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Institut d'Etudes Politiques de Paris Internet ? Enjeux de théorie politique Conférence de Paul Mathias 31/03/2000 |
I.
Historique de la liberté d'expression
II. La spécificité de l'internet et les possibilités qui s'ouvrent III. Quelles limites quant à la liberté d'expression ? IV. Les tentatives de régulation par les autorités V. La lutte sur le réseau même VI. Où en est la liberté d'expression sur internet ? La
liberté d'expression est un droit fondamental dans notre société.
Dans cet exposé, nous allons nous interroger sur la relation entre
le nouveau média internet et ce droit fondamental. D'abord, nous
allons tracer les origines de la liberté d'expression, avant de
voir quelles nouvelles possibilités s'ouvrent avec l'avènement
du réseau numérique. Toutefois, ce droit est rarement conçu
comme absolu, et les autorités essaient de définir ses limites.
Or, internet ne fait pas exception. Dernièrement, nous verrons comment
une lutte constante pour et contre la liberté d'expression sur internet
se fait sur le réseau même. Globalement, il faut constater
qu'internet constitue un progrès pour la liberté d'expression.
I. Historique de la liberté d'expression Les origines de la liberté d'expression sont à trouver dans le monde occidental. Il s'agit d'une tradition laïque, républicaine et démocratique, qui a commencé à émerger vers la fin du 18ème siècle. Auparavant, une telle liberté était réservée aux autorités royales, seigneuriales ou religieuses. En 1789, la liberté d'expression a été inscrite dans deux constitutions, une de chaque côté de l'Atlantique. Les Etats-Unis venaient de gagner leur liberté sur la couronne britannique et d'adopter leur propre constitution en 1776. Celle-ci a été amendée pour la première fois en 1789, et c'est ce First amendment qui garantit aux citoyens leur liberté d'expression : « Congress shall make no law...abridging the freedom of speech or of the press” Ainsi, il ne s'agit pas seulement de la liberté de chacun d'exprimer sa pensée, ses idées, ses croyances, mais aussi du droit de la presse d'informer et de distribuer de telles pensées sans restrictions de la part des autorités. En Europe, et en particulier en France, la liberté d'expression est probablement davantage associée à la Révolution française. En 1789, le peuple français a été libéré de la tutelle de la monarchie absolue, et ses représentants dans l'Assemblée nationale considéraient tout le monde, hommes et femmes, comme des égaux, ayant les mêmes droits fondamentaux. Dans cette logique, l'Assemblée nationale a voté la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le 26 août 1789. Désormais, tout acte des autorités devait respecter les règles simples mais fondamentales inscrites dans cette Déclaration, qui avait pour but d'éviter l'abus du pouvoir. Après avoir garanti la liberté de pensée et de croyance dans l'article, la Déclaration constate la liberté d'expression dans son article 11 : « tout citoyen peut...parler, écrire, imprimer librement » Cependant, il faut attendre le 20ème siècle et les tragédies de deux guerres mondiales pour que soient établis de tels principes au niveau mondial. Après la Seconde Guerre Mondiale, l'Organisation des nations unies (Onu) a pris le rôle de défenseur de la paix et de la liberté dans le monde. Elle considère que tout le monde a des droits inaliénables et égaux, et que c'est le mépris de ces droits qui est à l'origine des barbaries commises par l'homme. L'Onu a été fondée en 1948 et la même année elle a voté la Déclaration universelle des droits de l'homme, dans laquelle la liberté d'expression est assurée, dans article 19 : « Tout individu a droit à la liberté d'expression...sans considérations de frontières » En Europe, on a créé le Conseil de l'Europe en 1949, pour défendre la démocratie, l'Etat de droit et les droits de l'homme. Cette assemblée, qui rassemble des parlementaires des Etats membres, a voté la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en 1950. Cette Convention européenne des droits de l'homme défend clairement la liberté d'expression dans son article 10 ; « Toute personne a droit à la liberté d'expression...sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publique et sans considération de frontières » Dernièrement, nous pouvons mentionner le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui a été voté par l'Assemblée générale des Nations unies, en 1966. Dans son article 19, elle reprend presque les mêmes termes que la Convention européenne quant à la liberté d'expression: « Toute personne a droit à la liberté d'expression...sans considération de frontières" A
travers l'histoire, les droits fondamentaux, et en particulier la liberté
d'expression, ont été confirmés comme des principes
universels. Cependant, nous verrons constamment ces droits et ces libertés
circonscrits par la régulation, la menace et la violence. La liberté
ne peut être assurée qu'à travers une lutte constante.
II. La spécificité de l'internet et les possibilités qui s'ouvrent Nous pouvons nous interroger sur le rôle que l'internet peut jouer dans cette lutte constante. Qu'est-ce qu'il apporte de nouveau, et comment peut-il servir la cause de la liberté d'expression? Après le monopole de la parole, l'écriture et ensuite l'imprimerie ont constitué des révolutions pour le transfert d'idées et d'informations. Dans le siècle passé, on a vu apparaître les techniques audiovisuelles et enfin le numérique et l'informatique? L'internet constitue la dernière véritable révolution quant aux techniques de transmission d'informations et d'idées. Il s'agit d'un réseau de réseaux, et, selon le professeur Pierre Mackay à l'Université du Québec à Montréal, il tire son originalité et son caractère novateur du fait que sa "circonférence est partout et [son] centre nulle part". Il n'y a pas de centre de contrôle ni des frontières sur ce réseau. Tout intervenant est égal à tous les autres. Le système dépasse les frontières géographiques et politiques, ce qui constitue un défi pour toute la logique étatique. Or, internet peut être considéré comme une possibilité inédite quant à la liberté d'expression, sur lequel on peut communiquer librement et instantanément d'un bout du monde à l'autre. Les sites publiés sur le réseau ne sont pas destinés à quelqu'un en particulier et l'accès est en principe ouvert à tout le monde, sans considération de proximité, de nationalité ou de lieu de résidence. Dans des groupes de discussion, on peut exprimer sa pensée sans censure préalable. Selon la Cour Suprême des Etats-Unis, il s'agit d'une "conversation mondiale sans fin". La conversation se fait entre individus, organisations, sociétés et autorités. Toutefois, si les autorités y participent, elles ne sont pas capables de contrôler cette dynamique, qui échappe pour l'instant à leurs mécanismes de contrôle trop basés sur les frontières territoriales des Etats. Est-on donc enfin passé à une véritable liberté d'expression universelle, un demi-siècle après la déclaration faite à l'Onu? Au moins, s'agit-il d'un moyen formidable pour exercer ce droit et pour défier les autorités qui essaient de réguler les flux d'information et de communication. Dans des sociétés illibérales, internet peut donner accès à des informations "interdites" et donner la possibilité d'exprimer ses soucis au monde extérieur, même si cette possibilité peut être circonscrite. Pour les organisations non gouvernementales (ONG) traditionnelles de défense des droits de l'homme et de la liberté d'expression, internet constitue un nouveau moyen important. Par voie du réseau, elles peuvent diffuser leurs informations concernant des violations de ces droits, et ces informations seront accessibles pour tout le monde. Aussi, le réseau est-il utilisé pour lancer des campagnes contre des régimes responsables de telles violations. Ainsi, des ONG comme Amnesty Internationalet Human Rights Watch ont depuis longtemps établi des sites sur internet, qu'ils utilisent pur défendre les droits de l'homme. Elles publient régulièrement des informations sur des progrès et des reculs dans ce domaine, y compris par rapport à la liberté d'expression. Aussi, elles incitent les internautes à réagir contre les régimes qui violent ces droits. Un autre phénomène est l'apparition d'organisations de défense des droits de l'homme et de la liberté d'expression, qui opèrent uniquement sur internet. Digital Freedom Network, qui promeut des nouvelles méthodes d'action par internet, en est un exemple. Elle essaie de donner voix à ceux qui sont réprimés, diffuser de l'information sur de telles violations, et inciter les internautes à réagir par l'envoi d'emails aux autorités qui ne respectent pas leurs obligations dans ce domaine. Internet
constitue donc un progrès immense et une opportunité inédite
quant à la liberté d'expression et la défense de cette
liberté. Cependant, il faut voir quelles limites on peut donner
à ce droit.
III. Quelles limites quant à la liberté d'expression? La liberté d'expression est un droit fondamental, mais s'agit-il d'un droit absolu? En fait, cette discussion remonte au débat dans l'Assemblée nationale sur la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, lors de la Révolution française. A l'époque, deux camps s'opposaient. D'une part, celui qui voulait que la liberté d'expression soit limitée et définie par la loi, représenté par Sieyès. D'autre part, celui qui estimait que cette liberté devait être indéfinie et illimitée, représenté par Robespierre et Marat, qui disait:
"La liberté de tout dire n'a d'ennemis que ceux qui veulent se réserver
la liberté de tout faire. Quand il est permis de tout dire, la vérité
parle d'elle-même et son triomphe est assuré."
C'est pourtant le premier camp qui l'emporté, car si l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen garantit la liberté de parler, d'écrire et d'imprimer librement, elle en définit aussi les limites: "sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi." Il s'agit de l'idée que la liberté de chacun doit s'arrêter là où commence celle des autres. La liberté de tout dire et dans n'importe quelle situation pourrait restreindre la liberté d'autrui, en lui infligeant des dommages directs ou indirects. Ce principe a été respecté par la suite, notamment au 20ème siècle et d'abord dans la Convention européenne des droits de l'homme, dont l'article 10§2 précise que: "L'exercise de ces libertés…peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi…" Quant à l'Onu, la Déclaration universelle des droits de l'homme n'en fait par référence, mais le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 le fait dans l'article 19§3: "L'exercise des libertés…peut…être soumis à certaines restrictions…expressément fixées par la loi." L'idée est que la liberté d'expression est contrecarrée par certains devoirs et responsabilités par rapport aux autres. Parce que les gens ne sont pas capables de mener une autogestion de ceux-ci, une gestion judiciaire est nécessaire. Nous pouvons diviser les exceptions au principe de la liberté d'expression en deux groupes. 1)
La protection des personnes, des groupes et des valeurs
2)
La protection de l'Etat
Vu
le caractère transfrontalier et global d'internet, les autorités
nationales ont du mal à assurer le respect de tels principes. Elles
essaient tout de même de façons différentes de réguler
le contenu sur le réseau.
IV. Des tentatives de réguler la liberté d'expression sur internet Les autorités nationales n'ont pas laissé le champ libre et renoncé à tout droit d'intervenir et d'essayer de réguler la communication qui se fait sur internet. Comment essaient-elles de limiter la violation des principes mentionnés? Ce nouveau média, exige-t-il une nouvelle législation et des nouvelles solutions? En principe, l'activité sur internet est soumise aux mêmes règles et lois que d'autres médias dans la société? En France, le Conseil d'Etat l'a confirmé dans son rapport "Internet et les réseaux numériques": "l'ensemble de la législation existante s'applique aux acteurs d'internet… Il n'existe pas et il n'est nul besoin d'un droit spécifique de l'internet et des réseaux." Ainsi, le droit traditionnel s'applique aux questions concernant l'internet. On en a un exemple connu en France, concernant la question du libellé et de la diffamation. Il s'agit du droit de chacun à voir respectés son intégrité, son nom, sa réputation et sa vie privée. Ce droit a été violé quand des photos du modèle Estelle Hallyday nue ont été publiées sur un site hébergé par altern.org. Selon l'avocat à la Cour Henri LeClerk, ceci représentait "une atteinte intolérable à l'intimité de la vie privée et au droit de chacun sur son image". Même si les images ont été enlevées du site, Mme Hallyday a lancé un procès contre l'hébergeur qui a été condamné à payer une amende de 405 000 francs. La décision soulève la question de savoir si une telle mesure est efficace, car il est évident qu'il est impossible pour les autorités françaises de contrôler tout ce qui est publié sur le réseau, en France ou ailleurs. Ceci fait que des photos d'Estelle Hallyday nue sont toujours accessibles sur d'autres sites. Une deuxième question qui se lève est de savoir qui est responsable pour le contenu sur un site. Est-ce que cette responsabilité revient à l'hébergeur ou à l'auteur? Sur cette question, l'Assemblée nationale française vient de voter une loi qui rend l'hébergeur largement responsable. Cette loi engendre de nouveaux problèmes, et elle a été fortement condamnée par des organisations qui défendent la liberté d'expression sur internet, par exemple IRIS. Un problème important est qu'on rend les hégergeurs responsables pour réguler et censurer le contenu sur le réseau. A défaut, ils risquent d'être condamnés. Ceci est une atteinte à la liberté d'expression parce qu'un hébergeur n'a pas a priori la compétence de juger de la légalité du contenu d'un site. Au risque d'être condamné, il est contraint de pratiquer une censure stricte. Ceci, montre que les autorités ont entamé une législation spécifique à l'internet, ce qui peut avoir un impact sur la liberté d'expression. Néanmoins, l'histoire de la Communications Decency Act aux Etats-Unis est plus importante, et elle représente un échec pour ceux qui souhaitaient établir une régulation du contenu sur le réseau. Une partie de cette loi voulait criminaliser des pratiques illicites liées à l'obscénité et la violence. L'administration Clinton et le Congrès souhaitaient étendre la protection des mineurs à internet. Cependant, sur le réseau, il est impossible de vérifier l'âge de l'acteur. Ainsi, tout site qui pourrait être considéré comme dommageable pour un mineur devrait être complètement interdit. Ceci restreindrait la liberté d'expression des adultes. Or, le 8 février 1996, le même jour où la loi a été signée par Président Clinton, la American Civil Liberties Union (ACLU) et dix-neuf d'autres groupes ont porté plainte devant la Cour Suprême, pour violation du premier amendement de la Constitution américaine. La Cour Suprême a rendu sa décision le 26 juin 1997, et elle a rejeté cette loi. Elle a considéré que l'intervention gouvernementale sur le réseau ne pouvait que nuire à la liberté d'expression, et en particulier celle des adultes. La Cour invite plutôt les autorités publiques à trouver d'autres modalités pour protéger les mineurs, par exemple l'information parentale et le filtrage. Dans
de multiples pays, les autorités essaient par la loi de limiter
les abus de la liberté d'expression sur internet, mais elles ont
compris qu'internet est un phénomène transfrontalier qui
ne peut être régulé au niveau national. C'est pourquoi
les pays essaient de coopérer au niveau international. L'Union européenne
est un acteur important qui s'est engagé dans ce domaine. En avril
1997, le Parlement européen a voté une résolution
sur le
Toutefois,
un engagement au simple niveau européen ne peut suffire pour contrôler
l'activité et le contenu sur internet. C'est pourquoi on parle d'introduire
de telles questions dans des forums comme le G7, l'OCDE, l'Onu etc. Déjà
en 1996, la France a fait une proposition à l'OCDE pour l'adoption
d'une Charte
de coopération internationale sur internet. Cette proposition
vise surtout à protéger la sécurité de l'Etat.
La France souhaite
Nous voyons donc que les Etats démocratiques et occidentaux essaient dans un certain degré de limiter les abus de la liberté d'expression, et en partie à travers une coopération internationale. Néanmoins, ils soulignent pratiquement toujours l'impossibilité de tout contrôler et la nécessité de promouvoir l'autorégulation par les internautes. Cette position n'est pas partagée par certains pays moins démocratiques, qui essaient férocement de limiter l'accès, non seulement à certains sites, mais parfois à tout le réseau. La notion de « sécurité de l'Etat » prend une toute autre forme dans des pays comme la Chine, Singapour ou la Birmanie, qu'en Occident. En
Chine, une liste détaillée de crimes informatiques a été
élaborée, qui inclut l'utilisation de l'internet pour diffamer
ou diviser le pays. En 1996, elle a bloqué l'accès à
des sites comme CNN, Wall Street Journal et des sites de dissidents à
l'étranger. A Singapour, la discussion sur internet est acceptée
seulement si elle ne va pas à l'encontre des valeurs morales, la
stabilité politique ou l'harmonie religieuse dans le pays. En Birmanie,
on risque entre 7 et 15 ans de prison si on possède un accès
non-autorisé au réseau ou si on envoie ou reçoit de
l'information sur des thèmes comme la sécurité de
l'Etat, l'économie ou la culture nationale. Dans de telles régions,
où la tradition de libertés civiles est faible, une coopération
au niveau international peut nuire fortement à la liberté
d'expression. En 1996, les pays membres de l'Asean
se sont mis d'accord pour surveiller internet et bloquer des sites qui
iraient à l'encontre des « valeurs asiatiques ». Cette
expression est certainement vague, mais tout de même inquiétante.
Dans de tels pays autoritaires, le contrôle du contenu et de la communication
sur internet se fait par la pression, des menaces, la surveillance et la
restriction de l'accès aux moyens.
V. La lutte sur le réseau même Nous avons vu qu'internet est à la fois un enjeu dans la lutte pour la liberté d'expression et un lieu où cette lutte se réalise. La quasi-totalité des informations livrées sur cette question dans ce document a été recherchée sur le réseau. Par ailleurs, nous avons vu des exemples d'organisations qui défendent les droits de l'homme et la liberté d'expression dans son sens large, en utilisant internet comme un nouveau moyen de lutter. Mais il existe aussi une bataille qui est consacrée uniquement à la question de la liberté d'expression sur internet isolé et qui se fait le réseau même. Ainsi, il existe une multitude d'organisations, communautés, groupes ou individus avec des sites qui défendent des différentes opinions sur cette question. Les sites américains se réfèrent très souvent à la CDA et la décision de la Cour Suprême de la rejeter. Soit, ils y voient la victoire de la liberté sur la régulation étatique, soit, la défaite de la dignité par une société libéralisée à un degré déplorable. Citizens Internet Empowerment Coalition (CIEC) en est un exemple. Ce site est l'œuvre d'une coalition d'internautes, de bibliothèques d'éditeurs, de fournisseurs d'accès et d'organisations de défense des libertés civiles, qui s'est réunie pour faire opposition à la CDA. Elle défend la liberté d'expression absolue sur internet et leur site est entretenu comme un symbole de la décision de la Cour Suprême de rejeter la CDA. Souvent, différentes organisations de défense de la liberté d'expression sur internet coopèrent et créent des alliances. Ainsi, sous le drapeau de la Internet Free Expression Alliance (IFEA), on peut trouver de nombreuses organisations. Certaines sont consacrées uniquement aux question à l'égard d'Internet et d'autres non, mais elles se rassemblent autour de la défense de la liberté d'expression sur le réseau. On revient à la question qu'on se posait, dans le débat sur la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, lors de la Révolution française, notamment si la liberté d'expression doit être absolue ou définie et limitée. En général, tous ces groupes dénoncent les initiatives du gouvernement à réguler le contenu sur internet par la loi et prennent la position de Marat que la vérité triomphera si on a la liberté de tout dire. Ces organisations préfèrent l'approche de l'autorégulation par les internautes et qu'on combatte des mensonges avec des vérités et non des interdictions. Dans cette logique, le site de la Doomsday Clock propose que le révisionnisme, tel représenté par Zundelsite, soit combattu avec des contre-sites informatifs, tel The Nizkor Project. De l'autre côté, il y a des organisations, communautés, groupes et individus qui défendent une certaine régulation du contenu sur internet, et regrettent la décision de la Cour Suprême sur la CDA. Il s'agit souvent d'organisations religieuses et/ou conservatrices qui ont peur de l'influence négative que peuvent avoir la pornographie et la violence sur les enfants, sur la vie familiale et sur la société au sens large. Parmi ceux qui ont défendu la CDA le plus fort, on trouve The American Family Associationet Christian Coalition. Un autre exemple intéressant est le site Enough Is Enough. Celui-ci renseigne les parents quant aux possibilités de protéger leurs enfants des sites « dangereux » et guide les internautes vers des sites « sûrs ». En lisant les pages sur ce site, on a l'impression que la pornographie et l'exploitation sexuelle dominent le réseau. Enough Is Enough veut lutter contre ce phénomène et demande votre coopération et aide par une donation en ligne… D'autres
sites défendent la liberté d'expression mais font campagne
pour plus de responsabilité dans cette liberté. Le site établi
par la maison d'édition chrétienne
Zondervan
est un exemple d'un tel site qui demande plus d'autorégulation par
les internautes.
Zondervan a lancé une campagne pour promouvoir
la responsabilité dans la liberté d'expression - The
Green Ribbon Campaign. De la même façon, les défenseurs
d'une liberté d'expression absolue ont leur Blue
Ribbon Campaign, organisée par Electronic
Frontier Foundation.
VI. Où en est la liberté d'expression sur internet ? Internet est un grand progrès pour la liberté d'expression, car il donne des possibilités inédites quant à la communication et l'information de façon instantanée à travers les frontières géographiques et politiques. La liberté d'expression prend une forme universelle telle que prévue dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. Cependant, il y existe des limites, suite à la volonté des autorités d'essayer de limiter que l'abus d'une telle liberté inflige des dommages à autrui. Il s'agit tout d'abord d'essayer de promouvoir une conscience de responsabilité dans l'utilisation d'internet, car les autorités savent qu'il est impossible de tout contrôler. Or, la liberté d'expression n'en est pas fondamentalement en danger. Les menaces de la part de régimes autoritaires sont beaucoup plus inquiétantes, et constituent une vraie limite quant à la liberté d'expression sur internet. Une limitation d'accès au réseau et des menaces de représailles pour une utilisation « dommageable » met en question la nature universelle de cette liberté. D'autant plus que ces pays sont souvent relativement pauvres et que ceci limitent encore plus l'accès. Cependant, internet est une nouvelle arme pour les ONG qui combattent les régimes autoritaires, les violations des droits de l'homme et l'interdiction de s'exprimer librement. Le réseau est utilisé pour donner de la mauvaise publicité pour ces régimes et pour les mettre sous pression internationale de libéraliser leurs régimes. Sur le réseau même, une bataille se fait entre ceux qui proclament le droit de s'exprimer sans limites et ceux qui souhaitent une régulation par les autorités ou par les internautes mêmes. Pour ou contre, ceci est en soi un signe de liberté d'expression. Au final, il faut constater que le réseau constitue un pas en avant pour la liberté d'expression et qu'il jouera un rôle important pour étendre cette liberté à des nouvelles sphères. |
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