NEF - Le Livre 010101 de Marie Lebert - Articles

Les affres de la recherche d'un article papier, ou pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?

paru dans Edition-actu n° 58, 15 mai 2002

Les quelques lignes qui suivent sont à la fois une auto-critique, une activité qui n'a jamais fait de mal à personne, et le récit d'une expérience montrant qu'il n'est pas si facile que cela de se procurer l'article d'une revue imprimée, et de surcroît française, quand on habite de l'autre côté de la planète.

Acte 1. Septembre 2001. J'arrive à Paris, ville lumière au rayonnement international. Dans le TGV reliant Genève à Paris, je lis Télérama, hebdomadaire bien connu que j'achète deux ou trois fois par an, quand je suis sur le sol français et que je prends le TGV. Je tombe sur un très intéressant article relatif au mail-roman d'un auteur que je souhaite justement rencontrer à Paris, un signe qui ne trompe pas.

Acte 2. Octobre 2001. Je suis assez stupide pour ne pas garder l'article. Même pour une adepte inconditionnelle du zéro papier, deux pages, ce n'est pas cela qui aurait alourdi mes bagages. Ou alors j'aurais pu le scanner immédiatement dans le cybercafé où je lis mes messages. Encore plus stupide si ceci est chose possible, je ne garde même pas les références exactes de l'article dans le carnet qui me sert à la fois d'agenda et de journal de bord.

Acte 3. Février 2002, première semaine. Je voudrais écrire quelques lignes sur ce mail-roman, interviewer à nouveau l'auteur du mail-roman et relire aussi par la même occasion l'article de Télérama. Bêtement, je me dis que cet article, appartenant je crois à la rubrique Multimédia, est bien sûr en accès libre sur le site de Télérama. Erreur grossière. Une fois de plus, je prends mes désirs pour des réalités. Si tout le monde était comme moi, ce serait la mort de la presse papier, me dit sentencieusement mon collègue.

Acte 4. Février 2002, deuxième semaine. Je lance ma soeur sur le coup en lui demandant si elle peut me retrouver un article dont je n'ai ni le titre, ni le nom de l'auteur, ni la date exacte, mais le nom de la revue (ah, quand même...), la période approximative et le sujet traité, ce qui n'est déjà pas si mal. Mais elle habite une petite ville de province, ce n'est pas sûr qu'"ils" aient Télérama et en plus la médiathèque est loin de chez elle. De plus, ce serait plus pratique d'avoir les références précises. Là je suis bien d'accord. Je vais me débrouiller autrement.

Acte 5. Février 2002, troisième semaine. Je tente de trouver une collection de Télérama à San Francisco, où j'habite. Mais c'est peine perdue. Alliance française, Bibliothèque publique de San Francisco, rien. On me répond qu'il vaudrait mieux m'adresser à une bibliothèque française ou même parisienne, ou encore au siège de la revue (sans connaître le numéro exact?). En effet. Tout ceci est assez logique.

Acte 6. Février 2002, quatrième semaine. Il est temps de faire ce par quoi j'aurais dû commencer. J'écris à l'auteur du mail-roman qui me donne très aimablement le nom et l'adresse électronique de la journaliste ayant écrit l'article. J'écris ensuite à la journaliste qui, à son retour de vacances, me donne très aimablement les références exactes de l'article. Je suis très touchée. Vous en connaissez beaucoup, vous, des hommes et des femmes de plume se donnant la peine de vous répondre pour vous donner les références d'un article alors que la moindre des choses aurait été de noter vous-même ces références? Moi pas.

Acte 7. Mars 2002. Entre temps j'écris aussi à mon ami Jean-Paul, un parisien de Paris, en lui racontant mes déboires. Jean-Paul me retrouve lui aussi les références de l'article, incluses dans un message enthousiaste que je lui avais envoyé en octobre 2001 sur le mail-roman et l'article, message qu'il avait précieusement conservé, comme quoi les archives, cela a parfois du bon, et les gens qui archivent aussi.

Acte 8. Fin mars 2002. J'écris à nouveau à Jean-Paul, en lui demandant si cela ne le dérangerait pas trop de courir à la bibliothèque la plus proche et de me photocopier l'article. Vous en connaissez beaucoup, des amis à qui vous pouvez demander ce service, et qui ne vous répondent pas qu'ils sont débordés et qu'ils n'ont pas le temps, même si c'est le cas? Moi, non. Plutôt que de courir, Jean-Paul, de chez lui, commande la revue de Télérama, la reçoit, scanne l'article en question et me l'envoie. Comme vous voyez, il est contre le photocopillage, et il a bien raison.

Acte 9. Avril 2002. Après avoir lu l'article en version papier en septembre 2001 dans le TGV reliant Genève à Paris, je le lis à nouveau en version numérique en avril 2002, à San Francisco. Qui dit mieux? J'ai promis à Jean-Paul autant de mille-feuilles qu'il peut en manger lors de mon prochain séjour à Paris. Je parle bien sûr de la pâtisserie.

Acte 10. Conclusion. Mon collègue vient de me dire que j'aurais pu tout simplement commander la revue de Télérama directement. Très juste, mais avec les délais postaux parfois surprenants entre Paris et San Francisco, qui dit que j'aurais reçu la revue avant la fin de l'année? Et puis c'était une expérience, quelque peu tirée par les cheveux il est vrai, mais à saisir pendant qu'il est encore temps. D'habitude je ne lis que sur le web, qui comme chacun sait est le meilleur moyen pour la presse de toucher toute la communauté francophone, alors tant pis pour les articles qui n'y sont pas. Cet article fut l'exception qui confirme la règle.

Acte 11. Références. Que je n'oublie pas de vous donner les références de l'article en question, au cas où vous voudriez aussi le lire: "Rien n'est sans dire", de Karine Portrait, Télérama n° 2698 du 26 septembre 2001, p. 56 et 59. Non, ce n'est pas une erreur, les p. 57 et 58 sont des pages publicitaires n'ayant rien à voir avec le sujet. Rien n'est sans dire est le titre du mail-roman de Jean-Pierre Balpe, écrivain, chercheur et universitaire. Durant l'été 2001, ce mail-roman a été envoyé quotidiennement à cinq cents personnes pendant cent jours consécutifs.


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