La diversification des ressources dont traite ce numéro est étroitement liée au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC). Si ce phénomène n'est pas complètement nouveau et si l'on range sous ce terme des techniques de communication hétéroclites, question que nous évoquerons, il faut pourtant constater son accélération liée au multimédia hors ligne et en ligne et aux techniques de numérisation.
Pour appréhender l'impact des NTIC dans des apprentissages de langue ainsi que leurs rapports avec d'autres supports, il nous paraît essentiel de ne pas dissocier usages d'apprentissage et usages sociaux des NTIC. Une telle option tient évidemment au fait que les NTIC traversent tous les domaines d'activité et redéfinissent donc les frontières entre les sphères du travail, des loisirs et de l'apprentissage mais aussi à l'intérêt de prendre en compte les recherches menées ces dernières années sur l'innovation technique et l'appropriation sociale des techniques de communication.
La plupart du temps en effet on examine les domaines de l'éducation et de la formation comme des secteurs régis par des logiques propres qui supposeraient des outils d'analyse spécifiques.
Si cela est en partie fondé, on peut aussi considérer que des analyses externes au champ évoqué peuvent utilement l'éclairer. Nous examinerons ainsi des questions posées par la sociologie des usages et qui concernent les phénomènes d'appropriation, de diversification voire d'individualisation des pratiques de communication à travers les NTIC. Les travaux qui refusent le déterminisme technique comme le déterminisme social pour tenter d'expliquer les relations complexes entre technologies et usagers nous semblent en effet intéresser directement le champ de l'apprentissage.
Il en va de même pour toute une série de questions, liées aux premières et qui concernent les représentations des techniques et les valeurs symboliques qu'on y attache y compris dans une perspective interculturelle. L'internationalisation que permettent les NTIC présente d'autre part des risques de standardisation qui étaient moindres avec d'autres supports.
Enfin la diversification, certes effective, ne doit pas cacher les phénomènes de métissage et d'hybridation des supports qui sont eux aussi à prendre en considération.
Le rapport entre les nouveaux médias (en ligne ou hors ligne) et leurs utilisations dans le domaine de l'enseignement est aujourd'hui présenté comme une évidence. A grand renforts de présupposés, cette évidence s'est imposée à tel point que tenter de tenir un discours critique sur ce thème paraît blasphématoire : l'alliance entre une tradition de l'innovation pédagogique et l'efficacité supposée des toujours-et-éternellement-nouvelles technologies de l'information, relayée par le discours médiatique et de forts enjeux économiques rend-elle pour autant impossible toute interrogation de fond ? A savoir : pourquoi introduire ces médias en classe ? Quelles raisons a-t-on de leur accorder une efficacité symbolique (analysée en termes sémiotiques) susceptible d'intervenir dans les apprentissages ? Ces questions renvoient historiquement aux interrogations qui ont présidé, il n'y a pas si longtemps, à l'introduction des médias de masse (radio, télévision, presse écrite) dans la classe. Si ces pratiques ont pu avoir quelque efficacité, c'est qu'elles renvoyaient à une analyse de la culture de masse, culture partagée par le plus grand nombre d'élèves et véhiculée par les langages des médias. Introduire la télévision en classe c'était certes y introduire un outil technique. Mais c'était surtout recréer au sein de l'école le même type de partage de croyance que celui qui réunit des foules anonymes autour du rituel du journal télévisé. Les langages des médias, véhicules de la culture de masse, permettaient ainsi au plus grand nombre d'élèves de décoder facilement des messages qu'il "suffisait" par la suite de raccorder à des perspectives pédagogiques. Certaines recherches en Français Langue Etrangère ont ainsi pu créditer l'université de résultats transposables sur le terrain de l'école. Mais le cas des nouvelles technologies est-il équivalent ? Le vocable "nouvelles technologies" ne nous enferme-t-il pas d'ailleurs dans un raisonnement bien éloigné de celui évoqué autour des médias de masse ? Il semble que l'on assiste en fait à l'émergence d'une idéologie techniciste, idéologie qui fait trop souvent l'économie d'une réflexion sur les conditions de possibilité d'un partage des langages autour des nouveaux médias. Car sans la prise en compte des spécificités de ces nouveaux médias, spécificités qu'il convient d'aborder en termes sémiotiques plus qu'en termes d'efficacité immanente d'une technique, les enseignants ne courent-ils pas au devant de graves désillusions ? Les résultats aujourd'hui mis au crédit des nouvelles technologies renvoient en effet peut-être plus à un effet de nouveauté qu'à une réelle efficacité due au partage d'un langage.
Cet article tentera de faire le point sur cette problématique, et de dégager quelques pistes de réflexion afin de décrire certaines des spécificités des nouveaux médias.
Les bibliothèques ont au cours de leur histoire forgé la grande tradition du catalogue, intermédiaire entre le lecteur et l'oeuvre. D'abord simple répertoire, le catalogue est devenu outil de recherche : au-delà de la description, il a proposé des accès à celle-ci. Parallèlement, nombre de bibliothèques ont ouvert leur rayonnage au libre parcours du lecteur, ce qui les a obligées à classer les ouvrages dans un ordre représentatif du contenu : c'est le libre accès.
Bibliothécaires et documentalistes ont forgé pour ce faire des langages documentaires, définis comme langages artificiels, et censées formaliser à la fois le contenu des documents et les demandes des utilisateurs, dans une opération qu'ils ont appelée indexation. Des systèmes complexes, structurés et parfois hiérarchisés ont été élaborés : thesaurus, répertoires de termes ou d'expressions. Des relations entre ces termes ou expressions peuvent être établies a priori, formant ainsi un langage documentaire précoordonné.
Le langage documentaire est-il un pont entre le lecteur et l'oeuvre entre l'utilisateur et le document, ou lui fait-il écran ? L'un et l'autre. On ne saurait indexer d'un même mouvement les questions et les réponses, ni même raisonnablement prévoir les questions. Outil pour l'analyse, le langage documentaire est, pour l'utilisateur final, un langage étranger dont il va se servir tant bien que mal, ou qu'il va devoir apprendre tant soit peu.
L'informatisation des bibliothèques s'est d'abord appliquée aux catalogues. Elle a permis une indéniable amélioration de l'accès à la description bibliographique, pour ceux des usagers qui se sont adaptés à la machine. Mais le premier effet est s'avoir rendu difficile la pratique du feuilletage, abondamment prisée par les utilisateurs d'un catalogue sur fiche. En proposant comme modèle principal la gestion des réponses aux questions, le catalogue informatisé a terriblement renvoyé l'interrogateur à lui-même, le réduisant à ne chercher que ce qu'il avait déjà trouvé, que ce qu'il connaissait, que ce qu'il savait nommer ou caractériser.
Informatisés, les accès sont devenus plus nombreux et surtout combinables. Empruntés notamment à l'algèbre de Boole, des opérateurs permettent la réaction de véritables équations de recherche. Dans le même temps, la gestion automatisée des thésaurus et répertoires de descripteurs par les catalogueurs et les interrogateurs a démultiplié leur efficacité. Toutefois, si la recherche informatisée est de plus en plus efficace pour les utilisateurs experts, le problème de l'utilisateur profane est posé, sous deux termes : le langage et l'interface.
Affublant les interfaces d'accès aux catalogues informatisés d'un sigle qu'ils sont seuls à comprendre mais qui est lourd de sens (OPAC = on line public access catalogue), ils ont produit une abondante littérature de la frustration (les OPAC ne sont pas satisfaisants) et nommé les deux manifestations principales de cette frustration la suite : le silence(il y a des réponses mais elles ne parviennent pas) et le bruit (les réponses pertinentes sont perdues au milieu d'un fatras de réponses n'intéressant pas l'utilisateur). Diverses stratégies sont expérimentées pour réduire cette frustration
On tâche là de s'approcher, sans y jamais parvenir, du langage naturel, en partie hors sujet (parle-t-on naturellement à une machine ?) ; en tout cas de rapprocher les questions des utilisateurs des réponses que le "système" peut leur fournir. A mesure que les corpus grandissent et que les utilisateurs se diversifient, la difficulté de l'entreprise s'accroît. Quand à l'image, elle n'est encore pertinente en matière d'interrogation que dans des matières spécialisées, comme les molécules chimiques.
L'ergonomie de l'interface est une question importante, et cependant secondaire. Le passage des interfaces en mode caractère aux interfaces graphiques, puis au World Wide Web, peut très bien se faire alors que demeurent inchangés les index et les langages documentaires : modifier l'emballage peut donner envie d'utiliser un outil linguistique et logique qui par ailleurs demeure inchangé. L'intuitivité du clic n'entraîne pas l'intuitivité linguistique.
L'avènement d'Internet n'a pas changé les données des problèmes ici abordés mais leur a donné une autre dimension : au lieu de travailler sur des données (catalogues ou textes intégraux) localisés, on travaille sur des données réparties dans le monde entier. Tandis que des normes se mettaient en place pour l'interrogation simultanée de catalogues document listes, les moteurs de recherches se sont mis à indexer de façon primitive (par mot) tout ou partie des pages Web du réseau mondial. Le bruit devient assourdissant, et il n'est pas étonnant que ressurgissent dans un environnement nouveau des techniques éprouvées depuis longtemps : la classification (répertoires thématiques de sites) et l'indexation (Metadata ajoutées aux pages Web pour en indiquer l'auteur, le contenu...).
Nous poursuivons un rêve : réconcilier le langage naturel avec les langages documentaires, produire après une question intuitive une réponse pertinente. Il ne sera probablement jamais atteint. Mais s'en rapprocher est un singulier défi qu'à petit pas il est permis de relever.
Les supports multimédias, qu'ils soient hors ligne ou en ligne, tendent de plus en plus à être intégrés dans les centres de ressources destinés à alimenter l'apprentissage des langues. Au delà des discours traditionnellement exploités dans l'enseignement des langues (textes littéraires puis documents « authentiques ») c'est à de nouveaux discours que l'apprenant va être exposé lors de l'utilisation qu'il fera de ces nouveaux supports. Or, selon nous, tout apprentissage (et celui des langues ne fait pas exception) est indissociable du support sur lequel il s'exerce. L'objectif de cet article consistera donc à s'interroger sur les caractéristiques de l'exposition discursive proposée par les cédéroms et par internet. Outre les repérages linguistiques que l'on sera amenée à effectuer, on s'intéressera aux potentialités d'apprentissage détenues par ces discours en cherchant à mettre au jour les variables cognitives qu'ils mettent en jeu et le développement de compétences dont ils sont porteurs.
L 'apprentissage des langues n'est pas dissociable du support à partir duquel il s'exerce. En d'autres termes le passage d'un enseignement alimenté uniquement par des textes littéraires procure d'autres savoirs que celui qui intègre des discours sociaux (publicités, journaux, tous écrits qualifiés d' « authentiques »). Adoptant, dans le cadre de cet article, une perspective historique on mettra au jour certaines des articulations qui se sont créées (par l'intermédiaire de la didactique du FLE en particulier) entre supports textuels et activités d 'apprentissage. On cherchera ensuite à examiner, de manière prospective, les potentialités d'apprentissage que détiennent les nouvelles technologies lorsqu'elle se donnent comme perspective de contribuer à nourrir les ressources disponibles pour qui veut apprendre ou améliorer ses connaissances linguistiques.
On s'interrogera, dans cet objectif, sur l'exposition discursive que proposent les supports multimédias. Quelles caractéristiques détiennent ces discours et de quels développements de compétences sont-ils porteurs ? Telles sont les questions auxquelles on cherchera à apporter des éléments de réponse.
Le projet « une médiathèque virtuelle au service de l'enseignement et de la recherche » fait l'hypothèse de la pertinence de l'utilisation de contenus multimédias et de nouveaux systèmes d'archivage interactifs et s'intéresse aux usages générés par ce nouveau type d'outils. Ce projet essayera, d'une part d'évaluer les moyens développés par les institutions partenaires impliquées dans le projet afin de promouvoir la diffusion plus large de données et de contenus pédagogiques dans le cadre de l'éducation à distance et des dispositifs d'auto-formation, et d'autre part de répertorier les besoins des enseignants, apprenants et chercheurs. Cette analyse vise à conceptualiser et à développer des modèles innovants de classification ainsi que des outils d'apprentissage ou outils au sens de programmes informatiques optimisant l'accès aux données et leur manipulation. L'article rendra compte plus particulièrement de l'évaluation du système d'archivage et de l'interface d'accès aux ressources de scénarios d'exploitation pédagogiques dans le cadre de la didactique et de l'apprentissage des langues. Enfin, nos travaux cherchent à stimuler une démarche constructiviste qui s'intéresse plus précisément à l'incidence d'Internet sur la recomposition des nouveaux réseaux de la communication des savoirs.
A l'heure des autoroutes de l'information, du web, des réseaux intra et internet, des ordinateurs hypersophistiqués qui actualisent, jour et nuit, leurs données grâce au réseau, à l'heure où les philosophes s'interrogent sur l'anthropologie du cyberspace, des lieux matérialisent cette richesse virtuelle et dispersée : les centres de ressources.
Dans moins de cinq ans, toute université, entreprise, centre de formation qui n'aura pas son centre de ressources passera pour rétrograde... Ces lieux, innovants il y a seulement cinq ans, deviennent aujourd'hui communs et leur matérialité tend même à disparaître au profit d'espaces virtuels accessibles en intranet.
La question que nous nous posons, en amont de cet article, concerne les buts assignés à de tels dispositifs. En effet, selon les projets dans lesquels ils s'inscrivent, les centres de ressources, tout en se caractérisant par la même appellation, sont configurés de façon fort différente. Dans cet article et dans le cadre d'une approche ingénierique, sous-tendue par des choix philosophiques et socio-politiques, nous étudierons tour à tour les interfaces matérielles et humaines qui peuvent être mises en place dans un centre de ressources. Nous étudierons également les rôles qu'elles peuvent jouer dans l'organisation du dispositif et dans le développement des personnes, sachant qu'elles doivent permettre à chaque usager un parcours personnalisé qui tienne compte de ses caractéristiques socio-professionnelles, psychologiques et cognitives. Notre recherche propose des outils conceptuels pour le développement de dispositifs de formation, non seulement pour l'apprentissage d'un contenu disciplinaire, mais aussi pour l'acquisition d'une compétence à l'autoformation, dans et par les centres de ressources.
Nous tenterons ainsi de montrer que, dans un tel projet, le centre de ressources peut jouer lui-même, un rôle d'interface social dans un monde qui se virtualise, en partie, qui se complexifie, mais où chaque personne peut contribuer, activement, si elle est formée, à stimuler ce que Pierre Lévy appelle l'intelligence collective.
Depuis deux ans l'université Louis Pasteur de Strasbourg met en place des centres de ressources pour l'apprentissage des langues à l'intention des étudiants spécialistes d'autres disciplines (environ 4000 étudiants concernés à ce jour). L'expérience se fonde sur des choix méthodologiques et pédagogiques que nous définirons dans un premier temps. Ce type de dispositif se rapproche davantage d'un modèle d'immersion que d'une situation d'apprentissage scolaire. L'étudiant est exposé massivement à la langue étrangère au moyen de ressources nombreuses, variées et de qualité. L'utilisation du matériel linguistique « brut » demande des compétences de gestion de l'information et des méthodes de travail spécifiques. Le rôle des enseignants de langue présents dans ces centres s'en trouvent modifiés et mérite une réflexion particulière. L'étudiant note sur une fiche de suivi tout ce qu'il fait, le temps qu'il y consacre, les supports qu'il utilise. L'analyse de ces fiches permet de repérer des parcours d'apprentissage et de les mettre en rapport avec des résultats à des tests de langue, et aussi de voir avec précision la fréquence d'utilisation des différentes ressources et à quelles fins. En complément des fiches de suivi, des observations et des entretiens permettent d'identifier des évolutions dans le choix des matériels ainsi que dans l'appropriation des stratégies d'apprentissage et de leur éventuel transfert à d'autres disciplines.
Une recherche sur l'évaluation des centres est engagée et nous proposons d'en présenter les premiers résultats.
Nous discuterons la problématique du passage d'une logique d'enseignement à une logique d'apprentissage en considérant plus particulièrement les modalités d'utilisation des ressources mises à disposition favorisant ce passage.
Une des questions centrales posées par les transformations qui sont l'objet de ce numéro est de déterminer comment et dans quelle mesure une école où l'enseignement des langues a été et reste encore largement fondé sur une diète strictement programmée et une administration fortement linéaire peut préparer ceux qui la fréquentent à gérer au mieux des ressources variées désormais plus accessibles tant au dehors que - sans doute de plus en plus - à l'intérieur du dispositif de formation et aussi bien parallèlement à la scolarité que dans la perspective d'une formation continuée. Le point de vue qui sera défendu est que, même si la méthodologie de l'apprentissage et de l'enseignement des langues n'est pas en mesure aujourd'hui de proposer une conception d'ensemble intégrant pleinement cette nouvelle donne, il est fondamental que les systèmes scolaires arment ceux qui les fréquentent pour une exploitation efficace et réfléchie de ces ressources démultipliées.
Trois options majeures seront avancées, qui reviennent à bien des égards sur
Dans la mesure où les usagers / lecteurs ont de plus en plus loisir, par les mises en rapport auxquels ils peuvent procéder à l'intérieur des ressources aussi bien que par la prise interactive qu'ils acquièrent sur certaines d'entre elles (qu'ils sont à même de retravailler), le détournement et la recomposition de textes auxquels a toujours procédé l'enseignement (mais aussi tout concepteur-auteur de manuels aussi bien désormais que de cédéroms ou de pages en ligne avec hyperliens) passe plus facilement à la portée des partenaires du dispositif éducatif, enseignants et apprenants. Reste à savoir dans quelles conditions et à quelles conditions ils s'en saisissent.
Reste aussi à déterminer jusqu'à quel point cette entre-prise à effets multiples sur les pratiques et les représentations comporte des dimensions spécifiques dans le cas d'un apprentissage ayant pour objet ou pour vecteur une ou des langues étrangères. En quoi les longtemps adeptes de l'ascèse propédeutique sont-ils bien placés pour gérer l'accès à l'excès ?
Deux concepts semblent indissociables dans les écrits professionnels du monde de l'enseignement des langues, l'autonomie et les réseaux de communication électronique, sans doute parce que l'on peut voguer librement sur ces derniers (cf. les discours sur les technologies de G. Jobert in Annoot).
Cette liberté est-elle aussi grande qu'on le rêve ? Si nous suivons Laborit (et bien d'autres), nous pouvons en douter, dans la mesure où notre appréhension des événements et des données sera le résultat d'automatismes culturels ou conceptuels (Laborit, 1994).
Notre perception conditionnée du monde (cf. Laborit et Cyrulnik ci-dessus) rappelle les processus de nativisation (Schumann et Andersen). Nous nous trouvons confrontés à une double question didactique.
Il y a dans ces deux questions un réel défi pédagogique. En ce qui concerne les formations pour adultes ou étudiants (universités, grandes écoles), le mot « propédeutique » interculturelle a été avancé (Sturge-Moore). Une propédeutique, oui, mais sous quelle(s) forme(s) ? Là est la question. S'agira-t-il d'un enseignement ou d'une découverte, car peut-on enseigner à avoir un autre regard sur soi, sur les autres et sur le monde ? Le contenu de cette « propédeutique » est presque plus facile à cerner que son organisation, quelques pistes permettent d'en « ébaucher » une « esquisse », mais la forme que prendront les systèmes d'apprentissage et la relation pédagogique reste du domaine de la spéculation. Sauf peut-être dans les discours incantatoires...
Le propos est de mettre en évidence les éventuelles conséquences de l'utilisation d'un centre de ressources dans les cas où l'on prendrait pas soin de tenir compte des capitaux culturels préalables des apprenants. Il pourrait en effet se faire que, dans ces conditions, l'autonomie soit inégalisante, les favorisés culturels tirent plus de bénéfices des ressources que les moins bien dotés.
Il ne s'agit nullement d'aller contre le développement des centres, qui est, au contraire, une excellente chose, mais de pointer quelques risques. La formation des tuteurs (consultants, etc.) en est un autre dans la mesure où elle n'est pas du tout la même que celle des enseignants au sens classique. C'est un nouveau métier avec des contraintes, ses savoir-faire, et aussi les savoirs qui sont nécessaires à l'exercice même de la fonction.