[O] La Chasse des Regnardz, et Tessons.

Comme il faut dresser les petis Chiens de terre, pour la chasse des Regnardz et Tessons. CHAP. 60.
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APRES avoir parlé de la chasse des Chiens courantz, je feray icy un petit traicté de la chasse des Chiens de terre, et comme on les doyt dresser pour prendre Regnardz, Tessons, et leurs semblables.
Il faut entendre premierement, que nous avons de deux especes de Bassetz, desquelz nous disons la race estre venue des pays de Flandre, et d'Artoys: dont les uns ont les jambes torses, et sont communément a court poil, les autres ont les jambes droites, et sont volontiers a gros poil, comme Barbetz. Ceux qui les ont torses, coulent plus aysément en la terre que les autres, et sont meilleurs pour les Blereaux, d'autant qu'ilz y demeurent plus longuement, tenans mieux sans sortir. Ceux qui ont les jambes droites servent a deux mestiers, par-ce qu'ilz courent sur terre comme Chiens courantz, et entrent de plus grand' fureur et hardiesse en terre que les autres, mais ilz n'y demeurent pas si longuement, d'autant qu'ilz se tormentent a combatre les Regnardz et Tessons, ce qui les contraint d'en sortir pour prendre l'air. Il s'en trouve de bons et de mauvais des deux especes. Or par-ce que la chasse en est belle, et furieuse, sans grand travail ne peine, j'ay bien voulu icy descrire le moyen de dresser les Bassetz, et les mettre a la chair.
Premierement, on doyt commancer a dresser les Bassetz des l'eage de huyt a dix moys, car si un Basset n'entre en terre a son an, a peine luy pourra on jamais faire entrer. Et se faut bien donner garde au commancement qu'on les dresse de les rudoyer, ne que les Tessons ou Regnardz les blessent en terre, par autant que s'ila y estoyent battus ou outragez, ilz n'y voudroyent plus retourner. A ceste cause on ne doyt jamais faire entrer les Bassetz es terres ou il y ayt de vieux Tessons ou Regnardz, que premier ilz ne soyent dressez, et qu'ilz n'ayent leur an accomply. Encores faut il mettre tousjours un vieux Basset devant eux qui endurera la fureur des Tessons. Vous pouvez dresser les Bassetz et mettre a la chair en plusieurs manieres, dont la premiere est, qu'en la saison que les Regnardz et Tessons ont leurs petis, il faut prendre tous les vieux Bassetz, et les laisser aller en terre: puis alors qu'ilz commanceront a abboyer, on doyt tenir tous les jeunes au-pres des pertuis un a un, de peur qu'ilz se battent, et leur faire escouter les abboiz. Apres que les vieux Regnardz ou Tessons seront pris, et qu'il n'y aura plus que les petis, faut prendre tous les vieux Bassetz, et les coupler, puis laisser aller les jeunes, les hardissant en terre, en criant, Coule a luy Basset, Coule a luy, hou, prenez, prenez. Et alors qu'ilz tiendront quelque jeune Tessonneau ou Regnardeau, il leur faut laisser estrangler dedans la tranchee ou pertuys, se prenant bien garde que la terre ne tombe sur eux, de peur qu'elle leur nuyse. Ce fait, faudra porter tous les petis Tessonneaux ou Regnardeaux au logis, et en faire fricasser les foyes et le sang, avec du fourmage, et de la gresse, puis leur en faire curee, en leur monstrant la teste de leur gibbier. Apres que les Bassetz auront mangé la curee, ou bien au par-avant, il les faut laver d'eau tiede, avec du savon, pour faire tomber la terre, qui sera meslee entre le poil et la peau, car autrement ilz pourroyent devenir galleux, d'une galle qui seroit fort difficile a guarir. On les peut encores dresser en une autre maniere, sçavoir est: Il faut faire prendre de vieux Regnardz ou Tessons tous vifz, par les vieux Bassetz, et avec des tenailles propices a ce faire, comme pourrez veoir en pourtraicture cy apres, les prendre, et leur couper toute la maschoüere de dessoubz, là ou sont fichez les grans crochetz, et ne toucher point a celle de dessus, par autant qu'elle monstrera tousjours la fureur de la beste, sans pouvoir blesser ne faire mal. Apres faut faire faire des terres en un pré, lesquelles doyvent estre assez larges, a fin que les Bassetz ayent espace de leur tourner et virer, et entrer deux tout de front, puis couvrir les terres d'ais, et de gazon. Cela fait, on doyt mettre le Tesson dedans, et lascher tous les Bassetz jeunes et vieux, leur donnant courage, et les enhardissant comme l'art le requiert. Et quand ilz auront assez abbayé, faut frapper sept ou huyt coups de besche au costé, pour leur donner hardiesse quand on beschera. Puis faudra lever les ais a l'endroit ou sera le Tesson, et le prendre avec les tenailles, en le tuant devant eux, ou bien le faire estrangler a quelque Levrier, pour leur en faire curee. Et faut avoir du fourmage en une pochette, pour leur jetter soudainement sur leur gibbier, quand il sera mort. Et si d'avanture on ne vouloit rompre la maschoüere de dessoubz du Tesson, il luy faut coupper tous les crochetz, et toutes les maistresses dentz, de peur qu'il morde, et face mal.

Du naturel et complexion des Regnardz et Blereaux. CHAP. 61.
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TOUT ainsi qu'il y ha deux especes de Bassetz, il y ha semblablement deux especes de Tessons, et de Regnardz, sçavoir est, des Tessons, de Porchins et de Chenins: et des Regnardz, de grans, et de petis Goupilz. Combien que plusieurs veulent dire que les Tessons sont tous d'une mesme sorte, et qu'il n'y ha point de difference entre les Porchins et Chenins, si est-ce que je leur prouveray le contraire, tant par la couleur et façon des bestes, que par leur naturel.
Le naturel des Porchins est tel, qu'au sortir de leurs terres ilz font volontiers leur fiante: et ne la font jamais qu'ilz ne facent un petit pertuis avec le bout du nez, ou bien avec l'ongle, puis fiantent dedans, ce que ne font pas les Chenins: et font les Porchins plus communément leurs cavernes dedans le sable, et autres terres aysees a mouvoir, qu'ilz ne font pas ailleurs, et en lieux descouvertz, pour avoir la chaleur du Soleil, dormans incessamment: aussi y prenent ilz plus de gresse que les Chenins. Quant au pelage, les Porchins sont plus blancheastres, et ont le poil de dessus le nez, et de dessoubz la gorge beaucoup plus blanc que n'ont pas les Chenins, et si le corsage en est un peu plus grand, la teste et le nez plus gros: combien qu'il y ha peu d'apparence si on n'y regarde de bien pres. Le naturel des autres, qu'on appelle Chenins, est tel, et les cognoistra on en ceste maniere. C'est qu'ilz vont au pourchatz plus loing que les autres, faisant leur fiante au loing, de telle façon que celle des Regnardz. Ilz se tiennent volontiers dedans les fortes terres, ou dedans les rochiers, faisant leurs fosses et cavernes plus profondes et estroictes que non pas les Porchins: toutes-fois qu'il n'y ha pas tant de meres ne de carrefours qu'en celles des Porchins, d'autant qu'ilz ne peuvent pas mouvoir les terres fortes et rochiers, comme les autres font le sable, et les terres mouvantes. Ces deux especes ne se tienent point ensemble, et a peine les pourra on trouver a une lieüe pres l'une de l'autre. Les Chiens de terre craignent bien plus les Chenins que les Porchins, car ilz sont plus mauvais, et plus puantz. On les pourra encores cognoistre au pelage, lequel est tel. Les Chenins ont la gorge, le nez, et les oreilles jaunastres, comme la gorge d'une Martre, et sont beaucoup plus noirs et plus hautz sur jambes que les autres. Les deux especes vivent de toutes chairs, et mesmes vont aux charongnes. Ilz font grand dommage aux garennes, et principalement aux petis lapreaux, qui sont dedans les raboulieres, car ilz perçent droit dessus la rabouliere, la ou le Regnard suyt du long. Je leur ay veu prendre devant moy les petis cochons de laict, lesquelz ilz traynoient tous vifz en leur terrier. C'est une chose certaine qu'ilz en sont plus friandz que de toutes autres chairs, car si on passe un carnage de Porceau par dessus leurs terriers, ilz ne faudront jamais de sortir pour y aller. Ilz vivent de toutes sortes de gibbiers, comme oyes, pouletz, et leurs semblables: je le sçay par experience, car j'en ay nourry de privez jusques en l'eage de quatre ans: ilz sont plaisans et de bonne nature, sans mordre ne faire aucun mal, ne faisant que joüer avec les petis Chiens, et dormir la reste du temps: et quand je les appelloys, ilz venoyent a moy comme Chiens, me suyvant la part ou j'alloys. Ilz sont fort froidureux, et si on les laisse en quelque chambre ou il y ayt du feu, ilz s'en yront coucher dedans, et se brusleront les piedz, lesquelz sont fort difficiles a guarir. Ilz se nourrissent de pain, de petis osseletz, fourmage, fruitage, raisins, barbotz: somme, ilz mangent de tout ce qu'on leur veut donner. Quand il nege, ou fait autre fort temps, ilz ne sortent point hors de leurs cavernes, aucunes-fois de deux ou troys jours, ce que j'ay veu par experience: quand la nege estoit tombee devant leur pertuys, je ne trouvois point qu'ilz fussent sortys, et y suis allé par deux matins ensuyvans, et au dernier les trouvay sortis, ou ilz alloyent pourchasser leur vie. C'est plaisir de leur veoir amasser le bourre, comme paille, fougere, fueilles, et autres choses, ilz assemblent tout en un monceau, puis avec les quatre jambes et la teste en portent et traynent autant en un coup en leurs cavernes, qu'un homme en scauroit porter d'un bras soubz son aisselle. Ilz ont ceste malice, qu'alors qu'ilz se voyent abboyez des Bassetz, ilz ferment le pertuys de leurs cavernes apres eux, de peur que les Bassetz les suyvent. Et si on les fait abboyer deux ou trois foys dans les terres, ilz remuent leur mesnage, et s'en vont en un autre lieu. Ilz vivent longuement, et quand ilz sont bien vieux, les uns devienent aveugles, qui ne peuvent sortir de leurs fosses: si se sont les masles, les femelles les nourrissent, et si se sont les femelles, les masles font le semblable. Ilz meurent aussi de dartres {d'artres} qui leur vienent par tout sur la peau, comme lon veoit venir aux Chiens: qui est la raison pourquoy on doyt laver les Bassetz, comme j'ay dit cy dessus, par-ce que la terre engendre les dartres. J'ay veu toutes ces choses cy dessus mentionnees par experience.
Les Tessons sont de dure vie, car j'ay veu plusieurs-fois de bons et fortz Levriers apres les Tessons qui les mordoyent si asprement qu'ilz faisoyent sortir leurs trippes hors du ventre, encores se deffendoyent, et ne vouloyent pas mourir. C'est une chose certaine que les Tessons craignent le nez grandement, aussi ne leur scauroit on donner si petit coup de baston dessus qu'ilz ne meurent soudainement.
Quant a la chasse des Regnardz, il y ha peu de plaisir, principalement en la terre, par-ce que depuis qu'ilz sentent les Bassetz qui les abboyent, ilz bouclent, et sortent soudainement dehors, excepté en la saison que les femelles ont leurs petis, lesquelz ilz ne veulent abandonner. Ilz font volontiers leurs terriers en lieux mal-aysez a bescher, comme dedans des rochiers, ou soubz quelques arbres, et n'ont qu'une mere, qui va fort loing, laquelle est fort estroicte.
Quand les Bassetz ont une fois acculez les Regnardz, ilz se deffendent quelque peu, mais ne n'est pas de telle vigueur et hardiesse que les Tessons, et n'ont la morsure si dangereuse. Si on prent une Regnarde en la saison qu'elle est en amours, et qu'on luy couppe la nature, et le boyau qui la tient, avec ce les petis roignons, qui sont cause de l'engendrement, qui est ce que les chatreux ostent aux Chiennes quand ilz les sennent, puis mettre le tout, couppé par petis loppins, en quelque petit pot, tout chaudement, et prendre du Galbanum, et le mettre dedans, en meslant le tout ensemble, et couvrir le pot, de peur que le tout s'esvente, cela se pourra garder toute l'annee, qui servira alors qu'on voudra faire quelque trainee pour faire venir les Regnardz, en prenant du cuyr ou coüanne de lard, la mettant sur le gril, puis quand elle sera bien grillee, et toute chaude, il la faut tremper dedans le pot ou est la nature de la Regnarde, et le Galbanum, et en faire toutes les trainees: alors vous verrez que les Regnardz vous suyvront par tout. Mais il faut que celuy qui fera la trainee, frotte la semelle de ses souliers de bouze de Vache, de peur qu'ilz ayent le vent de ses piedz. Voyla comme il faut faire venir les Regnardz pour les prendre au piege, {pege} et pour les tuer au soir avec l'arbaleste. C'est une chose certaine, que si on frotte un Basset de souffre, ou d'huyle de cade, et qu'on le face entrer en des terres, ou il y ayt des Regnardz ou Tessons, ilz se remueront de là, sans y retourner de deux ou trois moys.

Comme il faut bescher, et prendre les Regnardz et Tessons, et des instrumentz qu'il faut avoir pour ce faire. CHAP. 62.
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TOUS Seigneurs qui voudront exercer la chasse des Chiens de terre, il faut qu'ilz soyent equippez et garnis des choses qui s'ensuyvent. Premierement, d'une demye douzaine de forts hommes pour bescher, d'une demye douzaine de bons Chiens de terre, pour le moins, qui ayent chascun un collier au col, large de troys doigts, et garny de sonnettes, pour l'entree des terres, a fin que les Tessons s'acculent plus tost, et aussi que les colliers les garderont d'estre blessez. Et a l'heure qu'on verra les Tessons acculez, ou que les Bassetz soyent las, et hors d'haleine, ou bien que les sonnettes fussent pleines de terre, il faudra prendre les Bassetz, et leur oster les colliers: mais au commancement ilz servent grandement, d'autant que le Tesson s'en accule plus tost. Plus, pour revenir au propos, le Seigneur doyt avoir sa petite charrette, là ou il sera dedans avec la fillette, aagee de seze a dix et sept ans, laquelle luy frottera la teste par les chemins. Il doyt avoir demye douzaine de mantes, pour jetter contre terre, a fin d'escouter l'abboy des Bassetz: ou bien pourra porter un lict plein de vent, lequel on pourra faire en ceste maniere. Il faut coudre des peaux ensemble en carré, et de la grandeur d'une paillace, et que les coustures en soyent aussi subtiles que celles d'une bale: puis quand tout sera bien cousu tout autour, il faudra mettre a un des coings un petit buffet, en façon de celuy d'une bale ou d'une cornemuse, qui se ferme de luy-mesmes quand le vent sera dedans, puis l'emplir avec une seringue, ou avec un bon souflet, fait a la semblance de celuy d'un Orfebvre. Toutes les chevilles et paux de la charrette doyvent estre garnis de flaccons et bouteilles, et doyt avoir au bout de la charrette un coffre de boys, plein de coqs d'Inde froidz, jambons, langues de Beuf, et autres bons harnois de gueule. Et si c'est en temps d'Hyver, il pourra faire porter son petit pavillon, et faire du feu dedans pour se chauffer, ou bien donner un coup en robbe a la nymphe. Les instrumentz pour bescher, doyvent estre premierement des tarieres, de deux sortes de pietes: sçavoir est, de larges et d'estroites, un coupant fait en façon d'une piete, lequel doyt estre aceré pour couper les racines, une besche fort large, pour tirer la terre, une racle pour ouvrir les meres et gouletz, de laquelle on tirera la terre hors, des tenailles pour arracher et tirer les Tessons des pertuis, des paelles de fer et de boys, des sacz pour mettre les Tessons vifz dedans, une paelle ou autre vaisseau pour faire boire les petis Chiens. Et faut que le Seigneur marche en bataille de ceste façon, equippé de tous les ferrementz cy dessus mentionnez, a fin d'aller donner l'assaut aux gros Tessons et Vulpins en leur fort, et rompre leurs chasmates, plocu, paraspetz, et les avoir par mine et contre-mine, jusques au centre de la terre, pour en avoir les peaux a faire des carcans pour les arbalestiers de Gascongne. J'ay pourtrait cy apres la forme et façon de chascun des ferrements.

[O] Les ferrementz. [O]
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Tariere pointue, pour faire la premiere perce.
Tariere ronde, pour percer et enlever la terre.
Tariere plate, pour fermer les meres.
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Piete estroicte, pour bescher la terre.
Piete large, pour bescher la terre.
Bezoche large, pour tirer la terre.
Tenailles, pour prendre les Taissons.
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Paelle de fer, pour bescher.
Racle, pour nettoyer les meres et pertuys.
Coupant aceré, pour couper les racines.
Paelle de boys, pour jetter la terre.

Comme on doyt lascher les Bassetz scelon les terres qu'on veoit. Et ce qu'on doyt faire pour bescher et miner les Tessons. CHAP. 63.
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IL FAUT icy entendre que premier que lascher les Bassetz, on doyt regarder les terres quelles elles sont, et le lieu ou elles sont situees, et là ou sont les acculz, car autrement on feroit tout au rebours de la chasse, d'autant que si les terres estoyent en pante de coustaux, il est requis de mettre les Bassetz par le dessoubz, devers la vallee, a fin d'acculer les Tessons sur le haut du coustaut, là ou les terres ne sont pas si profondes, pour les bescher plus aysément. Autrement, si les terres estoyent en une motte, et qu'elles fussent toutes rondes, la motte estant assise en lieu plat, il faut mettre les Bassetz aux pertuis qui sont les plus hautz, sur la sommité de la motte. Mais premier que de les lascher en telles terres, on doyt frapper vingt ou trente coups de la teste des pietes sur le haut des terres, a fin de faire desloger les Tessons du milieu d'icelles, pour les faire descendre aux acculz, qui sont au bas de la motte. On doyt tousjours lascher a l'entree deux ou trois Bassetz, a fin qu'en leur fureur ilz puissent desbranler et departir les Tessons, qui seront ensemble, et les chasser aux acculz. Ilz ont une malice de se faire abboyer aux careffours, et tienent fort en telz lieux contre les Bassetz. A l'heure qu'on veoit qu'ilz sont aux abboiz en telz endroitz, il est requis frapper deux ou trois coups de piete, et s'ilz ne veulent desloger pour telle chose, il faut soudainement mettre la tariere ronde pour les descouvrir. Et alors qu'on verra qu'ilz seront a l'accul, on ne doyt pas percer au droit d'eux, mais faut percer au droit de la voix du Basset, pour autant que si on perçoit droit sur eux, ilz retourneroyent dedans les grandes terres, et forceroyent le Basset, a ceste cause il faut percer, comme j'ay dit, au droit de la voix du Basset, avec la tariere ronde, car elle enleve sa terre sans qu'elle tombe dedans: puis soudainement mettre la tariere plate dedans le pertuis du rond, a fin qu'il ferme la mere tout au travers, de peur que le Tesson reculast sur le Chien. Et s'il est possible d'enfermer le Chien par le derriere de la tariere, il seroit fort bon, car si c'estoit par le devant, les Tessons le pourroyent battre et rudoyer: par-ce qu'aucunes-fois il s'en trouve en un accul six ou sept, qui pourroyent battre et rebuter le Chien. Quand la mere est fermee de la tariere plate, il faut faire soudainement la tranchee avec les pietes et paelles, a fin d'avoir espace pour ranger un homme dedans: et a l'heure laisser entrer les Bassetz en la tranchee, et les faire abboyer en ce lieu, là ou on veoit batailles et assaux de toutes façons. Il se faut donner garde que les Tessons ne se couvrent de terre, ce qu'ilz font volontiers quand ilz sont acculez, tellement que les Bassetz sont aucunes-fois dessus, et ne sçavent ou ilz sont allez. Puis quand on ha descouvert leur chasmate et fort, il faut avoir les tenailles pour les arracher: mais il y ha mistere a les prendre, par-ce que si on ne les prent qu'au corps, ilz mordent et blessent les Chiens quand on les tire dehors, toutes-fois on les peut prendre en cette sorte: il faut ouvrir les tenailles, et leur en mettre la moytié en la gueule, l'autre moytié par le dessoubz de la machoüere, puis serrer les tenailles, et vous le tiendrez par les maschoüeres de dessoubz, car si vous le preniez par la maschoüere de dessus du costé du nez, il mourroit soubdainement. Et alors que le tiendrez avec les tenailles, il le faut tirer et mettre dedans le sac, puis le porter en quelque court ou jardin renfermé de murailles, et le laisser aller, mettant les petis Bassetz apres: quand il sera eschauffé, il viendra assaillir les hommes comme fait un Sanglier. Et a telle chasse il est requis d'estre botté, car plusieurs-fois il m'ont emporté le lopin de la chausse, et la chair qui estoit par dessoubz. J'eusse traicté plus amplement de ceste chasse, mais par-ce que peu d'hommes y prenent plaisir, j'en ay escript succinctement.

[O] Fin de La Venerie.