SECTION DEUXIÈME

LE LEXIQUE EMPRUNTÉ

§ 3. -- Gaulois.

Nous connaissons environ quatre cent cinquante mots gaulois, soit par le témoignage de divers auteurs latins et grecs, soit par celui des rares inscriptions conservées ou des glossaires. De ce lexique déjà si restreint, une très minime partie seulement a survécu en français. Une fois la Gaule incorporée à l'empire romain, les Gaulois ont vite oublié leur langue pour apprendre le latin. Si le lexique gaulois n'a pas complètement disparu, c'est que, d'une part, le rôle important joué par la Gaule dans les destinées de Rome a pu mettre à la mode dans la société romaine quelques mots qui se sont vite incorporés au latin proprement dit, et que, de l'autre, les Gaulois romanisés ont continué à se servir, tout en parlant latin, de mots indigènes pour désigner certains objets qui leur étaient familiers et qui, sans doute, n'avaient pas de nom exactement correspondant dans cette langue. De toute façon, les mots d'origine gauloise ont revêtu la forme latine, et c'est sous cette forme que nous allons en dresser la liste par ordre alphabétique (1).

alauda,alou(ette).
ambactum (2) ambass(ade).
arependem (3), arpent.
bascauda, anc. franç. baschoe, vaisseau pour transporter la vendange, et peut-être bâche (4).
beccum, bec.
benna, banne.
bettonica, bétoine.
betullum (5),boul(eau).
braca, braie.
brace, brais.
brogilum, breuil (taillis).
bulga, bouge (sac).
cambiare, changer.
carpentum, charpent(ier).
carruca, charrue.
carrum,char.
cervesia, cervoise.
cuculla,coule.
hrotta, rote (instrument musical).
Leuca, leuga, lieue.
marga, marne (de margula).
saga, saie.
saponem (6), savon.
vertragum, vautre.
vidubium, vouge.

A ces mots, dont la provenance gauloise est assurée, on peut en ajouter d'autres, pour lesquels elle est très vraisemblable :

alausa, alose.
bebrum (7),bièvre.
bodina (8), borne.
cassanum (9),chêne.
cleta (10), claie.
comber- (11), (dé)combre.
cumba (12), combe.
glitia, glaise.
grava, grève.
gulbia (13), gouge.
landa, lande.
olca, ouche.
soccum (14), soc.
tannum (15), tan.
taratrum, tarière.
tinca, tanche.
tunna, tonne.
vassallum, vassal.
vernium, vergne.
viriola, virole.

Il existe beaucoup d'autres mots que l'on a cherché, faute de mieux, à rattacher au gaulois. Nous nous bornerons à énumérer ceux pour lesquels cette origine n'est pas absolument invraisemblable, en renvoyant à ce qui en a été dit dans le corps même du Dictionnaire.

balai (16)
barge (17) (barque),
berge,
bille (partie d'un arbre, bâton).
bouc (18),
brailler,
braire,
bran,
briser,
broder,
bruire,
bruyère,
chemin,
dartre (19),
drille (lambeau),
droue (20),
dru,
dune (21),
écagne,
écanguer,
galet, jalet (22),
glette,
gobet,
if,
jarousse,
jarret,
javelle (23),
javelot (24),
lie (sédiment),
matras (25),
mauvis (26),
mignon,
miner,
musser (27),
petit,
pièce,
poche,
quai (28),
refrogner,
rogue (hautain),
ruche,
tamis,
trâle,
trogne,
truand,
valet,
vanne.

§ 4. -- Celtique moderne.

Des idiomes celtiques, descendants directs ou collatéraux de l'ancien gaulois, se sont conservés jusqu'à nos jours dans la basse Bretagne, en Irlande, dans le pays de Galles et en Écosse (29). Ce n'est que par la basse Bretagne que le français a eu un contact direct avec ces idiomes (30). Il a fourni un grand nombre de mots au bas breton, mais il en a reçu très peu en échange. Les mots d'origine bretonne se rapportent en majorité, comme il est naturel, aux choses de la mer : aderne, baderne, baille (31), bernicle (32), bouette, darne, goéland, goémon, minot (boute-hors), raz.

Ce sont aussi des objets particuliers à la Bretagne que désignent les mots biniou, cagou, cromlech, dolmen, menhir, etc. Il est à peine besoin de faire remarquer qu'aucun de ces mots n'a réellement pénétré dans l'usage général : l'emploi de tel ou tel d'entre eux dans notre langue ne relève que de la fantaisie des archéologues (33). En revanche, baragouin, bijou, dia, sont incontestablement français : mais qu'ils soient réellement empruntés au bas breton, voilà qui est loin d'être assuré.

§ 5. -- Grec.

Le latin a beaucoup emprunté au grec. Longtemps avant l'ère chrétienne, les relations commerciales ou politiques introduisirent dans la langue latine un certain nombre de mots grecs qui s'y incorporèrent rapidement. Plus tard, la culture littéraire en fit naturaliser un bien plus grand nombre. Enfin le christianisme, à son tour, versa dans le vocabulaire de nouveaux termes religieux. Assurément beaucoup des mots venus du grec restèrent en quelque sorte à la surface de la langue latine, sans pénétrer jusqu'à la couche populaire. Toutefois le nombre de ceux qui furent incorporés au latin vulgaire est assez considérable. On en pourra juger par la liste suivante, où nous avons réuni à peu près tous les mots grecs qui se retrouvent dans le français actuel et qui, transmis par le latin, ont régulièrement passé par toutes les phases de la formation populaire (34):

<GR= adamanta>, adamantem, aimant.
<GR= aloxinê> (?), aloxina, aluine.
<GR= amugdalê>, amygdala, amande.
<GR= artemisia>, artemisia, armoise.
<GR= artemona>, artemonem, armon.
<GR= aura>, aura, or(age).
<GR= balsamon>, balsamum, baume.
<GR= baptisma>, baptisma, baptême.
<GR= basilikê>, basilica, basoche.
<GR= blaison>, blæsum, blés(er).
<GR= blasphêmein>, blasphemare, blâmer.
<GR= boeia>, boia, bouée (35).
<GR= bombon>, bombum, bomb(ance), bon(dir), etc.
<GR= bouturon>, butyrum, beurre.
<GR= bursa>, bursa, bourse.
<GR= gomphon>, gomphum, gond.
<GR= guron>, gyro(vagum), girou(ette).
<GR= diskon>, discum, dais.
<GR= dokhê>, doga, douve.
<GR= egkauston>, encaustum, encre.
<GR= ekklêsia>, *eclesia, église.
<GR= eleêmosunê>, eleemosyna, aumône.
<GR= emplastron>, emplastrum, emplâtre, plâtre.
<GR= emphuton>, *emputum, ente.
<GR= episkopon>, episcopum, évêque.
<GR= zêlon>, *zel(osum), jaloux.
<GR= êmina>, hemina, mine (mesure).
<GR= thêkê>, theca, taie.
<GR= thêsauron>, thesaurum, trésor.
<GR= thurson>, thursum, trou (de chou).
<GR= ibiskon>, hibiscum, gui(mauve).
<GR= kathedra>, cathedra, chaire, chaise.
<GR= kalopous>, *calop(ia), galoche.
<GR= kamara>, camera, chambre.
<GR= kamêlon>, camelum, chameau.
<GR= kaminon>, *camin(ata), cheminée.
<GR= kanthon>, canthum, chant, chant(eau).
<GR= kannabin>, *cannapem, chanvre.
<GR= kanonikon>, canonicum, chanoine.
<GR= kara>, cara, chère.
<GR= karkaron>, carcerem, chartre.
<GR= karuophullon>, caryophyllon, girofle.
<GR= kastanon>, castanea, châtaigne.
<GR= katabolê>, *catabola, (ac)cabl(er).
<GR= kaulon>, caulem, chou.
<GR= kauma>, *caum(are), chôm(er).
<GR= kapsa>, capsa, châsse.
<GR= kerasion>, *ceresia, cerise.
<GR= klêrikon>, clericum, clerc.
<GR= kogkhê>, concha, conche.
<GR= kolaphon>, *colpum, coup.
<GR= koleon>, coleum, couille.
<GR= kolla>, colla, colle.
<GR= kolumbon>, columbum, coulon.
<GR= krotalon>, crotal(are), croul(er).
<GR= kumation>, *cymatia, cimaise.
<GR= kôbion>, gobionem, goujon.
<GR= laikon>, laicum, lai.
<GR= metallon>, *metall(ia), maille (monnaie).
<GR= minthê>, mentha, menthe.
<GR= monastêrion>, monasterium, moutier.
<GR= monakhon>, monachum, moine.
<GR= môron>, *mora, mûre (baie).
<GR= nanon>, nanum, nain.
<GR= oreikhalkon>, orichalcum, archal.
<GR= ostreon>, ostrea, huître.
<GR= parabolê>, parabola, *paraula,parole.
<GR= paradeison>, paradisum, parvis.
<GR= peperi>, piper, poivre.
<GR= perdix>, perdicem, perdrix.
<GR= perkê>, perca, perche (poisson).
<GR= petra>, petra, pierre.
<GR= petroselinon>, *petrosilium, persil.
<GR= pison>, pisum, pois.
<GR= pittakion>, pittacium, (ra)petass(er).
<GR= platanon>, platanum, plane (arbre).
<GR= podion>, podium, puy.
<GR= polupous>, polypum, pieuvre.
<GR= porphura>, purpura, pourpre.
<GR= presbuteros>, presbyter, prêtre.
<GR= puxida>, pyxida, *buxida,boîte.
<GR= puxon>, buxum, buis.
<GR= rukanê>, runcina, *rucina,rouanne.
<GR= rutê>, ruta, rue (plante).
<GR= sagma>, sagma, *salma, somme (bête de).
<GR= sakkon>, saccum, sac.
<GR= sarkophagon>, sarcophagum, cercueil.
<GR= sêpia>, sepia, seiche.
<GR= sikera>, sicera, idre.
<GR= sinapi>, sinapem, sanve.
<GR= skalmon>, scalmum, échaume.
<GR= skopelon>, scopulum, écueil.
<GR= smaragdon>, smaragdum, émeraude.
<GR= spathê>, spatha, épée.
<GR= spasmon>, *spasm(are), pâmer.
<GR= skholê>, schola, école.
<GR= talanton>, talentum, talent.
<GR= telôneion>, teloneum, tonlieu.
<GR= triphullon>, *trifolum, trèfle.
<GR= tropon>, * trop(are), trouver.
<GR= phalagga>, phalanga, *palanca,palanche.
<GR= phantasia>, *pantasi(are), pantoiser.
<GR= Phrugion>, Phrygium, *frisium(or)froi.
<GR= khairephullon>, chaerefolium, cerfeuil.
<GR= kharakion>, *characium, (é)chalas.
<GR= khordê>, chorda, corde.
<GR= khoron>, chorum, chœur.
<GR= ôra>, hora, heure.

Le français connaît encore d'autres mots, que l'on ne peut rattacher à la formation savante proprement dite, pour lesquels l'origine grecque est manifeste. Mais, comparés à ceux que nous venons de passer en revue, ils se trahissent comme des emprunts postérieurs faits par la langue commune à la langue des savants. Nous nous bornerons à citer :

adragant, tragantum, <GR= tragakanthon>.
albâtre, alabastrum, <GR= alabastron>.
ange, angelus, <GR= aggelos>.
apôtre, apostolus, <GR= apostolos>.
autruche, avis struthio, <GR= strouthiôn>.
ciboire,ciborium, <GR= kibôrion>.
cimetière, coemeterium, <GR= koimêtêrion>.
coffre, cophinus, <GR= kophinos>.
datte, dactylus, <GR= daktulos>.
diable, diabolus, <GR= diabolos>.
diacre, diaconus, <GR= diakonos>.
dragée, *dragata, <GR= tragêmata>.
épître, epistola, <GR= epistolê>.
évangile, evangelium, <GR= euaggelion>.
flamme (lancette), phlebotomus, <GR= phlebotomos>.
germandrée, chamaedrya, <GR= khamaidrua>.
grammaire, grimoire, grammatica, <GR= grammatikê>.
greffe, graphium, <GR= graphion>.
horloge, horologium, <GR= ôrologion>.
migraine, hemicrania, <GR= êmikrania>.
orgue, organum, <GR= organon>.
paroisse, parochia, <GR= paroikia>.
pouacre, podager, <GR= podagros>.
réglisse, liquiritia, <GR= glukurriza>.
rime, rhythmus, <GR= ruthmos>.

Quelques mots grecs paraissent avoir passé en français, non par les livres et par l'intermédiaire du latin, mais directement, par suite des relations commerciales entretenues par notre pays avec Constantinople, surtout depuis Charlemagne et pendant les croisades. Dans ce cas, il est vrai, c'est souvent l'italien, le provençal et même d'autres langues étrangères qui leur ont servi de véhicule. Nous citerons :

aspre (monnaie),
avanie,
besant,
boutique,
braquemart,
caloyer,
céleri,
chaland,
chiourme,
civette,
drogman,
émeri,
endive,
étrope,
falot (lanterne),
fanal,
galée,
galère,
ganache,
golfe,
gouffre,
mandille,
moustache,
nocher,
page (subst. masc.),
police (contrat),
riz,
prame (36),
timbre,
trucheman,
velanède.

Enfin mentionnons quelques mots empruntés au grec moderne à la suite des événements mémorables qui ont amené la création du royaume de Grèce, comme clephte, palikare, philhellène et romaïque, que l'Académie française a admis dans son Dictionnaire.

§ 6. -- Germanique (allemand ancien).

Aussi haut que nous puissions remonter dans les textes historiques relatifs à notre pays, nous y voyons que les Gaulois avaient pour voisins au nord-est, de l'autre côté du Rhin, des peuplades germaniques. Ce voisinage a pu, dès les premiers siècles de l'ère chrétienne, introduire dans le latin parlé en Gaule quelques mots venus de l'autre côté du Rhin. Mais l'apport germanique se réduirait sans doute à bien peu de chose, s'il ne s'était produit, au commencement du Ve siècle, un fait historique d'une importance capitale sur les destinées de notre pays, à savoir l'invasion de la Gaule par les Francs et l'établissement de la dynastie mérovingienne, continuée par la dynastie carolingienne, comme elle de source germanique. Un contact ininterrompu de six siècles environ entre le latin vulgaire de la Gaule du Nord et le langage germanique des envahisseurs n'a pu modifier foncièrement le gallo-roman, mais il a introduit dans la langue de nos ancêtres un grand nombre de mots, dont l'ensemble donne au vocabulaire français du moyen âge une physionomie à part dans la famille des langues romanes, car les autres langues sœurs n'ont subi qu'à un moindre degré cette invasion de mots germaniques. Beaucoup de ces mots sont tombés en désuétude, mais la majeure partie a subsisté jusqu'à nos jours (37). On y trouve représentées les catégories d'idées les plus diverses ; mais la guerre et la vie rurale y ont une part prédominante (38).

substantifs
affre,
agace,
aigrette,
alise,
alleu,
anche,
arroi,
aune (mesure),
babine,
baboue,
balafre,
balle (pelote),
ban,
banc,
bande d'étoffe),
bannière,
bar (poisson),
bau,
baudrier,
bedeau,
beffroi,
beignet,
béton (lait),
bief,
bière (caisse),
bille (boule),
bloc,
bois (?),
bonde,
bondon,
bongeau,
borde,
bot,
botte (assemblage d'objets),
bouc,
bourg,
brachet,
brai (piège),
braise,
brand,
brandon,
brèche,
brelan,
brème,
bride,
brique,
brosse,
brouée,
brouet,
bru,
bûche (?),
buire,
buron,
butin,
caille,
cane (?),
canif,
carcan,
chambellan,
chamois,
charivari (?),
chaton (de bague),
chétron,
chopine,
chouette,
ciron,
clapet,
clapier,
clenche,
coche (bateau),
coiffe,
cote (cabane),
cotte (vêtement),
crabe (crustacé),
crafe,
cramail (?),
crampon,
crapaud (?),
crape,
crèche,
cresson,
croupe,
cruche,
dard,
drageon,
duvet (?),
écaille,
écale,
échanson,
écharpe,
échasse,
échauguette,
échelle (escadron),
échevin,
échiffre,
échine,
échoppe (boutique),
écofier,
écot,
écran,
écrevisse,
écume,
élingue,
émail,
émoi,
empan,
épar,
épeiche,
éperlan,
éperon,
épervier,
épieu,
époule,
esclame,
espringale,
estrif,
esturgeon,
étal,
étalon,
étau,
éteuf,
étoc,
étoffe,
étrier,
faîte,
falaise,
fanon,
faude,
fauteuil,
feurre,
feutre,
fief,
flan,
flot,
fouarre,
fourreau,
frais,
frette (39),
freux,
frimas,
froc (?),
gage,
gant,
garenne,
garou (loup-),
gâteau (?),
gaude,
gaufre,
gaule (?),
gazon,
gêne,
gerbe,
gerfaut,
gifle (?),
giron,
glouteron,
gonfalon,
grappe,
grès,
griffe,
groseille,
gruau,
gruyer,
guède,
guerdon,
guerre,
guet,
guiche,
guimpe,
guise,
hache,
haie,
haillon (?),
haire,
hait (40),
halle,
hallier (buisson),
hameau,
hampe,
hanap,
hanche,
hanneton,
harde (troupe),
hareng,
harpe,
hâte,
haubert,
haussière,
haveron,
havet,
havre,
heaume,
héberge,
héraut (?),
héron,
hétoudeau,
hêtre,
honte,
hotte,
houe,
hourd,
houseau,
housse,
houx,
huche,
hulotte (?),
if (?),
jardin,
laîche,
latte,
leurre,
lisse (palissade),
lippe,
litre, fém., liteau,
loge,
loquet,
losse (?),
lot,
malle,
marais,
marc (poids),
marche (frontière),
mare,
maréchal,
marsouin,
martre,
mât,
maton,
mégis (?),
mésange (?),
meurtre,
mitaine,
mite,
mitraille,
morille,
moufle (gant),
mousse,
mulot,
nord,
orgueil,
ouest,
parc (?),
patte (?),
poche (?),
quille (à jouer),
rang,
rat (?),
regain,
rochet,
roseau,
salle,
sénéchal,
sud,
tache,
taisson,
tanière,
taquet,
targe,
tas (?),
tassette,
taudis (?),
tette,
tique,
tonne,
touaille,
touffe,
toupet,
toupie (?),
tourbe (charbon),
trappe,
trêve,
troène,
trompe,
troupe (?),
trumeau (?),
tuyau,
varenne.
adjectifs
baud,
blafard,
blanc,
blet,
bleu,
brun,
dehait,
échif,
esclame,
fauve,
fluet,
frais,
franc,
gaillard (?),
galand,
gris,
laid,
lige,
madré,
morne,
riche,
sale,
sur (acide),
terne (?).

verbes
adouber,
avachir,
bannir,
bâtir (coudre),
baudir,
bouter,
bramer,
broder (?),
brouir,
brouter,
broyer,
buer,
choisir,
chopper (?),
choquer (?),
clapper,
cracher,
danser,
déchirer,
déguerpir,
dérober,
éblouir,
éclater (?),
éclisser,
effrayer,
émeutir (fienter),
enhardir,
épanouir,
épargner,
épeler,
épier,
estamper,
étricher,
étriver,
farder (?),
fauder,
flatir,
flatter,
fourbir,
fournir,
fourrer,
gâcher,
gagner,
galoper (?),
garder,
garnir,
gauchir,
glapir,
glisser,
gratter,
graver,
grigner,
grimper,
grincer,
gripper,
grommeler,
guérir,
guider,
guiper,
haïr,
haler (41) (tirer),
happer,
hâter,
heurter,
honnir,
lamper,
laper,
lécher,
mâchurer,
marquer,
marrir (42),
nantir,
navrer,
oudrir (?),
radoter,
ramper,
râper,
regretter,
rider,
river,
rôtir,
rouir,
saisir,
sérancer,
souper,
super,
taper (frapper),
taper (boucher),
tapir (?),
tarir,
tirer,
tomber,
toucher,
trébucher,
trépigner,
tricher (?).

adverbes
guère,
trop (?).

Parfois il s'est produit, entre des mots germaniques et des mots latins, une sorte de compromis, et la forme française tient à la fois du germanique et du latin. Tel est le cas pour haut (altum + hoch), hante (hasta + hand), mainst (multum + manag), et peut-être pour flanc (flac-cum + hlanka), froc (floccum + hrok), hâler (*assulare + hal), hâte, broche (hasta + harsta).

Rappelons aussi que la plupart des mots latins où le v initial est devenu g ont été influencés par des mots germaniques ayant un w, §§ 444 et 499.

§ 7. -- Allemand moderne.

Dès le IXe siècle, le français et l'allemand se sont trouvés en contact, comme autrefois le latin et l'ancien idiome germanique ; mais, au lieu d'être sur le Rhin, la frontière était flottante entre les Vosges et la Moselle. Pendant le moyen âge, ce contact a eu pour résultat l'introduction en ancien haut allemand, et surtout en moyen haut allemand, d'un grand nombre de mots français, relatifs pour la plupart aux raffinements de la civilisation que l'on enviait à notre société chevaleresque (43). Mais le français n'a presque rien emprunté à l'allemand pendant toute cette période : citons cependant halbran, hallebarde, nique, qui apparaissent chez nous dès le XIVe siècle. Ce n'est que depuis le XVe siècle que, par suite d'événements politiques divers (alliance avec les Suisses, Réforme, guerres de religion, guerre de Trente ans, etc., etc.), l'allemand a réussi à faire brèche dans notre vocabulaire.

Au XVe siècle, nos auteurs emploient déjà :
aurochs,
bélitre,
blocus,
boulevard,
cric,
dalle,
élan (cerf),
flasque (madrie),
foudre (tonneau),
halecret,
hausse-col,
lansquenet.

Au XVIe :
arquebuse,
balle (de l'épi),
bière (boisson),
bique,
bismuth,
blottir,
bogue (de châtaigne),
bondrée,
brinde,
burin,
cale,
canapsa,
carrousse,
castine,
cauchemar,
coche (voiture),
clapet,
éclanche,
espiègle,
fifre,
gueuse,
gulpe,
halte,
hase,
huguenot,
hutte,
potasse,
reître,
rosse,
trinquer,
trôler.

Au XVIIe :
bivouac,
blinde, blinder,
calèche,
chenapan,
cible,
crancelin,
cromorne,
dréger,
estomper,
étraque,
gangue,
gibelot,
havresac,
hulot (hublot),
obus,
rose-croix,
sabre,
traban,
vaguemestre,
valse,
velte,
zigzag,
zinc.

Au XVIIIe :
banse,
bérubleau,
blende,
bocambre,
bocard,
cobalt,
cran (raifort),
drille (trépan),
embérize,
estrigue,
feldspath,
flinquer,
glaçure,
gland (tenaille),
gneiss,
-halde,
hamster,
heiduque,
kirsch-wasser,
lagre,
losse,
loustic,
nouille,
prame (44),
quartier-mestre,
quartz,
sabretache,
spalt,
spath,
vampire,
vasistas,
velche,
vermout,
vidrecome.

Au XIXe :
bichof,
blague,
blockhaus,
bock,
bogue (anneau),
chope,
choucroute,
coprose,
cuffat,
dolman,
druse,
gamin,
guelte,
képi,
mastoc,
philippine,
schabraque,
schlague,
schlich,
thalweg,
tungstène.

On remarquera sans peine que les termes militaires forment un groupe assez nombreux parmi nos emprunts à l'allemand. Faisons observer aussi que, dans plus d'un cas, l'allemand n'a fait que servir de véhicule aux mots slaves, hongrois ou turcs pour leur passage en français.

Il faut mettre à part les mots qui désignent des institutions allemandes, et qui, confinés dans cet emploi spécial, ne font pas, à vrai dire, partie de la langue française générale. Nous citerons, parmi les plus connus :

amman,
ammeistre,
bourgmestre,
burgrave,
feld-maréchal,
hanse,
kreuzer,
landamman,
landgrave,
landwehr,
margrave,
mark,
ranz,
rhingrave,
rixdale,
thaler,
uhlan,
valkyrie,
vehme,
walhalla.

Mentionnons enfin quelques mots, dérivés du latin ou du grec, qui ne sont arrivés en français que par l'intermédiaire de l'allemand :

accordéon,
épisyllogisme,
harmonica,
humanisme,
publiciste,
tympanon.

§ 8. -- Anglais.

Par son fonds primitif, qui représente la langue des Angles et des Saxons, l'anglais se rattache au bas allemand, c'est-à-dire aux idiomes parlés dans les plaines de l'Allemagne voisines de la mer. Les envahisseurs danois lui ont fourni un apport notable d'éléments scandinaves ; mais surtout la conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, et les événements qui en furent la conséquence, l'ont tellement imprégné d'éléments français, qu'on l'a quelquefois, oubliant son origine, rattaché au groupe des langues romanes plutôt qu'à celui des langues germaniques. L'anglais, dédaigné en Angleterre même jusque vers le XVe siècle, n'a pour ainsi dire rien fourni au français pendant le moyen âge proprement dit (45). Mais depuis lors, et surtout pendant le XIXe siècle, nous lui avons beaucoup emprunté. Le développement extraordinaire de l'Angleterre et des États-Unis (séparés politiquement de la mère patrie au siècle dernier, mais en conservant la langue) au point de vue commercial, industriel, agricole, etc., explique suffisamment l'invasion de mots anglais que notre langue a eu à subir, et contre laquelle, par amour de la nouveauté, elle ne s'est peut-être pas toujours assez défendue. Dans la liste qui suit, nous ne donnerons que les mots qui paraissent avoir définitivement acquis le droit de cité chez nous, tout en reconnaissant que beaucoup d'autres, que nous ne donnons pas, sont en passe de l'acquérir (46).

abolitionniste,
accore,
actuaire,
albatros,
alderman,
ale,
allégeance (fidélité),
alligator,
anspect,
antilope,
arrow-root,
astic,
aubin (cheval),
balbuzard,
ballast,
banknote,
banquise,
baronnet,
bébé,
bifteck,
bill,
blackbouler,
boghei,
bol (tasse),
boston,
bouledogue,
bouleponche,
boulingrin,
bousin (cabaret),
boxer,
break,
brelée (?),
brick,
brogue,
budget,
bugle (clairon),
cab,
cabine,
cant (formalisme),
carisel,
carrick,
casimir,
celluloïd,
chair (coussinet),
châle,
chelem,
chèque,
cipaye,
claymore,
clown,
club,
coaltar,
coke,
cold-cream,
comité,
commodore,
confort,
confortable,
constable,
contredanse,
convict,
coroner,
corporation,
cotre,
cottage,
cowpox,
crabes,
crag,
craque (cavité),
croquet,
croup,
dandy,
derby,
dériver (sur l'eau),
détective,
dévonien,
disqualifier,
dock,
dogue,
dollar,
drain,
dranet,
drawback,
drop,
dyke,
écorer,
essayiste,
esterlin,
étambrai,
euphuisme,
excise,
express,
falot (drôle),
fashion, fashionable,
festival,
flanelle,
flet, fletan (?),
flette (?),
flibot,
flibustier,
flin,
flint-glass,
flirter,
forfait (t. de courses),
franc-maçon,
gabet (girouette),
galé,
gault,
gentleman,
gibelet,
gigue (danse),
gredin (?),
grog,
groom,
guépard,
guignes (?),
guinée,
gutta-percha,
hadot,
handicap,
hanebane,
héler,
hocher (secouer) (?),
hourra,
humoriste,
humour,
hurluberlu (?),
importer, importation,
interlope,
interview,
jockey,
jury,
keepsake,
lai,
lasting,
lias,
lingot,
lingue,
loch,
lord,
lougre,
lunch,
macadam,
mac-farlane,
mackintosh,
malt,
mauve (mouette),
meeting,
mess,
mohair,
moire,
pamphlet,
pandémonium,
pannequet,
panorama,
paquebot,
paquet,
partenaire,
patchouli,
péniche,
plaid (manteau),
poney,
pouding, poudingue,
puddler,
puritain,
quaiche,
quaker,
quorum,
rail,
ray-grass,
record,
redingote,
reporter (subst.),
revolver,
rhum,
rob,
rosbif,
rout,
scalper,
schooner,
sélection,
sentimental,
silurien,
sinécure,
singleton,
sloop,
snob,
soda,
speech,
spencer,
spleen,
sport,
square,
starter,
steamer,
steeple-chase,
sterling,
stock,
stoff,
stopper (arrêter),
tallipot,
tartan,
tattersall,
tender,
tilbury,
tille (?),
tonnage,
toste,
touriste,
tramway,
transept,
trappeur,
trick,
truck,
truisme,
tunnel,
turf,
turnep,
véranda,
verdict,
vote, voter,
wagon,
warrant,
waterproof,
whist,
yacht.

§ 9. -- Norois.

On appelle norois, nordique, norrène, etc., le rameau le plus septentrional de la famille germanique, dont les principales variétés sont l'islandais, le danois, le suédois et le norvégien, que l'on désigne en bloc sous le nom de langues scandinaves. L'établissement des Normands, au Xe siècle, dans la partie de la Neustrie qui depuis a pris le nom de Normandie, et leur fusion avec la population indigène a eu pour conséquence l'introduction de quelques mots scandinaves dans les parlers de cette partie de la France, d'où ils se sont parfois propagés dans la langue française proprement dite. Comme il est naturel, c'est notre vocabulaire maritime qui doit le plus aux langues scandinaves. Nous leur avons emprunté les termes de mer suivants (47) :

bâbord,
bateau,
bitte,
bord,
bouline,
cingler (faire voile),
crique,
écarver,
écope,
étai (cordage),
étambot,
étrave,
fret,
guindas,
hauban,
haveneau,
hisser,
hune,
lof,
narval,
ouaiche,
rade,
ralingue,
sonde (?),
tillac,
tolet,
touer,
tribord,
vague,
vaigre,
varech,
varangue,
vibord.

Les termes de la langue commune que l'on peut avec vraisemblance rattacher à la même origine ne sont pas nombreux. On peut citer : flèche (de lard), gaber, guichet, l'anc. français guile (48), d'où guiller et guilleret, goupillon, hanter, laper, mésange, quenotte, et quelques emprunts plus récents, édredon, eider, elfe, geyser, harfang, nickel, renne, rutabaga (49).

Acre, bigre et diguer sont confinés en Normandie ; guipon appartient au langage des arts et métiers. Quant à bague (d'où bagage), bisquer, écraser, la provenance scandinave de ces mots est fort douteuse.

§ 10. -- Néerlandais.

Le néerlandais, avec ses deux variétés, hollandais et flamand, est une langue germanique du groupe dit bas allemand. Les Francs, dont la confédération s'étendait à l'origine entre le Mein, le Rhin et le Weser, parlaient-ils un idiome bas allemand, comme la géographie porterait à le croire ? Il ne servirait de rien de discuter ici cette question. Nous avons enregistré dans le § 6 tous les mots français dont l'introduction paraît due aux Francs, en nous fondant sur des raisons historiques, et sans nous embarrasser de distinguer dans les emprunts faits à l'allemand ancien ce qui peut être qualifié de haut ou de bas allemand (50). Nous ne relèverons ici que les mots passés en français à une époque relativement récente, et dont la provenance néerlandaise peut être considérée comme assurée.

Un groupe nombreux est formé par des mots relatifs aux choses de la mer :

affaler,
aigrefin (poisson),
amarrer,
bac,
bateau,
beaupré,
bélandre,
berme (de canal),
bôme,
bomerie,
bosseman,
bourset,
boyer,
cabillaud (51),
cague,
cajute,
cambuse,
capre (corsaire),
caquer,
carvelle,
clinfoc,
coq (cuisinier),
crone,
digue,
dock,
dogre,
drège,
droguerie (préparation du hareng),
drogueur (pêcheur de hareng),
dune,
écoute,
épisser,
équiper,
fauber,
flibustier,
foc,
gréer,
hourque,
lamaneur,
lest,
locman,
marsouin,
matelot,
merlin,
mouette,
nable,
ossec,
pinque,
quille,
saur (fumé),
senau,
stockfish,
vase,
vindas,
vrac.

En dehors de cette série, on peut encore citer :

beaucuit,
birambrot,
bitter,
bosse (faisceau de chardons),
bouquette,
bouquin,
bouterame,
brandevin,
bransqueter,
brindestoc,
brodequin,
broquelin,
bucail,
bure (puits de mine),
by,
calandre (charançon),
cancrelat,
cliver,
colza,
cranequin,
diève,
drille (soudard),
driller,
drogue (?),
égriser,
escalin,
étai (support),
étangue,
étape,
faille (vêtement, étoffe),
frelater,
gripper,
gruger,
guiller (fermenter),
heurtequin (?),
hie,
hobereau,
houblon,
kermesse,
laie, d'où layette,
lambrequin,
last,
manne (panier),
mannequin (petit panier),
mannequin (figure de bois),
maquignon (?),
miche (?),
musico,
nope,
plaque,
quinquenove,
reverquier,
sapan,
scorbut,
troussequin (de selle),
trusquin,
vacarme,
varlope,
vilebrequin (52).

§11. -- Provençal.

Les emprunts faits par le français, langue romane du nord, au provençal, langue romane du midi de la France, ont commencé de bonne heure. La Chanson de Roland désigne les païens sous le nom de Sarrazins, forme qui porte l'empreinte indéniable de la phonétique provençale (53). Au XIIIe siècle s'introduit le mot ballade, transcription du provençal balada, chanson à danser, qui nous est resté comme un témoin de la primauté du Midi dans le domaine de la poésie lyrique. Mais ce n'est qu'après la réunion au domaine royal des possessions de la maison de Toulouse, et surtout depuis la guerre de Cent ans, où le Nord et le Midi se solidarisèrent dans la lutte contre les Anglais, que les emprunts du français au provençal prennent une réelle importance. A partir de la fin du XIIIe siècle, les Méridionaux commencent à rédiger en français, d'abord des documents d'ordre politique, administratif ou judiciaire, puis des œuvres d'un caractère littéraire. Non seulement des mots provençaux isolés, comme cadeau, cadet, cadis, camail, etc., acquièrent le droit de cité, mais les oreilles françaises s'habituent si bien au suffixe ade, correspondant au français ée, que nos écrivains du XVe siècle forment des dérivés avec ce nouveau suffixe. Les événements politiques et littéraires du XVIe siècle, qui vit monter sur le trône de France, dans la personne de Henri IV, un roi de Navarre, et qui consacra la renommée de quelques grands écrivains méridionaux, comme Monluc, Du Bartas et Montaigne, favorisèrent singulièrement l'importation des mots provençaux. Mais la réaction de l'école de Malherbe et la concentration à Paris, sous Louis XIII et Louis XIV, de la production littéraire arrêtèrent ce mouvement. En somme, la langue française proprement dite doit relativement peu de chose aux parlers du Midi. Les auteurs de dictionnaires se sont plu à grossir leurs recueils d'une foule de termes venus du Midi ; mais ce ne sont que des termes techniques (pêche, marine, cuisine, institutions et industries locales, etc.), dont on ne saurait mettre sérieusement en doute le caractère provincial. Moins accueillants que nos devanciers, nous avons laissé beaucoup de ces termes aux bords de la Méditerranée ou aux rives de la Garonne. Nous croyons cependant avoir fait encore une part assez large à l'élément méridional, comme le lecteur pourra s'en convaincre en parcourant la liste des mots d'origine provençale que contient le Dictionnaire général.

Liste des mots d'origine provençale

abeille (54),
abraquer,
accolade (55),
aganter,
aiguade,
aiguillade,
aiguillat,
aillade,
ailloli,
aissaugue (56),
alarguer,
aliboufier,
alios,
alude,
amadou,
arcanson,
arcasse,
arpon,
arrioler,
asperge,
aspic (plante),
aubade,
auberge,
aubergine (57),
aufe,
auvel,
bâcler,
badaud,
bade,
badillon,
badin,
bagasse (femme),
bague,
baile,
baladin,
balandran,
ballade,
bancasse,
bandingue,
banquette,
barandage,
barigoule,
barras,
barricade (58),
barrique,
bartavelle,
basane,
bastide,
bastille,
bastonnade (?) (59),
battude,
baudroie,
bauffe,
bauque,
bécharu,
béret,
bergelade,
besaigre (?),
besau,
besoche (60),
bigarade,
bigorne (?) (61),
bigue,
biscotte,
bistortier,
bogue,
bombonne,
bordel,
bordigue,
boucau,
bouguière,
bouillabaisse,
bouilleau,
bouin,
bouléjon,
boulièche,
boulier (filet),
bouquer,
bourd,
bourgade (62),
bourgin,
bourgne,
bourjassotte,
bourrique,
boursal,
boutade (?),
boutargue,
boute,
brague,
brancade,
brancard,
brandade,
breste,
bridole,
brinasse,
brindille (?) (63),
brousse,
brugnon,
brusc,
brusquer (flamber),
bugadier,
busserole,
caban,
cabestan,
cabillet,
cabillot,
câble,
cabre,
cabrer,
cabri,
cabriole,
cabrion,
cabron,
cabus (64),
cacolet,
cadastre,
cade,
cadeau,
cadédiou,
cadenas,
cadet,
cadis,
cadole,
cagot,
cagoule,
cairon,
caissetin,
calandre (alouette) (?) (65),
calanque,
cale (66),
calère,
caliorne,
calisson (67) (?),
camail,
camelle,
campagnol (?),
cani (?),
canne,
cannelas,
canner,
canole,
cap,
capade,
cape,
capéer,
capeler,
capelet,
capeline,
capion,
capiscol,
capitoul,
capoulière,
capulet,
carde (68),
cardon,
cargaison,
carguer,
carnal,
carnassier,
carréger,
caserne,
casse,
cassie,
castel,
causse,
cèpe,
charade,
chatillon (69),
chavirer,
ciboule,
cigale,
civadière,
clovisse,
cocagne,
cocon,
combrière,
combuger (70),
comtat,
coquillade (71),
coquiole,
cossat,
coucourelle,
couffe,
coupeillon,
courantille,
courtier (?),
couton,
coutrier,
croquer (saisir avec le croc),
croupiat,
croustille,
cuiratier,
dame-jeanne,
daurade,
décapeler,
décaper,
défendude,
déjuc (72),
démascler,
dépiquer (le blé) (73),
déraper,
destrier (marteau),
détroquer,
donzelle,
dot,
drapade,
ébouriffé,
ébrouter,
églantine,
embrun,
émissole,
emparer,
empouter,
encabanement,
enchaussener,
enclotir,
ers,
esbroufer,
escalier,
escampativos,
escarbillat,
escarbit (?),
escargot,
espade,
espadrille,
espalmer,
espar,
esparcet,
espart,
esperlucat,
esquicher,
esquinter,
estadou,
estrade,
fadaise,
faguenas,
farandole,
farouch,
fasier,
fat,
fauchère,
félibre,
feuillard,
filadière,
fillasse,
flageolet,
flamant,
flûtet,
fougon,
fourcat,
fovic,
frisquet,
fustet,
gabare,
gabarit,
gabelle,
gabie,
galoubet,
gamache,
gambe,
ganse,
garbure,
gargamelle,
garigue,
garron,
gaver,
gaviteau,
gavotte,
genestrolle,
gesse,
gimblette,
girole,
glène,
goudron,
gouge (fille),
goujat,
grégeois,
grègue,
grenette,
griffon (source),
gui (vergue),
guider,
hauturier,
isard,
jarre,
jas,
jumart,
lampant,
largue,
larguer,
lazaret,
lime (citron),
linguet,
luisette,
luzerne,
madrague,
madrier,
magnanerie,
maje,
mante,
margouillet,
marque (lettres de),
martingale,
mascaret,
mascotte,
masque (sorcière),
mendole,
menon,
merlus,
mestre,
micocoulier,
milan,
mistral,
moque,
muge,
muscade,
muscadelle,
muscadet,
muscat,
naulage,
nougat,
ortolan,
panade,
panicaut,
pantenne,
parpaillot,
passade,
pastel (guède),
pastenade,
patard,
pébrine,
pecque,
pétarade,
picaillon,
picholine,
pinchina,
podestat (74),
police (d'assur.),
poncire,
presse (pêche) (?),
rabiole,
rapetasser,
rémolar,
remole,
remous,
représaille,
ressac (?),
roudou,
roure,
rufian,
salade (mets) (?),
sarrasin,
sasse,
savantas,
scier (ramer),
soubresaut,
soubrette,
subrécargue,
subrécot,
tin,
tourd,
tourlourou,
touselle,
triolet (trèfle),
troubadour,
truc,
truffier, truffière,
velours,
ventolier,
viguier,
virevau,
yeuse.

§ 12. -- Italien.

Dès le XIIe siècle, sinon plus tôt, la littérature en langue vulgaire de la France a joui d'une grande vogue au delà des Alpes et a servi de modèle aux premiers poètes qui se sont hasardés à composer en italien : c'est ce qui explique que la langue de Dante et de Pétrarque offre certains gallicismes facilement reconnaissables, pour le philologue, sous l'habit toscan (75). En revanche, comme l'influence de la littérature italienne sur la littérature française a été à peu près nulle jusqu'au XVIe siècle (76), on ne s'étonnera pas que l'ancien français n'ait pour ainsi dire aucun mot d'origine italienne (77). Les premiers emprunts se sont produits au commencement du XIVe siècle, et ils sont dus aux relations commerciales, diplomatiques et militaires qui devinrent plus fréquentes dès lors entre les deux pays. Il est curieux de les suivre à la piste : brigue remonte à 1314 ; florin apparaît en 1318, voguer en 1337 ; brigand, au sens de " fantassin ", est familier à Pierre Bersuire, qui traduit Tite-Live pour le roi Jean vers 1350 ; falot se trouve en 1371 ; Froissart se sert de caraque et de bande (troupe) ; ambassade et ambassadeur remplacent définitivement nos anciens mots ambassée et ambasseor sous Charles VI ; Arnoul Greban, qui compose sa Passion avant la mort de Charles VII, emploie brigade et calmer ; Chastellain, mort sous Louis XI, se sert de banquet et d'escade (pour escadre) ; Commines et Jean d'Authon, qui écrivent sous Louis XII, nous offrent barde (selle), bastion, cabinet, enfanterie (infanterie), révolter, etc. Enfin, le grand mouvement de la Renaissance, provoqué surtout par les expéditions des Français en Italie, amène une véritable invasion de mots italiens, invasion que l'on peut constater dans toutes les branches de l'activité humaine, mais qui est surtout sensible dans la littérature proprement dite, les beaux-arts (surtout l'architecture et la musique (78)), la guerre et le sport (notamment l'escrime et l'équitation). Les protestations passionnées de Henri Estienne arrêtèrent peut-être un instant l'engouement pour les choses et les mots d'Italie. Mais les emprunts reprirent bientôt, plus rares toutefois, et ils ont continué jusqu'à nos jours. Un millier de mots environ sont ainsi venus s'ajouter à notre vocabulaire. En outre, il ne faut pas oublier que l'italien, concurremment avec le provençal et l'espagnol, a contribué au développement du suffixe ade (79), et que nous lui devons le suffixe esque, § 149, et les superlatifs en issime, § 589.

Liste des mots d'origine italienne

accaparer,
accolade (80),
accort,
accoster,
adagio,
affidé,
affront,
agio,
agrouper,
alarme,
alerte,
alpiou,
altesse,
altier,
alto,
amouracher,
andante,
angarie (81),
animelle,
annonciade,
anspessade,
antichambre,
antiquaille,
apoco,
apostis,
appartement,
appoggiature,
aquafortiste,
aquarelle,
aqua-tinta,
arabesque,
arborer,
arcade,
architrave,
archivolte,
argousin,
ariette,
arlequin,
armeline,
arpège,
arquebuse,
arsenal,
artichaut,
artisan,
asple,
assassin,
atlante,
attaquer,
attitude,
avarie,
avocette,
babiole,
bagatelle,
bagne,
baguette,
baile,
baïoque,
balcon,
ballet,
ballon,
balourd,
balustrade,
balustre,
balzane,
bambin,
bamboche,
banco,
bande (troupe),
banderole,
bandière,
bandin,
bandit,
banque,
banqueroute,
banquet,
baraque,
barbaresque,
barbe (cheval),
barbe (ministre),
barbon,
barcarolle,
bardache,
barde (selle),
bardot,
barigel,
baroque,
barque,
barquerolle,
barrette,
barricade (?) (82),
basin,
basque,
basse (pente),
basset (diapason bas),
bassette,
baste (rempli),
baster,
bastingue,
bastion,
bastonnade (?) (83),
bataillon,
batifoler (?),
batoude (?),
battiture,
bécarre (?) (84),
becfigue,
becque-cornu,
belladone,
belvédère,
bergamasque,
bergame,
bergamote,
berlingot,
bertavelle,
bestiasse,
bicoque,
bidet,
bilan,
biribi,
bisbille,
biscotin,
bisser,
blanque,
bocal,
bochette,
bombardon,
bombe,
bonace,
bonasse,
bonne-voglie,
bosquet,
botte (à l'escrime),
boucon,
bouffe,
bouffon,
bougran (?) (85),
bourgade (?) (86),
bourle,
bourrasque,
boussole,
braconnière (?),
braque (?),
bravache,
bravade,
brave,
bravo,
bravoure,
brésoles,
bricole,
brigade,
brigand,
brigantin,
brigue,
briller,
brio,
brocart,
brocatelle,
brocoli,
bronze,
broque,
brusque,
bucentaure,
buffet (partie du casque) (?),
buffle,
bulletin,
burail,
burat,
buratin,
burle, burlesque,
busc,
buste (tête),
buste (boîte),
cabalette,
cabinet,
cabriole,
cabus (87),
cacade,
cadence,
cadène,
cadre,
café,
cagne,
caïque,
caisson,
calade,
calamite,
calcet,
cale (t. de marine) (88),
caleçon,
calepin,
caler,
calibre,
calisson (?) (89),
calme,
calque,
cambiste,
camée,
camérier,
camerlingue,
camisade,
camisole,
camp,
campagne,
campanile,
canaille,
canasse,
canevas,
canevette,
cannetille,
canon (tube) (90),
cantabile,
cantaloup,
cantanette,
cantate,
cantatrice,
cantilène,
cantine,
canton,
cantonade,
cap,
cape,
capitan,
capitane,
capitan-pacha,
capiton,
caponnière,
caporal,
câpre,
caprice,
capriole,
capuce,
capuchon,
capucin,
caque-sangue,
carabé (?) (91),
carafe,
carafon (grande carafe),
caraque,
carat,
caravelle,
carbonaro,
carbonnade,
carcasse,
cardasse,
cardinalice,
caresse,
caricature,
carlin (monnaie),
carline,
carmagnole (?),
carnage,
carnation,
carnaval,
carne (viande),
carnier,
carpion,
carrare,
carrière,
carriole,
carrosse,
carrousel,
cartel,
cartelle,
cartisane,
carton,
cartouche,
casanier,
casaque,
cascade,
cascatelle,
case (92),
casemate,
casino,
cassade,
casse,
cassetin,
cassette,
cassine,
castrat,
catacombe,
catafalque,
caulicole,
cavagnole,
cavalcade,
cavalcadour,
cavalerie,
cavalier,
cavatine,
caveçon,
caver,
cavet,
caviar,
cédrat,
cèdre (cédrat),
céleri,
cervelas,
chamade,
charlatan,
chébec,
chêmer,
chicorée,
chicotin,
chiffre,
chiourme,
chipolin (?),
chipolata,
cicerone,
cimeterre,
cipolin,
cistre,
citadelle,
citadin,
citrouille,
coda,
coïon,
colaria,
colis,
colline,
colmatage,
colonel,
coloris,
comite,
comparse,
compartiment,
compliment (93),
composteur,
concert,
concerto,
concetti,
conche (ajustement),
condottiere,
confessionnal,
confident,
congédier,
conjoncture,
consulte,
contorniate,
contour,
contourner,
contralto,
contrapontiste,
contraste,
contrebande,
corniche,
corridor,
cortège,
cosser,
costume,
coupole,
courbette,
courrier,
course,
coursive,
courtisan,
créat,
crédence,
crédit,
crescendo,
croupade,
croustade,
cuirasse (?) (94),
cunette,
damasquiner,
darse,
déboucher (sortir) (?),
décamper,
décréditer,
dégrader,
délicatesse,
désastre,
désespérade,
dessein,
dessin,
dessinateur,
dessiner,
dévoiler (?),
dilettante,
discale,
discompte,
discourtois,
discrédit,
disgrâce,
disgracier,
disgracieux,
dispache,
dito,
diva,
do,
dogaresse,
dogat,
doge,
dôme,
donne,
donzelle,
douane,
douche,
drisse,
drogman,
ducat,
duelliste,
duettino,
duo,
ébrillade,
écarter,
écaveçade,
écorne,
embarrasser (?),
embasement,
embuscade,
embusquer,
émeri,
encasteler,
encastrer,
endive,
éparer,
épontille,
épouvante,
escabelon,
escache,
escadre,
escadron,
escalade,
escale,
escapade,
escarcelle,
escarmouche,
escarole (95),
escarpe,
escarpin,
escarpolette,
escaveçade,
escoffion,
escompte,
escopette,
escorte,
escouade (96),
escrime,
escroquer,
espade,
espadon,
espale,
espalet (?),
espalier,
espion,
esplanade,
espolette,
esponton,
esquif,
esquine,
esquisse,
esquiver,
estacade,
estafette,
estafier,
estafilade,
estame, estamet,
estampe,
esteminaire (?),
estive,
estiver (comprimer),
estoc,
estocade,
estouffade,
estramaçon,
estrapade,
estrapasser,
estropiat,
estropier,
étoupin,
étranguillon,
étudiole,
façade,
faciende,
faciliter,
faïence,
faillite,
falbala,
falot,
falquer,
falquet,
fanal,
fanfreluche,
fantasia,
fantassin,
fantoccini,
fantoche,
faquin,
farniente,
favori,
festin,
fiammette,
fiasco,
figurine,
filaret,
filatrice,
filigrane,
filon,
filoselle,
filtre,
finale,
finiment,
fioriture,
flanquer,
flasque (poire à poudre),
florence,
florencé,
florin,
fonte (fourreau),
forçat,
forfanterie,
forlane,
fortin,
fougasse,
fougue,
fourniment,
fracas,
franco,
francolin,
frangipane,
frasque,
frégate,
fresque,
fronton,
fruste,
fugue,
fumerole,
funester,
furie,
fusarole,
fuste,
gabatine,
gabion,
gala,
galantiser,
galbe,
galéace,
galéga,
galère,
gambade,
gambe,
gambiller,
gambit,
gamelle,
ganache,
garcette,
gargousse,
gavette,
gazetin,
gazette,
généralissime,
giberne,
gigantesque,
girafe,
girande,
girandole,
girasol,
gnacare,
gobin,
goffe,
golfe,
gondole,
gonfler,
gouache,
gourdin,
grabeler,
grabuge,
gradin,
gradine,
graffite,
grandiose,
granit,
granitelle,
grappin,
graticule,
graticuler,
grège,
grotesque,
grotte,
group,
groupe,
guide,
guider,
guidon,
guirlande,
gumène,
halte,
hautboïste,
hippogriffe,
horaire,
humoriste,
imbroglio,
impastation,
importer,
imposte,
impresario,
improviser,
improviste,
incaguer,
incamération,
incarnadin,
incarnat,
incognito,
indice (index),
infanterie,
influenza,
ingambe,
in petto,
intaille,
intermède,
intrigue,
investir,
isoler,
jarde,
jovial,
jujube,
lagune,
lampion,
lavande,
lave,
lazaret,
lazarone,
lazzi,
lésine,
leste,
lettrine,
libretto,
ligue,
lisse,
liste,
listel,
longuerie,
loterie,
loto,
luciole,
lumachelle,
lustre,
lustrine,
macaron,
macaronée,
macaroni,
macaronique,
maceron,
machiavélisme,
madone,
madrépore,
madrigal,
magasin,
majolique,
majordome,
makis, maquis,
malandrin,
mandoline,
manège,
manganèse,
manquer,
maquette,
marasquin,
marquer,
marquis,
martagon (?),
mascarade,
mascaron,
masque,
massepain,
matasse,
matelas,
médaille,
médaillon,
médicastre,
menestre,
méniane,
menon,
mensole,
mercantile,
merlon,
mesquin,
messer,
mestre,
mezzanine,
mezzo-soprano,
mezzo-termine,
mezzo-tinto,
misaine,
moche,
modèle,
modillon,
môle,
moncayar,
mont-de-piété,
morbidesse,
mortadelle,
mosaïque,
mouflon,
mousquet,
mousse (apprenti marin) (?),
mousseline,
moustache,
mozette,
muscadin,
muserole,
nacre (?),
naville,
négociant,
néroli,
niche (enfoncement),
nielle (gravure),
nocher,
noliser,
nonce,
numéro,
octavin,
ognette,
opéra,
orangeade,
oratorio,
organsin,
orgeade,
orle,
orviétan,
outre (sac),
pagnote,
paladin,
palan,
palanque,
panache,
pantalon,
papalin,
paragon,
parapet,
parasol,
paravent,
parer (t. d'escrime),
parère,
parfumer,
paroli,
partisan,
pasquin,
passade,
passège,
pastel (crayon),
pastiche,
pavesade,
pavie,
pavois,
pécore,
pédale,
pédant,
pédon,
péotte,
pépérin,
perroquet,
perruque,
pertuisane,
pesade,
pétéchie,
pianoforte,
piastre,
piédestal,
piédouche,
piffre,
pilastre,
pilote,
piste,
pistolet,
piston (?),
pittoresque,
plage,
plan,
plastron,
podestat,
pointille,
polichinelle,
poliment (action de polir),
poltron,
pommade (voltige),
pommade (cosmétique),
popeline,
populace,
porcelaine,
portor,
portulan,
poste,
postiche,
postillon,
poulevrin,
poulpeton,
pouzzolane,
preste,
primevère (?),
profil,
proue,
pulvérin,
putanisme,
quaderne,
quarantie,
quaterne,
quintette,
ramasse,
rambade,
ramingue,
raquette,
rassette,
ravelin (demi-lune),
rebuffade,
récolte,
redoute,
régal,
régate,
remorquer,
rémoulade,
renégat,
repolon,
représaille,
ressac (?),
retirade,
réunir,
réussir,
réussite,
reversi,
révolter,
riposte,
risque,
ristorne,
ritournelle,
rival,
riz,
rodomontade,
roquette,
roson,
rossolis (liqueur),
rubace,
rubican,
rufian,
saccade (?),
sacoche,
sacripant,
salade (casque),
saltimbanque,
satin,
saucisson,
sbire,
scabellon,
scapin,
scaramouche,
scier (ramer) (?),
secque,
semoule,
sentinelle,
sépia,
sequin,
sérénade (?),
séton (?),
sgraffite,
sigisbée,
signaler,
siller (?),
simarre,
sinistre (subst.),
siroco,
site,
smalt,
soffite,
soldanelle,
soldat,
soldatesque,
solde,
solder,
solfatare,
solfège,
solo,
sonate,
soprano,
sorbet,
sorgho,
sorte,
sortir,
soubreveste,
soulte,
sourdeline,
sourdine,
soutane,
spadassin,
spalmer,
spalt (asphalte),
spinelle,
stalle,
stance,
stangue,
stenté,
strapasser,
strapontin,
strasse,
strette,
stuc,
stylet,
supercherie,
svelte,
tablature,
taillade,
talc (?),
talisman (?),
taquin,
tarabuster (?),
tare,
tarentelle,
tarentule,
targuer,
tarif,
tarot,
tartane,
tavaïole,
ténor,
téorbe,
tercet,
terre-plein,
tic,
timbale,
tirade,
tombola,
toper,
tore,
toron,
torpille,
torse,
torticolis,
tournesol (?),
tracanner,
trafic,
tramontane,
transit,
travertin,
travestir,
tremolo,
tremplin,
tré-sept,
tribune,
triduo,
trille,
tringa,
trinquet,
trio,
trivelin (bouffon),
trivelin (instrument),
trombone,
tuf,
turco,
turquin,
tutti,
vade,
valise,
vallon,
vasque,
vedette,
veillaque,
verdée,
vermicelle,
vessigon,
veste,
veston,
vigie,
villa,
villanelle,
villégiature,
violon,
violoncelle,
virevolte,
virtuose,
voiturin,
volcan,
volte, volter,
volte-face,
voltiger,
volute,
zain,
zani,
zéro,
zibeline,
zinzolin.

§ 13. -- Espagnol.

L'Espagne a été souvent visitée par les Français du moyen âge, chevaliers qui allaient prendre part à la lutte des chrétiens contre les Maures, ou pèlerins qui se rendaient au tombeau de saint Jacques de Compostelle, et elle joue un grand rôle dans nos anciennes chansons de geste. Dès le XIe siècle, nos poètes emploient quelques mots espagnols, mais ce ne sont guère que des titres de chefs païens, considérés comme des sortes de noms propres, pour la plupart d'origine arabe : algalife (calife), almaçor (de l'arabe al-mansor, le victorieux), amirafle (amiral, émir), aufage, etc. Au XIIe siècle, l'auteur du Roman de Thèbes connaît le marabotin, monnaie d'or que les Espagnols nomment maravedi, et l'on trouve fréquemment dans les chansons de geste auqueton (forme primitive de hoqueton), aucube (tente ; cf. alcôve), meschin, meschine (garçon, fille ; cf. mesquin). Au XIIIe siècle apparaît genette, nom d'un mammifère voisin de la martre ; au XIVe, genet, mesquite (mosquée) ; au XVe, caban, infant, laquais, etc. Mais ce n'est qu'à partir du XVIe siècle -- et surtout de la seconde moitié -- que le français a fait un accueil véritablement large aux mots espagnols, sur qui rejaillissait quelque chose du prestige de la monarchie des Charles-Quint et des Philippe II, prestige qui subsista longtemps encore après que cette monarchie ne fut plus que l'ombre d'elle-même. Presque tous les mots espagnols qui se sont réellement et complètement incorporés à notre langue (alcôve, anchois, artichaut, camarade, canot, disparate, fanfaron, etc.) ont passé chez nous à la fin du XVIe siècle ou au XVIIe. Depuis lors, nous avons assurément beaucoup emprunté ; mais la plupart de ces emprunts ne portent que sur des termes spéciaux (surtout des noms d'animaux et de produits exotiques), qui ne peuvent prétendre à une place bien importante dans la langue générale (97). Il est à remarquer que, grâce à l'extension coloniale qu'a prise l'Espagne au XVIe siècle, sa langue a depuis lors servi de véhicule à une quantité de mots d'origine américaine, comme elle avait autrefois servi de véhicule à la plupart des mots arabes que contiennent les langues européennes.

Liste des mots d'origine espagnole

abaca,
abricot,
accastiller,
adjudant,
alberge,
alcade,
alcarazas,
alcôve,
alezan,
alfange,
algarade,
alguazil,
alicate,
alizari,
alligator,
alpaca,
alpiste,
aludel,
anchois,
andalou,
armadille,
arrobe,
arzel,
aubère,
aviso,
avives (98),
azerole,
bagasse (canne à sucre),
balse,
bandolier,
bandoulière,
barille,
basquine,
baste (as de trèfle),
bastonnade (99),
bécune (100),
berne (couverture),
bigotère,
bizarre,
boléro,
boucaro,
bouille,
bourjassotte (?),
bourrache (bouteille),
brasero,
busquer,
caban,
caboter,
cabouille,
cacao,
cachucha,
cacique,
caïman,
calebasse,
calenture,
caliche,
camarade,
camarilla,
camériste,
canari,
canéfice,
cannibale,
canot,
caparaçon,
cape,
capilotade,
carabe (nacelle),
carabé (?) (101),
caracal,
caracole,
caragne,
carambole (bille rouge),
carambole (fruit) (?) (102),
caramel,
carapace,
caret (tortue),
carmeline,
cascarille,
casque,
cassolette,
castagnette,
cavèce,
caye,
cédille,
cévadille,
chaconne,
chaloupe,
charabia,
chervis,
chinche,
chinchilla,
chocolat,
cigarre,
coca,
cochenille,
codille,
compliment (103),
condor,
contra-yerva,
copal,
coronille,
corrégidor,
cortès,
couperose (sulfate),
courbaton,
créole,
curcuma,
débarcadère,
démarcation,
dengue,
diane,
disparate,
don (seigneur),
dona,
Don Quichote,
doradille,
doublon,
dragan (?),
drave (?),
duègne,
Dulcinée,
écoutille,
écoutillon,
écubier,
eldorado,
élémi,
embarcadère,
embarcation,
embargo,
embarrasser (?),
enhendé,
épagneul,
épinard,
escamoter,
escouade (104),
espadrille,
espagnolette,
estampille,
estéminaire (?),
estère,
fabuliste,
falque (bordage),
fandango,
fanfaron,
felouque,
flotte (réunion de vaisseaux),
flottille,
frutille,
fustet (?),
gamache,
gano,
garcette (coiffure),
gavache,
genet,
genette (animal),
gerboise,
goyave,
grandesse,
grègue (?),
guano,
guérilla,
guitare,
hâbler,
hamac,
hidalgo,
hiloire,
hombre,
indigo,
jalap,
jonquille,
lama,
laquais,
lasso,
lilas,
lime (citron) (?),
liquidambar,
lunel,
maïs,
majorat,
majordome,
mammée,
mancenille,
mangle,
mangouste,
maniguette,
manille,
mantille,
maritorne,
marmelade,
marquette,
marron (esclave),
martagon (?),
mastigadour,
matador,
matamore,
matassin,
maté,
médianoche,
mélasse,
menin,
mérinos,
métis,
passacaille,
mohatra,
mordache (bâillon),
morfil (ivoire),
morion,
mosquée,
mousse (apprenti marin) (?),
moustique,
mulâtre,
nacarat,
natron,
nègre,
nopal,
noria,
octavon,
oille,
olla-podrida,
once (lynx) (?),
pagne,
palmiste,
parade (arrêt),
parage (région maritime),
paraguante,
parangon,
parer (arrêter),
patache,
patagon,
palate,
peccadille,
pépite,
picador,
picorée,
piécette,
pigne,
pite (agavé),
placer (gisement),
platine,
ponte,
préside,
quadrille,
quintille,
rancio,
rastacouère,
réalgar,
récif,
rémolin,
repolon,
résille (?),
ressac (?),
romance,
rossinante,
roupille,
rubican,
salpicon,
salsepareille,
salve (plateau),
sapote,
sapotille,
sarabande,
sarbacane,
sargasse,
sassafras,
saynète,
séguédille,
sérénade,
serron,
sieste,
silo,
spadille,
tablouin,
tomate,
toper,
toréador,
tourdille,
tournesol (?),
tride,
vanille,
vérine (tabac),
vertugadin,
vétille,
zagaie,
zain,
zinzolain,

§ 14. -- Portugais.

Malgré l'établissement d'une dynastie française, la maison de Bourgogne, en Portugal au moyen âge (1095), la langue portugaise n'a rien fourni au français avant l'époque moderne, et ce qu'elle a fourni est bien peu de chose. A deux ou trois exceptions près, tous les mots portugais qui nous sont devenus familiers désignent des objets (produits naturels ou manufacturés) de provenance asiatique, africaine ou américaine ; nous les devons à l'expansion coloniale et commerciale que prit le Portugal après la découverte du cap de Bonne-Espérance par Vasco de Gama (1497). On peut dire notamment que la plupart des mots malais que contient le vocabulaire français ont dû nous arriver par le canal du portugais.

Liste des mots d'origine portugaise

acajou,
albinos,
autodafé,
bambou,
banane,
banian,
bayadère,
béribéri (105),
bézoard,
caire (106),
calin,
carabé (107),
carambole (108) (fruit),
caste,
cipaye,
coco,
crabe (myrte),
fétiche,
macaque,
mandarin,
marabout,
moscovade,
mousson,
pagode,
palanquin,
petun,
pintade,
sargasse,
serval,
tombac,
travade,
véranda.

§ 15. -- Roumain.

Le roumain, langue officielle de la Roumanie, royaume formé à une époque toute récente par la réunion des principautés de Moldavie et de Valachie, a mêlé à son fonds latin primitif un grand nombre d'éléments GRs, turcs, slaves, etc. Il n'a exercé aucune action sur le vocabulaire français ; on peut noter toutefois que l'Académie a admis dans son Dictionnaire les deux mots roumains hospodar et vayvode, tous deux d'origine slave, qui ont été pendant longtemps les titres officiels des souverains ou gouverneurs de Moldavie et de Valachie. Mais, à vrai dire, ces mots ne sont pas plus français que tant d'autres termes de la langue roumaine que les auteurs de récits de voyage ou d'études historiques qui écrivent en français n'hésitent pas à employer dans leurs livres, en les mettant ou non entre guillemets, comme boyar (109) (propriétaire), camaras (trésorier particulier), dezetina (impôt sur les ruches), haiduc (110) (bandit), ispravnic (collecteur), keroutsa (carriole), mamaliga (bouillie de maïs), poslujnic (paysan étranger), postelnic (maréchal de cour), etc., etc.

§ 16. -- Patois français.

Le français littéraire a pour base le dialecte propre de l'Ile-de-France, qui se distingue par certains traits des autres dialectes ou patois de la langue d'oïl. Une étude phonétique attentive nous montre qu'à ce fonds primitif sont venus s'ajouter, en petite quantité, il est vrai, des mots appartenant à d'autres dialectes. L'e long et l'i bref du latin deviennent ei devant une nasale dans frein, de frenum ; plein, de plenum ; sein, de sinum, etc. Comment expliquer que la langue littéraire dise avoine, de avena ; foin, de fenum ; moins, de minus, sinon en supposant que ces formes lui sont venues des dialectes de l'Est, où elles sont régulières ? Le c primitif devant a se change en ch dans champ, chant, chanter, château, chemin, cheval, etc. Comment rendre compte de caillou, carde, cage, etc., sans les rapporter aux parlers de la Picardie et de la plus grande partie de la Normandie, où la conservation du c explosif nous apparaît comme une règle constante (111) ? La phonétique nous est donc d'un précieux secours, mais elle ne suffit pas toujours à nous renseigner exactement. Certains ont vu des emprunts faits au dialecte picard dans les mots français attaquer, camp, canaille, se fondant uniquement sur la présence d'un c (qu) explosif dans ces mots : d'autres considérations nous montrent que cette opinion est fausse, et que les mots en question nous viennent de l'italien. En revanche, tel mot dialectal, notoirement connu comme tel, peut ne porter en lui-même aucune trace de son origine : tel est le cas du berrichon champis (bâtard), écrit champi par George Sand au titre d'un de ses romans : François le Champi. L'histoire lexicographique de la langue d'oïl, embrassée dans tous ses dialectes, n'est pas encore assez avancée pour nous permettre de connaître exactement l'origine et l'extension de chaque vocable. Démêler les éléments patois que renferme le français proprement dit est donc une tâche très délicate ; nous ne donnons la liste suivante que comme une ébauche. Il est important de remarquer que beaucoup des mots qu'elle renferme n'appartiennent pas réellement à la langue commune : ce sont des termes spéciaux, désignant ordinairement des choses locales. Il n'est pas tout à fait exact de dire que le français a emprunté ces mots-là aux patois : ce qui est vrai, c'est qu'ils sont et qu'ils restent patois, bien qu'il ait semblé bon aux auteurs de dictionnaires français de leur donner une place dans ces recueils. Il ne faut donc pas que la longueur de cette liste fasse douter de l'exactitude de ce que nous avons dit plus haut, à savoir que le français n'a fait accueil qu'à un très petit nombre de mots dialectaux étrangers au parler primitif de l'Ile-de-France.

Liste des mots d'origine dialectale

abeille (112),
achoppement,
achopper,
acoulure,
acre,
affiquage,
affiquet,
affûtiau,
âge (timon),
aigliau,
aiguail,
aiguayer,
aiguière,
aplet,
arantèle,
armoire,
avillon,
banche,
barbiche (?),
barbouquet,
beaucuit,
bécard,
bécasse,
beige (?),
benêt,
bèquebois,
béquer (113), etc.,
béquerolle,
béquille,
bercail,
bêta,
bétoire,
béton (mortier),
biche,
blancard,
blaude,
blavelle,
blavet,
blêche,
bocage,
boquillon,
bouée (114),
bouquet (de fleurs),
bouquet (115) (petit bouc),
bouquet (dartre),
bouquette,
bouquin (embouchure),
bouracher,
broc (broche),
brocard (?),
broquer,
broquette,
broquillon,
bruman,
bucail,
buquet,
buquette,
cabaret,
caboche,
cacheron,
cage,
cahute,
caillou,
calandre (116),
calot (noix),
calumet,
cambrer (?),
camperche,
camus,
caniche,
canon (117),
carbouille,
carde,
caret (touret),
carne (coin),
carogne,
carqueron,
cartayer (118) (?),
catiche,
caudrette,
chabot,
champis,
charotte,
chopper,
chouquet,
cluse,
combuger (119),
copeau,
copter,
coque (?),
corbigeau,
corroi,
crételer,
crevette,
déboqueter,
déjuc (120),
dépiauter,
dérivotte,
derle,
déroquer,
détret,
devanteau,
douzil,
dravée, dravière,
ducasse,
ébotter,
écafer,
écagne,
écaille,
écale,
écanguer,
écente (121),
échalier,
écobuer,
écoucher,
écouer,
écoufle,
effiloquer,
encassure,
encoqûre (?),
éponte,
équignon,
équiper,
escarbille,
esclipot,
escourgeon,
esquipot,
estaminet,
esteuble,
esturgeon,
étapliau,
éteule,
étibot,
étier,
étiquette,
étoquiau,
étrieu,
étriquer,
fabliau,
fagne,
faille (solution de continuité),
falun,
faro,
faucard,
fauchette,
fauchon,
fierte,
flamiche,
flaque,
flasque (madrier),
foulque,
fourgon,
franquette,
freluquet,
gabégie,
galet,
gaspiller,
gavion,
gerzeau,
ginguer,
ginguet,
girolle,
grimoire,
grincheux,
grisou,
guignard,
hachotte,
hagard,
hanebane,
harengaison,
harenguière,
harle,
hercher,
hoquet,
houille,
judelle,
loque (?),
loquet,
louche (cuillère),
loure,
macroule,
maque,
margoulette,
miquelot,
muche-pot (à),
myrtille,
pieuvre,
pisé,
plateure,
potiche,
potin (commérage),
pouliche,
quai,
quenaille,
quenotte,
reluquer,
remugle (?),
renasquer (?),
requin (?),
requinquer,
revolin,
ribote,
roquet (manteau),
rouche,
salicoque,
seille,
sart,
stopper (raccommoder),
taquet,
tique,
tôle,
torque, torquette,
trique,
triqueballe,
troquer,
usine,
varaigne,
vergne,
vergue,
veule,
yole.

§ 17. -- Patois de la Suisse romande (franco-provençal).

Les cantons de Neuchâtel, de Vaud et de Genève et, en partie, ceux de Berne, de Fribourg et du Valais, ont des patois d'origine romane qui tiennent à la fois de la langue d'oïl et de la langue d'oc. On a proposé de désigner l'idiome de ces pays sous le nom de franco-provençal, en y adjoignant les patois de la Savoie, du Dauphiné septentrional, du Lyonnais, du Forez, de la Bresse et du Bugey, que d'autres rattachent au provençal proprement dit. Quelques-uns des mots qui nous sont venus de cette région se sont vite acclimatés, et personne n'en sent plus la provenance exotique : tels sont avalanche, chalet, crétin, glacier, goitreux, marron et rave. Les autres conservent toujours un caractère sinon strictement local, au moins spécial à tel ou tel groupe d'études, par exemple moraine, névé et piolet, qui ne sont familiers qu'aux géographes ou aux touristes membres d'un club alpin.

Liste des mots d'origine franco-provençale

avalanche,
avoyer,
bésolet,
bouquetin,
chalet,
crétin,
échandole (122),
génépi,
glacier,
goitreux,
grèbe,
grianneau,
lavaret,
lisier,
marron,
mélèze,
moraine,
névé,
piolet,
rave,
umble.

§ 18. -- Créole.

Par créole on entend spécialement la langue parlée dans les colonies françaises des Antilles (la Guadeloupe, la Martinique, etc.) ; mais on peut englober sous la même dénomination l'idiome de la population française du Canada, de l'île Maurice (aujourd'hui à l'Angleterre) et de l'île de la Réunion. Ces parlers si divers ont au moins un trait commun dans leur vocabulaire, c'est que l'élément français, qui en fait le fond, s'y est incorporé des termes venus soit des idiomes des aborigènes, soit des langues d'autres nations colonisatrices (espagnol, hollandais, anglais, etc.). On peut dire que la plupart des mots soit proprement américains, soit espagnols, anglais, hollandais, etc., que nous devons à notre expansion coloniale en Amérique nous sont venus par l'intermédiaire du créole. On trouvera la liste complète des mots de la première catégorie au § 30 ; quant aux mots de la seconde, parmi lesquels figure le mot créole lui-même, on n'aura pas de peine à les reconnaître dans les listes des emprunts faits à chacune des langues européennes. Nous ne signalerons ici que quelques mots créoles dont il n'a pas été possible d'établir avec certitude la provenance originaire, ou qui offrent un intérêt particulier.

Liste des mots d'origine créole

bouganèse,
cachiment,
calumet,
corossol,
coui,
couscou,
hébichet,
liane (123),
mondrain,
morne (montagne),
orignac,
ouragan,
palétuvier,
palmiste,
plaqueminier,
vesou.

§ 19. -- Basque.

Le basque, parlé aujourd'hui par environ un million de personnes, tant en Espagne qu'en France (arrondissements de Bayonne et de Mauléon), représente, dans son fonds primitif, une langue (probablement celle des anciens Ibères) qui est tout à fait étrangère au système indo-européen. On a quelquefois cherché à expliquer par des racines basques des mots français dont l'étymologie nous échappe encore, mais ces tentatives n'ont donné aucun résultat sérieux. Le français n'a rien emprunté directement à la langue basque (124) ; tout au plus quelques-uns des mots que nous avons pris à l'espagnol peuvent-ils se ramener à cette origine, comme anchois (125) et chaconne (126). On a proposé de voir dans le hollandais kabeljauw (d'où le français cabillaud) une métathèse pour bakkeljau, qui serait le basque bacallaoa ; mais cela n'est rien moins qu'assuré. Enfin notons que si le mot orignac, qui désigne une variété d'élan, est incontestablement d'origine basque, il nous est venu par le Canada, où des émigrants de la région de Bayonne ont dû l'importer au XVIe siècle.

§ 20. -- Slave. -- Lithuanien.

Les langues slaves (polonais, russe, ruthène, tchèque, serbo-croate, slovène, etc.) ne paraissent avoir fourni que deux mots au français du moyen âge, sable (martre) et soquenie, devenu aujourd'hui, par substitution de suffixe, souquenille. Le nom même des Slaves, latinisé en Sclavi (127), a pénétré, à l'époque des croisades, peut-être par l'intermédiaire des Vénitiens, qui faisaient beaucoup de prisonniers en Esclavonie, dans l'usage général de l'Europe occidentale avec le sens qu'a conservé le français esclave (128) ; mais ce mot n'est employé au moyen âge que dans des textes rédigés en Orient, et ce n'est qu'à la fin du XVe siècle, comme emprunt à l'italien, qu'il prend racine chez nous (129). A l'époque moderne, les relations commerciales et politiques ont introduit en français un certain nombre de mots slaves, surtout des mots polonais et russes. On remarquera que le nombre de ceux qui ont réellement perdu leur caractère exotique est très restreint, les mots qui sont restés affectés à la désignation d'objets ou d'institutions propres aux peuples slaves, même ceux qui nous sont les plus familiers, comme ban, guzla, knout, rouble, tsar, etc., ne devant pas réellement entrer en ligne de compte : tout au plus peut-on en citer une bonne douzaine, et ceux-là seuls sont vraiment français. Aussi ne faut-il pas s'étonner que le Dictionnaire général ne donne qu'une faible partie des mots slaves (spécialement des mots russes) que des relations littéraires et politiques plus intimes entre la France et la Russie introduisent chaque jour, mais qui ne peuvent prétendre qu'aux égards qu'on a vis-à-vis d'étrangers (130). Dans la liste qui suit nous avons compris non seulement les mots proprement slaves, -- qui souvent ne sont arrivés en français que par l'intermédiaire de l'allemand ou d'une autre langue, -- mais quelques mots d'origine diverse, pour lesquels le slave semble avoir servi de véhicule.

Liste des mots d'origine slave

archine,
ban (commandant),
boyard,
briska,
calèche,
corsac (131),
cosaque,
cran (raifort),
cravache,
diogot,
droschki,
esclave,
guzla,
houra,
knout,
mammouth,
mazurka,
obus,
polka,
prame (132),
rédowa,
sable,
schabraque,
shako,
souquenille,
steppe,
tsar,
ukase,
vampire,
vitchoura,
zibeline (133).

A côté du slave, le lithuanien mérite une simple mention, comme source de l'allemand elend, d'où est tiré le français élan (cerf).

§ 21. -- Hébreu.

La plupart des mots hébreux (134) qui ont passé en français (et ils sont bien peu nombreux) remontent à la traduction latine de la Bible faite par saint Jérôme, dans laquelle un certain nombre de termes, pour lesquels le latin ne semblait pas offrir de correspondants exacts, furent conservés sous leur forme originale (135). Nous citerons comme ayant cette provenance :

alléluia,
amen,
chérubin,
éden,
éphod,
géhenne,
hosanna,
hysope,
jubilé,
manne,
Messie,
pâque,
pharisien,
sabbat (136),
séraphin,
sicle,
zizanie.

A la littérature juive postérieure se rattachent : cabale, rabbin, sanhédrin, et un terme de droit civil français, cheptel de fer (137). A une époque récente, on a emprunté tohu-bohu au texte hébreu de la Genèse (138).

§ 22. -- Arabe.

L'arabe est, comme l'hébreu, une langue sémitique ; nous lui devons un nombre relativement considérable de mots, qui sont arrivés dans notre langue par deux voies différentes. Le prestige de la science arabe au moyen âge a amené la traduction en latin d'ouvrages de mathématiques, d'astronomie, de médecine, d'alchimie, etc., composés en arabe et qui se sont rapidement répandus dans toute l'Europe occidentale : c'est dans ces traductions latines que le français a pris la plupart des termes scientifiques qu'il doit aux Arabes. D'autre part, l'expansion territoriale de la domination musulmane, qui, après avoir failli, au VIIIe siècle, s'imposer à la France elle-même, a subsisté en Espagne jusqu'au XVe siècle, et les expéditions des croisades, que l'on peut considérer comme en étant la contre-partie, ont créé de multiples points de contact entre les deux nations : aux emprunts par le livre sont venus s'ajouter les emprunts par la parole. Les mots qui appartiennent à cette seconde classe se présentent eux-mêmes dans les conditions les plus diverses : les plus anciens viennent d'Espagne, sans doute par l'intermédiaire du provençal et de l'espagnol (139) ; d'autres viennent d'Orient et ont pu passer directement de l'arabe dans le français à l'époque des croisades (140), ou arriver par le canal de l'italien, du grec byzantin, du turc, etc. Il est à peine besoin de faire remarquer que les mots qui nous sont ainsi venus de l'arabe ne sont pas tous foncièrement sémitiques, et que plus d'un mot primitivement grec, persan ou hindou a été transmis par l'arabe au français. Signalons enfin le nouveau contact pris de nos jours par le français avec l'arabe depuis la conquête de l'Algérie : il a eu pour résultat d'introduire un assez grand nombre de mots arabes dans notre vocabulaire militaire, administratif ou économique, etc. De ces mots nous n'avons admis comme vraiment français que ceux qui ont perdu leur caractère purement algérien pour pénétrer dans la langue générale.

Liste des mots d'origine arabe

abricot,
aissaugue (141),
alambic,
albatros (142),
alberge,
alcade,
alcali,
alcarazas,
alchimie,
alchimille,
alcool,
alcoran (143),
alcôve,
aldébaran,
alezan (144),
alfa,
alfange,
algarade,
algazel,
algèbre,
algol,
algorithme,
alguazil,
alicate,
alidade,
alizari,
alkékenge,
alkermès,
Allah,
almageste,
almée,
almicantarat,
alquifoux,
aludel,
amalgame (?),
aman,
ambre,
amiral,
anil,
antimoine (?),
arabesque,
arack,
arcanne,
argousin,
arrobe,
arsenal,
artichaut,
arzel,
assassin,
aubère,
aubergine,
aufe,
avives (145),
ayan,
azédarac,
azerole,
azimut,
azur,
babouche,
bacha (146),
balais,
barbacane,
barde (selle),
basane,
bazar,
bédegar,
ben,
benjoin,
bézoard,
bonduc,
borax,
bosan,
bouracan,
bourrache (plante),
boutargue,
burnous,
caban,
cadi,
café,
caïd,
caïmacan,
calfat,
calife,
camphre,
candi,
carabé,
carafe,
caramel,
carat,
caratch,
caroube,
carthame,
carvi,
cétérac,
charabia,
cheik,
chérif,
chervis,
chiffre,
cimeterre,
civette,
cohober,
colcotar,
coton,
couperose (147) (sulfate),
couscous,
cramoisi,
cubèbe,
cuine,
curcuma,
cuscute,
darse,
diss,
djinn,
doronic,
douane,
douar,
drin,
drogman,
élémi,
élixir,
émir,
épinard,
essère,
estragon,
fagara,
faquir,
farde,
fellah,
felouque,
fez,
fustet,
gabelle,
galanga,
gamache,
gazelle,
genette (animal),
gerboise,
girafe,
gnacare,
goudron,
goule,
goum,
gourbi,
grabeler,
gumène,
hachisch,
haras,
harem,
harmale,
hégire,
henné,
hoqueton,
houri,
housse,
iman,
jarde,
jarre,
jasmin,
julep,
jupe,
kali,
kandjar,
kermès,
ketmie,
lilas,
lime (citron),
limon (citron),
lok,
luth,
madrague,
magasin,
mahaleb,
mameluk,
mandille,
marabout,
marcassite,
masser (palper),
matassin,
matelas,
mélongène,
mesquin,
minaret,
mohair,
mohatra,
moire,
momie,
moncayar,
morfil (ivoire),
mosquée,
nabab,
nadir,
naffe,
natron,
nénufar,
noria,
nuque,
orange,
orcanette,
papegai,
pastèque,
patard,
quintal,
racahout,
raquette,
rassette,
razzia,
réalgar,
rebec,
récif,
rob,
romaine,
sacre (faucon),
safran,
sarbacane,
sébeste,
séide,
simoun,
siroco,
sirop,
smalah,
sonna,
sopha,
sorbet,
soudan,
sulla,
sultan,
sumac,
tabis,
tabouret,
talc,
talisman,
tamarin (fruit),
tambour,
tare,
tarif,
tartane,
tartre (?),
tasse,
timbale,
trucheman,
turban,
turbith,
tutie,
vizir,
zagaie,
zain,
zénith,
zéro,
zinzolin,
zouave.

L'Académie admet en outre les mots suivants, parmi lesquels plusieurs sont des noms propres : Bédouin ; Cid ; coufique, de Coufa, ville d'Arabie où a été inventée l'écriture dite coufique ; fetfa, sentence du mufti ; islam, religion ; Mahométan ; maïdan ou meïdan, marché ; maravédi, ancienne monnaie d'Espagne ; miramolin, chef des croyants ; Mozarabe ; moka, café de Moka ; mollah et muezin, prêtre ou crieur qui, du haut de la mosquée, appelle à la prière ; mufti ou muphti, chef religieux ; Musulman ; Nabatéen ; rock ou rouk, oiseau fabuleux ; schiite, dissident ; sélam ou sélan, bouquet ; sequin, monnaie d'or ; sofi ou soufi, philosophe panthéiste ; sunnite, orthodoxe ; surate, verset ; uléma, docteur de la loi ; validé, mère (du sultan).

On peut encore citer : adène, arbrisseau d'Arabie ; achour, dîme ; alhagi, sainfoin ; almadie, bac, radeau ; casba, forteresse ; chechia, sorte de coiffure ; hadji, pèlerin ; méhari, chameau ; médersa ou medressé, école, etc., etc.

§ 23. -- Langues ouralo-altaïques (finnois, hongrois, turc, etc.).

Parmi les idiomes, étrangers au groupe des langues indo-européennes, qui se parlent dans l'Europe orientale, trois seulement, le finnois, le hongrois ou magyar et le turc, sont de quelque importance comme source du vocabulaire français.

Le finnois ne nous a donné que trois mots, mammouth, morse et ranger (renne). Le hongrois nous en a fourni un peu plus, souvent par l'intermédiaire de l'allemand : coche (voiture), dolman, heiduque, hussard, pandour, sabre, shako, soutache et uhlan. Plusieurs de ces mots n'appartiennent pas en propre au hongrois, qui les a lui-même empruntés au turc. L'apport du turc est beaucoup plus considérable, mais dans la liste qui suit on remarquera qu'il y a un assez grand nombre de mots d'origine arabe ou persane auxquels le turc a simplement servi de véhicule.

Liste des mots d'origine turque

aga,
aspre,
ayan,
baïram,
bergamote,
bey,
bezestan,
bostangi,
cafetan,
caïque,
caratch,
chacal,
chagrin,
chiaoux,
chibouque,
colback,
courbache,
cravache,
dey,
divan,
dol (tambour),
dolman,
efendi,
firman,
heiduque,
houri,
janissaire,
kalpack,
kiosque,
odalisque,
ottomane,
quaiche,
salamalec,
schabraque,
sorbet,
spahi,
tricoise,
tulipe,
turban,
turco,
turquet,
turquette,
turquin,
turquoise,
vampire,
yatagan.

Cette liste pourrait s'allonger considérablement si l'on relevait chez les historiens, les géographes, les voyageurs, etc., tous les termes spéciaux à la civilisation turque qu'ils emploient sans scrupule. L'Académie a enregistré azamoglan, serviteur (supprimé dans l'édition de 1878) ; icoglan, page du sérail ; imaret, sorte d'hôtellerie, de pension ; kaïmac, sorbet ; khédive, prince, titre spécial du souverain d'Egypte ; padischah, empereur ; para, sorte de monnaie ; pilau, plat de riz ; polacre, vaisseau ; raïa, sujet non musulman ; ramazan ou ramadan, neuvième mois de l'année, consacré au jeûne ; reis-effendi, titre de différents officiers turcs ; saïque, vaisseau ; sandjak ou sangiac, division administrative ; sérasquier, chef militaire ; timar, fief ; timariot, feudataire ; touc ou toug, étendard ; validé, mère (du sultan) ; vilayet, division administrative ; zaïm, feudataire inférieur au timariot. On peut encore citer : bachelick ou bachlik, écharpe formant capuchon ; bachi-bouzouk, sorte de franc-tireur ; baltagi, officier du sérail ; barat, diplôme, patente ; eyalet, gouvernement ; giaour, infidèle, chrétien ; iradé, décret ; kadine, maîtresse ; nizam, armée active ; redif, armée de réserve ; serdar ou sirdar, général en chef ; tandour, réchaud ; vali, vice-roi. Notons enfin que le nom diplomatique de la cour du sultan, la Sublime-Porte, est la traduction littérale d'une expression turque correspondante (148).

Au turc se rattache étroitement le mongol, auquel nous avons emprunté cacholong, et le tatar ou tartare, d'où nous est venu horde.

§ 24. -- Persan.

Le grec avait emprunté à l'ancienne langue de la Perse quelques mots qui ont passé au latin et que nous avons pris à notre tour à cette dernière langue, comme mage, parasange (149), satrape (150), etc. On remarquera que le nom même de la Perse se retrouve aujourd'hui dans celui du fruit dit pêche (151), du lat. persicum, grec <GR= persikon>, c'est-à-dire " de Perse ", dans perse, persique et persienne (152). Depuis le moyen âge, le persan, forme plus récente de la langue de la Perse, a fourni au français, comme aux autres langues de l'Europe occidentale, un assez grand nombre de mots qui lui sont arrivés par des voies diverses : les termes scientifiques par l'arabe et le latin, les termes de relation par l'arabe, le turc, l'italien, l'anglais, etc., quelques-uns seulement sans intermédiaire, grâce aux rares Français qui ont visité la Perse (153)

Liste des mots d'origine persane

anil,
assa,
azur,
babouche,
badam(ier),
badiane,
balais,
bazar,
bédegar,
calencar,
caravane,
caravansérail,
carquois,
chacal,
châle,
cipaye,
derviche,
divan,
échec (?),
firman,
gnacare,
guèbre,
gueules,
jasmin,
kermès,
kiosque,
laque,
lilas,
limon (citron),
mage,
mat (aux échecs),
momie,
nacre,
naphte,
narguilé,
nilgaut,
pacha,
rob (suc),
roc (tour),
schah,
spahi,
taffetas,
tambour,
toutenague (154).

§ 25. -- Langues de l'Inde.

L'Inde est partagée inégalement entre trois familles de langues : les langues aryennes, les langues dravidiennes et les langues kolariennes. Il n'entre pas dans notre plan de faire le départ entre ces trois groupes des mots que l'Inde a fournis au français (155). On constate déjà en gred et en latin la présence de quelques mots venus de l'Inde : tel est le cas, par exemple, de <GR= brakhmanes>, brachmani, francisé selon l'époque en brames, bramins, bramines ou brahmanes. Les philologues modernes ont emprunté soit au sanscrit, ancienne langue littéraire, religieuse et philosophique de l'Inde, soit aux langues encore vivantes (hindi, hindoustani, etc., d'une part, tamoul, télinga, etc., de l'autre), un certain nombre de termes didactiques qui n'appartiennent pas plus en propre au français qu'à toute autre langue européenne : l'Académie a accueilli quelques-uns de ces termes, parmi lesquels avatar paraît être le seul qui ait réellement pris pied dans notre langue. Enfin -- et c'est là le lot le plus important -- les relations commerciales nous ont familiarisés avec un certain nombre de mots originaires de l'Inde et dont beaucoup nous sont arrivés par l'intermédiaire du portugais ou de l'anglais.

Liste des mots originaires de l'inde

arec,
aryen,
avatar,
banane,
bandure,
banian,
baselle,
bengali,
béribéri,
bétel,
bonduc,
bongare,
brahmane,
cachou,
cari, kari,
cauris,
cornac,
datura,
gavial,
gibbon,
jaque (fruit du jaquier),
jungle,
jute,
kino,
mandarin,
palanquin,
paria,
patchouli,
serval,
tari,
tek,
tourmaline,
véranda,
vétiver,
zébu (156).

Avant de quitter l'Inde, il est juste de rappeler que ses produits manufacturés ont joui, dès l'antiquité, d'une grande vogue en Europe, et que cette vogue a laissé d'importantes traces dans notre langue. Les Grecs appelaient <GR= indikon>, et les Latins indicum, une matière tinctoriale bleue qui leur venait de ce pays : de là nos mots inde et indigo. Nous appelons indienne une étoffe de coton peinte fabriquée originairement dans l'Inde, et tamarin un fruit (tamar) de l'Inde. Beaucoup de noms de villes de ce pays sont devenus des noms communs pour nous : cachemire, madras, madapolam, mazulipatan, etc., et c'est probablement aussi dans l'Inde qu'il faut chercher l'étymologie -- encore indéterminée -- des mots gingas, guingan, jaconas, percale, sirsacas et tarlatane.

§ 26. -- Égyptien et copte.

Le français n'a rien emprunté directement au copte, forme relativement moderne de l'ancienne langue de l'Égypte. On peut noter seulement que le mot gomme, en latin gummi, en grec <GR= kommi>, est d'origine égyptienne, et que le jeu dit pharaon paraît avoir reçu ce nom par une allusion -- inexpliquée encore -- au titre des anciens souverains de l'Égypte.

§ 27. -- Langues de l'extrême Orient.

Aux langues de l'extrême Orient (tibétain, chinois, japonais, siamois, etc.) se rattachent les mots suivants :

ailante,
aucuba,
bonze,
cangue,
cannequin,
ginseng,
jonque,
kaolin,
laure (prêtre),
moxa,
poussa,
thé,
typhon,
yak (157).

Remarquons en outre que nankin est le nom propre d'une ville de la Chine célèbre par ses étoffes, que le nom de la Chine (158) se retrouve dans les mots china, chinois, squine, et que l'on peut employer absolument japon comme nom commun (159).

§ 28. -- Malais et langues océaniennes.

Le malais joue dans l'extrême Orient un rôle analogue à celui de l'arabe dans la région occidentale de l'Asie : c'est la langue commerciale par excellence. Ce rôle explique en partie qu'un nombre relativement considérable de mots puisse être porté ici à son compte. Dans ce nombre deux ou trois mots seulement se rattachent aux autres langues parlées en Océanie.

Liste des mots d'origine malaise ou océanienne

achars,
atoll,
babiroussa,
bambou,
caire (160),
cajeput,
calin (161),
calambour,
carambole,
caret (tortue),
casoar,
dugon,
émeu,
gecko,
gutta-percha,
jambosier,
kanguroo,
mangle,
mangoustan,
mangue,
orang-outang,
pamplemousse,
pangolin,
ramie,
rhum,
sagou,
salangane
sapan,
tallipot,
tatouer,
tombac,
upas.

§ 29. -- Langues africaines.

Les langues indigènes de l'Afrique nous ont fourni quelques mots qui désignent presque tous des animaux ou des végétaux particuliers à ce continent : plusieurs ne sont arrivés au français que par l'intermédiaire d'autres langues européennes, notamment du portugais. Le seul mot de ce petit groupe qui mérite une observation particulière est le mot zagaie, d'origine berbère : il se présente en français dès le commencement du XIVe siècle sous la forme archegaie, altération par étymologie populaire (sous l'influence du mot arc) de l'espagnol azagaya, dans lequel l'a initial représente l'article arabe al.

Liste des mots d'origine africaine

bamboula,
baobab,
chimpanzé,
couagga,
drongo,
dronte,
engri,
gnou,
gorille,
jocko,
macaque,
maki,
mandrill,
sénégali,
zagaie,
zèbre.

§ 30. -- Langues américaines.

Les langues indigènes de l'Amérique nous ont donné beaucoup plus de mots que celles de l'Afrique, et cela s'explique : on sait en effet que la civilisation vient à peine d'entamer le continent noir, tandis que depuis quatre siècles le nouveau monde, découvert par Christophe Colomb, a été exploré, colonisé et exploité à l'envi par toutes les nations européenes. Beaucoup de mots d'origine américaine nous sont venus par l'intermédiaire de l'espagnol, et même tel mot espagnol, comme chinche par exemple, n'est enregistré dans les dictionnaires français que comme nom d'un objet, d'un produit américain. On ne relèvera ici que les mots qui paraissent réellement appartenir aux idiomes indigènes de l'Amérique.

Liste des mots d'origine américaine

acajou,
agami,
agouti,
aï (paresseux),
ajoupa,
alpaca,
ananas,
ara,
aralia,
avocat (fruit),
boucan,
cabiai,
cacao,
cacique,
caïman,
canot,
caouane (162),
caoutchouc,
caracara,
caragne,
carbet,
caribou,
cassave,
chocolat,
coati,
cobaye,
colibri,
condor,
copal,
copayer,
cotinga,
cougouar,
coumarou,
coumier,
curare,
gaïac,
goyave,
guano,
hamac,
hévée,
icaque,
igname,
iguane,
ipécacuana,
jaguar,
kamichi,
karata,
kinkajou,
lama (quadrupède),
lamantin,
maïs,
mammée,
manioc,
manitou,
margay,
maringouin,
maté,
nopal,
ocelot,
ouistiti,
ouragan,
paca,
pagaie,
palissandre,
quinquina,
papaye,
patate,
pécari,
pétun,
pian,
pirogue,
pite,
ratanhia,
rocou,
sapajou,
sapote,
sarigue,
sassafras,
simarouba,
tamandua,
tamanoir,
tamarin (singe),
tangara,
tapioca,
tapir,
tapirer,
tatou,
tomahawk,
tomate,
toucan,
unau,
vigogne,
yucca (163).

§ 31. -- Argot.

L'argot, au sens propre, est une langue de convention qu'une certaine classe de la société forme à son usage exclusif dans un intérèt facile à deviner : l'argot le plus célèbre est celui des malfaiteurs. Il est souvent difficile de dire où commence, où finit l'argot, tel terme d'argot n'étant parfois qu'un vieux mot de la langue populaire, tel terme de la langue populaire pouvant venir de l'argot. Si l'origine de quelques-uns des mots qui suivent est hors de doute, ce n'est que faute de mieux que nous avons rattaché les autres à l'argot.

Liste des mots empruntés a l'argot

bagou,
caboulot,
cambrioleur,
escarpe,
escofier,
flamberge,
flouer,
frusquin,
gouaper,
gourer,
guibole,
gueux,
larbin,
maquiller,
matois,
mioche,
narquois,
trimer,
trucher,
voyou.

§ 32. -- Onomatopée.

L'onomatopée est la création d'un mot reproduisant dans ses éléments sonores le bruit de l'objet auquel il s'applique. L'onomatopée au degré le plus simple ne doit produire que des exclamations : couac, ouf, toc, etc. ; mais ces exclamations ont souvent donné naissance à des noms et à des verbes. D'autre part, on peut rattacher à l'onomatopée la répétition de certaines syllabes, n'offrant isolément aucun sens, soit pour désigner familièrement tel ou tel objet ayant déjà dans la langue un nom spécial (toutou, pour dire " chien ", papa, pour dire " père ", etc.), soit pour former un refrain de chanson. Enfin, il faut bien l'avouer, l'explication par l'onomatopée de tel ou tel mot n'est qu'une hypothèse provisoire destinée à disparaître un jour devant une étymologie définitive.

Liste des mots formés par onomatopée (164)

aï (maladie),
babiller,
bobo,
boubouler,
bouffer,
bredi-breda,
bribri,
bric-à-brac,
brouhaha,
cacarder,
caqueter,
chuchoter,
chuinter,
chuter (crier chut),
claquer,
cliqueter,
cloche,
coasser,
coco,
cocotte,
coq,
coquelicot,
coquerico,
couagga,
courcailler,
courlieu,
crailler,
craquer,
crételer,
cricri,
crincrin,
criquer,
crisser,
croasser,
croquer,
dada,
dare dare,
dodiner,
dodo,
drelin,
faridondaine,
fla,
flaquer,
flicflac,
flonflon,
frétiller,
fric frac,
froufrou,
gecko,
glouglou,
gnaf,
gnan-gnan,
grisoler,
guilleri,
guiorer,
guit-guit,
haha,
hahé,
haïe,
haler (exciter),
haleter,
hallali,
haro,
hau,
hennir,
hôler,
houper,
hucher,
japper,
lanturelu,
maman,
miauler,
mirliton,
nanan,
ouistiti,
papa,
ronfler,
ronronner,
tac tac,
tam-tam,
tic tac,
tinter (?),
toc toc,
toquer,
tou-tou,
trantran,
trictrac,
turlure,
turlut,
turlutaine,
virelay,
zest,
zézayer,
zist.


Notes

1. Les mots disparus de la langue populaire, surtout ceux qui sont relatifs aux institutions, peuvent reparaître sous la plume des savants modernes : tel est le cas pour bardus, barde, druida, druide, sylphus, sylphe, etc. Les historiens disent sans scrupule ambacte, soldurien, vergobret, d'après ambactus, soldurius, vergobretus, etc. Mais ces mots, pour n'être plus terminés en us ou en a, en sont-ils plus français ?

2. Le même radical se retrouve dans les langues germaniques ; mais comme ambactus est déjà employé par Ennius, il est à croire que le latin a reçu ce mot des Gaulois de la Gaule Cisalpine.,

3. Les textes de l'antiquité ne donnent que arepennem, aripennem, mais le français arpent suppose arependem. (Cf. l'espagnol arapende.)

4. C'est M. G. Paris qui a donné l'étymologie de baschoe, conservé par quelques patois actuels sous la forme bachoue, et cette étymologie est assurée. Quant à l'explication de bâche et de l'italien vasca (d'où le français emprunté vasque) par une forme gauloise bascauda ou vascauda qui aurait eu l'accent tonique sur la syllabe initiale, M. G. Paris ne la présente que comme une hypothèse. (V. Romania, xxi, p. 401 et suiv.)

5. Les textes anciens ne donnent que betulla et betula ; mais l'ancien français beoul, étant masculin, suppose l'existence de betullum.

6. Le mot est peut-être germanique. (Cf. § 6.)

7. Le radical bebr- se trouve à la fois en germanique et en celtique ; le mot proprement latin est fiber.

8. M. Thurneysen (Keltorom., p. 91) rattache à cette forme primitive l'ancien irlandais buden, partie d'un corps d'armée.

9. La forme du radical est assurée par le provençal cassanh, de *cassanium. L'ancien français a quelquefois chasne, qui représente exactement *cassanum ; la forme chaisne, d'où le français actuel chêne, paraît due à l'influence de fraxinum, frêne, qui a transformé *cassanum en *caxanum.

10. Grégoire de Tours emploie le diminutif *cletella.

11. M. Gaston Paris a montré que le radical de encombrer était bien distinct de celui de combler (Romania, XXIII, p. 243), et M. Meyer-Lübke en a rendu plus que vraisemblable l'origine celtique (Zeitschrift für romanische Philologie, XIX, p. 275).

12. On rapproche aussi ce mot du grec <GR= kumbê>, vase creux, barque.

13. Telle est la leçon (et non *gubia) des bons manuscrits d'Isidore de Séville, laquelle semble confirmée par l'existence dans le celtique d'un radical gulb, de sens analogue. L'ancien français goi, aujourd'hui gouet, ne peut s'expliquer que par *gubium, forme qui n'est peut-être qu'une simple variante dialectale, car Végèce emploie gubia (et non gulbia) au sens d'instrument tranchant.

14. Mot différent du latin *soccum, sorte de chaussure. On a supposé que besoche pouvait venir d'un type *bisocca, formé avec la particule bis et le radical de soc. (Cf. le néologisme bissoc.)

15. Radical commun au germanique et au celtique.

16. D'après M. Thurneysen (Keltorom., p. 89), le breton balaen est emprunté du français, et le français balai n'a rien à voir avec le breton balannen, genêt, dont la forme primitive est banazl, banadl.,

17. M. Thurneysen (Keltorom., p. 43) admet comme possible l'existence d'un mot celtique barga, distinct du bas latin barca.

18. Le radical bucc-est commun au celtique et au germanique.

19. M. Horning (Zeitschrift für romanische Philologie, XX, 86) considère dartre, autrefois dertre, comme une altération de *erte, *ertre, du latin herpetem, herpès.

20. En breton dreok, en gallois drewg. (Cf. Ernault, dans Revue celtique, V, 218).

21. Comme ce mot est particulier à la région française voisine des pays flamands, il est vraisemblablement emprunté de l'ancien néerlandais dune (aujourd'hui duin en hollandais), qui se rattache au celtique dunum, hauteur.

22. L'ancien irlandais a gall, pilier de pierre (Thurneysen, Keltorom., p. 100).

23. Du radical gab-, saisir, qui se retrouve peut-être dans gabelle, que le français a emprunté du provençal.

24. Du radical gabal, pointe fourchue.

25. M. Thurneysen admet comme possible l'existence en celtique d'une variante *mattara, à côté de matara, seul attesté (Keltorom., p. 107).

26. M. Thurneysen (Keltorom., p. 107) n'ose pas décider si le breton milvit, qui a le même sens, est indigène ou emprunté du bas latin.

27. Radical mûc- (Thurneysen, Keltorom., p. 108).

28. Quai est une forme normanno-picarde, § 16 ; il est possible que chai, que le Dictionnaire rattache au latin *caveum, soit la forme proprement française de quai, ainsi que le pense Littré.

29. L'idiome celtique de la Cornouaille (partie de l'Angleterre) s'est éteint au siècle dernier.

30. Il est peu probable que barnache, bernache, se rattache directement à l'irlandais bairneach, lépas : la variante bernacle vient de l'anglais barnacle ; la variante bernicle, du bas breton brenik. De même brogue, clan, claymore, plaid, usquebac, whisky, originaires de l'Écosse, flanelle, du pays de Galles, et quelques autres mots que nous avons laissés de côté, ne sont arrivés au français que par l'intermédiaire de l'anglais.

31. Baille n'est pas foncièrement celtique, mais scandinave. (Cf. danois balle, ballie ; suédois balja, etc.) Il est possible que ce terme de marine ait été emprunté par le français au scandinave, indépendamment du breton.

32. Cf. ci-dessus, n. 19.

33. Les archéologues emploient maint autre mot bas breton que nous n'avons pas cru devoir accueillir dans le Dictionnaire, par exemple lech (au sens de cromlech), mactiern (fils de prince), peulvan (poteau de pierre), tiern (prince), gwerz (chant historique), etc., etc.

34. En raison de la parenté originaire du latin et du grec, il est souvent difficile de distinguer les mots que le latin a empruntés du grec de ceux qui lui appartiennent héréditairement. Par exemple, certains philologues considèrent les mots latins aranea, gubernare, calamus, etc., comme empruntés des mots grecs <GR= arakhnê>, <GR= kubernan>, <GR= kalamos>, etc. D'autres les croient indigènes. Nous laissons intentionnellement de côté tous les mots qui prêtent à discussion, ainsi que ceux qui, pour avoir été incorporés au latin très anciennement, présentent des formes qui ne sont pas exactement le calque des formes GRques, comme anchora (<GR= agkura>), argilla (<GR= argillos>), atriplex (<GR= atraphaxis>), balneum (<GR= balaneion>), cera (<GR= kêros>), cotoneum (<GR= kudônion>), etc., etc. Il est bon de rappeler qu'il ne s'agit ici que de la formation populaire, et que les mots si nombreux que le français a tirés directement du GR par formation savante seront étudiés au § 277.

35. Bouée est une mauvaise orthographe pour boie, comme l'a montré récemment M. Tobler (Sitzungsberichte der Acad. der Wissensch. zu Berlin, 1896, p. 862).

36. Cf. p. 17, n. 1.

37. Quelques mots disparus ont été repris par les érudits (angon, antrustion, bardit, framée, francisque, leude, morganatique, ordalie, scramasaxe, ure) ou survivent dans des composés ou des dérivés (buc, dans trébucher).

38. Nous devons aussi au germanique quatre suffixes de dérivation, dont deux au moins, ard et aud, sont très vivaces. (V. §§ 138, 142, 147 et 149.) Enfin il est bon de faire remarquer que le français possède quelques autres mots d'origine germanique qui ne sont pas enregistrés ici parce qu'ils lui sont arrivés par l'intermédiaire d'autres langues romanes, surtout de l'italien, § 12.

39. M. Tobler a rattaché ce mot au germanique feter. (V. Romania, XXV, 623.)

40. De là dehait, déhaité, souhait, souhaiter.

41. Malgré ce qui a été dit dans le Dictionnaire, ce mot n'est pas d'origine scandinave. Il n'existe pas en ancien norois, et les langues scandinaves qui le possèdent aujourd'hui l'ont emprunté, à une date récente, au bas allemand.

42. De là marri, marrisson.

43. Le dernier travail publié à ce sujet est une thèse soutenue en Sorbonne par M. F. Piquet : de Vocabulis quæ in duodecimo seculo et in tertii decimi principio a Gallis Germani assumpserint. Parisiis, Leroux, 1898. -- Ces emprunts faits par l'allemand ont parfois donné le change et fait attribuer une origine germanique à des mots français indigènes ou venus d'ailleurs : c'est le cas pour aumusse, d'où l'allemand a fait müzze.

44. L'allem. prahm est d'origine slave : cf. polonais pram, russe paromu, etc., du bas grec <GR= perama>, bac.

45. On peut citer cependant lai, dont l'emprunt remonte au XIIe siècle. L'ancien français guile (d'où guiller, guilleret) tient à l'anglo-saxon vile ; mais comme le même radical se retrouve en islandais, le mot français est peut-être d'origine noroise, § 9.

46. L'Académie a admis en outre : lady (dame), lollard (partisan de Wiclif), milady (madame), milord (monseigneur), miss (mademoiselle), mistriss (madame), pairesse (femme de pair), plumpudding (pouding), poll (scrutin), pondage (sorte d'impôt), porter (sorte de bière), schelling (monnaie d'argent), test (serment), tory (conservateur), whig (libéral), usquebac, supprimé en 1878, et whiskey (eau-de-vie de grains).

47. Il est souvent difficile de décider si un mot français est d'origine scandinave ou d'origine néerlandaise, anglaise, allemande, etc. Aussi le lecteur ne doit-il pas trop s'étonner de certains désaccords entre nos listes et le Dictionnaire pour les §§ 6, 7, 8, 9 et 10. Les listes donnent notre manière de voir définitive.

48. Cf. § 8, p. 17, n. 2.

49. Les auteurs français qui traitent de la géographie, de l'histoire, de la mythologie, etc., des pays scandinaves emploient maints autres termes empruntés aux langues de ces pays. L'Académie a admis dans son Dictionnaire : edda, recueil mythologique, morne, parque, rune, caractère (d'écriture), saga, légende, scalde, poète.

50. C'est au § 6 que nous avons définitivement placé certains mots comme déraper, échasse, étron, flatir, flatter, flou (d'où fluet), frimas, gaufre, hanche, happer, harde, laper, mite (d'où mitaine, mitraille, etc.), moufle, mulot, etc., pour lesquels le Dictionnaire renvoie au § 10.

51. Cf. § 19, p. 29.

52. Le rapprochement, indiqué dans le Dictionnaire, des mots bélier, bélière, bési avec le néerlandais ne repose sur rien de solide ; en revanche, nous pensons que drille (soudard) et driller (courir) doivent être rattachés au holland. drillen, qui signifie non seulement " percer ", mais " tournoyer " et spécialement " faire l'exercice ". Notre maitre drille paraît être une adaptation mal comprise du holland. drilmeester, maître d'escrime. -- L'Académie a admis quelques autres mots spéciaux aux choses de Hollande, comme polder, terre entourée de digues, et stathouder, chef d'Etat.

53. On trouve aussi en ancien français elme et osberc, au lieu de helme (heaume), halsberc (haubert), formes d'origine méridionale. Remarquons en outre que le provençal peut être considéré comme ayant servi d'intermédiaire pour certains emprunts faits anciennement par le français à l'espagnol et à l'arabe. Notons enfin que les mots bouquetin, crétin, génépi, glacier, goitreux, grèbe, lavaret, marron (châtaigne), mélèze, moraine, névé, piolet et rave, pour lesquels on a renvoyé au § 11, viennent du franco-provençal, § 17.

54. Abeille est la forme indigène du Berry, de la Saintonge et du Poitou, et le français doit l'avoir emprunté au parler d'une de ces provinces plutôt qu'au provençal proprement dit.

55. Il est plus naturel cependant de supposer que ce mot vient de l'italien accollata.

56. Le provençal eissaugo, d'où le français aissaugue, mieux essaugue, vient de l'arabe chabaka.

57. Le mot provençal ou catalan correspondant est d'origine arabe.

58. Cf. § 12, p. 22, n. 8.

59. Cf. § 13, p. 26. n. 1.

60. Nous mettons ce mot ici parce qu'il y a un renvoi à ce paragraphe dans le Dictionnaire ; mais en réalité le français besoche, s. f. qui signifie " hoyau ", n'a rien à voir avec le provençal besouch, s. m. qui signifie " vouge " et qui vient régulièrement du latin vidubium. (Cf. ci-dessus, p. 12, n. 3.)

61. Bigorne se rattache plutôt directement au latin bicornis par formation à demi savante.

62. Cf. § 12, p. 23, n. 3.

63. Brondel, que l'on suppose avoir influencé brindille, n'est pas seulement provençal ; il se trouve en ancien français, notamment chez le trouvère Colin Muset.

64. Cabus vient plutôt de l'italien. (Cf. § 84.)

65. Calandre vient plutôt des patois de la région normanno-picarde. (Cf. § 16.)

66. Cf. § 12, p. 23, n. 5.

67. Peut-être d'origine italienne.

68. Vient plutôt des patois français de la région normanno-picarde. (Cf. § 16.)

69. Mot usité à Toulouse d'après Cotgrave ; mais il faut noter que le languedocien vient probablement du français chatouille, altération de sept-œil.

70. Combuger vient plutôt du parler de l'Angoumois ou de la Saintonge que du provençal proprement dit.

71. Le provençal coquillade, altération probable d'un plus ancien *cogulhada, est sans rapport avec le français coquille, mais remonte au latin cuculla, capuchon, qui se retrouve dans cagoule et coule.

72. Cf. § 16.

73. Le mot provençal depica ne vient pas de espiga, épi, mais de pica, écraser, fouler.

74. Ce mot vient du provençal ou de l'italien selon qu'il s'applique au midi de la France ou à l'Italie.

75. Par exemple ciera (franç. chère) ; agio (franç. aise), que nous avons repris dans le terme musical adagio ; congedo (franç. congé), qui nous est revenu sous la forme verbale dans congédier, etc. Plus récemment les Italiens nous ont emprunté hautbois, qu'ils écrivent oboe, et en ont tiré le dérivé oboista, que nous leur avons pris à notre tour et qui a revêtu chez nous la forme bizarre hautboïste.

76. Laurent de Premierfait a traduit le Décaméron de Boccace sous Charles VI, mais d'après une traduction latine que lui faisait au fur et à mesure un religieux italien.

77. Il faut naturellement ne tenir aucun compte des italianismes que l'on peut relever chez les Italiens qui, comme Aimé du Mont-Cassin, Brunetto Latini, Martin da Canal, Rusticien de Pise, se sont servis de la langue française. Cf. cependant ce qui est dit § 84 de l'origine de cabus.

78. Le vocabulaire de la musique est encore aujourd'hui tout italien ; les locutions comme affettuoso, agitato, allegro, a piacere, senza tempo, staccato, et tant d'autres, ne sont pas véritablement du français, et nous ne les avons admises que tout à fait exceptionnellement.

79. En ancien toscan ce suffixe est ada, et non ata comme dans l'italien littéraire actuel.

80. Cf. § 11, p. 20, n. 3.

81. Vient plutôt du latin angaria, comme le verbe correspondant angarier, de angariare.

82. L'italien barricata est plutôt emprunté du français, lequel le tient probablement du provençal. Barricade a désigné d'abord un retranchement fait avec des barriques.

83. Cf. § 13, p. 26, n. 1.

84. L'emprunt est bien douteux, car bécarre se trouve, ainsi que bémol, dans le roman de Fauvel, qui remonte au commencement du XIVe siècle.

85. C'est plutôt l'italien qui paraît avoir emprunté bougran au français. (V. § 142.)

86. Il est plus naturel de considérer bourgade comme emprunté au provençal, étant donné la date (1446) à laquelle on le trouve dans un texte français.

87. Cf. § 84.

88. Il faut plutôt supposer un emprunt au provençal : le premier exemple assuré du mot, au sens de " crique ", vient des œuvres de René d'Anjou, comte de Provence.

89. Cf. § 11, p. 21, n. 6.

90. Pour certains de ses sens, le mot canon 1 doit probablement être considéré comme un emprunt au normanno-picard, plutôt qu'à l'italien. (Cf. § 16.)

91. Cf. § 14, p. 26, n. 9.

92. Au sens de " maison ".

93. D'après M.G. Paris, compliment serait emprunté de l'espagnol complimiento.

94. Le mot apparaissant en français dès 1266 (V. godef. Compl.), il est peu probable que la formation en soit due à l'influence de l'italien corazza.

95. Escarole, scarole, remontent peut-être directement au latin du moyen âge scariola.

96. Cf. § 13, p. 26, n. 6.

97. Beaucoup de ces mots, transplantés tels quels, désignent des institutions ou des objets particuliers à l'Espagne et aux pays de langue espagnole, et ne sont employés que par les historiens ou les voyageurs amateurs de couleur locale : alcade, alguazil, corrégidor, cortès, junte, matador, miquelet, peseta, rancho, romancero, san-benito, vare, etc. Ce n'est que par tolérance que les dictionnaires français les accueillent, car au fond, et de l'aveu de tous, ils ne sont pas français ; nous nous sommes montrés plus réservés que nos devanciers à cet égard.

98. De l'espagnol adivas, arabe adz-dziva, même sens ; l'explication du français avives par l'eau " vive " bue par le cheval malade est sans valeur étymologique.

99. Il est difficile de dire si bastonnade vient réellement de l'espagnol, plutôt que du provençal ou de l'italien ; l'emprunt à l'italien est cependant plus vraisemblable.

100. De l'espagnol becuna ; le français ne connaissant pas de suffixe un, une, on ne peut y voir un dérivé de bec.

101. Cf. ci-dessous, n. 9.

102. Cf. § 14, p. 27, n. 1.

103. Cf. § 12, p. 23, n. 10.

104. L'emprunt à l'espagnol est peu vraisemblable, car on trouve en français escoadre, escoidre dès la fin du XVe siècle ; le mot vient de l'italien squadra, tout comme escadre.

105. " Maladie... que les Portugais appellent berber. " (Mocquet, Voyages, édit. 1645, p. 221.)

106. Du portugais cairo (furet. 1690 emploie cette forme), qui est le malais kayar, de kayaru, tordre.

107. L'emprunt de ce mot au portugais n'est pas certain ; il peut être venu par l'espagnol ou même par l'italien.

108. Nous avons fait venir carambole de l'espagnol et cipaye de l'anglais, mais c'est plutôt le portugais qui nous a transmis ces deux mots.

109. Cf. boyard.

110. Cf. keiduque.

111. Peut-être faut-il aussi considérer les mots dans lesquels o latin devant l ne se diphtongue pas (geôle, rissole, rossignol, etc.) comme dialectaux, par opposition à ceux où il devient eu (aïeul, filleul, etc.), qui sont plus réguliers. (Cf. § 86.)

112. Cf. § 11, p. 20, n. 2.

113. Il est possible que l'existence de bec en français propre, à côté des dérivés bécher, bécheter, bechée, etc., ait amené la création spontanée de béquer, béqueter, béquée, etc., sans qu'il faille voir dans ces dernières formes un emprunt au dialecte normanno-picard.

114. Cf. § 5, p. 13, n. 3.

115. Même réserve sur le rapport de bouquet à bouc que sur celui de béquer à bec.

116. Cf. § 11, p. 21, n. 4.

117. Cf. § 12, p. 23, n. 7.

118. Il est bien douteux que ce mot dérive de carrette pour charrette ; il se rattache plutôt à quart. (Cf. écart.)

119. Cf. § 11, p. 21, n. 9.

120. Ce mot, employé par Marot, est peut-être d'origine provençale.

121. Échandole, qui a le même sens, est venu du Dauphiné. (Cf. § 17.)

122. Cf. § 16, p. 28, n. 10.

123. Ce mot paraît être une forme dialectale (Normandie) de viorne, devenu iorne et, par agglutination de l'article, liorne, liane. On sait que calumet est aussi une forme normande, ou du moins normanno-picarde, qui nous est revenue d'Amérique.

124. A remarquer seulement dans Girart de Roussillon, v. 1708, la mention des Basques, appelés Escharanz, mot qui paraît dérivé de escuara, nom que les Basques donnent à leur langue ; il est probable que l'ancien français escarrant, que Godefroy traduit par " brigand, larron ", a la même origine. L'Académie a admis le nom propre Basque, parce qu'il entre dans certaines locutions : aller, courir comme un Basque (vite), tambour de basque. A ce nom, qui n'appartient pas à la langue escuara, se rattache basquine. Ajoutons que biscaïen et bisquain dérivent du nom de la Biscaye, province basque d'Espagne.

125. L'espagnol anchoa ou anchova se rattache plutôt au latin aphya, GR <GR= aphuê>, anchois, qu'au basque antzua, sec.

126. Basque chocuna, joli.

127. Les Slaves figurent souvent à côté des Sarrasins, dans nos chansons de geste, sous la forme Escler. De leur nom est dérivé l'ancien français esclavine, manteau d'étoffe grossière, porté surtout par les pèlerins, qui est encore donné par Oudin en 1642.

128. La présence de ce mot dans l'ancienne traduction des Machabées, qui remonte au XIIIe siècle, est tout à fait exceptionnelle.

129. Jean d'Authon écrit exclave ; Jean Bouchet et Claude de Seyssel emploient le pluriel esclaux.

130. Voici, à titre de curiosité, quelques-uns de ces mots : artèle, association coopérative ; barine, monsieur ; hetman, chef des Cosaques ; hospodar (V. § 15) ; kabak, cabaret ; kopeck, sorte de monnaie ; koumis, petit-lait ; kvas, boisson fermentée ; moujik, paysan ; obrok, capitation ; piaste, descendant d'une ancienne maison polonaise ; pope, prêtre ; pospolite, noblesse en armes (en Pologne) ; rouble, sorte de monnaie ; samovar, bouillotte ; schapska, coiffure militaire ; staroste, feudataire ; strelitz, fantassin ; toundra, lande ; vayvode (V. § 15) ; verste, mesure itinéraire ; vladika, chef. L'Académie a admis hetman, hospodar, kabak, kopeck, moujik, pope, pospolite, rouble, strelitz, staroste, vayvode, verste.

131. Ce mot remonte en dernier lieu au turc oriental qârsâq, § 23.

132. Cf. ci-dessus, p. 17, n. 1.

133. On doit rappeler ici que quelques noms propres des pays slaves (villes ou peuples) ont passé en français comme noms communs, notamment astrakan, cravate (Croate), polonaise, roussi (Russie).

134. A l'hébreu proprement dit se trouvent souvent mêlés des éléments des idiomes sémitiques voisins, comme le chaldéen et le syriaque : il n'y a pas lieu de les distinguer ici.

135. L'Académie a admis Aramésn, Essénien, Chaldéen, Chaldaïque, Hébreu, Israélite, Jéhovah, Léviathan, Machabée, Sabéen, Saducéen, Satan, Syriaque, qui sont des noms propres. A Jérémie se rattache jérémiade ; à Jacob ; jacobée, jacobin, jacquerie, jacques, jacquet, jaque (habit), jaquemart, jaquette ; à Jésus, jésuite ; à Judée, judaïque ; à Satan, satané, satanique ; à Lévi, lévite ; à Simon, simoniaque, simonie ; à Sodome, sodomie, sodomite.

136. A sabbat se rattache samedi, issu d'une forme secondaire *sambatum, au lieu de sabbatum. Quelques noms propres d'origine biblique ont aussi passé en français comme noms communs : Adam, Benjamin, Calvaire, Capharnaum, Judas, Juif, Philistin.

137. A cette littérature se rattachent aussi un grand nombre de mots familiers à ceux qui s'adonnent aux études hébraïques, mais qui ne font pas partie de la langue générale. Nous citerons à titre de curiosité : amora, discoureur ; caraïte, celui qui ne reconnaît que le texte de l'Écriture sainte ; ghemara, commentaire ; haggada, légende ; halacha, règle ; kadoche, grade de la franc-maçonnerie ; laaz, glose ; massore, tradition ; midrasch, explication ; mischna, alinéa ; nasi, président du sanhédrin ; purim, nom d'une fête ; selicha, élégie ; taled, voile ; talmud, recueil ; targum, commentaire ; thana, répétiteur. L'Académie a admis caraïte, massore ou massorah, mischna, nasi, taled, talmud et targum.

138. Dans le Livre des Juges, XII, 6, on raconte que ceux qui ne prononçaient pas correctement le ch du mot hébreu chibboleth, épi, étaient mis à mort. On emploie quelquefois en français le mot chibboleth (orthographié chibboleth à l'allemande) dans le sens de " signe de ralliement ", par allusion à ce passage ; mais cet usage est si restreint que le mot n'a pas été admis dans le Dictionnaire de l'Académie française.

139. Cf. §§ 11 et 12.

140. Cf. la forme orafle, employée par Joinville, qui a été signalée au mot girafe.

141. Cf. § 11, p. 20, n. 4.

142. Mot venu par l'anglais et le portugais de l'arabe al-gâdous, qui est le GR <GR= kados>, tonneau (cf. cade 2), par comparaison du pélican, qui apporte à boire à ses petits dans la poche de son bec, au seau d'une noria.

143. Cf. l'expression populaire : s'en moquer comme de l'an quarante, au mot an.

144. Le mot arabe auquel correspond alezan n'est pas déterminé d'une manière certaine.

145. Cf. § 13, p. 25, n. 2.

146. Forme prise par le persan padchah en passant par l'arabe.

147. Espagnol caparrosa et alcaparrosa, arabe zach cubrusi, vitriol de Chypre.

148. Parmi les noms propres devenus noms communs nous mentionnerons andrinople et angora, mais en faisant remarquer que ces noms sont d'origine grecque.

149. Latin parasanga, grec <GR= parasaggês>, mesure itinéraire ; le mot est en persan moderne ferseng, que les voyageurs francisent en farsange.

150. Latin satrapes, <GR= satrapês>, gouverneur de province.

151. Cf. presse 2, persicaire et persicot.

152. Il se retrouve, bien entendu, dans persan et dans parse ou parsi, noms propres, ce dernier appliqué spécialement par les philologues à la langue des anciens Perses.

153. Rappelons que l'étoffe dite bougran tire son nom de la ville de Boukara, où l'on parle une langue analogue au persan.

154. L'Académie a admis en outre : abdala, religieux (supprimé en 1878) ; calender, derviche ; dive, démon ; gaure, guèbre ; kabin, indemnité payée à la femme répudiée ; iranien, de l'Iran, autre nom de la Perse ; kan, prince (supprimé en 1878) ; kan, station (supprimé en 1878) ; kurtschis, cavalier ; padischah, empereur ; parse ou parsi (V. ci-dessus, p. 33, n. 5) ; pehlvi, ancienne langue d'une région de la Perse ; péri, fée ; sophi ou sofi, ancien nom du souverain de la Perse ; toman, monnaie de compte ; zend, commentaire, nom donné abusivement à la langue la plus ancienne de la Perse orientale, et zend-avesta, recueil des livres sacrés. Citons, parmi les mots familiers aux historiens, géographes, etc., qui ont écrit sur la Perse : abdest, purification ; délal, courtier ; farsange (V. ci-dessus, p. 33, n. 2) ; neski, kikani et taalik, variétés de l'alphabet persan ; serdar ou sirdar, général en chef ; tofandji, milice.

155. Ce départ est extrêmement délicat, le même mot existant souvent dans des dialectes qui n'appartiennent pas à la même famille linguistique. En outre, il n'est pas toujours facile de séparer les mots qui nous viennent de l'Inde de ceux que nous avons empruntés au malais, car parfois le même mot se trouve en malais et en tamoul ou en hindoustani.

156. L'Académie a admis en outre les mots suivants, parmi lesquels plusieurs sont des noms propres : bengali, langue du Bengale ; bouddhisme, bouddhiste, doctrine, sectateur de Bouddha ; déva, dieu, génie ; hindoustani, langue de l'Hindoustan ; lack, monnaie de compte ; naïre, noble ; nélumbo, plante dite " fève d'Égypte " et " nénufar de la Chine " ; pali ou bali, forme plus moderne du sanscrit ; pandit, docteur ; pourana, poème sacré ; rajah, prince ; roupie, sorte de monnaie ; sanscrit, langue ancienne de l'Inde ; Véda, livre sacre des Hindous.

157. L'Académie admet en outre king, livre sacré des Chinois ; mikado, titre de l'empereur du Japon ; petunsé ou pétunzé, feldspath à porcelaine ; tael, monnaie de compte de la Chine.

158. Le mot français serge rappelle le nom sous lequel les Grecs et les Romains ont connu un peuple d'extrême Orient (Seri) qui était probablement les Chinois.

159. Non seulement au sens de " porcelaine du Japon ", seul emploi admis par l'Académie, mais au sens de " vernis, laque ".

160. Emprunté par l'intermédiaire du portugais cairo au malais kayar.

161. Ce mot paraît dérivé du nom de la capitale de la presqu'île de Malacca, appelée par les Arabes Qalah ; de là aussi le turc galay, étain.

162. " Les Anglois la nomment loger-het, les Espagnols caivana, et les Français cahoanna. " (Œxmelin, Hist. des flibustiers 1686, I, 131.)

163. Ajoutons à cette liste un certain nombre de noms propres devenus noms communs : algonquin, apache, apalachine, cannibale, curaçao, iroquois, jalap, margajat, tabac, topinambour, vérine (tabac). L'Académie a admis en outre mocassin, chaussure des sauvages de l'Amérique du Nord ; oca, plante tubéreuse du Brésil ; pampa, plaine de l'Amérique du Sud.

164. Nous excluons de cette liste les interjections ; on en trouvera la liste au § 727.