R. Estienne, Dictionaire francoislatin, 1549: "Au lecteur"

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AV LECTEVR.

    Oultre la premiere impression de ce present liuvre, saches Lecteur qu'il a esté en ceste seconde, augmenté d'infiniz mots, lesquelz autant que possible a esté, on a tourné en Latin, fors aucuns ausquelz on n'a point encores trouué es autheurs mots Latins respondans. Pour lesquelz te prions si tu leur trouues propres dictions Latines, de nous en aduertir. Mesmes aussi d'autant de mots que tu trouueras es Rommans & bons autheurs Francois, lesquelz aurions omis: a fin que nostre conception quelque fois puisse sortir son effect.
    Secondement auons mis l'explication de la pluspart des mots difficiles, d'ou pourroyent auoir esté ainsi nommez: ou de quel autre langaige prins & mis en vsage Francois: laissans tousiours aux lecteurs leur meilleur iugement, & contens par ce commencement les auoir seulement incitez de plus pres auoir esgard a leur langue.
    Tiercement, ont esté adioustez les noms des Pais, Isles, Prouinces, & Villes, desquelles on a peu trouuer les noms Latins correspondans.
    Et pourtant que presque en chasque page a la fin de l'explication d'aucuns mots, a esté apposee ceste lettre B, de laquelle ne scaurois la signification: Sois certain que le plus grand nombre des mots Latins bien exposez icy en Francois, sont de feu monsieur Budé, qui sur tous autres, & entre autres dons a eu cestuy de nostre Seigneur, de bien entendre les mots & manieres de parler tant Greques que Latines: & les Greques bien & proprement expliquer en Latin, Et les Latines en Grec, ou en Francois: tellement qu'il n'est memoire de son pareil. Tous ces mots innumerables par luy expliquez nous n'auons maintenant marquez d'ung B: ains seulement ceulx que depuis sa mort auons transcript d'aucuns de ses liures a nous par ses enfans communiquez d'une singuliere affection (suyuans leur pere) qu'ilz ont de vouloir aider a tous studieux des langues: tant que iamais ne nous ont rien refusé, fust en Grec, ou en Latin, de tout ce que leur pere auoit laissé par escript, qu'ilz ayent estimé a tous pouoir prouffiter.
    Voyla de quoy t'auons voulu aduertir, studieux Lecteur, te prians estimer cest ouurage n'estre que commencement, qui iamais ne se parfera que par diuerses personnes soingneuses & diligentes a obseruer ce que & eulx & autres lisent ou parlent, dont se dressent certaines reigles tant pour l'intelligence des mots, que pour la droicte escripture d'iceulx, comme a esté faict par les autheurs Grecs & Latins.