Vit-on les loups brigands, comme nous
inhumains,
Pour détrousser les loups, courir les grands
chemins?
BOILEAU.
On appelle cheaux, plus communément louveteaux,
les petits de la louve; & on dit, ligner la
louve, pour dire, la couvrir. Le loup ne porte rien
à ses cheaux qu'il ne soit saoul, & même il ôte
la prébende à sa louve & à ses cheaux. La
louve fait
le contraire. On dit que la saoulée du loup dure huit
jours.
Les Egyptiens avoient en vénération cet animal,
parce qu'ils croyoient qu'Osiris s'étoit souvent déguisé
en loup. C'est que ce Prince portoit pour habillement
de guerre une peau de loup. Le loup étoit même
adoré à Lycopolis, qui signifie la Ville du loup. Cet
animal étoit consacré à Apollon.
Lactance, Instit. Christ. L. I. c. 10. dit, que les
Romains rendirent des honneurs divins à la louve,
parce qu'une louve avoit sauvé Remus & Romulus
en les alaitant, quand ils furent exposés. Arnobe,
L. IV. adv. Gentes, dit que de cette louve, ils
firent la déesse Luperca. Voyez encore sur cela Properce,
Eleg. IV. L. IV. v. 55. Ovide, Fast. L.
II. v. 413, 415. Tite-Live, L. I. c. 4. & Plutarque
dans la vie de Romulus. C'est que leur nourrice s'appelloit
Lupa, qui signifioit louve.
LOUP & LOUVE, sur les médailles signifient
ou l'origine
de la ville de Rome, fondée par les deux frères
Romuluas & Rémus, qu'on disoit avoir été
alaités
par une louve, ou simplement la domination Romaine,
à laquelle les peuples étoient soumis. Peut-être
désignent-
ils le pays où il se trouvoit quantité de loups,
comme l'exprime la médaille de Mérida. Souvent on
voit les deux frères attachés aux têtes de la louve.
P.
JOBERT.
Il y a trois sortes de loups. Le loup mâtin, qui ne
vit que de charogne, Lupus molossus; le loup lévrier,
qui vit de rapine qu'il attrape par sa légèreté.
Lupus vertagus. L'un & l'autre sont grands & rablés,
ayant une gueule épouvantable à double rang
de dents & de crocs qui coupent comme de l'acier.
Ils vont toujours deux ensemble. Le loup-
cervier ne vit que de gibier qu'il surprend; il est
plus grand que le renard, & habite d'ordinaire les
montagnes: Lupus cervarius. Quelques-uns croient
que c'est la même chose que le lynx, dont les Auteurs
ont parlé, que d'autres croient être un animal
fabuleux. Nicod dit que le loup-cervier est un
chat sauvage de la grandeur d'un léopard. Herbert
dans sa Relation de Perse dit aussi, que les loups-
cerviers sont de la race de nos chats, qui changent
de nature en changeant de pays, comme les chiens
d'Europe ont dégéneré en loups dans la nouvelle
Espagne.
Borel dit que quelques Auteurs le nomment
rhapius; & que c'est un loup tacheté comme un
léopard;
& que ce nom, selon Bochard, est dérivé
de l'Hébreu rhaham, qui signifie affamé.
Les Mémoires de l'Académie des Sciences en donnent
des connoissances plus certaines. On y a fait
la dissection de celui qu'on a nourri long-temps à
Versailles. On a cru jusqu'ici qu'il étoit ainsi nommé,
parce qu'il avoit la forme de loup, & qu'il
ressembloit en quelque façon au cerf par la couleur
de son poil. Mais la vérité est qu'il ne ressemble
aucunement au loup, & que le peu qu'il tient
du léopard, ou du cerf, lui est commun avec
quantité d'autres animaux. Il y a plus d'apparence
qu'il a été ainsi nommé, parce qu'il chasse les
cerfs, comme le loup les moutons. Il ressemble
plus au chat qu'à aucun autre animal. Il a les pieds
divisés comme les lions, les ours, les tigres & les
chats. Sa langue est couverte de pointes, comme
celle des chats & des lions. Ses oreilles sont toutes
semblables à celles d'un chat, & ont au haut une
houppe de poil fort noir: ce qu'Elien attribue aussi
au lynx. Il a le dos roux marqué de taches noires;
le ventre & le dedans des jambes d'un gris cendré,
marquetés de mêmes taches, mais plus grandes &
plus séparées. Chaque poil dans sa longueur est de
trois couleurs, ayant sa racine d'un gris brun, son
extrémité blanche, & sa partie du milieu presque
rousse. Il y en a de plusieurs espèces, & de poil
différent, selon les lieux d'où ils viennent. Le lynx,
le thos, les chaos & les panthères des Anciens,
ont été pris par quelques Modernes pour le loup-
cervier: mais M. Perrault en a bien fait voir la difference.
Voyez sur le loup Vossius, de Idolol. L.
III, c. 55, 59, 62, 72, 73, 74, 76, 77.
Les Seigneurs amassent leurs paysans pour aller
à la chasse au loup, & font un triquetrac, ou des
battues. Lupum conclamant. Le loup se prend avec
des hausse-pieds ou chasse-pieds, c'est-à-dire, avec
des chassetrapes & creux couverts, ou avec autres
pièges & amorces. Il est difficile de forcer un vieux
loup; car s'il trouve de l'eau, il courra trois jours
& trois nuits. Il n'y a point de loups en Angleterre,
depuis qu'ils furent exterminés par Elgarus,
ou selon d'autres, par Etheltan, Rois du pays. Alberto
Lazari dit qu'Edouard père de Henri Roy d'Angleterre,
pour exterminer tous les loups de son
Royaume, offrit cent écus de la tête de chaque
loup qu'on lui porteroit, & qu'on n'y en a point
vu depuis ce temps-là; quoiqu'il y en ait encore
beaucoup dans l'Ecosse. D'autres disent qu'Elgard
Roi d'Angleterre au Xe siècle, après avoir subjugué
deux fois les habitans du pays de Galles, leur
imposa pour tribut 300 têtes de loup tous les ans.
Par-là il extermina les loups d'Angleterre, ou les
fit fuir en Ecosse, dépuis cette chasse, & on n'en
voit plus dans l'Angleterre. Les anciens Grecs appeloient
le soleil lukos, loup; non pas du nom lúkos,
loup; au contraire le nom de lùkos, loup, étoit
pris
du nom du soleil. lúkos, comme on le peut voir aux
étymologies: mais de lùkê, lumière,
crépuscule.
Voyez Macrobe, L. I. c. 17.
Le loup, en termes de Blason, s'appelle tantôt
passant, tantôt courant; tantôt rampant &
ravissant.
Un Poëte a fait ce mot adjectif dans une fable,
faisant parler les brebis au loup qu'elles traitent de
votre Majesté louve, & de Monarque loup.
Prenez, Monarque loup, dit le baîlant
troupeau,
Contre le maître coq, prenez notre
défense,
Prenez sur nous toute licence,
Et comme il vous plaira, tondez sur notre peau,
Tout est à vous; en vous est notre confiance,
Et votre louve Majesté
Peut au gré de sa
volonté
Disposer de notre substance.
LOUP-GAROU. C'est
dans l'esprit du
peuple, un
esprit dangereux & malin, travesti en loup, ou un
forcier transformé en bête effrayante, qui court les
champs ou les rues pendant la nuit. Opinion aussi
ridicule que celle qui établit les revenans, les lutins,
les larves, les fées. Cette idée, toute extravagante
qu'elle est, subsiste depuis long-temps.
Pline se mocque de ceux qui croient que quelques
hommes sont transformés en loups-garous, & reprennent
ensuite leur première forme. Aujourd'hui
on fait peur du loup-garou à un enfant. Dans bien
des endroits le peuple croit que les excommuniés
& ceux qui n'ont pas fait leurs Pâques, son changés
en loups-garous. Il y a un arrêt du Parlement
de Dôle de 1574, qui condamne au feu Gilles
Garnier qui ayant renoncé à Dieu, & s'étant
obligé par serment à ne plus servir que le Diable,
avoit été transformé en loup-garou.
Le plus étrange effet de la force de l'imagination
est la craint déréglée de l'apparition des esprits,
des sortiléges, des loups garous, & de toutes
les autres rêveries des Démonographes. Voyez
dans la 3e Partie du P. Malbranche, où il traite
de la communication contagieuse des imaginations
fortes, quelle est la source de cette crainte, & comment
l'on peut avec une imagination déréglée &
échauffée de persuader soi-même, & persauder les autres
de l'existence de ces prétendus esprits. S'il y a des
loups-garous, ce ne peut être que des hommes atrabilaires,
qui s'imaginent être devenus loups, par
une maladie que les Médecins nomment Lycantropie.
Voyez ce mot.
Du Cange dérive ce mot de l'Anglois Were,
homme, du Latin vir. Loup-garou, homme
loup.
D'autres disent loup-garou, loup dont il se faut se
garer ou garder. Aussi dans quelques endroits on
l'appelle guère loup. C'est le sentiment des Bollandistes,
Acta Sanct. Mart. T. 2, p. 503.
LOUP GAROU, se dit figurément d'un homme bourru &
fantasque, qui vit seul, & éloigné de toute compagnie.
Morosus, difficilis, peracerbus. Cet homme
vit en loup-garou, il ne veut voir personne, il
ne sort que la nuit en loup-garou. Ils nous traitent
par-tout comme des loups-garous. VOIT. Ils
veulent
que leurs femmes vivent comme des loups-
garous. MOL.
Je ne prends point pour vertu
Les noirs accès de tristesse
D'un loup-garou revêtu
Des habits de la Sagesse. R.
LOUP DE MER, ou LOUP MARIN. Poisson qui
est
semé de taches qui a le dos blanc & bleu, qui
est grand, gras, épais, couvert de moyennes écailles,
ayant une grande & longue tête, avec une
grand ouverture de gueule. ROND. Lupus, ou
lucius
marinus. Les loups marins de la mer du Sud, y sont
en si grand quantité, qu'on voit souvent les
rochers couverts autour de l'île de la Quiriquine:
ils diffèrent des loups marins du nord, en ce que
ceux-là ont des pattes, au lieu que ceux-ci ont
deux nageoires alongées à peu près comme des ailes
vers les épaules, & deux autres petites qui enferment
le croupion. La nature a néanmoins conservé
au bout des grandes nageoires quelque conformité
avec les pattes; car on y remarque quatre ongles,
qui en terminent l'extrémité, peut être parce que
ces animaux s'en servent pour marcher à terre, où
ils se plaisent fort, & où ils portent leurs petits,
qu'ils nourrissent de poisson, & qu'ils caressent,
à ce que l'on dit, tendrement. Là ils jettent des
cris semblables à ceux des veaux, d'où vient qu'on
les appelle dans plusieurs Relations, Veaux marins;
mais leur tête ressemble plutôt à celle d'un chien,
qu'à tout autre animal; & c'est avec raison que
les Hollandois les appellent Chiens marins. Leur
peau est couverte d'un poil fort ras & touffu; leur
chair est fort huileuse, de mauvais goût: on n'en
peut guère manger que le foie; néanmoins les Indiens
du Chiloé la font sécher, & en font leurs
provisions pour se nourrir. Les vaisseaux François
en tirent de l'huile pour leurs besoins. La pêche en
est fort facile; on en approche sans peine à terre
& en mer, & on les tue d'un seul coup sur le
nez. Il y en a de différentes grandeurs; dans le
Sud ils sont gros comme de bons mâtins, & au
Pérou on en trouve qui ont plus de 12 pieds de long.
Leur peau sert à faire des Balsas, ou balons pleins
d'air, dont les Américains se servent au lieu de bateau.
FRÉZIER, p. 75. On voit quantité de
loups-
marins au Chili, tant à terre qu'à la mer. Les Hollandois
les appellent Lions marins, & quelques-uns
Veaux marins, parce qu'ils jettent un cri semblable
à celui d'un veau. D'autres les appellent Chiens
marins, parce qu'ils ont la tête assez semblable à
celle d'un chien. Les Espagnols les nomment comme
nous, loups marins. Ils sont amphibies.
On trouve dans les Mémoires de l'Acad. t. 3. part. I.
la description de cet animal. On remarque que ses
poumons sont partagés en deux lobes: son coeur est
rond & plat, & l'on y voit deux ventricules fort
grands. Ces deux ventricules communiquent ensemble
par le trou ovale, qui ne se ferme pas, comme
dans les animaux terrestres, quelque temps
après leur naissance; mais qui laisse circuler le sang
du ventricule droit dans le ventricule gauche sans
passer auparavant par les poumons.
D'où l'on doit conclure que le loup marin doit
vivre aussi facilement dans l'eau que dans l'air.
Pour s'en convaincre il faut remarquer 1ø. que
dans les hommes & dans tous les animaux terrestres,
le sang va de la veine cave dans le ventricule
droit du coeur; du ventricule droit dans l'artère
pulmonaire; de l'artère pulmonaire dans la veine
pulmonaire; & de la veine pulmonaire dans le
ventricule gauche.
2ø. Que la poitrine des hommes, comme celle
de tous les animaux terrestres, a deux mouvemens,
l'un d'inspiration & l'autre d'expiration. Dans le
premier elle se dilate, & reçoit l'air extérieur:
dans le second elle se retrécit, & elle rend l'air
extérieur qu'elle avoit reçu.
3ø. Lorsque dans le mouvement d'expiration la
poitrine se retrécit, les poumons en même temps
se compriment, & le sang qu'ils avoient reçu du
ventricule droit du coeur par l'artère pulmonaire,
est obligé de se rendre dans le ventricule gauche
par la veine pulmonaire. C'est pour cela sans doute
que la respiration est absolument nécessaire à la vie
de l'homme & de tous les animaux terrestres, puisque
sans ces mouvemens alternatifs d'inspiration &
d'expiration, le sang n'auroit pas son mouvement
de circulation.
Il n'en est pas ainsi du loup marin, & de tous
les animaux amphibies. Comme ils ont le trou ovale
ouvert, leur sang va du ventricule droit au ventricule
gauche du coeur, sans passer auparavant par les
poumons. Il a donc son mouvement de circulation
dans le temps même qu'ils ne respirent pas, & par
conséquent ces sortes d'animaux peuvent vivre dans
l'eau.
On peut appliquer ce principe à quelques effets
analogiques à celui dont on vient de parler.
1ø. Les enfans n'ont pas besoin de respirer dans
le sein de leur mère; parce que leur sang va du
ventricule droit au ventricule gauche du coeur par
le trou ovale qui ne se ferme que quelque temps après
leur naissance.
2ø, Veut-on savoir si un enfant trouvé mort est
venu au monde mort ou en vie? On n'a qu'à mettre
un morceau de son poumon dans l'eau. S'il va
au fond, l'enfant étoit mort avant de naître,
& s'il nage, l'enfant est venu au monde en vie.
En effet, si l'enfant étoit venu au monde en vie,
il auroit respiré; s'il eût respiré, il seroit resté de
l'air dans ses poumons; s'il fût resté de l'air dans
ses poumons, ils auroient été relativement plus legers
qu'un pareil volume d'eau, & par conséquent
ils auroient surnagé. On doit donc conclure que
s'ils vont au fond, l'enfant étoit mort avant que de
naître; & que s'ils nagent, l'enfant est venu au
monde en vie.
3ø. Ce qui cause la mort des noyés, n'est pas
l'eau qu'ils boivent, puisqu'ils en avalent peu; c'est
qu'ils ne peuvent pas respirer dans l'eau.
4ø. Ceux qui demeurent long temps dans l'eau,
sans avoir besoin de respirer, tels que sont les Pêcheurs
de perles, doivent avoir le trou ovale ouvert.
Pline dit que l'on faisoit voir à Rome des loups
marins qui répondoient quand on les appeloit, &
qui de la voix & du geste saluoient le peuple dans
les Théâtres. Sévérinus dit aussi qu'il y a eu un
loup marin qui témoignoit de la joie, quand on
nommoit les Princes Chrétiens, & de la tristesse,
quand on nommoit les Mahométans. Credat Judaeus.
Dent de LOUP, est un outil dont se servent les Graveurs,
Orfévres & Doreurs, pour polir leurs ouvrages.
Dens laevigatorius. C'est en effet une dent de
loup, attachée à un manche.
LOUP, est aussi un terme de Libraire, qui signifie un
instrument de bois, fait en manière de triangle, dont
on se sert pour dresser les paquets, lorsqu'ils sont
cordés. Triangulus Typographicus.
LOUP des Anciens. C'étoient des ciseaux courbes &
dentelés, attachés au bout d'un cordage, avec lesquels
on pinçoit le bélier, en le détournant à droite
ou à gauche. Cette machine faisoit le même effet
que les lacs courans.
LOUP, est aussi un petit morceau de latte, au bout duquel
les enfans attachent une petite corde, avec laquelle
ils font tourner cette latte en l'air; ce qui faisant
un bruit qui a quelque chose du hurlement d'un
loup, a été cause que les enfans ont appelé
Loup ce
morceau de latte. Assiculus rotatilis.
Vesse de LOUP, est une espèce de Champignon. Voyez
au mot VESSE.
On appelle Saut de loup, un fossé assez large
pour n'être pas franchi par un loup, & qu'on creuse
au bout des allées d'un parc, pour les fermer, sans
leur ôter la vue de la campagne.
LOUP, se dit figurément en Morale, d'un
Hérétique,
d'un hypocrite, ou d'un ennemi de l'Église. Jésus-
Christ nous avertit de nous garder de ceux qui viennent
avec des habits d'agneaux, & qui dans l'intérieur
sont des loups ravissans. Qui veniunt ad vos
in vestimentis ovium, intrinsecùs autem sunt lupi
rapaces. Le peuple les appelle des Pattes de loup,
des pattes pelues.
LOUP, se dit figurément aussi des personnes malignes,
médisantes, ou qui déchirent impitoyablement les
autres. Les hommes sont des loups les uns aux
autres. Homo homini lupus.
Puisqu'entre vous, humains, vous vivez en vrais
loups,
On ne me reverra de ma vie avec vous. MOL.
LOUP, en Chirurgie, est une espèce de maladie
qui vient aux jambes; ulcère chancreux qui ronge
& consume les chairs voisines. Carcinoma, cancer
crurum.
LOUP, en Chimie, est un des noms qu'on
donne
à l'antimoine, parce qu'il divise & dissout tous les
métaux avec lesquels on le fait fondre, excepté
l'or & l'argent.
LOUP, est aussi une espèce de masque de velours noir,
que les femmes ont porté pendant quelque temps
pour se préserver du hâle. Il n'étoit point attaché,
& elles le tenoient avec un bouton dans la bouche.
Il pendoit depuis le front jusques sous le menton,
à la différence des masques carrés qu'elles portoient
auparavant. Elles lui ont donné ce nom,
parce que d'abord il faisoit peur aux petits enfans.
LOUP, ou la Panthère. Terme d'Astronomie. Constellation
méridionale. On l'appelle aussi bête du centaure,
parce que le centaure la traverse. Lupus. Cette
constellation est composée de 19 étoiles: deux de
la troisième grandeur, onze de la quatrième, &
six de la cinquième.
LOUP, se dit proverbialement en ces phrases. Il est
décrié
comme le loup blanc. On dit que la faim chasse
le loup hors du bois, pour dire, que la necessité
contraint les gens à travailler, ou à mendier. Villon
en son Testament; nécessité fait gens méprendre,
& fait saillir le loup du bois. On dit qu'on
met les gens à la gueule du loup, pour dire, qu'on
les expose à des périls évidens. On dit, qui se fait
brebis, le loup le mange, pour dire, que quand on
est trop facile ou patient, on est sujet à être pillé,
ou insulté. On dit ironiquement, qu'une chose est
sacrée, comme la patte d'un loup. On dit d'un homme
enrhumé, qu'il a vu le loup: ou plûtôt on devroit
dire, que le loup l'a vu le premier, suivant
ce mot des Bucoliques de Virgile, Lupi Moerim videre
priores. C'est une erreur populaire fondée sur un
passage de Pline; mais ce passage de Virgile fait voir
que l'erreur est plus ancienne que Pline. On le dit aussi
de celui qui a vu le monde, qui est agerri & expérimenté.
On dit encore, que des gens vont queue à
queue comme des loups, quand ils s'entresuivent,
quand ils arrivent l'un aprés l'autre. Car on dit que
quand la louve est en chaleur, il y a une grande
traînée de loups qui la suivent queue à queue,
comme
dit Phoebus de Foix en son livre de la Chasse.
On dit encore, qui parle du loup en voit la queue,
lupus in fabula, quand quelqu'un arrive dans une
compagnie dans le temps qu'on parloit de lui. On
dit aussi, Marcher à pas de loup, pour dire, doucement,
& pour surprendre quelqu'un. On dit
aussi, Entre chien & loup, quand il fait obscur,
au temps qu'on ne peut descerner si c'est un chien
ou un loup. Entre chien & loup; cette expression
est ancienne en France, elle se trouve dans Marculfe.
Infra horam vespertinam, dit-il, inter canem
& lupum, &c. On dit qu'on a couru un homme
comme un loup gris, pour dire, qu'il a été vivement
poursuivi. On dit qu'on tient le loup par les
oreilles, quand on est embarrassé dans une affaire
douteuse, & où l'on envisage du péril de tous
côtés.
Auribus teneo lupum. TER. On dit que la lune
est à couvert des loups, qu'elle est en sûreté. Ce
proverbe vient du Latin, Luna tuta à lupis. On dit
aussi, Donner les brebis à garder au loup, comme
on dit, Au plus larron la bourse, pour dire,
Mettre une chose en une main infidèle. Ce proverbe
est encore tiré du Latin, & se trouve dans
Térence. On dit aussi, qu'il faut hurler avec les loups,
pour dire, qu'il faut s'accommoder à l'humeur de
ceux avec qui on a à vivre. On dit encore, que la
guerre est bien forte, quand les loups se mangent
l'un l'autre, ou que les loups des bois ne s'entremangent
pas, pour dire, que les gens d'une même
profession s'entresoulagent: ce qui se dit des Auteurs
ou des gens de même profession, lorsqu'ils
se déchirent, ou qu'ils plaident les uns contre les
autres. On dit en Chirurgie, qu'on enferme le loup
dans la bergerie, quand on laisse refermer une plaie
sans l'avoir bien fait suppurer, pour empêcher qu'il ne
s'y forme un sac qui obligeroit à la rouvrir. On dit
aussi, le loup mourra dans sa peau, pour dire, qu'il
arrive rarement qu'un méchant homme s'amende.
On dit aussi, A brebis comptées, le loup les mange,
pour dire, que quelque soin que l'on ait de garder
ce qu'on a, & d'en savoir le compte, on ne laisse
pas quelquefois d'être volé. On dit aussi qu'un homme
est connu comme le loup, pour dire, qu'il est
extrêmement connu, & cela ne se dit que d'un
homme de qui on peut se donner liberté de dire ce
qu'on en pense. On dit aussi savoir la patenôtre du
loup, pour dire, savoir de certaines paroles magiques
pour empêcher que le loup n'étrangle les brebis.
On appelle une femme débauchée, une louve.
On dit: Qui sauroit les coups, on prendroit les
loups, pour dire, Que si l'on savoit deviner, on
feroit de belles choses & de beaux profits.
Quiconque est loup, agisse en loup:
C'est le plus certain de beaucoup. LA FONT.
Danser le branle du loup, est un proverbe qui ne
se trouve point dans nos Dictionnaires. En voici
l'explication. COSME. Tu parles haut, comme si
j'étois
sourd. SIMPLICIEN. Par-là vous pouvez
connoître
que je ne danse pas le branle du loup, la queue
entre les jambes, c'est à dire, que je n'ai point de
peur. COSME. Il est vrai que le loup étant
un animal
cruel & lâche, porte ordinairement la queue entre
les jambes, qui est un signe de sa lâcheté & de mauvaise
nature, aussi-bien que de celle du chien,
duquel un Poëte a dit que les chiens de mauvaise
race replient leur queue sous le ventre.
Degeneresque canes caudam sub ventre reflectunt.
Voyez CHIEN.
On disoit anciennement, leu, & on le dit encore
en Picardie. Il en reste des marques dans un jeu de
petits enfans appelé, à la queue leu, leu; & dans
le nom de Saint Leu & Saint Gilles. Sancti Lupi &
AEgidii.
On disoit aussi autrefois loin, pour signifier la
même chose. L'Abbaye de Ville-Loin est appelée
Villa-Lupa. La riviere de Loin, ad Lupam.
Isles aux LOUPS MARINS. Il y a sur la
côte de
l'Acadie,
dans la nouvelle France, des îsles qu'on appelle
les îsles des Loups marins, parce que les loups
marins vont là faire leurs petits. Ils y viennent pour
mettre bas vers le mois de Février, montent sur les
rochers, & se mettent autour des îles, où ils font
leurs petits, qui sont en naissant plus gros que le
plus gros porc que l'on voie, & plus longs. Ils ne
demeurent à terre que peu de temps, après quoi
leurs père & mère les emmènent à la mer; ils
reviennent
quelquefois à terre ou sur des rochers, où
la mère les fait téter. La pêche s'en fait au mois de
Février, lorsque les petits y sont: on va tout autour
des îles avec de forts bâtons, les père & mère
fuient
à la mer, & on arrête les petits qui tâchent de
suivre, en leur donnant un coup de bâton sur le nez,
dont ils meurent. L'on va le plus vîte que l'on peut,
car les père & mère étant à la mer, font un
grand
bruit, qui donnant l'alarme par-tout, les fait tous
fuir; mais il se sauve peu de petits: on ne leur en
donne pas le temps. Il y a des journées que l'on en
tue jusqu'à six, sept, & huit cens. Ce sont les petits
qui sont les plus gras, car les père & mère sont
maigres. L'hyver il faut bien trois ou quatre petits
pour faire une barique d'huile; qui est bonne à
manger, étant fraîche, & aussi bonne à brûler que
l'huile d'olive, & n'a point d'odeur en brûlant,
comme les autres huiles de poisson, qui sont toujours
pleines de lie épaisse, & de saletés au fond
des bariques.