I. Leroy-Turcan, "Présentation de quelques exemplaires des ouvrages de Gilles Ménage : originaux et contrefaçons"

1. De la bibliophilie à l'exigence scientifique

Faut-il rappeler que, quels que soient les travaux réalisés sur des textes anciens, il est indispensable pour le chercheur d'avoir une certitude absolue concernant la qualité des textes sur lesquels se fondent toute analyse théorique, toute critique, toute exégèse, toute référence ?

La connaissance des contrefaçons -- repérage, identification, chronologie -- n'est pas un luxe en grammaire ou en lexicologie [3] : les chercheurs travaillant sur l'histoire des théories linguistiques ne doivent pas hésiter, de temps à autre, à se faire bibliophiles [4] en vertu de l'exigence scientifique qui implique, entre autres, le souci d'exactitude des références et des textes cités.

Ce n'est pas ici le lieu d'évoquer les principes de réalisation [5] et de diffusion [6] d'un livre ancien ni de présenter les différents foyers de contrefaçons actifs au XVIIe siècle [7] : notre objet se limitera à attirer l'attention du lecteur-consultant, du philologue, sur les points essentiels de ce qui constitue presque, au-delà de la simple reconnaissance du statut d'un livre et en dépit du contexte d'ouvrages imprimés, l'établissement d'un texte absolument fiable.

Nous allons donner ici, à partir des exemplaires présents au fonds ancien de la bibliothèque municipale de Lyon, quelques cas significatifs des différences textuelles opposant un original à une contrefaçon : rappelons que plusieurs exemplaires d'un même livre, dans sa réalisation matérielle, peuvent ne pas contenir un texte identique en dépit des apparences formelles du titre, de la date d'édition et du nom de l'éditeur.

2. Les critères d'identification : l'original et la contrefaçon

2.1. Quelques principes élémentaires de découverte d'un livre : nécessité de la réalisation d'une fiche signalétique ; modalités de description.

2.1.1. Réaliser une fiche signalétique, c'est se constituer un point de repère indispensable, s'offrir les moyens de comparer en toute rigueur des ouvrages conservés dans des lieux divers et éloignés, c'est se donner la chance d'identifier un ouvrage comme étant un original ou une contrefaçon.

Pour l'identification d'un exemplaire original, nous partons de deux principes logiques : tout ouvrage portant des annotations manuscrites de Ménage lui-même, ou de ses correspondants et amis, nous offre un repère indiscutable [8] ; il en est de même pour tout ouvrage dont nous savons, à la fois par un ex libris ou un ex dono et par une source extérieure, biographique et plus largement historique, qu'il a été offert à quelqu'un par Ménage [9] ; il est possible, sans trace directe ni explicite, de retrouver l'origine d'un ouvrage grâce à l'histoire des fonds particuliers ou des collections qui ont souvent été gardées à part dans les bibliothèques privées. Ainsi pour l'exemplaire des Origines de la langue françoise (1650) qui se trouve à la bibliothèque municipale de Blois dans la collection d'un bibliophile, érudit local, G. Ribier [10] qui fut au XVIIe siècle une personnalité de la ville de Blois : sans sa collection privée, léguée aux jésuites de Blois, puis revenue dans le domaine public après la Révolution française, cet exemplaire ne serait sans doute pas parvenu à la disposition du public dans d'aussi bonnes conditions. Tel est encore le cas, à Orléans, d'un autre exemplaire des Origines (1650) [11] dont la reliure luxueuse porte sur la première et la quatrième de couverture deux initiales marquées en lettres d'or, G et P, correspondant très certainement à Guillaume Prousteau [12] : ce bibliophile passionné, né à Tours en 1646, docteur puis professeur à l'Université d'Orléans, réussit à acquérir en 1679 la bibliothèque de Henri de Valois dont on sait l'importance dans les échanges entre savants [13].

En l'absence de ces critères irréfutables, nous pouvons avoir tout de même des présupposés tels que la fréquence d'exemplaires absolument identiques dans les grandes bibliothèques parisiennes (Bibliothèque Nationale, Mazarine, de l'Institut) ou provinciales (fonds anciens de Lyon, Strasbourg, Bordeaux, Angers, Grenoble, Besançon, Aix-en-Provence, etc.) [14]. Mais cela ne peut que permettre d'attendre de trouver le critère absolu.

2.1.2. Les apparences sont parfois trompeuses

La page de titre (avec les marques des libraires [15]) et le Privilège Royal (ou l'Extrait du Privilège) [16] constituent deux critères de reconnaissance essentiels mais non suffisants, dès lors que l'un comme l'autre peuvent avoir été arbitrairement ajoutés avant que le livre n'ait été relié [17] ; il faut donc les examiner en tenant compte non seulement de tous les détails de mise en page et de taille des caractères, mais aussi de leur place par rapport à l'organisation des cahiers. S'impose alors une vérification systématique de l'harmonie entre foliotation [18], pagination [19] et mise en page de l'ensemble du texte [20], y compris les tables et index pour les correspondances des références, sans oublier non plus les « décorations » comme les bandeaux les lettrines ou les culs de lampe (cf. infra pour les ObLF de 1672).

Toute irrégularité, si minime semble-t-elle, qu'elle concerne un original ou une contrefaçon, doit donc être consignée dans la fiche signalétique (cf. infra, annexes). Il va sans dire qu'à moins de lire in extenso un ouvrage, en tenant compte de tous les détails formels propres à la constitution matérielle du livre [21], on peut compter sur le hasard des vérifications qui permettent de repérer par exemple les inévitables fautes d'impression. Aussi faut-il prendre conscience de l'intérêt que peut offrir une simple coquille comme critère distinctif d'une édition précise : toute correction ultérieure de cette coquille dans une autre édition mérite alors une attention particulière selon qu'elle est imputable à un retirage avec corrections ou à une contrefaçon associant sous une même reliure des cahiers récupérés et des cahiers recomposés et corrigés.

2.2. Retirages et contrefaçons [22]

Nous n'aborderons pas la question des critères extérieurs de la contrefaçon banale : le format, la qualité du papier, les négligences d'impression et les décorations. Les exemples de nos fiches et les quelques commentaires les accompagnant dans le cas de certains exemplaires suffiront : rappelons simplement que le format des contrefaçons est sensiblement plus petit que celui des originaux dans une même catégorie de format (cf. infra, les mesures pour les formats in 12°).

2.2.1. Le cas du DEOLF, 1694

Des descriptions différentes peuvent correspondre aux variantes d'une même fiche signalétique quand il s'agit de tirages de la même édition, même dans le cas d'interversion de cahiers avant la mise en place de la reliure.

Ainsi pour deux exemplaires de la BN qu'il est légitime de considérer comme des originaux [23], comparés à deux exemplaires de la Mazarine [24], à deux exemplaires de la bibliothèque de l'Institut [25], ainsi qu'à d'autres exemplaires examinés dans quelques villes de province (fiche de base en annexe).

Des différences matérielles entre des exemplaires ne sont pas forcément des indices pertinents pour l'identification d'une contrefaçon : ainsi Lyon BM 22 998 correspond fidèlement aux exemplaires précédemment évoqués, de même que les deux très beaux exemplaires conservés aux fonds ancien de la bibliothèque municipale de Grenoble [26], les deux autres de la BU, dont l'un porte un ex libris au nom de Desbrosses (cote 238 X 350) ou encore ceux magnifiquement reliés de Châlon/Saône ; mais nous connaissons, dans une collection privée, un exemplaire curieux car beaucoup plus mince que les autres exemplaires examinés, cela étant dû en grande partie à la qualité du papier : la succession irrégulière des pages 569/570, 573/574, 571/572, 575/576 s'accompagne de la succession suivante pour les feuillets : CCcc, CCcc3, CCcc2 ; de même pour les pages 585/586, 589/590, 587/588 et 591/592 correspondant aux feuillets EEee, EEee3, EEee2 ; de même enfin aux pages 593/594, 597/598, 595/596 et 599/600, soit les feuillets FFff, FFff3, FFff2. Ces cas d'interversion, comparables à ceux de l'exemplaire de BN X 500, n'entraînent pas d'autre conséquence, pour le texte qui reste le même, qu'une consultation désagréable pour le lecteur. L'ouvrage a vraisemblablement été relié de façon hâtive.

2.2.2. Terminologie : retirage ou contrefaçon ?

Alors que le retirage est officiel, la contrefaçon est clandestine, mais parfois on est conduit à étendre cette notion à des éditions annoncées comme des copies fidèles de l'édition originale : tel est le cas des deux tirages successifs de Menagiana 1693 que nous nommerons respectivement 1693a et 1693b, par opposition à une édition hollandaise 1693h.

On connaît deux éditions françaises du Menagiana 1693 avec quelques modifications en b ne justifiant pas la terminologie de réédition : le retirage 1693b de 1693a présente une particularité puisque le nom de Chastelain ne figure pas dans la liste des Noms des personnes qui ont contribué à cet Ouvrage avec leur marque (liste placée à la fin de l'Avertissement au v° de l'avant-dernier feuillet du cahier i). Au lieu de voir son nom figurer en première ligne de cette liste dans 1693a, on ne trouve en 1693b qu'en fin de liste des points de suspension suivis des trois étoiles constituant la marque de Chastelain [27]. La BN possède des exemplaires de ces deux tirages [28], le premier, sous la cote Rés. Z 2643, le second sous les cotes Rés. 2641, aux armes de Huet, et Rés. Z 2642, aux armes de Charles d'Hozier. L'exemplaire de Lyon BM 304 412 est donc du premier tirage [29] tout comme celui du fonds ancien de Bourg-en-Bresse conservé grâce à la collection du Sieur Jacques Dutour Vuillard [30].

Les éditions hollandaises, dès lors qu'elles sont marquées comme étrangères, n'apparaissent pas clandestines comme celles qui gardent la marque d'un libraire parisien alors qu'elles ont été réalisées à Lyon ou à Genève (cf. l'exemple des ObLF 1672 avec une fausse marque de chez Barbin [31]). Il faut cependant se méfier de la fidélité au texte d'origine, puisque ces éditions sont le fruit d'une recomposition complète : la taille de l'ouvrage, beaucoup plus petite qu'un in 12° parisien, entraîne des caractères différents ; on ne retrouvera aucune correspondance de pagination avec l'original parisien. Il faudrait avoir la patience de vérifier l'exactitude absolue (respect des graphies d'origine, par exemple) du texte de ce genre d'édition. Nous nous sommes contentée de présenter ici la reproduction de la page de titre de l'édition réalisée à Amsterdam chez A. Braakman datée de 1693 pour signaler deux irrégularités manifestes -- indépendamment de la différence de format [32] : la présence sous le nom de Ménage de la mention erronée « De l'Académie Françoise » [33] et la marque du libraire qui n'est pas sans rappeler celle de l'édition originale parisienne (cf. la reproduction). Technique d'accroche pour une meilleure vente ? Il n'est pas impossible que cette édition soit bien postérieure à 1693, qu'elle ne soit due qu'au caractère rare de la première édition, dès lors que sont sorties, quasiment coup sur coup, en 1694-5, la deuxième et, en 1715, la troisième édition. L'étude de ce succès de librairie reste à faire.

2.3. Le cas des Observations de M. Ménage sur la Langue françoise (1672 et 1675-6) à Lyon et dans la région Rhône-Alpes par comparaison avec les exemplaires présents à Angers et à Paris (BN et Institut)

2.3.1. La première édition de 1672, très répandue, est à manier avec précaution quand on doit en extraire des références ; avant même la parution de la seconde édition, elle fut copiée abondamment surtout chez les Jésuites ; nous avons étudié à Lyon même deux contrefaçons différentes (cf. fiches en annexe) et nous avons distingué, dans l'ensemble de la région Rhône-Alpes et dans la région Ouest, plusieurs séries de contrefaçons qu'il nous reste à identifier, à regrouper selon les lieux de réalisation [34]. Pour identifier un original de 1672 il suffit de repérer les deux chapitres XXXI (p.63 et 64), le chapitre 233 noté « 243 », CCXXXXIII (p.347), l'errata occupant trois pages foliotées xxiij et le Privilège commençant au verso de la dernière page de l'errata. À cela s'ajoute la vérification de la marque du libraire Barbin et celle des bandeaux et lettrines.

2.3.2. L'édition revue et corrigée de 1675 (tome 1) et de 1676 (tome 2) -- dont Slatkine a produit un reprint en 1972 -- a, elle aussi, subi des remaniements de mise en page comme le prouvent les exemplaires d'Orléans comparés à ceux de Paris (BN et Institut), d'Angers, de Châlon-sur-Saône, de Beaune, de Nancy et à ceux de Lyon. Un des indices de contrefaçons est l'absence de clochettes sur la marque du libraire Barbin, l'autre est la mise en page particulière des pages 14-15 et 16 du tome II dont le texte est légèrement différent (cf. descriptif en annexe, n. 49).

2.4. Le témoignage éloquent du Menagiana

L'étude du Menagiana, rendue délicate par la multiplicité des éditions, rééditions, retirages et contrefaçons, mériterait une analyse détaillée que nous n'avons eu le loisir de mener que sur quelques exemplaires examinés à Lyon, Angers et Paris : nous ne ferons donc ici qu'esquisser une présentation des pièges offerts par ce texte dont on connaît le succès.

Nous avons déjà évoqué la première édition ; la seconde n'est pas sans difficulté, puisque tantôt les deux tomes sont datés de 1694, tantôt le premier seulement [35], le second portant parfois la date de 1695. Récupération des pages de titres de 1694 dans le premier cas ? Retirage dans le second ? [36]

Nous avons en revanche la chance de connaître plusieurs séries de la troisième édition en 4 tomes datée de 1715 -- que l'on doit à Bernard de La Monnoye, « l'Oracle vivant de la République des Lettres » [37] --, dont une des caractéristiques formelles consiste en des mains signalant les articles nouveaux par rapport à la deuxième édition ; or, ces mains dont l'éditeur donne un modèle dans la Préface (v° du f. äiij) [38] ne sont pas toujours les mêmes d'une série à l'autre : de fait, un premier tirage a été censuré et a subi d'importantes modifications, nommées « cartons », comme le prouve l'exemplaire de l'Indice expurgatoire du Menagiana de l'Edition de Paris conservé à la BN avec les armes de Huet, avec les quatre tomes de 1715, comme s'il s'agissait d'un cinquième tome (Rés. Z. 2650) [39]. Mais tous les cartons signalés dans cet Indice Expurgatoire ne sont pas insérés systématiquement dans les « retirages » de 1715 que nous avons consultés à Paris, Lyon et Angers, ce qui en accroît les difficultés d'étude. Signalons simplement ici que le tome I de l'exemplaire de Lyon BM 304 411 nous paraît bien être un original absolu, c'est-à-dire, du premier tirage non censuré.

Il va de soi que toute référence dans Menagiana 1715 est donc à utiliser avec précaution, c'est-à-dire au minimum après vérification des cartons officialisés dans l'Indice Expurgatoire. Ajoutons que, dans certains exemplaires, on trouve en fin de volume des pages reliées apparemment sans lien particulier avec le reste de l'ouvrage. Loin d'être le fruit d'une négligence du relieur, ce sont tout simplement les pages correspondant aux textes originaux ajoutés dans les volumes au texte censuré par les cartons, ce que nous confirme l'exemplaire de la BN (Rés. Z. 2646) et l'un de ceux de Lyon BM (304 409) qui offrent donc l'avantage de comporter à la fois le texte original du premier tirage et celui des corrections apportées au second tirage expurgé [40]. Mais, là encore, l'absence de régularité rend difficile et longue toute description systématique : il nous paraît donc inutile, à ce jour, de faire état dans ce travail de notre description des volumes de Lyon comparés à ceux d'Angers et de Paris ; nous invitons simplement tout lecteur intéressé par la troisième édition du Menagiana à consulter l'Indice expurgatoire [41].

L'édition de 1729 pourrait nous offrir la solution aux diversités de 1715, en donnant notamment la version non expurgée de 1715. Mais cette édition de 1729 n'étant officiellement qu'une reprise de 1715 présente en réalité globalement les mêmes aléas, d'autant qu'elle semble avoir été réalisée en grande partie à partir de cahiers de 1715 récupérés de divers tirages ; mais quels cahiers de 1715 ? Nous constatons, par exemple, dans les exemplaires que nous avons à Lyon, que le tome I de 1729 n'est pas exactement fidèle à ce qu'aurait dû être le premier tirage de 1715. D'autre part, on retrouve en fin de volume les ajouts de cahiers censurés : ne s'agit-il que des censures de 1715, ou bien y en a-t-il eu d'autres [42] ? Enfin le grand nombre de pages signées avec l'ajout d'une étoile placée avant la marque de foliotation rend encore plus suspects ces exemplaires.

Pour compléter ces premières mises en garde concernant les deux éditions de 1715 et 1729, nous disposons du témoignage de l'Histoire du Menagiana donnée par Salengre dans l'Eloge de La Monnoye placé en tête de l'édition hollandaise des Poësies de La Monnoye, parues à La Haye en 1716 [43]. Après avoir détaillé les qualités du travail de La Monnoye (p.xxx à xxxiij), Salengre évoque le « sort » de cette troisième édition directement confrontée à la censure du pouvoir des « bigots..., Nation alors toute-puissante en France » qui « pestèrent furieusement à cause de divers articles qui choquoient disoient-ils la Religion et les bonnes mœurs. » (p.xxxiv-xxxv). B. de La Monnoye, intimidé par les lettres de cachet et « les exemples de gens, que pour une bagatelle on envoïoit à la Bastille » fut contraint de faire cesser la vente et de promettre la suppression de certains articles :

Ce témoignage, malgré son intérêt, n'est pas suffisant : même si cette édition de 1715 est très répandue en France [44], nous n'avons pas encore trouvé deux séries des quatre tomes absolument identiques ; or, en dépit de la remarque de Salengre selon laquelle

les exemplaires que nous avons consultés à Paris, à Angers et à Lyon, bien imprimés chez Delaulne, ont tous des cartons ! Il nous reste donc à poursuivre nos investigations de façon à identifier en toute certitude un authentique original du premier tirage de 1715 ! Quoi qu'il en soit, nous savons que, même si l'édition de 1715 est « plus ample de moitié et infiniment plus correcte que les précédentes », tout lecteur doit la consulter avec la circonspection impliquée par la censure du Grand Siècle.

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Notes

3. Ce qui n'exclut pas d'autres domaines, comme nous le montrerons infra avec les différentes éditions et rééditions du Menagiana.

4. Nous présentons ici le fruit d'une démarche tout à fait personnelle dont nous avons progressivement perçu l'importance.

5. Cf. Dureau & Merland 1978, 1982, 1985.

6. Cf. Sayce 1979 et Répertoire bibliographique.

7. Nous renvoyons à l'ensemble de l'étude magistrale de Henri-Jean Martin (Martin 1984 : tout particulièrement 967-1015 (t.2, Sources et Bibliographie)).

8. Tel est le cas des deux exemplaires des Origines de la langue françoise (1650) conservés à la réserve de la BN, annotés respectivement par S. Bochart (X 923) et par P.D. Huet (X 901), puis retravaillés par Ménage en vue de l'édition du DEOLF (1694) : pour plus de détails, voir Leroy-Turcan 1991 : 69-112.

9. Ainsi pour l'exemplaire des Origini della Lingua Italiana (1685) dont la reliure magnifique est aux armes et au chiffre de Charles de Sainte Maure, duc de Montausier, exemplaire conservé à la bibliothèque municipale de Nancy (Rés. 587).

10. Il fut notamment l'auteur d'un Traité des Chanceliers et des Gardes des Sceaux de France auquel Ménnge se réfère, entre autres dans les ObLF (par ex. 1675, ch. 8, p 18-9 = 1672, ch. 8, p.16).

11. Sous la cote Rés. D. 397.

12. Cf. son ex libris sur d'autres textes de Ménage comme les Observations : outre la personnalité des collectionneurs qui ont possédé les Origines (1650), le luxe de la reliure peut nous donner indirectement une preuve de la qualité d'attention accordée à un livre considéré comme précieux.

13. Cf., pour plus de détails, Cuissard 1884 : 99-111 (ch. XXIII, §1 « La bibliothèque Guillaume Prousteau »).

14. Nous sommes en train de réaliser l'inventaire des ouvrages philologiques et lexicographiques de G. Ménage conservés dans les fonds anciens des bibliothèques de France, en distinguant, autant que possible les originaux des contrefaçons ; nous poursuivrons nos investigations dans les bibliothèques des grandes villes d'Europe.

15. Il faut savoir que les cuivres ou les bois des marques peuvent être récupérés, usagés ou légèrement modifiés (cf. infra, pour les Observations et le Menagiana). Cf. Laurent-Vibert & Audin 1925 : reproductions n° 26-7 pour Barbin, n° 64 ssq. pour Coignard, n° 74 pour Courbé et n° 89 pour Delaulne.

16. L'analyse des Privilèges est essentielle : on vérifie au minimum la date d'accord, celle du registré et celle de fin d'impression. Dès lors on est attentif à la pertinence des écarts chronologiques d'une date à l'autre, à celle de l'absence de la date de fin d'impression ; l'absence de Privilège dans un ouvrage non lacéré par ailleurs est un indice pertinent de contrefaçon.

17. Certaines contrefaçons comprennent des cahiers récupérés d'éditions antérieures (cf. infra, le cas du Menagiana).

18. Tout cahier étant normalement complet, il est par exemple suspect de trouver dans un format in 12° un cahier ne comportant que quatre feuillets.

19. Lorsqu'on constate une erreur de pagination, il faut surtout vérifier si elle correspond à un changement de cahier, ce qui peut constituer un indice important de contrefaçon, notamment quand l'erreur se répète dans le livre.

20. Travail long, car méticuleux, mais dont les efforts sont bien récompensés : ainsi, l'on constate dans certaines contrefaçons des ruptures totales du texte (cf. infra pour le Menagiana).

21. Ce qui implique une certaine conscience du lecteur, une part d'abnégation du cherheur aussi puisqu'il doit accepter de prêter, dans un premier temps du moins, davantage attention à la forme extérieure qu'au contenu.

22. Cf. Parguez 1969.

23. Malgré des irrégularités de pagination : ainsi pour l'exemplaire BN X. 501 les quelques anomalies de pagination sont sans doute dues à des négligences dans la disposition des mains de papier (erreur imputable aux relieurs ?), avec la succession suivante pour les p.298, 301, 302, 299, 300, 303..., les p.554, 557, 558, 555, 556, 559..., les p.602, 605, 606, 603, 604, 607..., les p.610, 613, 614, 611, 612, 615..., et les p.618, 621, 622, 619, 620, 623... (vérifier encore la foliotation) alors que l'exemplaire BN X. 500 (= microfiche 996), dont les armes de Huet et ses notes manuscrites confirment, en toute logique, que l'authenticité est conforme à la fiche signalétique donnée infra (notes manuscrites de Huet) = Mazarine 116 et D 116.

24. Sous les cotes 116 et D 116, ce dernier exemplaire portant l'ex libris du Patrum Recollectorum conventus parisiensis avec la marque du couvent en lettres d'or sur la première et la quatrième de couverture.

25. Cotes D. 5106 et R. 57 : ces deux exemplaires sont des originaux, sans aucun doute. Le volume R. 57 est couvert d'annotations manuscrites préparant la réédition par A.F. Jault en 1750 ; nous en préparons une analyse détaillée, car nous avons déjà évoqué l'intérêt et les dangers de cette réédition.

26. L'un d'eux, sous la cote P. 1593, marqué d'un ex libris, porte plusieurs notes manuscrites concernant le parler dauphinois. L'autre, A. 2097, est également un original, mais sans signe distinctif.

27. Nous remercions ici Mme Francine Wild de nous avoir rappelé la référence à la Préface de la première édition de l'Anti-Menagiana où cette liste des Noms des personnes qui ont contribué à cet Ouvrage avec leur marque est commentée.

28. Dont les notes manuscrites sont inégalement intéressantes : Huet a noté en face des initiales de noms propres les noms in extenso, ce que l'on retrouve officialisé par B. de La Monnoye dans l'édition de 1715 ; sur BN Rés. Z 2643 figurent de nombreuses annotations furieusement hostiles, non signées, du genre de celle-ci : « Ce Menagiana est un recueil de sottises, d'infamies, de mauvaises plaisanteries et de calomnies absurdes. Il y a très peu de bons mots. Et ceux qui ont ramassé toutes ces pauvretez comme les meilleures choses dites dans l'assemblée de Gilles Ménage ont fait une playe incurable a sa réputation. Cette Rapsodie a esté hautement honorée d'un Privilège du Roy, quoyqu'il y ait des impiétez et des traits sanglans contre la réputation des plus grands hommes. On a débité en peu de temps ce misérable libelle après lequel une infinité de gens ont couru. O saeclum Insipiens et inficetum. » Un parallèle s'impose évidemment avec l'Anti-Menagiana (recherche en cours).

29. Ce premier tirage est très vite devenu rare donc recherché et rares sont les bibliothèques qui l'ont conservé ; il en est d'ailleurs de même pour le second tirage dont les libraires anciens savent tous la valeur.

30. Comme le prouve le très bel ex libris de cet exemplaire : « Ex Bibliotheca D. Jacobi Mariae Dutour-Vuillard, equitis, D. de Latour... » (cote 110 235).

31. Pour plus de détails, cf. Reed 1974.

32. 1693a et 1693b sont de format in-8°, alors que 1693h et de format in-12°.

33. Cf. dans ces Actes le texte de notre communication sur « Ménage et l'Académie ».

34. Nous évoquerons simplement ici la belle série de contrefaçons où manque seulement l'errata, le Privilège commençant alors sur le deuxième feuillet xxiij ; alors que l'erreur sur les deux chapitres XXXI est maintenue, celle du ch. 233 est corrigée ; nous avons pu vérifier que les exemplaires de Bourg-en-Bresse (cote 107 405), de Chambéry (A. 10014), de Mâcon (6065), de Châlon/Saône (3790-628) et de Beaune (P. 2329) dont les bandeaux et lettrines comportent certains défauts de gravure viennent du même atelier qui a effectué une copie de la marque du libraire Barbin en modifiant les clochettes du motif d'origine. Il reste bien sûr à vérifier d'autres points comme celui du papier utilisé pour chacun de ces ouvrages, mais la répartition géographique de ces exemplaires laisse penser qu'ils peuvent avoir été faits à Genève ou à Lyon.

35. Précisons aussi que l'impression des dates en chiffres romains n'est pas toujours identique pour une même date : ainsi trouverons-nous pour le premier tome de cette deuxième édition MDCXCIIII ou MDCXCIV.

36. L'état actuel de nos recherches ne nous permet pas d'aller au-delà du simple descriptif de cette deuxième édition dont nous n'avons encore étudié que les exemplaires de la BN et de la bibliothèque municipale d'Angers.

37. Nous savons qu'il y a travaillé dès 1693 par une lettre de Bayle à l'Abbé Nicaise (lettre n° 115) : « le Menagiana corrigé sur les bons avis de M. de La Monnoye, sera quelque chose de bon. Personne ne pénètre comme lui les fautes les plus imperceptibles ». Cf. encore l'article MÉNAGE dans le Dictionnaire de Bayle.

38. « [...] et la matiere dans la suite s'est si bien multipliée, qu'un gros recueil s'en étant formé, j'ai cru par reconnoissance le devoir incorporer dans celui qui l'a fait naître, le tout cependant de telle sorte que l'on pût distinguer sans peine le premier d'avec le second*. » * : « On a distingué les articles nouveaux par une main. »

39. Voici le texte servant de préface : « L'Ancien Menagiana, imprimé plus d'une fois, n'ayant jamais été censuré dans aucun de ses articles, quoi qu'il y en ait d'assez libres, on avoit lieu de présumer que la nouvelle édition, augmentée de deux volumes, composez dans le gout des précédens auroit un pareil succès. La chose a tourné autrement. Des hommes graves, pour lesquels j'apprens que l'Editeur a infiniment de respect, ayant examiné ces additions, y ont condamné divers endroits. Lui, né docile, & qui d'ailleurs n'avoit eu nulle mauvaise intention, a mieux aimé se soumettre à telle réforme qu'on a voulu lui prescrire, que d'entreprendre de se justifier. Il a dressé en conséquence les cartons suivans, pour être substituez aux articles & passages déclarez licentieux par ses Censeurs. Et comme ces cartons ne laissent pas, quoi que dans un moindre degré de gayeté, d'avoir leur agrément, soit par l'érudition, soit par le sel qui s'y trouve, j'ai cru faire plaisir au Public de les insérer ici tout de suite, y spécifiant, à la forme des INDICES EXPURGATOIRES, la page, la ligne, souvent mème les premiers, & les derniers mots des endroits changez. J'ai plus fait, l'Editeur ayant revu avec attention l'ouvrage entier, & y aiant trouvé matière à plusieurs corrections nouvelles, j'ai pris soin de les recueillir, & de les ajouter, pour la satisfaction des amateurs de l'exactitude, à l'INDICE EXPURGATOIRE; en sorte que si l'on joint ces derniéres corrections à celles qui ont été ci-devant marquées, dans les errata, & dans les diverses additions, mises les unes à la fin des volumes, les autres au commencement, on sera comme sûr d'avoir enfin ce qui a été promis, je veux dire UN MENAGIANA CORRECT. »

40. Exception faite des cartons des pages 307 et 335 ; pour le carton III des corrections des p.370 sqq., le texte de BN Rés. Z 2646 est différent de celui de l'Indice Expurgatoire.

41. Dans l'attente d'une présentation exhaustive du Menagiana 1715 et de ses variantes, nous ne donnons ici, à titre d'exemple, que les références des cartons du premier volume (voir infra annexe).

42. Nous ne pouvons pas nous permettre, dans l'état actuel de nos recherches, de donner des conclusions assurées, mais les comparaisons systématiques des différents exemplaires conservés dans les bibliothèques de France et d'Europe devraient nous permettre d'aboutir à des certitudes.

43. Référence que nous devons à une note manuscrite au v° du feuillet de la reliure, juste avant la première page de titre sur l'exemplaire BN, Rés. Z, 2646, t.1. Cf. encore, à propos de ces cartons, la référence donnée par Samfiresco 1902 aux Mémoires de littérature de Salengre (t.1, 2e partie, p.223 sqq.)

44. Il suffit de consulter les catalogues imprimés des bibliothèques pour s'en convaincre.