DICTIONNAIRE

 

DES

 

SCIENCES ET DES ARTS,

L’Etymologie, la définition et les diverses acceptions des termes
techniques usités dans l'Anatomie, la Physiologie, la Médecine,
Chirurgie, la Pharmacie, la Chimie, — la Zoologie, l'Ornithologie
l'Ychtiologie, l'Entomologie, etc. — la Botanique, la Minéralogie; —
les Mathématiques, la Métrologie ou le système des nouveaux poids et
mesures ; — l'Analyse, la Mécanique, l'Hydraulique, la Statique, l’Hydro-
tatique, la Dynamique, l'Hydrodynamique, la Physique, l'Optique,
l'Acoustique, la Pneumatique, l'Electricité, le Galvanisme ; — l’Astrono-
mie, la Gnomonique, la Géographie, l'Hydrographie, la Navigation ; —
la Peinture, la Sculpture, la Gravure ou la Glyptique, l'Imprimerie ;
l'Architecture; la Marine, l'Art de la guerre ; le Blason, la Gymnastique,
la Chorégraphie ; — la Pêche, la Chasse ; — les Arts et Métiers ou la
Technologie ; — l’Economie domestique, l’Agriculture, le Jardinage, le
Commerce ; — l’Economie politique, les Titres d’honneurs et de dignité,
la Diplomatie; — la Littérature, la Grammaire, la Rhétorique, la Poésie,
l'Art dramatique; — la Logique, la Morale, la Métaphysique, la Théo-
logie ; — la Jurisprudence, la Pratique ; la Bibliographie, l'Antiquité,
la Diplomatique; l'Histoire, la Chronologie, la Numismatique, etc. etc.

On y a joint le Tableau historique de l'origine et des progrès de
chaque branche des connoissances humaines, et une Description
abrégée des machines, des instrumens et des procédés anciens
et modernes employés dans les Arts.

 

PAR M. LUNIER.

TOME I.

A PARIS,

 

CHEZ. LE NORMANT, IMPRIMEUR-LIBRAIRE,
RUE DES PRÊTRES SAINT-GERMAIN-I/AUXERROIS, N°. 17.
et chez H. NICOLLE et C°, rue des Petits-Augustins, N°. 33.

 

1806


 

 

 

A SON ALTESSE SERENISSIME

MONSEIGNEUR

LE PRINCE MURAT,

GRAND AMIRAL, MARÉCHAL DE L'EMPIRE,
GRAND OFFICIER DE LA LEGION D'HONNEUR,
GOUVERNEUR DE PARIS, etc.

Monseigneur,

En demandant à VOTRE ALTESSE SÉRENISSIME; la permission de faire paraître sous ses auspices cet humble fruit de mes travaux je n'ai eu d'autre ambition que celle de le présenter au public, accompagné de la recommandation d’un Prince qui donne tous les jours des preuves de son goût éclairé pour les sciences et les arts.

En acceptant mon hommage, VOTRE ALTESSE serenissime a donc comblé tous mes vœux; et si à l’accueil gracieux qu'elle a daigné faire à l'ouvrage elle a ajouté des choses infiniment trop flatteuses pour l'auteur, je dois les attribuer entièrement aux sentimens généreux qui rappellent aux Princes qu'ils sont les protecteurs nés des gens de lettres, qui permettent aux guerriers les plus illustres de sourire à leurs efforts, et qui commandent peut-être aux hommes que leurs services ont portés à une grande élévation de ne pas refuser cette sorte d’encouragement à leurs compositions les plus foibles.

J'ai l'honneur d'être,

MONSEIGNEUR,

de Votre Altesse Sérénissime,

Le très-humble et très-obéïssant
serviteur,

LUNIER.

 


 

PREFACE.

 

Lorsque les Sciences et les Arts étoient ignorés ou dédaignés des gens du monde, on voyait peu de Dictionnaires, et ceux qui existoient ne passoient guère les bornes de la Langue commune : mais aujourd'hui que tout le monde est instruit ou désire de le paroître, aujourd'hui qu'il n'est point de brochure ou de feuille périodique qui ne renferme quelques termes scientifiques ou techniques, dont la nouveauté ou la bizarrerie peut arrêter 1e lecteur, les dictionnaires qui en donnent l’explication sont devenus d'un usage général et même indispensable.

Quelque considérables que soient déjà ces sortes d’ouvrages leur nombre doit encore s'accroître, parce que leur nature, est de ne jamais atteindre la perfection, et de ne pouvoir en approcher qu'en se multipliant. Il doit, en effet, arriver, de tems en tems, des époques où ceux qui existent ne pouvant plus suffire, il faut nécessairement les renouveler ; et ces époques sont marquées par les grands changemens qui s'introduisent dans le langage des Sciences et des Arts, et qui sont une suite naturelle de leurs progrès. Mais s'il est une circonstance où ce besoin se fait plus particulièrement sentir, c'est incontestablement celle dans laquelle nous nous trouvons, où une foule de nouvelles idées ayant .accru, dans l'espace de moins de vingt-cinq ans, les richesses de l'esprit humain, il a fallu, pour les exprimer, créer une multitude de nouveaux termes, ou multiplier les acceptions des anciens.

Mais quelque favorable que suit le moment qu'on a choisi pour publier ce nouveau Dictionnaire, quelque-soin qu'on ait pris pour le mettre en état de remplacer tous ceux qui l'ont précédé, et suppléer à leur défaut d'instruction, on n'a pas la prétention de croire qu'il est plus à l'abri qu'eux de la destinée qui les attend tous et il faudra bien que, dans un certain nombre d'années, il cède la place à un nouveau venu, qui, profitant de ses lumières et même de ses fautes, et se parant des nouvelles acquisitions faites dans les Sciences et dans les Arts, le reléguera dans un coin de bibliothèque, où lui-même ira le rejoindre à son tour pour servir l'un et l'autre, et ainsi que leurs prédécesseurs, de monumens plus ou moins fidèles de l'état des connoissances humaines au moment où ils ont été composés.

L’utilité des dictionnaires une fois reconnue, ainsi que la nécessité de les renouveler de tems en tems, il est indispensable de dire quelque chose des motifs qui ont fait entreprendre celui-ci, du plan que l'auteur a suivi, et de la manière dont il l'a exécuté.

Parmi les dictionnaires qui traitent des Sciences et des Arts, les uns se sont bornés à une science en particulier; les autres ont entrepris la description des arts qui ont entr'eux quelque analogie; quelques-uns ont embrassé l'universalité des connoissances humaines, mais on ne trouve, ni dans les uns ni dans les autres, une instruction complète : ici, c'est une description des procédés et des instrumens d'un art, sans aucune définition des termes qui composent son langage; là, on trouve l'étymologie d'un mot, mais point d'explication de la chose dont il est le signe; partout de l'instruction, mais une instruction partielle, disséminée, et presque toujours insuffisante.

Voilà les motifs qui ont déterminé l'auteur à réunir, dans le moindre espace possible, ce qu'on ne trouveroit que difficilement et à grands frais dans deux ou trois cents volumes ; en y ajoutant, comme de raison, les termes dont les Sciences et les Arts se sont enrichis depuis quelques années, et particulièrement ceux de la nomenclature chimique, du nouveau système des poids et mesures, et ceux: en plus grand nombre qui ont accru le domaine de la physique, de la minéralogie, de la botanique, etc. Voici maintenant le plan de l'ouvrage.

Si la connoissance des choses dépend en grande partie de celle des mots, l'art qui donne une explication nette de deux-ci, l'art qui apprend à remonter du connu à l'inconnu, des composés au simple, des dérivés au radical, des acceptions rnétaphoriques au sens primitif; l'étymologie, en un mot, a dû être considérée par l'auteur comme le premier et le principal objet de son travail.

L'art étymologique a, comme les autres arts, ses principes et ses règles, mais il a aussi ses dangers et ses écueils. Il existe dans la formation des mots d'une langue, dans leurs diverses applications, et jusque dans leur corruption, une suite, une généralisation d'idées, dont il n'est pas impossible de trouver le fil et l'enchaînement, il n'est pas non plus très-difficile de reconnoître les termes qui nous viennent des langues anciennes; et pour ceux que nous avons empruntés des langues modernes, l'histoire des guerres, des voyages, du commerce, montre suffisamment l'ordre des différens canaux par où ces termes ont pu passer jusqu'à nous : mais .quand on a épuisé tous les moyens indiqués par l'art pour trouver l'origine certaine d'un .mot dont les changemens considérables et les acceptions multipliées ont fait oublier ou perdre la première imposition, vouloir aller-plus loin, c'est justifier les reproches de frivolité et de pédantisme que l'on fait à la science et à ceux qui la professent et il faut alors se contenter de l’étymologie qui paroît la plus probable, et même se résoudre à en adopter une qui n'a souvent d'autre mérite que de ne pas trop choquer la vraisemblance.

Au reste, la science étymologique n'a pas besoin, pour être une science utile et même nécessaire, de cette exactitude rigoureuse dont ses partisans lui font honneur, et que ses, détracteurs lui refusent, les uns et les autres, trop légèrement peut-être car, que l'étymologie d'un mot soit certaine, vraisemblable ou douteuse; que les principes sur lesquels elle est fondée soient évidens, judicieux ou absurdes, elle a toujours, même dans le cas le moins favorable, l'avantage insigne et incontestable de piquer la curiosité, d'exciter l'attention, de soulager la mémoire, de rappeler, avec le mot, l’idée de la chose qu'il représente, ou de suppléer à cette idée par celle d'une circonstance, d'une propriété, d'une date, d'un fait, d'un nom qui en facilite l'intelligence et en perpétue le souvenir. Il faut ajouter à cela que tous les hommes éclairés regardent l'art étymologique comme une sorte d'analyse qui sert merveilleusement à la définition, si elle n'est pas la définition elle-même.

A l’'étymologie du mot, on a joint sa signification littérale et grammaticale, et à celle-ci ses diverses acceptions. Cela seul devroit suffire pour foire distinguer cet ouvrage des simples vocabulaires, et le mettre au rang des dictionnaires de notions; mais l'Auteur, s'est efforcé de lui mériter doublement ce titre, en plaçant, par-tout où les circonstances l'ont permis, une notice historique, contenant l'origine, les principes et les progrès des Sciences; l'époque des découvertes importantes, les noms de leurs auteurs, les événements qui les ont préparées, et les circonstances qui les ont accornpagnées, la naissance de chaque art, ses perfectionnemens, sa décadence, sa perte, sa renaissance, les noms de ceux qui s’y sont distingués, et les titres des ouvrages qui en ont traité; s'il est question d'un usage, d'une fête catholique, d’une cérémonie, on a indiqué le pays où il a commencé à s'introduire, l'occasion et la date de son établissement ; s’il s’agit d’un titre d’honneur, de dignité ou d'office, on a eu soin de faire mention de sa création, de ses,fonctions, et des révolutions qu'il a éprouvées par les çhangemens de moeurs et de gouvernemens.

 

Quant à l’ordre à suivre dans la distribution des diverses d'un même mot appliqué à plusieurs Sciences ou Arts, l'Auteur avoit à choisir entre le degré d'importance ou de prééminence dont telle science ou tel art jouit dans le monde savant, et entre l'ordre successif des dérivations du mot : l'Auteur a préféré ce dernier, comme le mode le plus naturel, le plus instructif, et le plus propre à marquer la progression des diverses significations du mot, en partant de son acception la plus simple, pour arriver à la plus composée, la plus étendue ou la plus éloignée de son acception primitive. Enfin, pour reposer la vue et faciliter les recherches, chaque article est précédé du nom (imprimé en italique) de la Science ou de l'Art auquel l’acception se rapporte.

Tel est le Dictionnaire qu'on a l'honneur d'offrir au public. Son utilité fait toute son excellence ; son autorité, et par conséquent son succès, ne reposent nullement sur le nom et la capacité de Celui qui l'a composé, mais uniquement sur le mérite et la réputation des savans illustres qui y ont contribué, chacun pour sa part.

Quant au travail qui est particulier à l'Auteur, comme il se réduit à de légers soins pour rassembler ses matériaux, à un peu de patience pour les examiner, et à quelque discernement pour les choisir, les classer et les réduire, ce travail peut, s'il est exécuté avec méthode, précision et clarté, le mettre a l'abri de la censure, mais il ne suffit pas pour lui donner part à des éloges qui ne sont dus qu’à ceux dont il a emprunté les lumières.

Les auteurs de dictionnaires ne travaillent pas pour leur propre gloire leur tâche est de préparer celle des autres. Condamnés par état à les pionniers de la littérature, leur destinée est remplie lorsqu'ils sont parvenus à écarter les obstacles qui s'opposent à ses progrès, à aplanir et à nettoyer les routes qui doivent conduire les hommes de génie aux honneurs et à la fortune.

Mais cet avantage, commun à tous les dictionnaires, n'est pas le seul qui distingue celui-ci : l'Auteur, en ménageant l'intérêt des savans, en leur épargnant quelquefois de longues et pénibles recherches, et en les mettant souvent à même de citer les écrivains originaux et les historiens contemporains, comme s'ils les avoient lus, a encore eu l'ambition d'être utile aux gens du monde, en les mettant en état, non pas de professer les Sciences et les Arts, mais d'entendre leur langage, et de pouvoir rendre raison d'un terme scientifique ou technique qui aura paru dans une feuille du matin, et qui fera probablement le sujet de la conversation du soir.

L'Auteur n'a rien négligé pour atteindre ce double but, mais si, malgré tout ce qu'il a pu faire, il lui est échappé quelques erreurs ou quelques omissions, il prie ceux qui s'en apercevront de vouloir bien considérer l'étendue de son ouvrage et le comparer avec le cadre étroit dans lequel il l'a renfermé; de songer à l'immensité des matériaux qui lui ont été nécessaires, et dont quelques-uns lui ont manqué, par l'impossibilité de les réunir tous : et ils reconnoîtront sans doute avec lui que si un ouvrage d'un volume un peu considérable reste presque toujours imparfait, c'est moins par défaut de soins, que parce que les soins les plus constans et les plus multipliés ne sont pas toujours heureux ils se convaincront qu'une recherche appelle une autre recherche; qu'un livre ne sert souvent qu'à faire sentir le besoin d'un autre livre; qu'on ne trouve pas tout ce qu'on cherche, et qu'on n'est pas toujours satisfait de ce qu'on trouve, que la réflexion et l'idée du mieux viennent quelquefois trop tard; enfin que, quelque chose que l'on fasse, il faut toujours qu'il reste une part à la critique, et de quoi fournir la matière d’une seconde édition.