Chauveté s. f. (chô-ve-té — rad. chauve). Calvitie, état d’une personne chauve. || C’est un vieux mot qui serait utile, le mot CALVITIE étant trop didactique pour le langage usuel.

G.D.U., t. III, p. 1110 d.

 

Feu, Feue, adj. (feu, feû — Ménage dérivait ce mot du latin felix, heureux, à l’aide des formes intermédiaires suivantes : felix, felicis, felice, felce, feu. Notre feu, pour défunt, serait ainsi le makaritês des Grecs et le felicis memoriæ des Latins ; mais les dérivations indiquées par Ménage sont toutes de fantaisie. D’autres ont indiqué le latin fuit, il fut, d’où l’italien fu, qui est employé avec la signification de notre mot feu : La fu madama. Feu est certainement la contraction du vieux français feü ou fahu, qui s’employait dans le même sens, et il est probable que feü ou fahu représente une forme barbare fadutus ou fatutus, qui peut se rapporter à fatum, destin). Défunt, décédé, qui est mort naguère : Feu mon père. Ma feue mère. Feu ma mère. Le feu roi. J’ai connu dans mon enfance un chanoine de Péronne âgé de quatre-vingt-douze ans, qui avait été élevé par un des plus furieux bourgeois de la Ligue : il disait toujours : Feu monsieur de Ravaillac. (Volt.)

J’ai toujours été nourri par feu mon père,
Dans la crainte de Dieu, monsieur, et des sergents.

Racine

— Gramm. Selon l’Académie, lorsque cet adjectif est placé après l’article, il signifie mort le dernier, il prend un e muet devant un nom féminin, et il ne peut être employé au pluriel, d’où il résulte qu’on doit écrire : Le feu roi, la feue reine, et qu’on ne pourrait pas dire : Les feus princes. Placé avant l’article ou un déterminatif quelconque, feu est toujours invariable : Feu mon père, feu ma tante. Il l’est aussi devant un nom propre ; par exemple on dirait : feu Marie Dumont.

G.D.U., t. VIII, p. 300 b-c.

 

Navire, s. m. (na-vi-re — du bas lat. navirium, dérivé du latin navis. Navire signifie proprement flotte, réunion de vaisseaux ; on lui trouve encore ce sens dans quelques vieux auteurs : « Et si avoient navire de deux cents nefs. » [Chronique de St-Denis.] Ce n’est que par restriction que navire a signifié vaisseau). Bâtiment destiné à la navigation sur mer : Equiper, frêter un navire. Construire, lancer un navire. Plus un navire est petit, plus il est en danger dans le gros temps. (Montesq.) Les matelots se passionnent pour leur navire; ils pleurent de regret en le quittant, de tendresse en le retrouvant. (Chateaub.) Le caprice de la pensée franchit les mers sans navire. (V. Hugo).

Qu’il va lentement le navire,
A qui j’ai confié mon sort !

Béranger

— Fig. Objet exposé à des vicissitudes comparées aux tempêtes qui assaillent les navires :

Un homme dans la tombe est un navire au port

Malherbe

— Prov. A navire brisé tous vents sont contraires. Tout nuit à un corps usé ; les gens ruinés ne trouvent plus aucune chance favorable.

— Antiq. Navires sacrés, Bâtiments consacrés aux dieux.

—Mar. Navire marchand, celui qui est spécialement affecté au commerce. || Navire en guerre et marchandise, Bâtiment marchand qui a une commission pour faire la guerre. || Navire en course, Vaisseau armé en guerre par des particuliers, avec une commission de l’Etat pour faire la course. || Navire de registre, Nom qu’on donnait en Espagne et en Amérique à un navire marchand qui obtenait du conseil des Indes la permission d’aller faire son commerce dans ce pays, moyennant une certaine somme et sous certaines conditions. || Petit navire, Instrument de bois qu’on jette à la mer pour connaître le sillage du vaisseau. On dit aujourd’hui Loch. || Navire ! Cri par lequel la vigie prévient qu’un bâtiment est en vue.

— Astron. Navire Argo. Constellation de l’hémisphère austral, qu’on appelle aussi Navire, vaisseau, Navire de Junon, Chariot de mer.

— Rem. Ce mot était autrefois féminin, ou du moins d’un genre douteux :

Jason, le gouverneur de toute la navire.

Ronsard

Car aux flots de la peur, sa navire qui tremble
Ne trouve point de port.

Malherbe

 

[Suit alors la partie encyclopédique]

G.D.U., t. XI, p. 880 a-b.

 

Prosateur s. m. (pro-za-teur — du vieux verbe proser, ou du bas lat. prosator. Il n’est dons pas exact, comme l’affirment Ménage et Richelet, que ce mot nous vienne de l’italien. Il n’est pas vrai non plus que prosateur ait été introduit dans la langue par Ménage, qui se l’est attribué et qui l’avait seulement repris. Enfin, Richelet avait tort de condamner ce mot comme formé de proser qui passait à ses yeux pour un barbarisme et qui était seulement un terme tombé en désuétude. Prosateur, un mot excellent et qui a définitivement pris pied dans la langue, fut fort contesté à l’époque où Ménage le réédita. Bouhours et Richelet, en particulier, se sont déclarés énergiquement contre lui et parurent même avoir réussi à le faire abandonner. Nos écrivains l’ont repris et ont eu d’autant plus raison que le mot orateur, qui traduisait autrefois la même idée, était depuis longtemps abandonné, ou du moins réduit à exprimer une idée toute différente). Auteur qui écrit, qui excelle à écrire en prose : Le prosateur n’est juste et profond que par la réflexion. (A. de Muisset.) Un poëte peut devenir un prosateur, mais jamais un prosateur ne deviendra un poëte. (Th. Gaut.) Le prosateur détrône chaque jour le poëte. (E. Pelletan)

G.D.U., t. XIII, p. 279 a-b.