Crapelet (Charles), habile imprimeur, né à Levécourt (Haute-Marne) en 1762, mort en 1809. Il établit une imprimerie dans la capitale au commencement de la Révolution et entreprit dans ces temps difficiles de régénérer la typographie française par la scrupuleuse correction des textes et la pureté des caractères. Ses éditions, qui rappellent celles des Estienne et des Alde, sont très-recherchées des bibliophiles. Nos citerons surtout les Oiseaux dorés d'Audibert (1802, 2 vol; in-fol.), dont 13 exemplaires ont été tirés en lettres d'or.

Crapelet (Georges-Adrien), imprimeur et philologue distingué, fils du précédent, né à Paris en 1789, mort en 1842. Il soutint avec éclat la réputation de son père par les belles éditions qu'il a données : La Fontaine (1814), Montesquieu (1816); Rousseau et Voltaire (1829). La publication la plus importante sortie de ses presses est la Collection des anciens monuments de la littérature française (1816-1830, 13 vol. in-4°), offrant, dans l'ordre chronologique, une série d'ouvrages, la plupart inédits, où l'on peut suivre les progrès successifs de notre langue. On cite, parmi ces ouvrages : Lettres de Henri VIII à Anne de Boleyn; Combat de trente Bretons contre trente Anglais; Histoire de la Passion, composée en 1490 par Olivier Maillard, etc. Crapelet est auteur des livres suivants : Études pratiques et littéraires sur la typographie (2 vol. in-8°).; Des Progrès de la littérature en France et en Italie au XVIe siècle (1836, in-8°), etc

Crapelet (Louis-Amable), peintre et aquarelliste français, né à Auxerre en 1825, mort à Marseille, le 19 mars 1867. Il fit ses études au collège d'Auxerre, où son père, agent voyer en chef et remarquable miniaturiste, favorisa son penchant irrésistible pour le dessin. A Paris, il fut successivement élève de M. Badin, peintre d'histoire, maintenant directeur de la manufacture des Gobelins, de M. Séchan, peintre décorateur, et enfin de MM. Corot et Durand-Brager. L'humeur inconstante du jeune artiste le portait ainsi à essayer de tous les genres, allant de la peinture d'histoire à la décoration et du paysage à la marine. Après quelques années d'une existence assez orageuse, supportant fièrement la pauvreté, grâce au travail, à la persistance et à la foi dans l'avenir, il débuta au Salon de 1849 par un paysage, Matinée, tableau qui fut remarqué.

Mais ses secrètes aspirations le poussaient vers le pays du soleil et de la lumière. Après un court séjour en Algérie. Il poussa jusqu'en Egypte. Esprit aventureux et amoureux de l'inconnu, lui aussi, paraît-il, voulut aller à la recherche des sources du Nil. Il remonta le fleuve jusqu'à la troisième cataracte dans une cangue conduite par douze nègres, et pénétra jusqu'au village de Ouadhi-Alfagh. Mais à tout voyage il faut un terme, et Crapelet revint par l'Asie Mineure, Constantinople, la Grèce et l'Italie. Il garda de ces pays enchantés une impression éternelle. Sa voie était trouvée, et il s'adonna presque entièrement à la reproduction de scènes orientales.

Il reparut à l'Exposition universelle de 1855 avec sa Vue du village de Luxor, puis il s'adonna plus spécialement à l'aquarelle, et devint bientôt l'un des maîtres du genre. Nous citerons principalement : Une rue au Caire : Intérieur oriental : le Temple de Medinet-Habou et la Mosquée de Mounayed (Salon de 1857); puis Intérieur de l'église Saint-Jean, à Pise; Vieille cour arabe au Caire; Ruines du temple de Kouna-Ambos (Salon de 1861); Ancien village des Catalans (Salon de 1865); aux Salons de 1865 et de 1866, les Vieux quartiers du Caire et un Bazar au Caire; enfin Un Coucher de soleil sur le Bosphore, que l'artiste exposa en 1866 dans sa ville natale, et qui se trouve dans la collection de M. E. Joly. Le musé d'Auxerre possède aussi un Intérieur de forêt, très beau paysage qu'il envoya à la même exposition des beaux-arts. Ce tableau, comme d'ailleurs les toiles trop rares du regrettable artiste, se fait remarquer par un coloris étincelant, des tons vigoureux et d'une bonne réalité. Ses aquarelles sont parfois trop empâtées et tournent à la gouache, ce qui leur donne un certain air de dureté, mais elles sont toujours énergiques et lumineuses. Crapelet, comme Decamps, faisait trop bon marché de la vérité locale et la sacrifiait volontiers à la recherche du caractère ou de l'effet. Il a traduit l'Orient avec un sentiment tout personnel, moins en ethnographe qu'en poëte amoureux des colorations puissantes, des contrastes de tons, de lumières et de costumes aux harmonies chatoyantes.

Crapelet avait rapporté de ses voyages de nombreux portefeuilles de croquis qui ont fait de son brillant crayon une précieuse ressource pour nos recueils illustrés. Le Tour du monde, l'Illustration, le Monde illustré l'ont compté parmi leurs correspondants assidus. Dans le premier de ces recueils, il a publié la relation d'un Voyage en Tunisie, qu'il entreprit en 1859, à la demande du bey de Tunis. En 1857, il accomplit sur le Monte-Cristo, avec Alexandre Dumas et le peintre Moinet, un second voyage d'Italie.

Crapelet excellait aussi dans le décor, ce côté plastique des chefs-d'œuvre dramatiques, trop dédaigné aujourd'hui. Il travailla spécialement, dans ses dernières années, pour les théâtres de Lyon et de Marseille.

[G.D.U., t. 5, p. 450 b - c]