FRE 345H5
Teaching and Learning French Since the 1970s

Notes de la semaine 11

Le projet de lecture et les étapes de la lecture (cf. CC ch. 7, première partie)

CC (p. 73-4) parle des objectifs de la lecture : on lit pour s'informer, pour apprendre, pour exécuter une tâche particulière, pour se distraire, mais ne donne pas d'exemples (sauf pour l'exécution d'une tâche particulière). Trouvons donc des exemples et distinguant deux situations de lecture : la classe de langues et la lecture indépendante.

On peut dire au départ que dans les cours de langue seconde de niveau élémentaire ou intermédiaire le but de toute lecture est de favoriser l'apprentissage de la langue seconde. Un article de journal en langue française conçu en premier lieu pour informer le lectorat du journal, un conte de fées écrit en français pour distraire des petits francophones, une recette de cuisine destinée aux jeunes cuisiniers et cuisinières québécois, français ou belges pourront fournir la matière, de par leur contenu grammatical et lexical, du perfectionnement de la maîtrise de la langue française chez des élèves anglophones. On pourrait ajouter dans la catégorie des apprenants les autodidactes, enfants, adolescents ou adultes, qui veulent perfectionner leur compétence dans une langue seconde.

La situation naturelle de la lecture est la lecture individuelle où le lecteur lisant son journal veut s'informer de ce qui se passe dans le monde, où la lectrice voulant se détendre en s'amusant lit les aventures d'Astérix et Obélix, où le lecteur désirant quitter les soucis de son quotidien pour entrer dans un autre univers lit Le Petit Prince, où la lectrice voulant préparer le repas de midi lit son livre de recettes.

Dans le cadre de l'apprentissage d'une langue seconde (voire de la langue maternelle), on s'entend depuis quelque temps pour programmer trois étapes : la pré-lecture, la lecture et la post-lecture.

Dans la première étape on peut présenter le vocabulaire du sujet du texte (donc pain, baguette, boulangerie, artisanal, etc. pour le texte "La baguette en péril") ; pour certains textes on peut faire des inférences à partir du titre ou des illustrations (cf. le macrotexte, l'approche du haut vers le bas, le cadre de référence, les éléments paratextuels) ; on peut à partir de ce premier regard global former une première hypothèse sur le sens général du texte.

CC (pp. 75-76) cite la grille de pré-lecture de Bernet et Fougères : la nature du message (lettre, article de journal, extrait de roman, etc.), la nature du code (langue soignée, familière, technique, etc.), la nature des référents (choses, personnes, concepts, etc. – cf. ci-dessous "Les actants"), la nature du récepteur (destinataire), la nature de l'émetteur (personne, organisme, etc.). Précisons ce que peut signifier "la nature des référents" au stade de la pré-lecture. Sans entrer dans le détail du texte, c'est-à-dire sans passer à l'étape de la lecture, les référents à considérer sont ceux du titre, éventuellement renforcés par les images : le référent principal du texte "La baguette en péril", éventuellement soutenu par la photo d'une baguette, est le pain (plutôt que la baguette) ; celui du texte "Les visages du multiculturalisme canadien. Portrait de la jeune génération" est le multiculturalisme canadien.

La lecture elle-même peut se faire en plusieurs fois : d'abord une lecture rapide pour dégager les idées principales du texte ; ensuite une lecture plus attentive pour trouver le détail et les nuances des grandes lignes dégagées par la première lecture ; une lecture à haute voix de certains passages (parties de phrases ou phrases complètes) pour préciser tel ou tel point, telle ou telle idée, pour remettre en question telle ou telle hypothèse, etc. ; des questions pour tester la compréhension globale et particulière ; la sollicitation d'avis critiques.

L'exploitation du texte dans l'étape de post-lecture peut prendre plusieurs formes : par exemple, la vraie confection du gâteau dont il est question dans la recette de cuisine ; la discussion en petits groupes d'un sujet analogue à celui du texte (le texte parle des vacances de Pierre et Marie puis en groupe les apprenants parlent de leurs propres vacances) ; la rédaction d'une lettre fondée sur le modèle de la lettre lue comme texte.

Le reste du chapitre 7 de CC (toute la section sur "Apprendre à comprendre au moyen de stratégies de lecture", à partir de la p. 77) concerne une reprise de notions déjà discutées et des suggestions d'exercices (voir aussi les appendices) que nous n'examinerons pas dans le cours. Signalons toutefois le classement des articulateurs donné à la p. 92 (cf. CC p. 57 et notes de la semaine 10).

Les actants

Nous plaçons cette discussion dans le cadre de la lecture (opposée à la pré-lecture et à la post-lecture). CC parle, d'une part des arguments de Meyer (p. 61), et d'autre part des référents d'un texte (p. 75). Les premiers se situent au niveau de la phrase, les seconds au niveau du texte. Au niveau du texte, les référents dont il faut tenir compte ne sont pas tous les référents de toutes les phrases du texte, mais les principaux référents de l'histoire racontée (quel que soit le genre de texte – conte, article informatif, description, texte argumentatif, etc.), ceux qui jouent un rôle dans l'histoire : personne ou personnage, lieu, époque, chose, objectif, instrument, etc. Dans le texte "La baguette en péril", par exemple, les principaux référents sont : le pain, la France ou les Français, les meuniers français et l'Association nationale de la meunerie française, les meuniers autrichiens, les enfants, la nutrition, les boulangers, les supermarchés, les boulangeries artisanales, le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. On peut dire que le principal référent de ce texte est le pain français, sujet de l'article.

Dans certains textes narratifs, dont en particulier le récit, les référents jouent un rôle plus clair que dans "La baguette en péril". Dans un conte de fées, le destinateur ou mandateur (le roi, par exemple) ordonne au héros ou sujet (le prince, par exemple) de redresser un tort (c'est l'objet ou objectif à atteindre) pour que le royaume retrouve enfin la paix et le bonheur (le royaume est le destinataire); dans cette tâche le héros trouve l'aide d'un auxilaire ou adjuvant (ami ou bonne fée, par exemple) et doit combattre un agresseur ou opposant (c'est le "méchant", homme, sorcière ou dragon, par exemple) avant d'atteindre son but. La pantomime anglaise (Puss in Boots, Little Red Riding Hood, Cinderella, etc.) a cette structure classique, mais on peut retrouver au moins certains de ces rôles ou fonctions traditionnels dans nombre de textes modernes, comme les articles de journaux informatifs. On parlera donc d'actants, qui sont pour la plupart des êtres mais qui peuvent être des choses et incluent l'objectif ou la mission (c'est l'objet).

Plusieurs analyses sont possibles dans le cas de textes non purement narratifs. Dans le texte "La baguette en péril", on pourrait dire que le sujet (ou "héros") est le pain français, que le mandateur ou destinateur est l'Association nationale de la meunerie française, que les adjuvants sont les boulangeries artisanales, que les opposants (les "méchants") sont les céréales du petit-déjeuner, le chocolat et les supermarchés, que l'objet est l'augmentation de la consommation de bon pain, que le destinataire est la bonne santé des Français. Trouver ces mêmes fonctions dans le texte "Les visages du multiculturalisme canadien: portrait de la jeune génération" est moins facile. Le multiculturalisme canadien serait clairement le sujet (ou "héros") et le racisme serait un opposant. Mais Toronto et Silk Kaya? Sont-ce des sujets ou héros, des adjuvants? Toronto et Silk sont donnés comme exemples, comme portraits de cette galerie du multiculturalisme. Dans l'histoire de type classique (Cendrillon ou "La baguette en péril"), il n'y a pas de vrais exemples (ils sont secondaires dans "La baguette..."). Dans le cas d'un texte comme "Les visages du multiculturalisme canadien", la structure actantielle reste donc partielle. On parlera plutôt de thèmes.

La page "Rappel des principales notions à maîtriser" de la Section de français de l'Université de Lausanne donne des explications et un tableau très clairs 

Provenance : http://www.unil.ch/fra/page24791.html