Le premier juillet ? C'est les vacances !

C'est le 30 juin. M. Dupont finit son travail dans le centre de Paris à dix-sept heures, comme d'habitude. À la moitié de ses collègues il dit «  bonnes vacances ». Mais il ne le dit pas aux autres. Pourquoi ? Est-ce qu'il est impoli ? Est-ce qu'il a une dent contre eux ? Pas du tout ! C'est que demain, c'est le premier juillet, et pour la moitié de ses collègues, comme pour presque la moitié de la population de la France, le premier juillet c'est le départ en vacances.
    Les réservations – peut-être un appartement au bord de la mer, peut-être une maison de campagne – ont été faites depuis longtemps, sinon depuis l'année dernière, parce que les Dupont, comme la plupart des Français, ont leurs habitudes, et ils retournent d'année en année à leur endroit préféré.
    Le lendemain ils se lèvent tôt pour charger les valises. Un petit déjeuner rapide et ils se mettent tous en voiture. Neuf heures précises, en route ! Et tout de suite, un problème. Comment sortir de la cour ? Il y a tellement de circulation dans la petite rue qu'il est impossible de trouver une place entre deux voitures. Mais impossible n'est pas français ! Il suffit de pousser un peu et voilà ! Le tour est joué. Une petite vingtaine de minutes plus tard ils sont au bout de la rue. En moins de deux heures ils ont parcouru les dix kilomètres entre leur appartement et l'autoroute. Maintenant ça roule mieux ! On fait du quarante à l'heure sans problème.
    À une heure de l'après-midi, c'est le premier embouteillage. Tout le monde s'arrête. M. Dupont descend de sa voiture, se met debout sur le marchepied et regarde devant, en arrière. Que des voitures ! Alors, on ne va pas bouger pour un moment, autant profiter pour manger le casse-croûte.
    À seize heures enfin ils se remettent en route. Du trente à l'heure, c'est mieux que rien, et à cette vitesse-là ils seront arrivés dans dix heures. C'est ça, les vacances !

Histoire invraisemblable, me dites-vous ? Écoutez bien ceci...
    Le premier juillet, il y a quelques années, une des chaînes de la télévision française a envoyé une équipe en hélicoptère, faire un reportage sur les vacanciers. L'hélicoptère est parti de Paris au début de l'après-midi et a atterri dans un champ à côté de l'Autoroute Aquitaine, l'autoroute qui va de Paris vers la côte Atlantique. Les reporters ont descendu leurs caméras et leurs microphones et ils ont traversé le champ jusqu'à l'autoroute. À droite et à gauche les trois voies étaient bourrées de voitures et de caravanes de vacances, pare-choc à pare-choc. Selon les informations reçues en direct de la chaîne, l'embouteillage s'étendait une bonne centaine de kilomètres dans les deux sens.
    Alors, un reporter est allé frapper sur la glace d'une voiture. Le conducteur l'a baissée.
    « Bonjour, Monsieur. Depuis combien de temps êtes-vous arrêté ici ? »
    « Oh, ça fait bien trois heures maintenant. »
    « Trois heures sans bouger ? »
    « Ouais. C'est ça. »
    « Vous ne saviez pas qu'il y aurait tant d'embouteillage ? »
    « Si si, on savait. »
    « Et vous êtes parti à quelle heure ce matin ? »
    « À neuf heures pile. »
    « Pourquoi pas partir à six heures et éviter cette circulation ? »
    « Oh, mais, vous savez, nous partons chaque année à neuf heures. »
    « Mais vous pouvez partir plus tôt ! »
    « Non, ça fait plusieurs mois que nous planifions et on s'est dit, pourquoi changer maintenant. »
    « Vous comptez arriver quand ? »
    « Avec tous ces retards, peut-être pas avant demain matin. »
    « Vous seriez parti ce soir, vous seriez également arrivé demain matin ! »
    « Oui, mais si nous partions ce soir nous perdrions une journée de vacances ! »