Enseigner le français langue étrangère et langue seconde avec Internet

Carole Netter

Swarthmore College


Internet est devenu ces dernières années l'un des principaux moyens de communication. Il est actuellement le support privilégié aux nouvelles technologies destinées à l'enseignement. Que nous apporte Internet actuellement pour l'enseignement des cultures et littératures francophones? Qu'est-ce qui pourrait être amélioré et développé?

Enseigner avec Internet.

  • Communiquer, échanger et collaborer. Le courrier électronique et le Web francophone donnent la possibilité d'échanger recherches et méthodologies comme jamais auparavant: Listes de diffusion; Bibliographies; Recherches littéraires; Bibliothèques, librairies et cédéroms; Sites éducatifs; Colloque en ligne "Frontières de la fiction" (Fabula, décembre 1999).
  • Publications sur le Web, en particulier, de travaux d'étudiants. Publier sur le Web dans des délais très brefs des documents auxquels les étudiants ont collaboré est très motivant pour eux. Dans d'autres disciplines, les étudiants sont encouragés au tutorat, cette participation serait tout à fait souhaitable pour notre discipline: Petites annonces et dialogues réalisés en classe par un groupe d'étudiants débutants; Lettre de Leïla Sebbar à des étudiants de français (Décembre 1995); Leïla Sebbar répond aux questions d'étudiants américains sur les nouvelles "Palmes" et "le Bal".
  • Aide à l'enseignement. Internet offre des programmes de cours et des éléments de cours dans tous les domaines, ainsi que de la documentation culturelle et littéraire: Français langue étrangère et langue seconde; Activités culturelles et littéraires, Aide en ligne, Compréhension et expression orales, Conjugaison des verbes, Correspondance, Dictionnaires, Exercices structuraux, Expression écrite, Évaluation, Français spécialisé, Grammaire, Interrogation, Jeux de langue, Linguistique, Nombres, Orthographe, Phonétique, Vocabulaire. D'excellents dictionnaires et outils de correction sont déjà en ligne, dont le Dictionnaire Universel Francophone (Éditions Hachette et l'AUPELF-UREF); L'Université du Texas à Austin met en ligne des exercices interactifs de 1e année et un dictionnaire de formes verbales qui passent pour des modèles du genre.
        Le domaine de la "Compréhension orale", presque inexistant il y a encore un an, prend de l'essor. Des sites ont recours à la technologie de Real audio et vidéo et de QuickTime pour mettre en ligne des documents interactifs comprenant des séquences filmées ou sonores indispensables pour l'enseignement de la langue:
    – Niveaux 1 et 2 (ClicNet): Jouez à la loterie – écoutez et écrivez les chiffres et les nombres de 1 à 50 en jouant à la loterie; Dialogues – environ soixante-dix courts dialogues pour apprendre le français avec le sourire; Les Jokes de Gert Millaire – blagues, citations et devinettes racontées par une Québécoise, et annotées pour les étudiants anglophones.
    – Niveaux 2 et 3: Civilisation française. Exemple: "Les écoles" (Marie-J. Ponterio, Robert Ponterio, Cortland); Funambule, apprendre et enseignez le français avec TV 5; Encyclopédie sonore (France) – cours de littérature disponibles dans différentes universités françaises, extraits en ligne.
        Les archives des stations de radio et chaînes de télévision regorgent de documents directement utilisables en cours de langue et de culture. En parallèle avec les journaux et magazines, nous avons en main des outils sans précédent pour présenter l'actualité politique, sociale et culturelle de nombreux pays francophones.
        Les textes et sites littéraires, quant à eux, se multiplient et sont mieux localisés. Rien de plus pratique qu'un texte sous format électronique pour une recherche par mot clé, des annotations et notes de cours. Principaux répertoires de sites littéraires assortis de moteurs de recherche: Littérature francophone virtuelle (ClicNet, 1995-); Yahoo Littérature (1997-); Aleph (Fabula, site de recherche sur la fiction littéraire, Canada, 1999-); Fabula est un lieu de ressources et de rencontre destiné aux chercheurs s'intéressant aux théories de la fiction littéraire. On y trouve des nouvelles (parutions, colloques, appels d'articles, informations diverses sur la recherche littéraire), un forum, des bibliographies sur les différents champs théoriques en lien avec la fiction, et Aleph, un moteur de recherche pour les études littéraires. Sites indexés par Aleph.
        Principaux sites éditeurs de textes du domaine public: ABU: la Bibliothèque Universelle (France, 1993-) – précurseur de l'édition électronique de textes du domaine public, le serveur de l'Association des Bibliophiles Universels offre la possibilité de lire, télécharger plus de 250 textes du domaine public. Vous pouvez également faire des recherches de mots sur l'ensemble du corpus. Exemple: Lexique du rire (Lettre H); Athéna (Université de Genève, 1996-); Bibliothèque électronique de Lisieux (1997-); Les sites de la Bibliothèque Nationale de France (1998-): Gallica: Images et Textes du XIXe siècle francophone et Gallica Classique offrent des textes en mode texte et image (ce dernier pourrait dès à présent être interrogeable si la BNF s'en donnait les moyens techniques).
        Quelques ressources textuelles contemporaines: Île en île (Sylvie Roussel et Thomas C. Spear, City University of New York, 1998-); Le site offre une riche documentation sur les îles francophones et francophiles et valorise des ressources informatives et non commerciales sur le monde insulaire. (Voir la rubrique "Littérature francophone virtuelle" de ClicNet.)
        Multiforme et prometteuse, l'aide à l'enseignement s'avère encore insuffisante dans le domaine de l'enseignement de la langue. Aucun gouvernement de pays francophone, aucun éditeur, aucune équipe d'enseignants n'ont, à ma connaissance, regroupé leurs efforts pour mettre en ligne gratuitement un cours de français multimedia chargé de former des débutants et d'en faire des locuteurs à part entière (je ne parle pas ici de l'enseignement à distance pratiqué par les universités américaines et canadiennes. Voir la CIFFAD, en particulier). Plus généralement, on peut se demander ce qui pourrait être fait pour mieux développer les ressources éducatives francophones et l'échange de ces ressources. C'est ce que nous allons faire ensemble.

    Améliorer Internet
    Le Web est souvent lent, les sites ne sont pas toujours accessibles, d'excellents sites disparaissent. Trouver ce que l'on cherche reste un problème: les moteurs de recherche nous transmettent souvent trop ou trop peu d'information. On perd un temps fou à trouver des sites excellents. Tout ce dont les étudiants et enseignants ont besoin n'existe pas encore. Pour les recherches d'information, le moteur de recherche le plus performant me semble être actuellement Google car, dans le cas d'un changement d'adresse, il conserve une copie du site indexé, il classe en premier les pages les plus citées, et son option "GoogleScout" recherche des sites d'intérêt similaire. Les moteurs de recherche et répertoires de ressources devraient à l'avenir nous aider à mieux sélectionner informations et outils technologiques de qualité, ce qui nous inciterait à collaborer, et nous éviterait de refaire plus ou moins bien ce qui existe déjà sur le Web. Les moteurs de recherche comme celui de Fabula pour les études littéraires, et celui du Carrefour Éducation, portail Internet des enseignants du Québec (Télé-Québec, en collaboration avec le gouvernement du Québec et le Ministère de l'éducation, août 99), pour les sites éducatifs représentent un progrès certain si on les compare à celui du site du Ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie EducaSource (France). Enseignants et étudiants continueront à publier textes culturels et littéraires, recherches, ou documentation pédagogique afin d'enrichir les ressources existantes. Il est souhaitable que les serveurs institutionnels, ceux des bibliothèques, des universités, des académies et des écoles apportent un soutien technologique nécessaire aux enseignants et apprenants (initiations aux nouvelles technologies, logiciels, "applets", "JavaScripts", etc.) et offrent des bases de données à des ressources éducatives francophones accessibles sans restriction sur le Web.

    Il est clair qu'il y a 10 ans, personne ne se doutait de l'ampleur que prendrait le Web pour la recherche et l'enseignement en études francophones. Nous vivons une période remarquable de partage des connaissances. Il ne tient qu'à nous de participer activement à cette révolution de l'enseignement des cultures et littératures francophones.