Reader Seduction
on reading Violette Leduc's La Bâtarde
Violette Leduc
chose me
to polarize her mirrors
une fille de la campagne,
she ran to the end of all her village roads
past poppies and cows (natural Mona Lisas)
and the blinding background
of wheat fields against the sky
she arose from these dusty tableaux
into boarding schools and liaisons
with girls she drank like wine,
like a French movie,
their only error telling her
they liked her as she was
(qu'elle venait toute faite)
and the creamy milk
delivered daily door-to-door
made her strong
and the daylong walks
in wheat fields dipped in sky
made her
she longed for costumes to cover up
documents made from a promise
broken before she was born
in a privileged bedroom her mother
had found she did not belong
a silhouette against the furtive past
Violette threw out her wardrobe
climbed instead into stolen sweaters
(she peeled off her skin like pantyhose,
pulled it on like a cross)
before the chapter was through,
I, le lecteur de cette histoire,
had to drive her
to the Lost and Found
she says j'ai with an A
comme les filles du Nord
until she comes to
Paris.
her polished lens filtered
carefully, nightmare lovers
to figure in her tragedy,
men like her looking for home
among waiting rooms,
magically their mirrors reflected
a waist fascist as invading soldiers,
a cartoon nose, the sweeping
majesty of Oscar Wilde eyelids
this her own body
misshapen and proud
beautiful and shy
her body a tug-of-war field
that she lies down in
looks up into the sky and a looping
movie of her failures
she chose me
to block this out,
sort this out, reader
she was 55 years old
a sun-wrinkled
mushroom-cute
gnome princess,
re-writing the writer
bien dans sa peau
_________________
the poem's title comes from a work of criticism on Leduc by Elizabeth Locey.
|
La Séduction du Lecteur
au sujet de La Bâtarde de Violette Leduc
Violette Leduc m'a choisie
pour polariser ses miroirs
une fille de la campagne
elle parcourait jusqu'au bout
des chemins du village
au-dela des vaches et des pavots
et l'arrière plan aveuglant
des champs de blé
touchant le ciel
elle provenait de ses tableaux
pour s'intégrer des pensionnats
et liaisons avec
des filles qu'elle buvait comme du vin,
comme un film français,
leur seule erreur, ces filles,
étant de dire à Violette
qu'elle venait toute faite
et le lait écremé distribué
chaque jour à la porte
la rendait forte
et ses marches longues
dans des champs trempés de ciel
la façonnait
elle désirait des costumes
pour se cacher dedans,
cacher des documents
fabriqués d'une promesse
cassée avant qu'elle naisse
dans une chambre privilégiée
sa mère s'est aperçue
qu'elle était l'intruse
une silhouette devant un passé sournois
Violette a jeté tous ses vêtements,
elle préférait mettre des pulls volés
(elle a enlevé sa peau comme des collants,
l'a remise comme une croix,)
avant que le chapitre soit complet,
moi, la lectrice de cette histoire,
j'ai dû la conduire jusqu'au
bureau des objets trouvés
et encore, elle dit « j'ai » avec un A
comme les filles du Nord
jusqu'à ce qu'elle arrive à
Paris.
Son objectif a filtré prudemment
des amants de cauchemar
à jouer dans sa tragédie,
des hommes qui étaient, comme elle,
chez eux que dans des salles d'attente.
Magiquement, ses miroirs
ont réfléchi
une taille fasciste
comme les soldats envahisseurs,
un nez de B.D., mais aussi
la majesté balayante
des paupières à la Oscar Wilde
ceci, son propre corps
laid et fier
beau et timide
son corps jouait le rôle de Violette
dans un film de tous ses échecs
elle m'a choisie
pour résoudre tout ça, lecteur,
elle avait 55 ans,
ridée par le soleil
mignonne comme un champignon
une princesse-gnôme,
récrivant l'ecrivaine
bien dans sa peau.
|