FEYDEL, Gabriel, alias P*. P*. P*., ou FAYDEL, Jean-Félix-Gabriel.
Cet homme politique français et littérateur à ses heures perdues, naquit à Cahors (Lot) le 9 septembre 1744 et y mourut le 26 juin 1827. Avocat dans sa ville natale, Feydel fut député aux États généraux par le Tiers état de la sénéchaussée du Quercy, le 24 mars 1789. Il devint secrétaire le 28 septembre, et, en toutes circonstances, se fit remarquer par son opposition aux idées nouvelles. Après la session, il se mit à l’écart et ne reparut que sous l’Empire, à l’époque de la rédaction des Remarques, comme conseiller de préfecture du Lot (10 janvier 1804). Il entra comme député du Lot, au corps législatif le 10 août 1810, adhéra à la déchéance de Napoléon et fit partie de la Chambre introuvable (22 août 1815).
Ferdinand Brunot propose une brève analyse des Remarques morales, philosophiques et grammaticales sur le Dictionnaire de l’Académie françoise :
« C’est un livre d’une certaine importance. L’auteur n’a aucune intention de dénigrer l’ouvrage qu’il commente. Sa préface, très courte, se termine même par une phrase très élogieuse : « Avec toutes les négligences qui déparent le dictionnaire de l’Académie, cet ouvrage est encore le mieux fait de tous les dictionnaires de langues vivantes. »
[...] Malheureusement, l’auteur n’est pas un savant, tant s’en faut ; il accepte les bourdes les plus grossières et affirme avec force des étymologies ou d es explications souvent ridicules. Il lui arrive de corriger des erreurs par d’autres plus graves. IL eût pu prendre un ton moins tranchant et moins grossier.
[...] Ornithomance est un terme de grimoire, dont l’Académie françoise n’avoit point à se charger. La position de l’auteur devant les nouveautés de ce genre est très nette. Il les ignore systématiquement. Quoiqu’il écrive à une époque où la « chimie françoise » est en train de gagner l’Europe, il refuse de savoir ce que signifient azote et oxygène, ainsi que muriatique.
Pour les mots patois, comme caristade, bachot, picholine, nous sommes mieux fixés. L’auteur n’en admet pas l’intrusion.
Feydel tient rigueur à tous les éléments du lexique qui ne sont pas d’une noblesse incontestable. L’Académie avait donné bêta comme terme familier. Notre repreneur aggrave la sentence : Bêta « n’a jamais dû voyager polus loin que les halles, où il est né. » […]
Les proverbes lui paraissent bas. Les morts ne mordent plus est qualifié de « hideux quolibet, ne seroit pas supportable chez les Iroquois. »
Loin de vouloir faire place à des mots dédaignés, Feydel blâme les quelques condescendances que l’Académie avait eues à l’égard des mots bas… » [: Histoire de la langue française, Paris, 1968, Armand Colin, t. X, 2ème partie, p. 687-689].
Charles Bruneau rapporte pour sa part que l’abbé André Morellet, secrétaire perpétuel de l’Académie française lorsque celle-ci fut dissoute en 1793, et responsable de la sulfureuse cinquième édition du Dictionnaire de l’Académie française [1798], reçut un exemplaire de l’ouvrage de Feydel, sur lequel il porta cette note manuscrite : « Cet ouvrage est presque tout entier parfaitement ridicule. J’en ai relaté beaucoup de sottises dans une brochure ». Voir à ce sujet : Histoire de la langue française, Paris, 1968, Armand Colin, t. XII, p. 556.
Les exemplaires de cet ouvrage sont aujourd’hui assez rares. Il figurait sous le n° 820 dans le Catalogue de la bibliothèque de son éditeur, Antoine-Augustin Renouard, lors de la vente qui eut lieu le 20 novembre 1854 et les jours suivants. Les Observations sur un ouvrage anonyme intitulé remarques morales, philosophiques et grammaticales…. que l’abbé Morellet rédige et imprime en réponse au libelle de Feydel, sont portées au même catalogue sous le n° 821. Elles sont également publiées dans le tome I des Mélanges de Littérature et de Philosophie du XVIIIe siècle, Paris, Ladvocat, 1818, et Le Bailly, 1836.