Le questionnaire a été adressé en septembre 2000 à 51 personnes, dont 31 ont répondu. Trois réponses étaient trop succintes pour que l’on puisse en tirer des informations intéressantes. Il reste donc 28 personnes. On pourrait s’inquiéter d’un échantillon aussi restreint. Mais sa petite taille témoigne déjà des difficultés qu’il y avait à prendre une grande partie de son temps pour réaliser des activités qui n’étaient pas valorisées au milieu des années 1990: explorer les contenus du web, construire un serveur ou un forum, inciter les collègues à publier, se constituer un réseau d’experts, dans sa discipline comme en informatique, n’allait pas de soi. Par ailleurs, le but de cette enquête n’est pas de recenser toutes les initiatives, mais de détailler de façon précise celles qui répondaient à une réelle exigence scientifique: celle-ci n’est pas l’apanage des professeurs d’universités, et c’est pourquoi des enseignants du secondaire ou des classes préparatoires ont été interrogés. Enfin, les 34 questions envoyées étaient ouvertes (à l’exception de cinq questions de base), et leur envoi sous forme électronique a permis aux destinataires d’y répondre sans limitation de taille et en développant leur expérience personnelle. Ainsi, on peut espérer que ces témoignages sont représentatifs, non seulement des préoccupations des pionniers de l’internet en sciences humaines, mais aussi de l’état d’esprit de leurs collègues qui ont tenté, avec un moindre succès, de participer à la diffusion de contenus structurés sur le web.
Certaines réponses sont d’une franchise étonnante: certains enquêtés n’ont pas hésité à critiquer vertement leurs collègues. Par souci de protection des informateurs, il importait donc d’anonymiser les réponses. Mais cela ne suffit pas: dans les « micro-mondes » de l’Universé, il est aisé d’identifier un chercheur, si l’on connaît son âge, son institution, et ses activités, surtout quand celles-ci sont marginales. Aussi le lecteur comprendra-t-il que certains profils aient été volontairement mélangés de façon qu’aucun enquêté ne puisse être retrouvé: un propos tenu par une spécialiste de la discipline A sera parfois transcrit comme étant celui d’un de la discipline B. De même, le terme « institution » sera uniformément employé pour évoquer une université, un lycée ou une grande école. Les structures plus petites, axées sur des recherches ou des enseignements thématiques, seront quant à elle présentées comme des « laboratoires », indépendamment de leur éventuelle appartenance au CNRS.
Ces choix ne résultent pas seulement d’une inquiétude exagérée face aux déboires que pourraient subir les informateurs (l’internet n’est pas une activité « criminelle », même dans le monde universitaire: au contraire, les pionniers sont aujourd’hui parfois valorisés). Il s’agit simplement de maintenir une relation de confiance: ayant reçu généreusement des informations confidentielles, nous nous attachons à garantir cette confidentialité.