QUEUE. subst. fém. Ce mot se dit De toutes sortes de bêtes, comme animaux à quatre pieds, oiseaux, reptiles et poissons. En parlant des animaux à quatre pieds, il signifie, Cette partie qui est au bout de l'épine du dos, comme une continuation des vertèbres, et qui est ordinairement couverte de poil. Le bout de la queue. Le tronc de la queue. Un noeud de la queue. La queue d'un cheval, d'un taureau, d'un mouton, d'un renard. Grosse queue. Courte queue. Queue épaisse. Chevaux à longue queue, à courte queue. Les chevaux s'émouchent avec leur queue, de leur queue. Ce chien flatte de la queue. Couper la queue à un cheval, à un chien. Un lion qui se bat les flancs de sa queue. Couper un noeud de la queue à un cheval.
     On dit, d'Un cheval qui a peu de poil à la queue, qu'Il a une queue de rat.
     En parlant Des marques de Dignité que les Visirs font porter devant eux, on appelle, Visir à trois queues, Le Visir qui a droit de faire porter devant luy trois queues de cheval; Et, quand l'Empereur des Turcs veut porter la guerre en quelque endroit, Il fait exposer des queues de cheval.
     On appelle, Queue de mouton, Une pièce de viande, qui est prise du quartier de derrière d'un mouton, et où ordinairement la queue tient. Servir une queue de mouton. Quand on dit, Un ragoût de queues de mouton, On n'entend parler que des queues seules.
     En parlant de fourrure, on appelle, Queue de marte, La peau et le poil de la queue d'une marte, passée et accommodée. Une robe fourrée de queues de marte.
     On dit prov. et fig. Brider son cheval par la queue, pour dire, Commencer une affaire par où on devroit la finir.
     On dit aussi prov. et fig. d'Un homme qui a peine à avoir dequoi vivre. qu'Il tire le diable par la queue.
     On dit prov. et bassement, qu'Il n'en est pas resté la queue d'un, pour dire, qu'Il n'en est resté aucun, aucune. Tous les lapins de cette garenne ont été détruits, il n'en reste pas la queue d'un. Ils ont dérobé toutes mes pêches, toutes mes poires, il n'en est pas demeuré la queue d'une.
     On dit prov. qu'Il viendra un temps où les vaches auront besoin de leur queue, pour dire, qu'On aura un jour besoin de ce qu'on néglige, de ce qu'on méprise le plus.
     On dit prov. et bass. d'Un homme qui a paru confus de ce qu'une affaire ne lui a pas réussi, qu'Il s'en est retourné honteusement la queue entre les jambes.
     On dit fig. et famil. qu'On a pris une affaire par la tête et par la queue, pour dire, qu'On l'a tournée et éxaminée [sic] de toutes les manières. Dans le même sens, on dit prov. et fig. Prendre le Roman par la queue. Et cela se dit principalement, d'Une fille qui devant épouser un homme, commence à vivre avec lui comme s'il étoit déja son mari.
     On dit prov. d'Un homme qui arrive dans une compagnie dans le temps qu'on parle de lui, Quand on parle du loup on en voit la queue.
¶ QUEUE, En parlant des oiseaux, se dit, Des plumes qui leur sortent du croupion, et qui leur servent ordinairement comme de gouvernail pour se conduire dans l'air. La queue des hirondelles est fourchée. Cela est fait en queue d'hirondelle. Une queue de paon. Un paon qui se mire dans sa queue. Un coq qui a une belle queue.
¶ QUEUE, En parlant des poissons, des serpens, et de quelques insectes, est La partie qui s'étend du ventre jusqu'à l'extrémité opposée à la tête. Queue de morue. Queue de saumon. Le scorpion pique de la queue. Une baleine peut renverser une barque d'un coup de queue. Un serpent qui se mord la queue, étoit chez les Egyptiens le symbole de l'année.
     On dit prov. A la queue gist le venin, le venin est à la queue, pour dire, qu'Il est à craindre que la fin d'une affaire ne soit fâcheuse, quoique le commencement ne le soit pas.
     On dit prov. Ecorcher l'anguille par la queue, pour dire, Commencer par l'endroit le plus difficile et par où l'on devroit finir. Et l'on dit, qu'Il n'y a rien de plus difficile à écorcher que la queue, pour dire, qu'Ordinairement il n'y a rien de plus difficile dans une affaire, que de l'achever.
¶ QUEUE, Se dit aussi en parlant des fleurs, des feuilles, des fruits, et signifie Cette partie par laquelle ils tiennent aux arbres, aux plantes. La queue des violettes, des roses, etc. des melons, des poires, des prunes, des fraises, des framboises, etc. Cerises à longue queue, à courte queue. Il ne faut pas couper la queue des fruits qu'on veut garder.
     On appelle Queue de renard, Une petite plante qui ressemble à peu près à une queue de renard et qui vient ordinairement dans des terres humides.
     En parlant De certaines fleurs, comme Tulippes, lis, narcisses, on appelle, Queue, quand elles sont cueillies, ce qu'on appelle, Tige, dans ces mêmes fleurs, lorsqu'elles sont encore sur pied.
¶ QUEUE, Se dit encore De plusieurs autres choses qui ressemblent en quelque façon à une queue, comme, dans des Lettres de Chancellerie, Cette partie du parchemin qu'on coupe en forme de queue pour y attacher le sceau. Scellé à double queue. Des Lettres signées en queue par le Rapporteur.
     En certaines lettres de l'Alphabet, comme au g, au p, etc. on appelle Queue, Ce qui excède par en bas le corps de la lettre.
     On appelle, La queue d'une comète, Une longue trainée de lumière qui suit le corps de la comète. Une comète à longue queue. Cette comète avoit la queue tournée vers l'Orient.
     On appelle, La queue de la poële, La longue pièce de fer qui sert à tenir la poële. Et on dit prov. Il n'y en a point de si empêché que celui qui tient la queue de la poële, pour dire, que Celui qui a la principale conduite d'une affaire, est le plus embarrassé.
     On appelle, La queue du moulin, Cette

grande pièce de bois qui sert à faire tourner un moulin à vent sur son pivot.
¶ QUEUE D'ARONDE. Terme de menuiserie, qui se dit d'Un certain tenon, d'une certaine pièce de liaison taillée en queue d'hirondelle.
¶ QUEUE, Le bout, la fin de quelque chose. La queue d'un étang. A la queue du bois, de la forêt. La queue de l'hiver a été rude. Le proverbe dit, Mi-Mai queue d'hiver.
¶ QUEUE, Se dit encore De l'extrémité d'un manteau, et d'une robe d'homme ou de femme, lorsqu'elle traîne par derrière. Robe à queue traînante. Les Prélats, les Magistrats, les Dames, etc. se font porter la queue. La queue d'un manteau. La queue d'une chape de Cardinal.
¶ QUEUE, Signifie aussi, La derniere partie, les derniers rangs de quelque Corps, de quelque Compagnie, comme, La queue d'une procession. La queue du Parlement, d'un Régiment, d'une Armée. C'est le dernier reçû, il est à la queue, tout à la queue. Se mettre à la queue. Prendre la queue. Charger une Armée, un Régiment, etc. en queue. Donner en queue. Donner sur la queue d'une Armée. Prendre en flanc et en queue.
     On dit aussi, A la queue, en queue, pour dire, A l'extrémité, à la suite, immédiatement après. Il étoit à la queue de la tranchée, à la queue des travailleurs. Le bagage suivoit en queue, étoit à la queue. Ce Régiment étoit à la queue des chariots. Il suit en queue. C'est un bon chasseur, il est toûjours à la queue des chiens.
     On dit encore, A la queue, en queue, pour dire, A la poursuite de quelqu'un, aux trousses de quelqu'un. Avoir les ennemis en queue. Il a fait un mauvais coup, les Prevôts sont à sa queue. Il a le Prevôt en queue. Laissez-moi faire, je lui mettrai un homme en queue qui le hâtera bien d'aller. Les trois dernières phrases sont du style familier.
¶ QUEUE A QUEUE. adverb. A la file, immédiatement l'un après l'autre. Ces loups se suivoient queue à queue. Attacher des chevaux queue à queue. Ces bateaux étoient queue à queue. Il y a un jeu d'enfans qu'on appelle, A la queue leu leu. Parce qu'ils marchent à la suite les uns des autres, comme marchent les loups, qu'on appeloit autrefois leux.
¶ QUEUE, Se dit aussi fig. De la suite d'une affaire. Cette affaire aura une fâcheuse queue, une longue queue. Ne laissons point de queue. Ne point laisser, ne point faire de queue dans un payement.
     On dit, Monsieur sans queue. Madame sans queue. Mademoiselle sans queue. Monsieur le Prince sans queue. Monsieur le Duc sans queue. pour dire, Monsieur, Madame, Mademoiselle, Monsieur le Prince, Monsieur le Duc tout court, et pour faire entendre qu'il ne faut rien ajoûter.