L'hérédité(L'Express, 4 novembre 1993)La génétique explose. En l'espace de quelques années, des centaines de gènes, responsables de maladies dramatiques, ont été découverts. La carte du génome l'ADN caché dans nos cellules a été dressée. Aujourd'hui, le monde est à l'aube d'une révolution qui va bouleverser le corps et les esprits. Déjà on annonce, contre toute morale, qu'on a réussi à cloner des embryons humains! Les hommes ne vont-ils pas trop loin, trop vite en tentant d'appliquer les nouvelles techniques non plus à leurs maux mais à leur personnalité tout entière? Et demain ne seront-ils pas tentés d'apporter des solutions biologiques et génétiques à des problèmes purement sociaux? Pourront-ils éviter des dérapages, lorsqu'ils auront s'ils y parviennent déniché les prédispositions génétiques du moindre de leurs comportements? Alors les scientifiques prennent le dossier avec des pincettes. « De la dynamite ». « Tout peut être mal interprété », répètent à l'envi ceux qui tentent de définir les soubassements génétiques du comportement des hommes. Leur violence, leur tendance à l'alcoolisme, leur intelligence, leur capacité à dominer, leur soumission, leur timidité, leurs penchants sexuels, etc., peuvent-ils oui ou non être directement imputés à l'ADN de leurs chromosomes? Traînons-nous dans notre façon d'être les traces biologiques de nos parents? Si oui, sont-elles prépondérantes? Tel père tel fils, clame le dicton populaire. Les chiens ne font pas de chats, reprend un autre. Vrai ou faux? Question de taille, qui revêt des habits neufs grâce aux résultats d'études sur les jumeaux et grâce aux fulgurants progrès de la biologie moléculaire. Question vieille comme la philosophie et qui préoccupait déjà Platon, quatre siècles avant l'ère chrétienne. « Il croyait en la transmission de la nature profonde de l'homme, héritée du père », explique Michel Duyme, généticien et psychologue au CNRS. Et même à la possibilité d'améliorer la race humaine! |