérisées et réunies à celles des Dictionnaires dont le sien est encore le SUPPLÉMENT sous ce nouveau rapport.

Toutefois, par une position bien définie de l’épithète « universel », Boiste se garde d’outrepasser les bornes de ses compétences. Le dictionnaire universel d’une langue ne peut prétendre être le dictionnaire d’une langue universelle, même si, au fond, la conception rationaliste et unitaire du sensualisme, dont sort dans les mêmes années l’Idéologie, permet de comprendre que toutes les langues renvoient par l’expérience sensible aux mêmes notions et aux mêmes concepts.

Dans le cadre restreint du français, l’intervention du terme de Supplément est significative de cette recherche d’une complétude inaccessible en raison de l’incapacité dans laquelle se trouvent tous les lexicographes, passés, présents et futurs, de définir à l’unité près le contenu du magasin lexical d’une langue. On voit ainsi se mettre en place un dispositif lexicographique s'adressant uniment aux protagonistes de la communication verbale, qui tient à la fois de la science des idées telle que Destutt de Tracy et Cabanis définissent l'Idéologie, et du manuel de Belles-Lettres, tel que le dernier tiers du XVIIIe siècle en a donné l'illustration. Cet objet hybride doit assumer une double fonction culturelle :

— d'une part, permettre aux lecteurs d'identifier l'inconnu à partir du connu, et d'explorer les territoires d'un savoir dans lequel n'entrent désormais que les détenteurs d'une carte d'identité sociale clairement identifiée, car les connaissances deviennent alors synonyme de puissance ; et, d'autre part,

— garantir aux auteurs la légitimité de modèles à suivre pour être lus et entendus de leurs contemporains comme de la postérité.

La dimension analytique et évaluative — déjà implicitement métalexicographique du travail de Boiste — a sans doute subjugué l’esprit de l’homme de lettres. Lorsque Charles Nodier se saisit du Dictionnaire Universel, il se trouve ainsi en face d'un ouvrage déjà doté d'une historicité critique perceptible, qui a connu lui-même des révisions et des augmentations sensibles, et qui affirme sans relâche son ambition d'être contemporain à son époque. L'écrivain n'est pas forcément tendre à l'endroit de l'œuvre de l'avocat lexicographe, mais il lui reconnaît au moins le mérite de répondre — bien ou mal, qu'importe! — aux attentes du public de son temps. Ce qui est aussi manière de dire que le dictionnaire sert à informer le penser d'une époque et à conditionner les modes intellectuels et cognitifs de cet âge. Le dictionnaire devient la forme par excellence du prêt à penser et du prêt à écrire ; toute idée doit pouvoir trouver en lui les pièces de son costume énonciatif, ainsi que l'expose le feuilleton publié par Le Temps du 15 novembre 1832 :

Il est vrai que le succès du Dictionnaire de Boiste se passerait de ma recommandation et de celle des journaux. Celui-là s’est fait tout seul. Le Dictionnaire de Boiste est sans contredit de tous les livres que l’on vend encore le livre que l’on vend le mieux, non pas qu’il soit bon, le Dictionnaire de Boiste ; un dictionnaire ne saurait être bon avec notre langue et notre alphabet ; mais parce qu’il est large, immense, incommensurable ; parce qu’il a une réponse bonne ou mauvaise à toutes les questions, une solution mauvaise ou bonne à toutes les difficultés ; parce que, dans son imperfection essentielle, il renferme sous une forme portative l’expression abrégée de toutes les notions lexiques et scientifiques du siècle, que l’on extrairait à grand’peine d’une bibliothèque entière. Ce n’est pas seulement l’Encyclopédie verbale, c’est le Pandœmonium de la langue. Toutes les pensées, toutes les acquisitions, toutes les fantaisies de l’homme, se sont faites petites afin d’y tenir à l’aise. Ce ne sont, à la vérité, que des épluchures, mais ne vous y trompez pas. Ce sont les épluchures du fruit de l’arbre de la science, et ce n’est pas dans un dictionnaire qu’on en cherche ordinairement le coloris et le duvet, le parfum et la saveur. Ce qu’il faut lui demander, et il n’est jamais en retard avec son interlocuteur, le Dictionnaire de Boiste, c’est la définition telle quelle de tous les argotismes dont les livres sont bourrés depuis que l’on imprime, définition étriquée, rabougrie, avortée quelquefois, mais très suffisante pour faire un peu de lumière dans le chaos de la parole, aux yeux des hommes de notre époque, qui ont de si bonnes raisons pour se contenter en toutes choses de l’équivalent d’une perception et de la superficie d’une idée. Les éléments de conception et de renouvellement y sont rares comme ces nageurs du poète qui échappent au naufrage ; le cadre où ils sont jetés est vaste comme son abîme. Si l’histoire de notre civilisation manque à l’avenir, il lui suffira pour en juger du Dictionnaire de Boiste ; car Boiste, qui ne pensait qu’à faire un dictionnaire, a créé un symbole.

Ce dernier terme souligne la part d’investissement idéologique que représente la constitution d’un dictionnaire, et la fascination — délétère ou vivifiante — qui en résulte :

La société tout entière est représentée dans ce trésor effrayant des diffusions du verbe. Je ne crains pas de dire qu’on pourrait mettre au défi l’anagnoste le plus résolu, celui qui s’est soumis par devoir ou qui s’est condamné par esprit de mortification à lire du commencement à la fin, je ne dis pas un volume de la période actuelle, cela serait trop fort, mais un compte rendu, un discours, un feuilleton, de se passer du Dictionnaire de Boiste. C’est le janua linguarum de la tour de Babel ; c’est l’indispensable vade mecum pour lequel mon excellent ami M. Boulard semble avoir inventé les amples redingotes aux poches in-4°, dont les érudits ont adopté la forme avec tant d’empressement. Ce n’est pas moi du moins qui me passerais du Dictionnaire de Boiste, moi qui recule tous les matins d’une modeste frayeur devant dix paragraphes du Corsaire ou du Figaro, et qui ne me chargerais pas d’interpréter les Petites-Affiches au pied levé. Je voudrais bien y voir mes illustres maîtres Joseph Scaliger, Claude Saumaise et Gilles Ménage, qui savaient presque tout ce que l’on savait de leur temps. Je suis très convaincu qu’ils consulteraient souvent le Dictionnaire de Boiste en lisant pour se récréer, au coin de leur docte foyer, l’analyse d’un vaudeville.

S’inscrivant dans la lignée du mythe de Babel, et des autorités que furent Comenius puis les encyclopédistes des Lumières, Nodier peut s’instituer conseil en lexicomanie et s'attribuer une responsabilité de régisseur de la postérité du dictionnaire de Boiste. L'évocation des Scaliger, Saumaise et Ménage, ou, par ailleurs, des Henri Estienne et Furetière, achève de faire de lui un critique reconnu et un savant avéré ayant place reconnue dans une généalogie d'érudits aux caractéristiques reconnues. Du dictionnaire total — Pandaemonium, janua linguarum, ou vade mecum — l'on passe au lexicographe total, dont l'ambition est à peine dissimulée par l'ironie douce-amère d'un discours nécessairement en porte-à-faux par rapport à son objet… puisque le critique est aussi en partie le responsable du produit critiqué.

 

3. Anamorphose ou Métamorphose ?

Si, comme l'affirme Nodier, le Dictionnaire Universel de Boiste est ce phénix des dictionnaires, essayons de comprendre pourquoi et comment, d'éditions en rééditions, de rééditions en nouvelles éditions, cet ouvrage a tant évolué dans sa forme et son contenu.

3. 1. De la forme livresque

Pour cela, remontons à une spécificité bien attestée comme argument publicitaire de diffusion dans les péritextes lexicographiques de la seconde moitié du XVIIIe siècle et du début du XIXe siècle : le caractère portatif que se doivent de posséder les dictionnaires d'usage courant. Le détail paraît insignifiant à première vue, mais — restitué dans l'évolution des modes et des raisons de l'usage du livre en France — il devient le signal d’une nécessité pratique découlant de la généralisation des Belles Lettres : rendre les ouvrages de cette nature aisément disponibles, accessibles, et transportables hors des bibliothèques. Dans le secteur des dictionnaires, l'événement est d'importance. À partir de ses premières occurrences au milieu du siècle précédent, avec la publication en 1750 du Manuel lexique ou dictionnaire portatif en deux volumes in-8° de l'Abbé Prévost, suivi, en 1752 du Dictionnaire portatif des beaux-arts de J. Lacombe, la fortune de cette configuration ne se démentira jamais plus. Entre la fin du XVIIIe siècle et le milieu du XIXe, on relève ainsi toute une floraison d'objets de tous genres et tous types; on pourrait encore ajouter à cet ensemble les Abrégés, dictionnaires de poche, etc., qui dénotent un identique souci. Depuis les retirages et contrefaçons dont le dictionnaire de l'Académie française a été l'objet à la suite de l'édition de 1762, c'est même ici manière courante de faire admettre l'injection de nécessités mercantiles dans l'ensemble plus abstrait des réflexions sur la langue préalables à la rédaction d'un dictionnaire. Si Boiste revendique l'autorité du Dictionnaire de l'Académie françoise, c'est précisément dans l'édition de 1778, c'est-à-dire dans une édition parallèle publiée à Nîmes par Pierre Beaume, qui se fait un honneur d'avoir procédé lui-même à semblable modification de format à la suite d'un modèle lyonnais de 1772.

Modifier le format revient à modifier la forme et modifier la forme implique de modifier aussi le contenu. Nous sommes là devant une succession de contraintes gigognes qui font de l'épithète portatif un prédicat beaucoup plus important qu'il n’y paraît, et dont P. C. V. Boiste entend tirer tout le bénéfice. En proposant un dictionnaire simultanément portatif et exhaustif, l'auteur affronte ainsi un problème comparable à celui de la quadrature du cercle.

Les techniques de composition, de rédaction et de typographie mises en oeuvre pour parvenir à ce résultat : abréviations [24], sigles et symboles, etc., sont d’une grande diversité, et d’une indéniable ingéniosité. Mais la lisibilité difficile de ces ouvrages expose cruellement aujourd'hui les impossibles contraintes que rencontra le lexicographe, car, bien souvent, la référenciation précise et exacte des documents allégués comme témoins ou comme preuves demeure approximative sinon impossible. Que dire de la mention T., renvoyant au Dictionnaire Universel François & Latin dit de Trévoux, en l’absence de toute précision puisqu’entre 1704 et 1771 cet ouvrage connut six éditions officielles, indépendamment de contrefaçons avérées, et subit lui-même de profondes mutations [25].

Nodier dans la préface qu'il donna en 1834 à la huitième édition du Boiste, dénonça d’ailleurs les effets de tels artifices :

Les lecteurs exigeants qui veulent savoir la juste part qu’un éditeur a prise à une publication, me demanderont probablement de quel signe mes corrections et mes additions sont marquées. Je ne pouvais plus y pourvoir par une figure supplémentaire aux astérisques (*) et aux croix (U ) de M. Boiste, qui donnent aux anciennes éditions l’aspect trop bien justifié peut-être du cimetière de la langue, et que l’habile typographe a sagement supprimées, si ce n’est à une lettre (H) où la croix (U ) est de convention pour marquer les voyelles aspirées.

3. 2. de la forme « dictionnairique »

La configuration générale du dispositif notionnel et épistémique souhaité par Boiste, qu'illustrent d'ailleurs fort explicitement les pages de titre des premières éditions de son Dictionnaire Universel, montre qu’il s'agit là d'une ambitieuse machine, puisque, outre les considérations précédemment exposées, l'auteur affirme renfermer dans son ouvrage :

un extrait comparatif, une concordance critique et un supplément des principaux dictionnaires publiés jusqu'alors, pour lesquels il revendique d'avoir intercalé des exemples, inventé, refait ou complété des définitions jugées insatisfaisantes. Cette section de la réclame de l'ouvrage est indéniablement l'une des plus développées : Boiste tient à en faire l'une de ses supériorités.

En revendiquant d'être aussi un manuel de néologie, Boiste entend — dès la première édition — délimiter son territoire face aux entreprises concurrentes des grammairiens idéologues à la terminologie proliférante, et des écrivains eux-mêmes qui, tel Louis-Sébastien Mercier, voulaient libérer la langue française de ses corsets et de ses entraves en enflammant l'imagination créatrice des locuteurs.

Un dictionnaire de synonymes. Ce qui n'est pas tâche aisée… car le débat ambiant reste celui qui oppose abondance et pertinence des unités lexicales, comme c'était déjà le cas dès 1736 avec l'Abbé Girard.

Un dictionnaire abrégé des difficultés de la langue, pour lequel il s'appuie sur les autorités les plus reconnues de son époque, sans qu’il soit réellement possible cependant d’identifier avec précision les sources alléguées, en l’absence de renseignements précis concernant la bibliothèque de Boiste. La lecture des propos du lexicographe donne encore l'occasion de mesurer la complexité d'une époque dans laquelle la langue connaît de drastiques mutations, toujours plus faciles à évoquer qu’à analyser en profondeur :

La concordance des mots ne suffisant pas pour offrir le système grammatical de la Langue française, l’Auteur a composé un DICTIONNAIRE DES DIFFICULTÉS pour la rédaction duquel il a consulté les grammaires et les ouvrages les plus estimés, sans cependant multiplier indiscrètement ces difficultés, en adoptant les systèmes des novateurs. Il n’ignorait pas que cette dénomination était incorrecte, mais elle lui parut plus claire que toute autre, et probablement elle avait son mérite, puisqu’elle lui fut dérobée depuis avec la seule addition des mots plus qu’inutiles, raisonnées, grammaticales et littéraires. Il a de plus annexé à l’ouvrage un ABRÉGÉ DE GRAMMAIRE EN TABLEAU, recueilli dans le Cours public de M. BLONDIN, professeur très-estimé. Il a joint au Dictionnaire l’abrégé du TRAITÉ DES TROPES de DUMARSAIS, les TRAITÉS DES CONJUGAISONS de RESTAUT et de WAILLY, un autre de PONCTUATION ET DE L’USAGE DES LETTRES CAPITALES.

Se mettent ici en place les champs d’études principaux que la grammaire illustre au XIXe siècle dans sa volonté de réduire les difficultés du système de la langue. Sous l'égide des autorités en vogue, qu'elles relèvent de la période post-révolutionnaire [Blondin] ou de l'ancien régime [Dumarsais, Restaut], éventuellement prolongé [de Wailly], se lient les divers intérêts mentionnés ci-dessus, désormais soumis à un principe explicite de fonctionnalité qui embrasse la langue dans toute l'étendue de ses formes et de ses registres, puisque le lexicographe entend adjoindre à son œuvre :

Un dictionnaire de versification qui spécifie les règles combinatoires propres au discours poétique, dans un esprit comparable à celui des ouvrages de Daire, Varinot, Carpentier ou de Planche [26].

Un manuel d'orthographe et de prononciation, fidèle dans l'ensemble aux prescriptions de l'Académie, car une graphie normée et une prononciation correcte sont les derniers objets par lesquels s'achève l'instruction du citoyen et deviennent les signes de sa parfaite intégration au corps social. Le Dictionnaire Universel se veut aussi un dictionnaire consensuel. Et enfin,

Un ensemble de dictionnaires particuliers qui achèvent de donner aux étrangers la compétence et la maîtrise du français, parmi lesquels figurent des ouvrages consacrés aux Paronymes- Homonymes, à l'Étymologie, à la Mythologie, Biographie, Géographie, ainsi qu'à l'Histoire naturelle.

Ce dispositif fort complexe rend délicate la lecture du Dictionnaire Universel; Boiste, qui en est conscient, a cherché à atténuer cette difficulté en rédigeant — selon un principe taxonomique bien connu de l'Idéologie — une table des matières permettant de croiser les divers ordres d'informations. Mais, compte tenu de l’ergonomie malaisée de l’ensemble, ce complément nécessaire révèle vite son insuffisance, et c'est pourquoi Boiste vieillissant est obligé de recourir aux services de l'impétueux, du fantasque et de l’entreprenant Nodier.

3. 3. Du dessein du dictionnariste :

En faisant miroiter aux yeux des lecteurs tout l'avantage d'une telle machine sémiotique, Boiste résumait son quintuple dessein :

a) philosophique et idéologique :

Il est facile de reconnaître que son plan l’attache essentiellement à la Langue française, dont il est comme le DEPÔT ou le TRÉSOR : il en offre les richesses à ses quatre âges les plus remarquables; il doit la suivre dans toutes ses périodes, s’enrichir sans cesse avec elle de toutes les expressions, locutions, concordances de mots créés par les Arts, les Sciences ou le Génie : loin de se laisser appauvrir, comme elle, par l’Usage, il doit, au contraire, conserver pour l’avenir, ainsi qu’il a recueilli du passé, toutes les richesses dont cet Usage, tyran des langues, la dépouille : il peut même survivre à cette Langue comme langue vivante : il doit également suivre l’Esprit humain dans sa démarche progressive; s’enrichir avec lui de toutes les créations partielles et successives des Arts, des Sciences, et surtout de la Métaphysique, en recueillant les expressions, les définitions créées par le Génie qui les cultivera; il doit épargner aux Savants futurs les amers regrets que cause à nos savants la privation de Dictionnaires faits sous le siècle de Périclès ou d’Auguste; et si, dans l’immense révolution des siècles à venir, des conquérants barbares pouvaient encore renverser l’édifice social, reconstruit par la Force et le Génie, s’ils brûlaient les bibliothèques, un seul exemplaire échappé aux flammes offrirait à ceux qui auraient la tradition orale de la Langue française, la table raisonnée des matières des connaissances humaines, telles qu’elles étaient dans le siècle où il a été publié.

b) épistémique :

Si le Lecteur, si le Critique même le plus sévère veut considérer que cet Ouvrage doit offrir la plus grande utilité dans le moindre espace possible en donnant l’Extrait comparatif, la Concordance et le Supplément des Dictionnaires, sans être la copie ni l’imitation d’aucun d’eux; qu’il est fait sur un plan entièrement neuf, selon un mode d’exécution également nouveau, avec une méthode toujours régulièrement suivie, à l’aide d’une diction particulière et analytique, dans une langue lexicographique créée pour l’Ouvrage et dont le mécanisme a permis de donner, dans un seul volume, le résultat de l’amalgame et de leur réduction à leur plus simple expression de matériaux immenses, auparavant épars et oubliés dans les bibliothèques, s’ils veulent penser à l’attention minutieuse et toujours soutenue, à la scrupuleuse régularité, au choix guidé par le Goût et la Critique, à la réflexion, à la méditation même nécessaires pour la rédaction de cet Ouvrage, ils auront quelque indulgence pour ces fautes. Qu’ils veulent bien observer que le corps du Dictionnaire seul se compose de près de soixante mille articles, dont aucun, pris isolément, formé de la réunion de choses éparses dans plusieurs livres, et donnant en substance plus qu’aucun autre Dictionnaire, devrait être un chef-d’oeuvre, pour que l’ensemble fût parfait : qu’ils considèrent que cet Ouvrage renferme non comme extrait, mais matériellement et dans son texte, autant que trente volumes in-8°, et qu’il a été écrit en entier de la main de l’Auteur qui en a fait, dans la retraite, sa principale occupation, comme il a fait son état, pour ainsi dire, de la Lexicographie, car le perfectionnement indéfini dont ce Dictionnaire est essentiellement susceptible par son plan et le mode particulier de son exécution, exige de son Auteur un travail continuel pour remplir son cadre illimité, en recueillant tout ce dont la Langue ou les Sciences peuvent l’enrichir : que ce Lecteur et ce Critique observent enfin que cet Ouvrage est de la nature de ceux qui furent exécutés par des associations de Religieux garantis par leur situation, leurs goûts et même leur caractère, de tout sujet de distraction, uniquement occupés de l’objet de leur travail, qui l’était aussi de leur goût particulier, et pourvus abondamment de tous les moyens de succès.

c) lexicologique et philanthropique :

L’Éditeur ose donc espérer que le Public continuera d’accueillir favorablement ce Dictionnaire, et de le regarder non seulement comme le MANUEL DE LA LANGUE FRANÇAISE, dont il offre la substance modifiée par le temps et l’usage, par les Arts, les Sciences, etc., mais encore comme une véritable ENCYCLOPÉDIE PORTATIVE, utile à tous les Français, nécessaire à tous les Étrangers que le goût de la Littérature et des Beaux-Arts, ou les relations sociales et politiques, déterminent à apprendre la Langue française qu’il contribue à rendre universelle, du moins en Europe.

Derrière ce discours et ses circonlocutions, s’affirme l’idée que le dictionnaire total est par essence même universel ; que le dictionnaire universel est par nécessitétotal…. Lecteur curieux de telles déclarations, on peut comprendre que Nodier ait été captivé par la circularité de cette argumentation, dans laquelle il enfermait — peut-être avec quelque ironie — le contenu même du terme de « pertinacité » dont il caractérisait non sans ambiguïté l’entreprise de Boiste. En effet, derrière la séduction subsistaient ses irréductibles préventions générales à l'égard des dictionnaires, comme en témoignent, par exemple, certains fragments de l’article du Journal des Débats du 10 avril 1819 :

Les deux volumes de M. Boiste sont donc l’Encyclopédie de la langue et un des ouvrages les plus utiles qu’on ait jamais publiés en français. Ils peuvent même tenir lieu de bibliothèque entière aux gens du monde et aux gens de lettres dont l’érudition ne se compose que de mots, et c’est garantir à cette cinquième édition un débit qui rendra bientôt la sixième indispensable… J’ai dit et je persiste à dire que ce Dictionnaire est un ouvrage inappréciable, et qu’il n'est pas difficile de réparer ce qu’il a de défectueux….

On connaît bien désormais ce caractère spécifique des grandes entreprises trans-historiques, qui, à travers éditions et rééditions, exposent les travaux lexicographiques au syndrome de Pénélope… Un ouvrage, matériellement achevé mais jamais totalement fini pour l’esprit, se voit incessamment remis sur le chantier par un ou plusieurs rédacteurs en charge directe ou indirecte d'exécution testamentaire… afin de demeurer adéquat aux transformations de la langue et de la société. Furetière eut son Basnage de Beauval puis la première édition du Dictionnaire Universel François & Latin (1704), Richelet eut son de Wailly, les Académiciens eurent leurs dignes ou indignes successeurs, et furent parfois aussi leurs propres réviseurs, sous la contrainte des concurrences apparemment déloyales de leurs contrefacteurs … En s'élevant au-dessus du Dictionnaire Universel de Boiste dès 1819, grâce à l'article critique publié dans le Journal des Débats, Nodier revendique ainsi une maîtrise qui ne saurait être ni aisément ni spontanément attribuée à un journaliste… Afin que ce feuilliste puisse exciper des qualités supposées caractériser un dictionnariste savant ou un érudit désireux de réviser le Dictionnaire Universel, il lui faut faire ses gammes : ce seront les prospectus et préfaces rédigés pour les dictionnaires de Gattel [1813], Raoul-Rochette [1819], Verger [1823, 1826], Trapany et Rosily [1826] … Ce seront les deux éditions successives de l’Examen critique des dictionnaires françois (Paris : 1828, 1829) [27].

Le fruit de ce travail est publié en 1834 comme huitième édition de cet ouvrage. L'édition ultérieure de 1839 fera paraître le nom d'un des acolytes de Nodier dans cette longue et patiente tâche, le fidèle comparse qui — la même année — devait également signer le Complément du Dictionnaire de l'Académie française, l'obligeant Louis Barré…

3. 4. De l’empreinte du réviseur :

Dans le texte de la préface rédigée pour la circonstance, aux allures évidentes de manifeste, Nodier reprend habilement, et parfois mot pour mot, phrase pour phrase, la revendication d'un dictionnaire idéal qu'il venait juste de formuler dans le feuilleton critique publié le 15 novembre 1832 par Le Temps; texte dans lequel le dessein d'une nomenclature complète se trouvait soutenu par le désir de voir conniver l'ensemble des institutions chargées d'officialiser l'usage du français :

Le Dictionnaire dont je parle, vous l’auriez depuis longtemps si la Providence ne soufflait pas à des temps marqués sur les espérances des peuples, comme sur des châteaux de cartes dressés par un enfant imprévoyant et insoucieux. L’organisation de l’Institut, comprise dans un moment de loisir par le génie de Bonaparte, vainqueur et reposé, aurait pourvu sans effort à ce monument immortel, le plus grand que la civilisation eût jamais élevé. Chacune des quatre sections y aurait apporté son tribut : l’Académie française, sa grammaire, sa littérature, ses autorités classiques devenues les lois de la parole ; les sciences, leurs langues techniques authentiquées par une commission un peu experte en science verbale ; les inscriptions et belles-lettres, leur archæologie européenne et exotique, et surtout leurs traditions et leur philologie du Moyen Âge, si elles s’en occupent ; les beaux-arts eux-mêmes, une nomenclature brillante qui aboutit toujours à s’introduire et à se figurer dans le langage ; et il résulterait de cette opération simultanée une notion dont j’ai peur que les générations à venir ne se fassent pas une idée bien claire : c’est que les académies étaient bonnes à quelque chose. — Toute société formée pour la progression intellectuelle du genre humain qui ne s’est pas assurée de son vocabulaire n’a pas encore compris sa destination. —

Or cette revendication ne saurait être anodine dès lors que les critiques de l'écrivain à l'endroit du lexicographe s'attachent autant à la philosophie générale du projet qu'aux éléments particuliers de sa réalisation. En dépit de ce que Nodier se flatte d'avoir réalisé, l’important n'est plus le développement quantitatif de la terminologie mais l'illustration des valeurs liées aux usages et aux emplois des éléments de la nomenclature :

J’ai ajouté les mots, les acceptions, les exemples spéciaux et significatifs que je savais, et que je n’avais encore donnés, par hasard, ni à Boiste, ni au public.

J’ai augmenté la partie intéressante des étymologies; pas assez, peut-être, mais autant qu’elles se présentaient lucides et incontestables. Une étymologie qui peut être contestée n’est pas matière de Dictionnaire. Elle est matière de dissertation. Deux pages sont trop peu pour une étymologie intéressante et utile dans un mémoire académique. Deux lignes sont trop dans un glossaire. […] Quand nous ne parlerons qu’un grec mal orthographié, gâté par des terminaisons hibrides [sic], nous commencerons à savoir la langue scientifique, et nous ne saurons plus le français.

Je n’ai donc pas cru devoir augmenter beaucoup sous ce rapport les richesses lexicologiques de M. Boiste, mais je n’y ai retranché que ce qui était redondant ou évidemment vicieux; et il est impossible de ne pas tomber dans l’un ou l’autre de ces défauts, quand on s’est condamné à faire un Dictionnaire, ou à le revoir. Le vice de son travail est donc l’excès, et je n’ai pas eu le droit de le dépouiller, je le répète, de ce luxe intarissable de mots auquel son succès doit peut-être quelque chose.

Le nouvel éditeur revient donc pratiquement sur chacun des points qui avaient fait la notoriété du Boiste pour en relativiser la valeur. Mais il en est sur lequel Nodier tient à s'attarder plus longuement. La question de l'exemplification littéraire des valeurs de sens, par exemple, car cette pratique renvoie à une fonction de la lexicographie qui, pour connexe et subalterne qu'elle paraisse d'abord, se révèle vite fondamentale : la double assignation éthique et esthétique accompagnant la standardisation didactique de la langue.

Est-il nécessaire d’insister ? On se rappelle les propos que Girault-Duvivier énonçait dès 1811 dans la Préface de la Grammaire des Grammaires [28]. On connaît peut-être moins les propos tenus quelque vingt ans plus tard par deux des successeurs de Boiste, qui se posèrent eux-mêmes comme les modèles du lexicographe et du grammairien national, à savoir les frères Bescherelle, qui n’hésitaient pas à déclarer à ce sujet

C'est une vérité maintenant incontestable que la véritable grammaire est dans les écrits des bons auteurs. La science grammaticale se borne à l'observation et à l'appréciation des termes, des règles de concordance, des constructions adoptées par les grands écrivains. C'est dans leurs ouvrages qu'il faut chercher le code de la langue. En effet, où trouver mieux que dans ces régulateurs avoués du langage des solutions à tous les problèmes, des éclaircissements à toutes les difficultés, des exemples pour toutes les explications [...]? Mais la tâche n'est pas facile à remplir. Un auteur, quelle que soit sa supériorité, ne fait pas autorité à lui seul; il faut donc compulser tous les chefs d'oeuvre de notre littérature, réunir une masse imposante de faits, et n'admettre que ceux qui ont été consacrés par l'emploi le plus général. Cet immense travail se complique encore de la difficulté de choisir des pensées intéressantes sous le rapport de la morale, de la religion, de l'histoire, des sciences, des lettres et des arts; or on conçoit tout ce qu'offrirait de fastidieux un amas de ces phrases triviales dont fourmillent nos grammaires. L'éducation, d'ailleurs, est inséparable de l'enseignement, et il faut, autant que possible, élever l'âme et former le jugement. Sous ce point de vue, rien de plus consciencieux que notre travail. Les cent mille phrases qui constituent notre répertoire grammatical sont tirées de nos meilleurs écrivains; elles sont choisies avec goût; il n'en est pas une qui ne révèle à l'esprit ou une pensée morale, ou un fait historique, scientifique, littéraire ou artistique [...]. Ajoutez à ce premier avantage tout le charme que prête à l'étude jusqu'alors si aride de la grammaire l'étude même des faits, si supérieure à la vieille routine qui s'obstine à renverser l'ordre naturel en procédant des théories aux exemples. Envisagée de cette façon, il nous semble que la grammaire n'est plus seulement un exercice de collège sur lequel s'assoupit la mémoire; c'est l'histoire de la pensée elle-même, étudiée dans son mécanisme intérieur; c'est le développement du caractère national dans ses intérêts politiques et ses sentiments religieux, analysé ou plutôt raconté par la nation elle-même, par les interprètes les plus éloquents de cette nation [29] .

Grammaire ou dictionnaire, lexique ou combinatoires morpho-syntaxiques, éthique et pragmatique, esthétique et politique, même combat ! Ou, comme le disait déjà Boiste en conclusion de son Avis indispensable sur l’usage et l’utilité de ce dictionnaire pour les personnes qui parlent, lisent ou écrivent le français :

C’est à ce but [de généralisation universelle de la langue française] que l’Auteur aspirait et comme Européen et comme Français : il n’a pu être soutenu dans ses longs et fastidieux travaux que par la certitude d’être utile; il l’a voulu être non-seulement en facilitant l’étude de cette Langue, mais encore en contribuant à former l’esprit et même le cœur de ceux qui voudront faire une étude particulière de son Dictionnaire; car on peut assurer avec confiance que celui qui s’occupera de cette étude, acquerra non-seulement la connaissance de la langue, une grande facilité de s’exprimer, et des notions que des travaux plus suivis pourront développer, mais encore l’habitude si importante de définir avant de juger ou de raisonner; et, de plus, une juste idée des choses qu’il lui importe de connaître sous les rapports de ses besoins, de ses devoirs et de son bonheur.

Un tel encomiasme irénique ne saurait s’énoncer que sur la base d’une foi inaliénable en la puissance du langage maîtrisé par l’intelligence et la morale. C'est ici que nous retrouvons comme l'écho d'une pavane pour une lexicographie défunte… Les dictionnaires de l’avenir, tant avec Bescherelle, qu’avec Poitevin, tant avec Littré qu’avec Larousse, tant avec Dupiney de Vorepierre ou Lachâtre qu’avec Hatzfeld, Darmesteter et Thomas, se donneront des objectifs bien différents, même si, au fond, en chacun d’eux subsistent les formes d’un éternel lexicographique, comparable à l’éternel grammairien que mettait naguère en évidence Alain Berrendonner [30]. Mais c’est là une autre histoire !

 

Conclusion :

Le travail de révision du Dictionnaire Universel de Boiste auquel se livre Nodier est l’œuvre d’un maître de la plume lui-même nostalgique des valeurs du passé. Dans le feuilleton du Temps du 8 novembre 1834, à propos de ses Notions Élémentaires de Linguistique critiquées par le Baron d'Eckstein, Nodier n'écrivait-il pas en ce sens :

Si on avoit suivi d’un regard attentif la direction de mon esprit (mais à quel propos s’en seroit-on occupé ?) on sauroit que j’ai porté le même scrupule, le même instinct de défiance et de timidité dans toutes les questions scientifiques à l’examen desquelles je me trouvois appelé par mon goût et par mes études ; on m’accorderoit de n’avoir jamais dérogé à l’opposition consciencieuse, et si l’on veut, systématique et paradoxale, dans laquelle je me suis retranché contre toutes les théories de progrès qui m’ont paru abusives et menteuses ; on ne me reprocheroit point d’être resté en arrière avec les découvertes, quand j’use depuis trente ans un filet de voix inentendue à proclamer, selon ma pensée, que toute découverte nouvelle nous entraîne d’un pas de plus vers l’abyme où toutes les civilisations vont mourir.

Transposons ces remarques et appliquons-les à l'esprit qui a présidé à la révision de la huitième édition du Dictionnaire Universel de Boiste. Le déni d'une modernité ennemie des principes de la morale utilitaire du XIXe siècle y est constant. Que la totalité et le grand Pan dont se réclame la nouvelle édition se pare désormais des couleurs irisées d’un paon avantageux, ou trouve quelque harmonie dans les échos d’une flûte quelque peu faunesque par ses façons de jouer de la séduction, il n’en reste pas moins que ce travail de refonte a profondément marqué son époque. Le Pan pavane alors mélancoliquement, fièrement, imperturbablement.

Entre les sanglantes remises en question politiques, sociales, linguistiques de la période révolutionnaire et le second Empire, pétrifié dans le bronze de ses canons et le marbre de ses certitudes, entre le rouge et le noir, dans l'interrogation éthique sur le sens de toutes les révolutions du monde et du langage, des choses et du savoir, il y avait alors place pour une transformation progressive du lexique et une métamorphose du geste lexicographique.

Nostalgie d'un passé où les mots et les choses pouvaient concorder… regret de fabriquer des illusions avec les mots et des utopies avec les discours… Il est impossible de séparer le projet de Boiste poursuivi par Nodier de ses éléments circonstants, et notamment, de cette visée morale, sinon moralisatrice, qu'exposait si bien l'Avis sur la cinquième édition de 1819 (augmentée de 560 pages). On pouvait déjà lire en ces lignes la dénonciation des outrances factuelles, idéologiques et verbales d'une époque désormais révolue:

Nous sommes conduits naturellement au point de vue moral sous lequel on doit considérer cette COLLECTION de MAXIMES et de PENSÉES qui forme comme un second ouvrage incorporé dans le Dictionnaire. Pour en faire d’abord connaître tout le prix, nous citerons trois pensées seulement :

La morale, présentée par Pensées détachées, a plus d’énergie. SÉNÈQUE.

Des Maximes morales éparses et sans suite font plus d’effet sur le cœur. F. BACON.

Les Pensées morales sont des clous d’airain qui s’enfoncent dans l’âme et qu’on n’en arrache point. DIDEROT.

Nous ajouterons qu’il suffit d’ouvrir ce livre, de lire quelques exemples, pour reconnaître qu’il est un grand nombre de ces MAXIMES, de ces PENSÉES dont le souvenir ou l’oubli peut avoir l’influence la plus heureuse ou la plus funeste sur les destinées, non pas seulement du Lecteur ou de quelques individus, mais même des peuples. Elles portent la plupart sur les objets les plus importants à l’humanité, sur la religion, la politique, la littérature, les beaux-arts et la morale dont elles offrent un Cours rédigé en MAXIMES, fruit de l’expérience des siècles.

Le projet de concourir à l'amélioration du bien-être de l'homme par l'inculcation de sentences morales adaptées à toutes les circonstances se fait ici jour sans la moindre réticence d'énonciation. L'issue s'impose alors d'elle-même : le dictionnaire universel est devenu le viatique dont l'humanité doit se munir pour affronter la traversée de l'existence :

Cet ouvrage est plus particulièrement encore offert aux malheureux [31]! puissent-ils, à sa lecture y trouver quelques distractions, quelques consolations, et s’y pénétrer de la résignation philosophique ou religieuse, inappréciable vertu qui nous apprend l’art si difficile de vivre heureux ou plutôt le moins malheureux possible ! et, si l’Auteur peut y réussir, s’il inspire à quelques jeunes gens l’amour de Dieu, de la Vertu, de la Patrie; s’il en arrête d’autres dans la carrière qui les conduit au malheur, il sera récompensé des sacrifices de temps, d’argent et même de sa santé, qu’il a faits pour donner à son ouvrage le plus grand degré d’utilité possible en mettant l’instruction et le bon sens dans les mains de tout le monde; en offrant à ceux qui ont tout lu, l’analyse, le résumé de leurs lectures, par la réunion de l’universalité des choses accompagnées des pensées saillantes qu’elles font naître dans l’esprit des grands Écrivains, des Philosophes et des Savants; réunion qui fait du Dictionnaire un MANUEL ENCYCLOPÉDIQUE et MORAL que tout homme qui sait lire et réfléchir doit avoir près de lui, pour en nourrir son esprit toujours avide, lorsque nul autre objet ne lui offre un aliment.

Enfin cet ouvrage, poétiquement parlant, transporte le Lecteur aux Champs Elyséens; il s’y voit entouré de Sages de tous les pays, ils lui soumettent leurs pensées : son esprit se développe, ses principes se raffermissent, son ame s’épure dans leur entretien; il en sort et meilleur et plus heureux.

Il ne fallait probablement pas moins de quinze éditions du Boiste pour atteindre à ces champs élyséens et pour parvenir à raisonner le pan…tagruélisme politique et moral de son auteur et de ses réviseurs !… Pour accréditer les perverses vertus du cliché, des idées reçues, des lieux communs et du panurgisme de la pensée…

Replaçons pour finir l’ambition universaliste au sein de l’histoire des concurrences de la lexicographie française. De 1694 à 1877-78, jamais la série du Dictionnaire de l’Académie française ne fait interférer les termes et notions de dictionnaire et d’universel. L’Encyclopédie de d’Alembert et de Diderot, pour sa part, prend bien soin d’élaborer une typologie qui tient à l’écart cette notion d’universel, comme si cette dernière traînait derrière elle — en pleines Lumières… — toute l’infamie des querelles de la scolastique médiévale :

On peut distinguer trois sortes de dictionnaires ; dictionnaires de langues, dictionnaires historiques, & dictionnaires de Sciences & d'Arts : division qu'on pourroit présenter sous un point de vûe plus général, en cette sorte ; dictionnaires de mots, dictionnaires de faits, & dictionnaires de choses : néanmoins nous retiendrons la premiere division, parce qu'elle nous paroît plus commode & même plus précise.

En effet, un dictionnaire de langues, qui paroît n'être qu'un dictionnaire de mots, doit être souvent un dictionnaire de choses quand il est bien fait : c'est alors un ouvrage très-philosophique. Voyez GRAMMAIRE.

Un dictionnaire de Science ne peut & ne doit être qu'un dictionnaire de faits, toutes les fois que les causes nous sont inconnues, c'est-à-dire presque toûjours. Voyez PHYSIQUE, METAPHYSIQUE, &c. Enfin un dictionnaire historique fait par un philosophe, sera souvent un dictionnaire de choses : fait par un écrivain ordinaire, par un compilateur de Mémoires & de dates, il ne sera guere qu'un dictionnaire de mots.

Quoi qu'il en soit, nous diviserons cet article en trois parties, relatives à la division que nous adoptons pour les différentes especes de dictionnaires.

DICTIONNAIRE DE LANGUES. On appelle ainsi un dictionnaire destiné à expliquer les mots les plus usuels & les plus ordinaires d'une langue ; il est distingué du dictionnaire historique, en ce qu'il exclut les faits, les noms propres de lieux, de personnes, &c. & il est distingué du dictionnaire de Sciences, en ce qu'il exclut les termes de Sciences trop peu connus & familiers aux seuls savans.

Le projet très catholique inscrit dans la tradition des Boyer, Rochefort et autres Furetière se voit ainsi mis historiquement entre parenthèses et occulté par les philosophes comme étant sans intérêt ni avenir dans la perspective d’une saine philosophie du langage. C’est au motif de ce défaut essentiel d’intelligibilité et de compréhensibilité que Guizot, reprenant Condillac et Beauzée en 1808, condamnait la notion dans son Dictionnaire des synonymes, au profit de la clause du général sur laquelle seule peut se fonder une épistémologie digne de ce nom :

Le général, selon le dictionnaire de l'Académie, est commun à un très grand nombre : l'universel s'étend à tout. Ainsi, l'autorité de cette compagnie confirme les notions établies ci-dessus par l'abbé Girard.

Le général comprend la totalité en gros ; l'universel, en détail. Le premier n'est point incompatible avec des exceptions particulières ; le second les exclut absolument.

Aussi dit-on qu'il n'y a point de règle si générale qui ne souffre quelque exception : et l'on regarde comme un principe universel, une maxime dont tous les esprits, sans exception, reconnaissent la vérité dès qu'elle leur est présentée en termes clairs et précis.

C'est une opinion générale, que les femmes ne sont pas propres aux sciences et aux lettres : madame Deshoulières, madame Dacier, madame la marquise du Châtelet, madame de Grafigny, chacune dans leur genre, font une exception d'autant plus honorable pour le sexe, qu'elle prouve la possibilité de bien d'autres. C'est un principe universel, que les enfants doivent honorer leurs parents : l'intention du Créateur se manifeste sur cela en tant de manières, qu'il ne peut y avoir aucun cas de dispense.

Dans les sciences, le général est opposé au particulier ; l'universel, à l'individuel.

Ainsi, la physique générale considère les propriétés communes à tous les corps, et n'envisage les propriétés distinctives d'aucun corps particulier, que comme des faits qui confirment les vues générales : mais qui n'a étudié que la physique générale ne sait pas, à beaucoup près, la physique universelle ; les détails particuliers sont inépuisables.

De même la grammaire générale envisage les principes qui sont ou peuvent être communs à toutes les langues, et ne considère les procédés particuliers des unes ou des autres que comme des faits qui rétablissent les vues générales : mais l'idée d'une grammaire universelle est une idée chimérique ; nul homme ne peut savoir les principes particuliers de tous les idiomes ; et quand on les saurait, comment les réunirait-on en un corps ?

Un étranger toutefois traite de grammaire prétendue générale l'ouvrage que je publiai en 1767, sous les auspices de l'Académie Française ; et la raison qu'il en donne dans un coin de table, sans la prouver nulle part, c'est que, pour faire une grammaire générale, il faudrait savoir toutes les langues. Je réponds que c'est confondre le général et l'universel : qu'Arnaud et Lancelot sont les auteurs de la grammaire générale et raisonnée de Port-Royal ; que Duclos y a joint sans correctif ses remarques philosophiques ; que l'abbé Froment y a ajouté de même un bon supplément ; que Harris a donné, en anglais, des recherches philosophiques sur la grammaire générale ; que ni les uns, ni les autres ne savaient toutes les langues ; que néanmoins le public a honoré leurs écrits de son suffrage ; et que j'aime mieux être l'objet que l'auteur d'une objection qui tombe également sur des écrivains si célèbres.

La grammaire peut bien s’aligner sur la physique : le corps des règles de syntaxe renvoie à une organisation qui — par la raison — transcende la disparité des formes de construction. Mais, dans le secteur du lexique, il en va tout autrement. La prétention généralisante s’y voit sanctionnée. Guizot laissera d’ailleurs subsister cette condamnation dans l’édition de 1822 de son ouvrage, tandis que l’histoire continue d’aligner ses arguments empiriques. En 1808, le Dictionnaire universel de Boiste avait déjà huit ans d’âge, et connaissait alors sa troisième édition…. En 1822, il est à la veille de sa sixième édition [1823], et Nodier a déjà commencé à en refondre l’organisation. L’Académie française, en 1835, fait toujours silence sur cette ambition totale de la lexicographie… Il faut attendre 1863 pour que Littré reconnaisse simultanément à l’Académie que son dictionnaire de langue, par ses qualités et ses défauts, est devenu « presque universel », et que le nom de Boiste entre dans les colonnes du Dictionnaire de la langue française, en quatre volumes grand in-4°, comme indicateur d’une généralisation de l’usage particulièrement savoureuse alors :

Panlexique (pan-lè-ksi-k’), s. m.

Titre qu’on a donné au grand Dictionnaire de Boiste ; il signifie Lexique universel ou complet.

Etymologie : Du grec, tout, et lexique.

Conformément aux vœux de Boiste et de Nodier, les quinze éditions du Dictionnaire Universel sont dès lors réduites à une dénomination unique, fixée dans l’indéfinition généralisante de son intitulé!…. Voilà qui ne manque pas de jeter un jour intéressant sur les conditions de transformation des ambitions de la lexicographie française du XIXe siècle, puisque, somme toute, de l’universel de Boiste, relayé ultérieurement par Poitevin, au national de Bescherelle, puis à l’analogique de Boissière, et au logique de Blanc, une certaine forme de raison nous mène au général… entrevu dans les années 1875 et vigoureusement affirmé entre 1890 et 1900 par Hatzfeld, Darmesteter et Thomas [32] :

I. — L'ouvrage que nous présentons au public est un Dictionnaire de la langue française depuis le commencement du xviie siècle jusqu'à nos jours. Il a pour objet, non seulement de définir les mots de la langue écrite ou parlée, d'en déterminer les diverses applications, d'en indiquer le véritable emploi, mais encore de rendre compte de cet emploi et d'en expliquer l'origine. C'est un dictionnaire raisonné de l'usage, pendant trois siècles, des changements que la langue a subis durant cette période et des causes qui ont amené ces changements.

Nous avons essayé de répondre aux besoins du plus grand nombre, sans rien sacrifier de la sévérité de la science ; de composer une œuvre simple, claire et intelligible pour tous, en observant scrupuleusement les règles de la méthode historique ; car, puisque les mots naissent, se développent et se transforment dans le temps, ils ont une histoire. Cette histoire ne s'adresse pas seulement aux érudits ; elle intéresse tous ceux qui veulent connaître exactement le sens des mots qu'ils emploient. Comme on l'a fort bien dit, l'érudition est ici, non l'objet, mais l'instrument, et ce qu'elle apporte d'historique est employé à compléter l'idée de l'usage, idée ordinairement trop restreinte.

Mais suffit-il de présenter un tableau complet des formes et des acceptions successivement employées, pour faire connaître l'histoire d'un mot ? Est-ce là que se borne la méthode historique, quand il s'agit du langage, c'est-à-dire d'une matière que transforme incessamment l'activité de l'esprit ? Peut-on dire enfin, avec l'éminent auteur des lignes qu'on vient de citer, que l'usage complet a en lui sa raison, ce qui suppose qu'aucune idée supérieure ne le dirige ? Nous croyons le contraire, et c'est ce qui doit justifier le travail que nous avons entrepris.

La méthode historique ne consiste pas simplement à faire connaître les divers sens d'un mot, en partant de la signification première, de laquelle toutes les autres sont sorties. Après avoir constaté, recueilli les faits, il faut en montrer le lien et l'enchaînement. Comment ranger les divers sens dans l'ordre où ils se sont succédé, si l'on ne démêle les causes qui ont déterminé cet ordre ? Si la suite des événements politiques a sa raison d'être, les énumérer dans l'ordre chronologique, sans chercher les causes qui en ont amené la succession, c'est faire de la chronique et non de l'histoire ; de même, si le langage sert à exprimer la pensée, les mots ne sauraient passer du sens primitif aux sens dérivés et figurés sans suivre un certain ordre, qui a son explication rationnelle ; et l'on doit chercher dans les lois de la pensée la cause historique des transformations auxquelles les mots ont été soumis.

II. — Lorsqu'on embrasse les différentes acceptions d'un mot dans leur ensemble, il s'en dégage le plus souvent une notion commune qui les domine et les rattache les unes aux autres. Cette notion n'est point une conception abstraite et arbitraire ; elle a existé réellement dans l'esprit du peuple ; elle a été la raison supérieure des modifications que le sens a subies. La négliger ou l'ignorer, c'est supprimer l'élément essentiel de l'histoire du mot ; car c'est omettre le point de vue selon lequel il a été considéré d'âge en âge, c'est-à-dire le fait principal qui a déterminé, en vertu de la logique de l'esprit humain, le passage d'une signification à une autre.

Ainsi, par le détour de la sémantique que Michel Bréal forgeait à l’aide de ses connaissances de comparatiste, se réduit la double aporie de la complétude lexicologique et de l’exhaustivité lexicographique….

Tandis que le dictionnaire universel doit de plus en plus avouer ses incertitudes et faire état dans ses colonnes d’inéluctables lacunes, que le Grand Dictionnaire Universel du XIXe siècle de Pierre Larousse dissimulera sous l’ironie, la critique, l’engagement et les sarcasmes, le dictionnaire général peut bien ambitieusement revendiquer le sens objectivé d’une totalité raisonnée qui épuise en discours l’ordre des constituants physiques et idéologiques… de l’univers.

 

ANNEXES DOCUMENTAIRES :

PAGES DE TITRES DES ÉDITIONS DE :

1808 (a), 1834 (b), 1839 (c)

1821 (d)

(a)

DICTIONNAIRE UNIVERSEL

DE LA LANGUE FRANÇOISE, AVEC LE LATIN;

MANUEL

DE GRAMMAIRE, D'ORTHOGRAPHE ET DE NÉOLOGIE,

EXTRAIT COMPARATIF DES DICTIONNAIRES PUBLIÉS JUSQU'A CE JOUR;

 

Contenant, 1° La nomenclature et l'Extrait du Dictionnaire de l'Académie Françoise, édition de 1778, sans citation; édition de 1798 (an 6), de 1803 (an 11), avec citation; ses Définitions, Acceptions et Locutions; la différence des Styles; l'accord des Substantifs et des Adjectifs; celui des Verbes avec les prépositions, etc.; les renvois aux Dictionnaires des Difficultés de la Langue, des Synonymes et au Tableau grammatical, ajoutés à cet Ouvrage; ce qui supplée aux exemples de l'Académie :

2° L'Extrait, avec citation, des Dictionnaires de Trévoux, Ferraud, et de tous les autres Dictionnaires françois, anciens ou modernes, françois et étrangers, pour les Additions de mots et de définitions, les Corrections faites au Dictionnaire de l'Académie, les Variantes d'Orthographe, la Prononciation et l'Etymologie dans les cas difficiles;

3° Des Mots, des Locutions, des Acceptions et des Définitions omises dans ces Dictionnaires, et recueillies, avec citation, dans les Auteurs les plus estimés, françois, anciens et étrangers :

4° L'Extrait des Dictionnaires de Néologie, des deux Encyclopédies Alphabétiques et Méthodiques, des Dictionnaires et Traités élémentaires des Sciences, Arts, Commerce, Coutumes, Manufactures, Métiers, etc.

5° Des Dictionnaires particuliers des Rimes, des Synonymes ou Acceptions, des Difficultés de la Langue, des Homonymes, de Mythologie, des Personnes remarquables, de Géographie ancienne et moderne; des Traités de versification, de Ponctuation, etc., de Conjugaisons des Verbes, et un Abrégé de Grammaire.

 

Ouvrage classique, adopté pour les bibliothèques des Lycées, offrant, en abrégé, l'exécution des plans de dictionnaires tracés

Par d'Alembert, Fénélon, etc., et pouvant tenir lieu des dictionnaires dont il est l'Extrait et le Supplément.

 

Par P. C. V. Boiste.

Le premier livre d'une nation est le dictionnaire de sa langue. Volney

Troisième Édition, augmentée d'un tiers

A Paris, chez l'Auteur, rue Hautefeuille, n° 30

1808

(b)

 

DICTIONNAIRE UNIVERSEL

DE LA LANGUE FRANÇAISE, AVEC LE LATIN ET LES ÉTYMOLOGIES

EXTRAIT COMPARATIF, CONCORDANCE, CRITIQUE ET SUPPLÉMENT DE TOUS LES DICTIONNAIRES FRANÇAIS

MANUEL ENCYCLOPÉDIQUE

DE GRAMMAIRE, D’ORTHOGRAPHE, DE VIEUX LANGAGE, DE NÉOLOGIE,

Contenant : 1° l’Analyse, la Comparaison et la Critique des éditions du Dictionnaire de l’ACADÉMIE, de ceux de FURETIÈRE, TRÉVOUX, FERRAUD, GATTEL, WAILLY, etc; leurs Nomenclatures, l’Extrait de leurs Définitions, les Acceptions, les Locutions nobles, familières ou PROVERBIALES; les Proverbes; la CONCORDANCE GRAMMATICALE ou RÉGIME des mots, l’indication de leur emploi, selon l’usage et les STYLES noble, poétique, figuré, familier, populaire, marotique, épistolaire; et la PRONONCIATION figurée;

2° Les Variantes de DÉFINITIONS, d’ACCEPTIONS, d’ORTHOGRAPHE de ces DICTIONNAIRES;

3° Les Mots anciens ou nouveaux, les DÉFINITIONS, les ACCEPTIONS et les ALLIANCES de mots, omis par ces DICTIONNAIRES, et recueillis dans les Écrivains français les plus estimés;

4° Les TERMES propres aux Sciences, Arts, Manufactures, Métiers, etc., etc., et les Définitions extraites, des DICTIONNAIRES ou Traités particuliers :

5° Les MOTS du vieux langage, nécessaires pour l’intelligence des anciens Auteurs, depuis J. DE MEUN jusqu’à LA FONTAINE;

6° Les MOTS créés par la NÉOLOGIE et le NÉOLOGISME, pour l’intelligence des Auteurs nouveaux et des Journaux, etc., qui les emploient :

7° Les ÉTYMOLOGIES grecques, latines, arabes, celtiques, etc., etc;

8° L’Extrait et la Critique des nouveaux DICTIONNAIRES;

9° De nouveaux Exemples de Phrases formant une collection de Maximes et de PensÉes des meilleurs auteurs;

suivi

10° De DICTIONNAIRES, 1° des SYNONYMES, 2° des DIFFICULTÉS DE LA LANGUE, résolues par les bons grammairiens, 3° des RIMES, 4° des HOMONYMES, 5° des PARONYMES;

11° De TRAITÉS, 1° de VERSIFICATION, 2° de TROPES, 3° de PONCTUATION, 4° des CONJUGAISONS, 5° de PRONONCIATION :

12° De VOCABULAIRES, 1° de MYTHOLOGIE avec l’Étymologie grecque, 2° des PERSONNAGES REMARQUABLES, 3° de GÉOGRAPHIE ANCIENNE ET MODERNE selon la nouvelle division, AVEC LE LATIN;

13° D’un ABRÉGÉ DE GRAMMAIRE en tableau;

14° D’une NOMENCLATURE COMPLÈTE D’HISTOIRE NATURELLE, suivant les dernières classifications.

OUVRAGE CLASSIQUE, ADOPTE POUR LES BIBLIOTHÈQUES ET LES DISTRIBUTIONS DE PRIX DES COLLEGES, ET POUVANT TENIR LIEU DE TOUS LES DICTIONNAIRES

 

PAR P. C. V. BOISTE

 

Le premier livre d'une nation est le dictionnaire de sa langue. Volney

L'éducation de l'homme doit finir par des pensées. De Bonald.

HUITIÈME ÉDITION,

Revue, corrigée et considérablement augmentée

Par Charles Nodier, de l'Académie française,

Chevalier de la légion-d'honneur, Bibliothécaire de l'Arsenal,

Membre de la société entomologique de France, et de plusieurs académies provinciales

 

 

PARIS

Chez Lecointe et Pougin, Libraires, Quai des Augustins, n° 49

1834

(c)

 

DICTIONNAIRE UNIVERSEL

DE LA LANGUE FRANÇAISE, AVEC LE LATIN ET L'ÉTYMOLOGIE

EXTRAIT COMPARATIF, CONCORDANCE, CRITIQUE ET SUPPLÉMENT DE TOUS LES DICTIONNAIRES FRANÇAIS

MANUEL ENCYCLOPÉDIQUE

DE GRAMMAIRE, D’ORTHOGRAPHE, DE VIEUX LANGAGE, ET DE NÉOLOGIE,

Contenant :

1° l’Analyse, la Comparaison et la Critique des éditions du Dictionnaire de l’Académie, de ceux de Furetière, Trévoux, Ferraud, Gattel, Wailly, etc; leurs Nomenclatures, l’Extrait de leurs Définitions, les Acceptions, les Locutions nobles, familières ou proverbiales; les Proverbes; la Concordance grammaticale ou régime des mots, l’indication de leur emploi, selon l’usage et les styles noble, poétique, figuré, familier, populaire, marotique, épistolaire; et la prononciation figurée;

2° Les Variantes de Définitions, d’Acceptions, d’Orthographe de ces Dictionnaires;

3° Les Mots anciens ou nouveaux, les Définitions, les Acceptions et les Alliances de mots, omis par ces Dictionnaires, et recueillis dans les Écrivains français les plus estimés;

4° Les Termes propres aux Sciences, Arts, Manufactures, Métiers, etc., etc., et les Définitions extraites, des Dictionnaires ou Traités particuliers :

5° Les Mots du vieux langage, nécessaires pour l’intelligence des anciens Auteurs, depuis J. de Meun jusqu’à La Fontaine;

6° Les Mots créés par la Néologie et le Néologisme, pour l’intelligence des Auteurs nouveaux et des Journaux, etc., qui les emploient :

7° Les Étymologies grecques, latines, arabes, celtiques, etc., etc;

8° L’Extrait et la Critique des nouveaux Dictionnaires;

9° De nouveaux Exemples de Phrases formant une collection de Maximes et de Pensées des meilleurs auteurs;

10° Un Dictionnaire de Synonymes;

11° Un dictionnaire des Difficultés de la langue, résolues par les bons grammairiens;

12° Un Dictionnaire des Rimes;

13° Un Dictionnaire des homonymes;

14° Un Dictionnaire des Paronymes;

15°Un Traité de Versification;

16° Un Traité des Tropes;

17° Un Traité de Ponctuation;

18° Un Traité des Conjugaisons;

19° Un Traité de Prononciation;

20° Un Vocabulaire de Mythologie avec l'Étymologie grecque;

21° Un Vocabulaire des Personnages remarquables, revu et augmenté par M. Landois, Professeur au collège de Bourbon;

22° Un Vocabulaire de Géographie Ancienne et Moderne, selon la nouvelle division, avec le latin;

23° Une Nomenclature complète d'Histoire Naturelle, suivant les dernières Classifications;

24° Un abrégé de Grammaire en Tableau;

25° Principes de Grammaire d'après l'Académie française, par M. Lorrain, Proviseur au collège Saint-Louis;

OUVRAGE CLASSIQUE, ADOPTE POUR LES BIBLIOTHÈQUES ET LES DISTRIBUTIONS DE PRIX DES COLLEGES, ET POUVANT TENIR LIEU DE TOUS LES DICTIONNAIRES

PAR P. C. V. BOISTE

 

NEUVIÈME ÉDITION,

Revue, corrigée, considérablement augmentée,

PRÉcÉDÉe des principes de grammaire d'après l'académie française, par m. lorrain, proviseur au collège saint-louis

et comparee avec le dictionnaire de l'académie de 1835,

par mm.

CHARLES NODIER,

De l'Académie Française,

Chevalier de la Légion d'honneur, Bibliothécaire de l'Arsenal,

Membre de la Société Entomologique de France,

Et de plusieurs Académies provinciales,

ET LOUIS BARRÉ,

Professeur de Philosophie,

Membre de plusieurs sociétés savantes,

L'un des auteurs

Du Complément du Dictionnaire de l'Académie.

A PARIS

FIRMIN DIDOT FRÈRES,

Imprimeur de l'Institut

Rue Jacob, 56

REY ET GRAVIER,

Libraires,

Quai des Augustins, 45.

1839

(d)

Dictionnaire des Belles-Lettres

Contenant :

Les Élemens de la littérature théorique et pratique d’après un seul principe, l’Association des idées opérées dans le langage ou le style, par le bon emploi des quatre élémens littéraires, les faits, les images, les pensées et les sentimens, fournis par l’Esprit, l’Imagination

ou la Mémoire et le génie nourris par l’Etude.

Elémens choisis par le bon Goût, appréciés par le bon sens, et disposés par l’Ordre

pour atteindre au noble but des Belles-Lettres, l’association des idées de Bonheur et de Vertu.

Principes appuyés d’Extraits raisonnés des écrits didactiques d’Aristote, Cicéron, Horace,

Quintilien, Longin, Vida, Corneille, les deux Racine, Boileau,

Rollin, Fénelon, Bouhours, Le Bossu, Batteux, Condillac, Dubos, Trublet, Fontenelle,

de Jaucourt, d’Alembert, Marmontel, Mallet, Sulzer, Voltaire,

Hugh Blair, Maury, Buffon, La Harpe, Palissot, Geoffroy, Cailhava, Chénier,

Amar, Le Mercier, etc., etc. ; avec des Citations et des Exemples.

Ô vous sur qui le sort exerce ses rigueurs,

Les Lettres calmeront vos plus vives douleurs.

Par P. C. V. Boiste

Ancien Avocat, Auteur du Dictionnaire Unversel.

Tome 1-5

Paris

H. Verdière, Libraire, Quai des Augustins, n° 25,

1821

 

 

L’art

D’écrire et de parler Français

Troisième partie

Dictionnaire des Belles-Lettres

La première partie se compose du Dictionnaire Universel

[Un volume in-4° de 107 feuilles, broché, pour Paris, 25 francs ; reliés, 28 francs.

Deux volumes in-8° de 112 feuilles, brochés, pour Paris, 18 francs ;

reliés en un volume, 21 francs]

La seconde des Nouveaux Principes de Grammaire

[Un volume in-8° de 48 feuilles, broché, pour Paris, 8 francs ; relié, 9 fr. 50c.

Il faut ajouter 5 centimes par feuilles pour les recevoir francs de port par la poste.]

1. BOISTE (Pierre-Claude-Victoire), Imprimeur, / BASTIEN (J.-F.) Dictionnaire universel de la langue française, extrait comparé des dictionnaires anciens et modernes ; ou Manuel d'orthographe et de néologie, contenant ***, précédé d'un Abrégé de la grammaire françoise et suivi d'un Vocabulaire de géographie universelle ; ouvrage classique nécessaire à ceux qui veulent lire, parler ou écrire la langue françoise et devant tenir lieu pour l'usage habituel des dictionnaires publiés jusqu'à ce jour. Par P.-C.-V. BOISTE, imprim., et J.-F. BASTIEN, ancien libraire-éditeur. Paris : Boiste, an IX LXXIII-XIII-491 p. ; 8 obl. Paris : BN, X 13711

Dictionnaire universel de la langue françoise, avec le latin, et les étymologies... Manuel encyclopédique de grammaire, d'orthographe, de vieux langage, de néologie….. Paris, Firmin Didot, 15e édition, 1866 (Collection personnelle).

2. Cf. par exemple le Journal Grammatical… J.-Ph. Saint-Gérand, « L'Exemple d'une revue : le Journal Grammatical et Didactique de la langue française (1826-1840), in J.-Ph. Saint-Gérand [éd.], Langue et Linguistique. Mouvements croisés et alternés (1790-1860), Travaux de Linguistique, 33, 1996, pp. 91-114.

3. On distinguera -- au fur et à mesure de la prise de consistance scientifique d'une linguistique éprise de discriminations terminologiques et de distinctions conceptuelles -- entre le français, système idéologique de forces de contraintes socio-culturelles, et la langue française, système sémiologique de forces de contraintes grammaticales et lexicales.

4. L'intitulé d'un ouvrage trilingue, tel le Catholicon de Jehan Lagadeuc, dictionnaire breton-latin-français du XVe siècle, a été libellé en grec : cf. C.-J. Guyonvarc'h : « De nos jours Lagadeuc aurait intitulé son travail Dictionnaire Universel et il aurait ajouté en sous-titre, à l'usage des Bretons désirant mieux savoir le latin et le français. » (vol. 2, p. X-XI, Ogam, Rennes, 1975).

5. In Œuvres et jours, 717 : « le trésor de la langue », glôssès.

6. In De oratore, 1, 18 : thesaurus rerum omnium, memoria.

7. Cf. le Dictionnaire étymologique de la langue grecque de P. Chantraine, Paris, Klincksieck, 1968.

8. Peut-être à cause de l'énoncé abrégé de la page de faux-titre, Dictionnaire général et curieux, qui surprend d'autant plus par son engagement implicite que la page de titre est prolixe et baroque, à la fois ouverte et fermée. Pour une analyse plus détaillée des implicites de cet intitulé, cf. Isabelle Turcan, « Le discours lexicographique ancien : de la transgression des limites formelles aux limites de l'in-fini », à paraître dans la revue de l'Institut Universitaire de France, IUF/N2, La Limite.

9. Cf. infra, p. xx, citation du Journal des Débats, en date du 10 mai 1819, à propos du Dictionnaire universel de Boiste réputé « tenir lieu de bibliothèque entière ».

10. Marquée par l'article défini pluriel, avec ou sans caractérisation ; les groupes nominaux ou l'énoncé du contenu impliqué par des formes telles que « contenant… », etc.

11. Traité de la formation méchanique des langues, Paris, Saillant, 1765.

12. Le Monde primitif analysé et comparé avec le monde moderne […] ou Grammaire universelle et comparative, Paris, l'Auteur, 1774.

13. Essai synthétique sur l'origine et la formation des langues, Paris, Ruault, 1774.

14. Paris, Firmin Didot, 1810.

15. Paris, Demonville, 1808. Seconde édition, Paris, Delangle Frères, éditeurs-libraires, 1828.

16. Paris, Delangle Frères, éditeurs-libraires, 1828, seconde édition en 1829.

17. Paris, Renduel, 1834.

18. Citations empruntées à F. Brunot, Histoire de la langue française, t. XII, par Charles Bruneau, Paris, Armand Colin, 1968, pp. 545-546.

19. Ibid., p. 564.

20. Ibid., p. 547.

21. Avertissement de la 3e édition, Paris, chez l'auteur, rue Hautefeuille, n 30, 1808, p. i.

22. Voir : Nouvelle histoire de la langue française, sous la direction de Jacques Chaurand, Paris, Le Seuil, 1999, Chapitre VI. 6 Aspects de la standardisation du système : L'évolution du lexique, pp. 424-454.

23. N'écrivait-il pas : Ami sévère et souvent contempteur des travaux lexicologiques, je n'ai jamais loué aucun Dictionnaire, parce que je n'ai pas encore conçu la possibilité d'en faire un bon avec trois mauvais éléments dont tous nos Dictionnaires se composent, savoir : un mauvais alphabet, une mauvaise orthographe, et une nouvelle langue [Préface de la huitième édition du Dictionnaire Universel de Boiste]?

24. Rappelons simplement ici les plus courantes d'entre ces abréviations :

Auteurs dont les noms sont abrégés.

Le Dictionnaire de l'Académie, éditions de 1665 et de 1778, n'a pas de citation.

ACADÉMIE, nouvelle édition de 1798. A. Idem de 1801. AL. -- L'AUTEUR B. -- CATINEAU, orthographe de Voltaire. C. -- CORMON, abréviateur de Gattel. CO. -- FERRAUD. F. -- FURETIERE. FUR. -- GATTEL. G. -- KANT. K. -- LINNÉ. L. -- J. M. MAURY, continuateur. J. M. -- MULLER. M. -- NOUVEAUX DICTIONNAIRES. N. -- RESTAUT, Traité d'orthographe. R. . Idem, deuxième édition. RR. -- RICHELET (abrégé de). RICH. -- Supplément du Dictionnaire de l'Académie. S. A. . -- TRÉVOUX (Dictionnaire de). T. -- WAILLY, Dictionnaires des rimes. V. Idem , Abrégé de l'Académie. V. -- GRAND VOCABULAIRE. VOC.

Signes abréviatifs employés dans le Dictionnaire de la Langue française.

+ Les + désignent les mots dans lesquels la lettre h est aspirée.

(….) Les parenthèses (….) renferment, 1 les additions à l'analyse de l'Académie; 2 les différents styles, familier, figuré, etc.

(….) Les parenthèses renferment aussi les étymologies.

| Les | la prononciation figurée.

Le -- tient toujours la place du mot.

- La division -, celle des portions du mot semblable dans le texte, le latin ou les variantes d'orthographe.

[ Le [ indique les autorités, dans l'article.

Les 1, 2, 3, etc. , indiquent, dans le corps de l'article, l'exemple des pensées qui s'y rapporte, et qui, placé à la fin de chacun, porte un même chiffre.

Abréviations du Dictionnaire de la Langue française.

Abréviations des étymologies.

absol. ument; adj. ectif; admir. ation; adv. erbe; affirm. atif; agricul. ture; allem. And; anat. omie; ang. lais; antiq. uité; apérit. ive; ar. abe; archit. ecture ; ardois. ier; arith. . métique; art. icle; astrol. ogie; astron. omie; augm. entatif; auxil. iaire; bar. bare; barbar. isme; blas. on; botan. ique; bras. serie; burl. esque; celt. ique; chim. ie; chir. urgie; claus. tral; com. merce; compar. aison; conj. onction; cout. ume; crit. ique; dévot. ion; didact. ique; (Diffi.) voyez le Dictionnaire des Difficultés.; dimin. utif; diplom. atie; épist. olaire; escr. ime ; esp. agnol; Étriv. ial; ex. emple; exclam. ation; expr. ession; f. éminin; famil. ier; fauc. onnerie; fig. uré; fortif. ication; g. enre; géom. étrie; gr. ec; (gram.) voyez le Tableau grammatical; gram. maire; hébr. eu; hist. oire; horl. ogerie; impér. atif; impers. onnel; impréc. ation; imprim. erie; ind. ien; indéclin. able; indéf. ini; injur. ieux; interj. ection; interrog. ation; inus. ité; iron. ique; irrég. ulier; ital. ien; jardin. ier; juris. prudence; lapid. aire; lat. in; lit. urgie; littér. ature; m. asculin ; man. ége; manuf. acture; marit. ime; math. ématique; méd. ecine; men. uiserie; mépr. is; mét. iers; milit. air; minér. alogie; mon. noie; mus. ique; n. eutre; N. ord; négat. ive; néol. ogique; nouv. eau; numér. al; part. icipe; pas. sif; peint. ure; pers. onnel; pl. uriel; poét. ique; polit. ique; popul. aire; poss. essif; prat. ique; prép. osition; prés. ent; priv. atif; pron. ominal; prov. erbial; r. égulier; récipr. oque; réfl. échi; relat. if; renouv. elé; rhéto. rique; s. ubstantif; S. ud; sing. Ulier; (Syn.) Voyez le Dictionnaire des Synonymes; syr. iaque; t. erme; tabl. etier; Traité. Voyez les Traités de Conjugaisons, etc.; v. erbe; vén. erie; vétér. inaire; vi. eux; vi. eux fr. ançais; voy. ez;

Abréviations du Vocabulaire de Mythologie.

Afric. aine; Arab. e; Celt. ique; Egyp. tienne; Ind. ienne; Jap. onnaise; Lap. onne; Mah. ométane; Mex. icaine; Orient. ale; Pers. ane; Péruv. ienne; Scand. inave; Slav. onne; Tart. are;

Abréviations du Vocabulaire des Personnes remarquables.

acad. émicien; anat. omiste; antiq. uaire; arch. itecte; art. iste; astrol. ogue; astron. ome; biblio. graphe; biog. raphe; cél. èbre; chim. iste; coméd. ien; comment. ateur; compil. ateur; conventionn. el; doct. eur; écon. omiste; écri. vain; édit. eur; gén. éral; géogr. aphe; géom. ètre; gr. and; gramm. airien; grav. eur; hist. orien; ho. mme d'état; jés. uite; jurisc. onsulte; lexic. ographe; libr. aire; litt. érateur; m. ort; maréch. al; méd. ecin; min. istre; minér. alogiste; mus. icien; nat. uraliste; orat. eur; orient. aliste; peint. re; philol. ogue; philos. ophe; polit. ique; prédic. ateur; prof. esseur; proph. ète; rab. bin; relig. ieux; satir. ique; sav. ant; sculpt. eur; théol. ogien; trad. ucteur;

Abréviations du Vocabulaire de Géographie.

Af. rique; Allem. agne; allem. and; Am. érique; angl. ais; Angl. eterre; ar. abe; Autr. iche; b. as; b. asse; b. ourg; baill. iage; chât. eau; contr. ée; dan. ois; Danem. arck; dép. artement; duc. hé; écos. sais; Esp. agne; esp. agnol; Eur. ope; flam. and; fort. Eresse; fr. ançais; Fr. ance; gr. and; h. aute; heur. euse(S. aint); hol. landais; Holl. ande; Ir. lande; irl. andais; Ital. Ie; ital. ien; lat. in; m. ort; Méditer. ranée; mér. idional; mont. agne; orient. aliste; port. ugais; Port. ugal; prov. ince; r. ivière; républ. ique; rom. ain; roy. aume; septent. rional; v. ille; V. ou voy. ez; vil. lage;

L'appareil exposé est profus, mais les capacités discriminatives en sont troublées et le repérage des sources réelles s'en trouve d'autant compliqué.

25. Cf. Actes des Journées internationales Connaissance et Rayonnement du Dictionnaire universel françois & latin, de Trévoux, organisées par I. Turcan, Trévoux, 15-16 octobre 1999, accessibles sur internet à l'adresse : http://www.univ-lyon3.fr/siehldaweb/trevoux.html.

26. Daire, Les Épithètes françoises, rangées sous leurs substantifs, ouvrage utile aux jeunes poëtes…, Paris, 1759; Varinot, Dictionnaire des métaphores, Paris, 1819; Planche, Dictionnaire de la langue oratoire et poétique, Paris, 1819-1821, 2 vol.; Carpentier, Gradus poëtique français, Paris, 1822.

27. Une version en mode texte et en base de données interrogeable sous Tact de la seconde édition de cet Examen… est disponible sur notre site Langue du XIXe siècle à l'adresse : http://www.univ-bpclermont.fr/LangueXIX

28.  Cette Grammaire offre d'ailleurs un nouveau degré d'utilité. Bien convaincu que la religion et la morale sont les bases les plus essentielles de l'éducation; que les règles les plus abstraites sont mieux entendues lorsqu'elles sont développées par des exemples; et qu'à leur tour les exemples se gravent mieux dans la mémoire, lorsqu'ils présentent une pensée saillante, un trait d'esprit ou de sentiment, un axiome de morale, ou une sentence de religion, je me suis attaché à choisir de préférence ceux qui offrent cet avantage. J'ai en outre multiplié ces exemples autant que je l'ai pu, et je les ai puisés dans les auteurs les plus purs, les plus corrects; de sorte que, si dans certains cas, nos maîtres sont partagés d'opinion; si certaines difficultés se trouvent résolues par quelques-uns d'entre eux d'une façon différente, et qu'on soit embarrassé sur le choix que l'on doit faire, sur l'avis que l'on doit suivre, on éprouvera du moins une satisfaction, c'est qu'on aura pour se déterminer l'autorité d'un grand nom; car, comme l'a dit un auteur, Il n'y a de Grammairiens par excellence que les grands écrivains , Paris, Porthman, 1811, p. vi-vii.

29. Bescherelle frères, et Litais de Gaux, Grammaire Nationale ou Grammaire de Voltaire, de Racine, de Bossuet, de Fénelon, de J.-J. Rousseau, de Buffon, de Bernardin de Saint-Pierre, de Chateaubriand, de Casimir Delavigne, Paris, Bourgeois-Maze, 1836, p. v-vi.

30. Alain Berrendonner, L'éternel grammairien. Etude du discours normatif, Berne, Peter Lang, 1982.

31. M. de Lingré a dit : « Un livre est une lettre écrite aux amis inconnus que l'on a dans le monde».

32. Dans les lignes ci-dessous, c'est nous qui soulignons les parties discriminantes du raisonnement des auteurs du Dictionnaire général de la langue française.