Histoire/Genre/Migration

Sessions du Lundi 27 mars matin Ecole Normale Supérieure, grande salle, Ens, 48 boulevard Jourdan 75014 Paris.

Résumé

9 h – 10 h Approches théoriques/ Theoretical Approaches

 

Philippe Rygiel, Introduction

Donna R. Gabaccia, Immigration History Research Center, University of Minnesota (USA), Gender and Migration: History in an Interdisciplinary Field of Study, [Genre et Migration : un objet d’histoire au carrefour de plusieurs disciplines]

Like the study of immigrant women that preceded and still partially
overlaps with it, scholarship on gender and migration has developed over
the past two decades not only in history but in a wide variety of
disciplines. The 1990s were a period of intensive ìinterdisciplinary field
buildingî for those generally interested generally in migration; for those
interested in gender and migration more specifically a cross-disciplinary
dialogue had emerged already by the mid-1990s. By the late 1990s it was
beginning to generate theoretical work that promised as way to begin to
link hundreds of specialized studies of particular migrant groups in
particular times and places.
Still, specialists in some disciplines (notably anthropology and
the less-quantitatively-oriented researchers in sociology) were far more
active participants in this dialogue than were specialists in other
disciplines, such as political science or economics). Unlike these more
quantitatively-oriented disciplines, historians were relatively open to
gender analysis and generated a great deal of work on gender and migration.
In this paper I ask and attempt to answer three related questions. To what
extent have historians participated in the cross-disciplinary discussions
of gender and migration? What might historians best contribute to this
dialogue and how? Finally, what can historians expect to gain by drawing on
work on gender and migration in other disciplines?

Anne Morelli, Université libre de Bruxelles (Belgique), Jalons pour une histoire des femmes migrantes en Europe [Toward an history of female migrants in Europe]

Jalons pour une histoire des femmes migrantes en Europe
La féminisation actuelle des migrations est largement reconnue mais on oublie trop souvent que les migrations du passé ont, elles aussi, touché les femmes. Que ce soit parce qu'elles encourageaient ou subissaient les migrations des hommes ou parce qu'elles-mêmes voyageaient, les femmes ont été concernées par les départs. Mais si les femmes ont toujours pris part aux migrations, leur participation a rarement été visible et encore moins mise en valeur par les historiens

Une histoire souterraine hors de l'histoire qui les envisageait seulement comme victimes

L’heure est donc venue de retracer la part diversifiée que les femmes ont prise dans les migrations, mais l'histoire des femmes migrantes n'est encore qu'à ses premiers balbutiements. Une pionnière, Donna Gabaccia, a établi dès 1989 une bibliographie de 300 pages sur les femmes migrantes aux Etats-Unis mais les travaux d'histoire y sont très minoritaires par rapport aux autres disciplines.
En effet, si les femmes migrantes sont l'objet de nombreux éclairages sociologiques, psychologiques ou même médicaux, leur histoire n'a, jusqu'à présent, fait l'objet que de très peu d'études. Ce n'est pas étonnant si on pense que cette histoire se situe au point de rencontre de trois domaines historiques ayant eux-mêmes émergé récemment : l'histoire des pauvres, l'histoire de l'immigration et l'histoire des femmes, trois domaines qui ne figurent encore qu’en pointillés dans les cursus classiques d’histoire.
Le cadre théorique de l'histoire des femmes migrantes se situe donc à l'intersection de l'histoire de classe, de genre et de race, où les dominations possibles se superposent, la femme riche et blanche ayant des possibilités de domination supérieures à la femme pauvre provenant d'un pays ayant été colonisé. À moyen terme, le Groupe d'étude sur l'histoire de l'immigration et le GIEF de l'ULB comptent mettre sur pied un réseau européen qui se penchera sur l'histoire des migrations de femmes aussi bien vers l'Europe qu'à partir de l'Europe et qu'à l'intérieur de l'Europe. L'étude de ces trois aspects est nécessaire à une étude qui se veut comparatiste, tant dans le temps que dans les formes que ces migrations de femmes ont prises. A terme nous voulons donc étudier tant l'effet " push ", qui a obligé des femmes à quitter l'Europe (ou certaines régions d'Europe) que l'effet " pull " qui a attiré d'autres femmes en Europe. A ce titre, la migration des femmes européennes vers les Amériques, l'Afrique ou l'Australie nous intéresse d'un point de vue de l'histoire européenne pour comprendre quels sont les éléments - religieux, économiques, sociaux, voire politiques- qui les ont motivées à partir. Ainsi nous sommes hautement intéressées par ces femmes irlandaises qui, au XIXe siècle, quittent nombreuses leur pays via le port de Cork, pour aller se marier avec des inconnus (souvent d'ex-bagnards) en Australie. Comprendre leurs mobiles serait bien évidemment se pencher aussi sur la détresse économique et sociale de l'Irlande au XIXe siècle et découvrir quels étaient les attraits de la situation matrimoniale vers laquelle elles partaient.
Nous n'avons pu jusqu'à présent intégrer pleinement à la première phase de nos travaux cette dimension des Européennes quittant l'Europe mais elle reste présente dans nos projets.

Des sources et une méthodologie spécifiques


Nous avons finalement centré nos travaux sur une approche méthodologique des difficultés de l'enquête historique sur les femmes migrantes, et sur l'étude d'un certain nombre de cas. La question qui traverse en effet tous les exposés est bien celle des sources et de la méthode. Si les sources orales sont fondamentales dans les enquêtes actuelles, elles manquent cruellement pour les périodes plus reculées où il n'y a plus de protagonistes en vie. D'un point de vue méthodologique, l'histoire des femmes migrantes oblige les historien(ne)s à faire preuve d'inventivité et d'innovation. En effet, les femmes ont toujours participé aux migrations mais elles sont absentes d'un grand nombre de sources "classiques", ce qui oblige donc à en " pressurer " d'autres pour les rendre visibles.
Dans le volume que nous avons récemment publié(1) Sarah Losego a montré brillamment comment des dossiers de naturalisation peuvent nous éclairer sur l'histoire de femmes migrantes. D'autres sources pour l'histoire des femmes migrantes sont les enquêtes parlementaires, des sources notariales, des archives judiciaires, des documents d'entreprises ou de missions religieuses, des témoignages, de la correspondance privée. Certaines oeuvres de fiction elles-mêmes devraient être prises en compte pour retracer l'histoire des femmes migrantes. Ainsi la nouvelle de Leonardo Sciascia, intitulée "L'examen" met en scène des recruteurs suisses sillonnant la Sicile dans les années 1960, à la recherche de jeunes filles aux doigts fins et habiles, qu'ils entendent embaucher pour l'industrie helvétique de précision. Comme pour toute histoire des femmes, on ne connaît généralement l'histoire des migrantes que par des documents que des hommes ont produits. Si pour le moyen-âge notre connaissance des femmes est irrémédiablement liée au regard lointain des hommes sur les femmes (les documents émanent la plupart du temps de médecins, juristes ou théologiens qui, étant souvent des clercs, ne peuvent même pas approcher les femmes), l'histoire des migrantes n'échappe pas à ce schéma. Les rares sources historiques les concernant ( conventions bilatérales, de sécurité sociale, articles de presse, photos) sont produites très généralement et très longtemps par des hommes.
Les migrations de femmes apparaissent en outre souvent comme suspectes tant il est clair que leur place est au sein de la famille. Le simple fait, pour une femme, de se déplacer seule apparaît souvent, dans le contexte de l'époque, comme dangereux. L'émigrante est perçue comme une proie facile pour les rabatteurs de tous genre ; le spectre de la prostitution est toujours sous-jacent et fait naître un contrôle soutenu. Mais même dans ce cas, les sources ne sont pas aussi généreuses qu'on pourrait le croire : ainsi, dans ses travaux sur les prostituées étrangères à Bruxelles au XIXe siècle , Sophie De Schaepdrijver s'est basée sur les archives de police mais elle a dû procéder à divers croisements : les archives donnaient l'adresse des bordels et à ces adresses on trouvait les coordonnées des filles. C'est à de telles "gymnastiques" que l'on doit fréquemment procéder pour approcher l'histoire des femmes migrantes.
Ainsi pour aborder la condition des servantes étrangères, les assurances " gens de maison " peuvent être une source intéressante. En Belgique cette assurance est anonyme (c'est-à-dire qu'il ne faut pas donner le nom de la personne pour laquelle on la contracte et que l'assurance couvrira) et elle est donc très largement contractée par les personnes occupant du personnel domestique, même non déclaré. En cas d'accident, les dossiers du Fonds des accidents de travail révèlent l'identité des victimes et permettent donc de repérer les femmes étrangères, alors même qu'elles ne sont par ailleurs pas officiellement déclarées comme travailleuses.

Un miroir pour comprendre les migrantes d'aujourd'hui

Nous aimerions évidemment que ces travaux d'histoire soient d'utiles références pour comprendre des phénomènes liés aux migrations féminines et qui ne sont pas propres à une époque. Les sociologues ne manqueront pas de relever de nombreuses similitudes entre des situations et stratégies sociales passées et actuelles. Ainsi, par un effet évident de miroir, on saisira rapidement que les femmes irlandaises partant à l'aventure en Australie pour s'y marier ont à notre époque de nombreuses correspondantes en ces femmes bulgares, ukrainiennes, africaines ou Sud-américaines qui comptent aussi sur un mariage (avec un Européen cette fois) pour améliorer leur statut social et espèrent ainsi garantir à leur progéniture (existante ou future) un avenir meilleur. L'étude des femmes d'émigrés restées dans leurs villages italiens au XIXe (les " veuves blanches ") trouve un écho évident dans la situation actuelle des Marocaines restées sans hommes dans les montagnes de Taourirt, une vie en suspens dont les hommes sont absents mais qui ne peut se résumer aux seuls aspects négatifs de la dislocation familiale, parce qu'elle est aussi, dans une certaine mesure émancipatrice.
Quant à l'étude des oeuvres de protection des jeunes servantes, ceux qui imaginent la réalité qu'elle décrit pour le XIXème siècle comme définitivement et heureusement dépassée, devront se pencher sur la situation des jeunes migrantes rurales qui arrivent aujourd'hui dans
les mégapoles chinoises, pour découvrir qu'un " Club des femmes migrantes " tente actuellement de limiter leur surexploitation et le harcèlement sexuel dont elles sont l'objet, absolument comme au XIXème siècle en Europe.


L'émigration/émancipation ?


L'équation est loin d'être automatique. Mais certaines femmes trouvent leur émancipation dans le départ de leur mari (ce n'est pas automatique car le contrôle social de la famille peut rester étroit) et d'autres peuvent la trouver en émigrant et spécialement lorsqu'elles sont autonomes financièrement, que ce sont elles qui partent en pionnières et font venir leur mari ou quand elles assument une part des dépenses familiales. L'exemple des ouvrières espagnoles au travail dans des usines allemandes, développé par Monika Mattes, nous montre qu'une situation a priori subordonnée peut finalement générer une conscience de classe et des actions collectives qui révèlent chez certaines migrantes des capacités d'organisation et de résistance insoupçonnées. La grève des six cents ouvrières espagnoles de la fabrique de biscuits Bahlsen, qui se solde par trois cent cinquante licenciements, pourrait être utilement comparée à celle que menèrent en Belgique les ouvrières de la Fabrique Nationale d'Herstal, elles aussi pour beaucoup immigrées et qui s'étaient mobilisées autour du mot d'ordre" A travail égal, salaire égal ". Mais il n'est pas sûr, par ailleurs, que ces farouches grévistes aient réussi pour autant à bouleverser la dissymétrie des rapports de genre dans leur sphère privée.
Les structures de genre ne sont pas automatiquement remises en cause par les migrations mais elles le sont parfois. Les niches d'activités spécifiquement réservées aux femmes migrantes (services domestiques, petit commerce, soins aux personnes, services sexuels) sont certes des emplois dévalorisés mais, même dans le cas décrit ici par Daniela Perco, celui des nourrices qui vendent leur lait pour les enfants des classes dominantes, la migration peut être l'occasion pour ces femmes de découvrir un autre milieu géographique et social, d'autres horizons, d'autres valeurs, sans que cela ait été leur but initial.
La migration féminine peut donc exacerber la dépendance de certaines mais être libératrice pour d'autres et elle peut finalement changer, peu ou prou, les rapports de genre au sein du couple et de la famille.

Des questions spécifiques à la migration féminine

Parmi les spécificités de la migration féminine, on retiendra la proportion plus grande de femmes que d'hommes louant leurs services sexuels et la présence de questions qui se posent en d'autres termes pour les femmes que pour les hommes. Hommes ou femmes, les migrants qui ont des enfants souffrent de ne pouvoir dans certains cas les emmener avec eux. Mais les mères ayant laissé des enfants au pays ressentent sans doute différemment des hommes cette déchirure. Daniela Perco, dans son article sur les nourrices aux XIXe et XXe siècles, pose avec acuité cette question : " Comment peut-on être mère à distance ? ".
Comment peut-on aussi organiser simultanément deux " chez soi " ? Cette question, les femmes migrantes, faisant des projets à la fois pour ici et là-bas, se la sont posée très concrètement. Pour les migrantes portugaises en France, Carolina Leite nous a donné à ce propos leurs réponses concernant ces deux foyers dont elles supervisent la construction ou l'aménagement simultané alors que l'espace les sépare. De même le lien très spécifique que les femmes migrantes entretiennent à la nourriture ne fait que commencer à être étudié dans une perspective historique. Les " qualités " généralement exigées des femmes migrantes sont différentes de celles exigées des hommes. Certes elles doivent, comme eux, être robustes et saines, mais en outre on exige d'elles une moralité irréprochable et un aimable caractère. Par ailleurs, lors de crises, si le marché du travail se ferme aux hommes étrangers il reste néanmoins ouvert aux femmes étrangères, par exemple pour y exercer comme domestiques, gardes-malades ou infirmières.

D'importantes prospectives


Bien d'autres sujets, à peine abordés aujourd'hui sont promis à des études historiques. Les formes et les motivations des migrations féminines sont extrêmement variées, allant des migrations économiques classiques aux migrations matrimoniales (qui peuvent elles-mêmes revêtir des formes différentes, on songe notamment au flux d'Européennes qui épousèrent un Anglais ou un Américain à la Libération et s'expatrièrent ), en passant par les migrations missionnaires. La problématique des femmes réfugiées politiques nous semble un sujet prometteur, d'un intérêt tel qu'il sera très probablement l'objet à part entière d'un autre séminaire conjoint du Groupe d'étude sur l'histoire de l'immigration et du GIEF. En effet, ce type de migrations peut sembler à première vue échapper aux questions de méthodologie et de sources spécifiques qui concerneraient plutôt des femmes invisibles socialement et politiquement. Les réfugiées politiques étant des femmes actives, elles auraient dû laisser d'importantes traces historiques. Pourtant l'étude que j'ai réalisée avec mon collègue Jean-Philippe Schreiber et qui aborde, encore superficiellement, cette problématique à travers un cas, celui de la militante juive communiste Yvonne Jospa, montre que même ces migrantes atypiques n'échappent pas complètement à l'invisibilité caractéristique de toutes les migrantes. En nous centrant sur la question des sources et de la méthodologie spécifique de l'étude historique des migrations de femmes, nous avons espèré en tous cas stimuler les historiennes (et les historiens) à aborder davantage cette matière, encore enfouie sous de trop nombreux préjugés. D'ores et déjà, il élargit le questionnement sur les rapports de genre car l'émigrée, si elle est femme, subit aussi un statut qui la distingue clairement, toutes classes confondues, des femmes de la société d'accueil. L'émigration trace une hiérarchie entre les femmes elles-mêmes, qu’il convient d’étudier.
Enfin, si les études sur les sources spécifiques à l'étude de l'histoire des femmes migrantes sont pionnières elles permettent cependant de dégager déjà de premières conclusions. De manière générale, les femmes qui se déplacent sont plutôt jeunes et proviennent le plus souvent de régions rurales. La révolution industrielle, qui a déplacé le flux des richesses de la terre aux villes sort ici pleinement ses effets. Ce qui est valable pour le XIXe siècle l'est encore aujourd'hui, sauf que les aires de migration se sont considérablement étendues. Les migrations mettent donc en présence des femmes urbaines et des femmes rurales et leurs relations influencent les nouvelles venues qui adaptent leur comportement, ce qui peut se répercuter dans leurs relations avec leur milieu d'origine.
La question des motivations est aussi au cœur des recherches historiques sur l'histoire des migrantes. Le simple " besoin économique ", qui demeure un moteur indéniable, est loin de suffire à tout expliquer. On perçoit une gamme nuancée de stratégies sous-jacentes, allant de l'espoir diffus d'une vie meilleure à celui d'échapper au contrôle social, ou à celui de s'émanciper. L'histoire des migrations féminines met en lumière une variété de motivations : les formes d'exil non voulu, non négociable et ressenti douloureusement coexistent avec des stratégies d'éloignement qui restaurent des femmes dans un rôle d'actrices, pleinement responsables de leur vie.


(1) Pour une histoire européenne des femmes migrantes. Sources et méthodes, Anne MORELLI et Eliane GUBIN (éd) Groupe interdisciplinaire d'Etudes sur les Femmes, ULB, Bruxelles 2004, 294 pages.

10 h 15 - 12 h 15 Genre et frontières/Crossing Boundaries.

Discutante : Nancy L. Green Ecole des hautes études en sciences sociales, Centre de recherches historique (Paris, France)

Mary Romero, Arizona State University, School of Justice and Social Inquiry (USA), Motherhood, and the Globalization of Reproduction: The Hidden Costs of Paid Care Work. [La mondialisation du travail reproductif et la maternité. Les coûts cachés de la domesticité dans le monde contemporain].

Contrasting motherhood and childhood in the employer and employee family, the divisions of work and family are revealed as social issues that transcend the purely personal. Both employer and employee families have childcare needs but their purchasing power present completely different options placing the children of domestics at an enormous disadvantage. Stories of domestic service from the perspective of the daughter of a live-in maid accentuate the unequal distribution of reproductive labor at the societal level. Using her narrative of growing up in the employer's house during the school year and living in Mexico in the summer, she juxtaposes the processes of globalizing reproduction and the changes in motherhood in her family. The system of privileges available to employers and employees determines childrearing and socialization while reproducing class differences. Immigrant mothers employed as live-in nannies are restricted to the most basic "mothering" agenda of sending money home to house, feed, and clothe their children; while they simultaneously, sell their labor as caregivers to middle-class women who engage in intensive mothering. Under these conditions, "quality" time and mother-child activities that enhance the cognitive development becomes a privilege, not a right. Social scientists have restricted their analysis to the family unit which does not capture the ramifications that poorly paid domestic labor and childcare have on other sectors of society, particularly workers' families. Caring for children is not priceless in our society but usually relies on the cheapest labor available. Immigration policies and declining welfare benefits assure professionals of a ready pool of low-wage workers. Childcare policies and programs that are not inclusive of all mothers, regardless of class, race, or citizenship, maintain a system of privileges that relies on subordination.


Dolores E. Janiewski, Victoria University of Wellington, School of History, Philosophy, Politics and International Relations (New Zeland)
American Possession, American Dispossession: Gender, American Frontiers and the Interaction between Indigenous Peoples and Europeans in the 19th Century US [Spoliations américaines. Genre, frontières américaines et interactions entre Européens et populations indigènes au XIXe siècle.]

Usually discussed in American historiography as the settlement of the ‘West’ separated from Immigrant history, the U.S. is the result of a series of settler colonies populated by Euroamerican emigrants who spread across the continent. These emigrants entered ‘stateless’ areas displacing the indigenous inhabitants. These American settler states thus began the process to statehood once 5,000 white male adult settlers had established their residence in a specific location so that an officially recognised territory could be organised. This paper is the product of a research project aimed at rethinking the U.S. as a continental and colonizing power in the l9th Century as the structural platform for its imperial and global reach in the 20th & 2lst centuries. Rather than the ‘American freedom, American slavery’ paradox analysed by Edmund Morgan, this is a study of ‘American possession, American dispossession’. Gender, as well as race, are both products of this history.
My research looks at Euroamerican settler immigrants and the indigenous Indian refugees or coerced emigrants displaced by the arrival of the settlers during the process of consolidation in which indigenous patterns of gender relations began to be transformed through the actions of the representatives of settler society--missionaries, the military, government agents, and the settlers themselves-- into ‘frontier’ societies and then into settler states with private property, patriarchal gender relationships, and ‘race’ relationships which denied the indigenous peoples citizenship in the new settler state.
Thus it will examine the ‘side’ of the frontier unnoticed by Frederick Jackson Turner with his references to ‘free’ land and the expansion of democracy as the product of the ‘frontier’ and build upon previous publications including ‘Gendering, Racializing and Classifying: Settler Colonization in the United States, l590-l990,’ in Daiva Stasiulis and Nira Yuval-Davis,(eds) Unsettling Settler Societies: Articulations of Gender, Race, Ethnicity and Class , ‘Gendered Colonialism: The ‘Woman Question’ in Settler Society’ in Ruth Roach Pierson and Nupur Chaudhuri, (eds). Nation, Empire, Colony: Historicizing Gender and Race, and ‘Making Women into Farmers’ Wives: The Native American Experience in the Inland Northwest’, in Wava G. Haney and Jane B. Knowles (eds), Women and Farming: Changing Roles, Changing Structures.
The paper will discuss how the process of frontier and settler transformation gave Euroamerican women greater rights vis a vis men while simultaneously stripping Indian women of their freedoms through a process of coerced domestication. Similarly settler men gain new status as landowners while Indian men lost their position as hunters and warriors. The unevenness of this kind of gender transformation was replicated in the racialised society that emerged simultaneously in which race functioned as a marker of power and of location as settler or uprooted migrant. Thus the ‘West’ could be described by Turner as the crucible of American democracy and become the region where Euroamerican women first gained full political rights while also being the area where indigenous women and men lost their their way of life, their livelihood and their ability to live outside the market, the U.S. state and the gender patterns associated with both.
These people in the act of becoming settlers used the term ‘emigrants’ to describe themselves but the historiography on the process of settler colonization in the trans-Mississippi, as is often the case with the kind of specialization that divides history into diverse fields, has tended to forget this self-identification. Calling their field ‘Western history’, many scholars operate within a teleological paradigm that reads the history back from the establishment of self-governing settler colonies rather than recognizing the emigrant status of those who entered these already occupied territories. This history diverged from the themes and emphases of ‘Immigrant History’ as studied in the U.S. with its focus on European immigrants, who arrived in the already self-governing states and cities of the l9th century U.S.
The issue of power is one of those salient elements that can be analysed once the teleological distortions have been removed. Turner’s ‘frontier thesis’ needs to be reconceived as the history of Anglo-American emigrants who used military force and technological advantage so successfully as to erase their status as immigrants. After this historical revision, the actions of the modern-day U.S., itself now politically guided by the manly heirs to two settlers colonies --Texas and Wyoming—can be better understood as deeply rooted in the history of a nation state composed of settler colonies that grew out of a largely forgotten history of emigration, invasion and military occupation.
This revises the usual approach to immigrant history that focuses on the growth of ethnic enclaves and assumes the immigrant as relatively powerless, poor, and thus needing to accommodate to the political forms and police power of a nation state and the dominant economic, cultural, and social context established by those who arrived earlier. In this case it is those who arrived earlier who made the sorts of cultural and material concessions that ‘immigrant history’ usually attributed to the later arrivals. This process then produces a new emigration, in turn, by displaced Indian peoples, a process already underway in the l600s, as the beginnings of a diaspora, a coerced emigration of many uprooted peoples into smaller and smaller enclaves far away from their homelands. This examination, thus raises questions not included within the conventional scope of immigrant history. Rather than ethnic identity, usually assumed to become gradually less important this case shows how the boundaries of ‘race’ grew more rigid as racialised cultures emerged from this kind of settler emigration/immigration while gender relations altered on both sides of the frontier.

Terry-Ann Jones, Fairfield University, Department of Sociology and Anthropology (USA), Changing Gender Roles: West Indian Migration to the United States and Canada, [Transformation des rôles genrés. Migrations caraibéennes vers les Etats-Unis et le Canada dans le monde contemporain.] [Texte]

Introduction


Migration is embedded in West Indian history to such an extent that international movement has become a part of the consciousness of the people. Emigration from the West Indies and the transnational flows that have developed between the islands and their primary destination countries have become not only an economic strategy for West Indians, but also a culturally and socially desirable practice. Evidence of this is reflected not only in the large numbers of West Indians who emigrate annually, but also in the large percentage who express the desire to emigrate. Migration has become a channel through which Caribbean people have been able to achieve socioeconomic mobility. With the development of a capitalist economy headed by the elite, migration, according to Thomas-Hope (1998:190), “was one of the few means open to the masses to improve their material circumstances and thereby also enhance their social status.” Migration was for many West Indians a means by which they could escape the hierarchical structure of their home country and realize higher socioeconomic status through improved opportunities for education and employment.
Patterns of emigration have changed over the course of West Indian history, and have usually been related to such factors as the colonial past as well as contemporary economic opportunities. While there has been constant demand for West Indian labor in the United States and Canada throughout the second half of the twentieth century, this demand has shifted between sectors. Much of the labor demand has been concentrated in low-skilled fields such as farm working or domestic work. More recently the trend has shifted toward health care to such an extent that there is an overrepresentation of West Indians, particularly women, in health care professions in the United States and Canada. While health care professions are not gender-specific, most West Indian nurses and nurse’s aides tend to be women. Similarly, farm workers are predominantly men, while domestic workers are almost exclusively women. This paper examines the changing roles of men and women in West Indian migration to the United States and Canada during the second half of the twentieth century. A central question of this paper is: to what extent do West Indian women adopt a leadership position when migrating to the United States and Canada? What are the implications of this shift in domestic power relations? Does the changing role of migrant women stimulate greater autonomy for women in the household?


Background


During the mid-1950s female West Indian migrants to the United States and Canada were employed as domestic workers under a program through which they were obligated to work for a one year period, after which they could apply for permanent residency and sponsor close relatives. Beginning in 1955, the Canadian government admitted 100 Jamaican and Barbadian domestic workers annually. These workers were all single women age 21 to 35 years. Under this policy, West Indian domestic workers were required to work for one year as domestics, and they were eligible to apply for citizenship after living in Canada for five years. They were also able to sponsor close relatives to join them in Canada. This system proved to be a means by which many young women, some of them educated, were able to enter Canada and provide their families with access to Canada and its wealth of opportunities. After their mandatory year of domestic work, many of these West Indian women sought training and employment in professions such as nursing. By 1960 the number of West Indian women permitted to enter Canada as domestic workers was raised to an annual total of almost three hundred and women from other West Indian islands were also included..
Major changes in Canadian immigration policy in 1962 enabled more black foreigners to enter the country. The new policies emphasized education and employment potential, and proclaimed that each immigrant would be judged “entirely on his own merit, without regard to race, colour, national origin, or the country from which he comes.” Following these policy changes black immigrants, especially West Indians, began to arrive in large numbers. The employment opportunities were attractive to both single and married women who took advantage of the high demand for women in domestic, child care, and nursing positions. Although in some cases the women were joined by their families, this livelihood strategy in some cases led to the fragmentation of the family. The result is gender imbalance among West Indian immigrants. For example, of Jamaicans living in the United States, 56.3 percent are female and 43.7 percent are male. In contrast, among the total American population 50.9 percent are female and 49.1 percent are male.
More recently, West Indian women have continued to migrate in search of employment, leaving spouses and children in the care of other family members at home. Remittances are sent home to support the children and their caregivers, usually aunts, uncles, or grandparents. Although this is often initially a temporary move, many of these immigrant women remain permanently, later sponsoring their children and spouses to migrate once they have settled in the destination country. Women, particularly those from the Caribbean, have tended to lead the family migration process because of the relative ease with which they find employment. The demand for female-dominated professions such as elementary school teachers, nurses, and domestic workers also facilitates this gender bias. This paper will explore these trends in West Indian migration to the United States and Canada, and the changing gender roles that accompanied them.

Elizabeth Thomas-Hope, “Globalization and the Development of a Caribbean Migration Culture.” in Mary Chamberlain, ed. Caribbean Migration: Globalised Identities. New York: Routledge, 1998.
Robin W. Winks, The Blacks in Canada: A History. Second Edition. Montreal and Kingston: McGill-Queen’s University Press, 1997
Winks 1997:443
U.S. Bureau of the Census, Public Use Microdata Sample, Florida, Five Percent, 2000 Census of Population, Washington, D.C. 2003.
U.S. Bureau of the Census, Public Use Microdata Sample, Florida, Five Percent, 2000 Census of Population, Washington, D.C. 2003.
Nancy Foner, “Race and Color: Jamaican Migrants in London and New York City.” International Migration Review. Vol. 19, No. 4. 1985.

Florence Mae Waldron, Franklin & Marshall College (USA), The Gendered Worlds of New England's Quebecois Migrants, 1870-1930, [Les mondes genrés des Québécois de la Nouvelle Angleterre (1870-1930)]. [Texte]

As many as a million French Canadians - one-third of the province's population - migrated from Quebec to New England from the mid-nineteenth century through the early twentieth century. Nearly three-quarters of them made this journey between the years 1870-1930. While men and women traveled the same routes and settled in the same cities, the two sexes experienced migration in very different ways. The migrants' beliefs regarding what it meant to be a man or a woman shaped every aspect of the migration process; most notably, these beliefs colored their perceptions of life in the United States and determined how individuals acculturated to their new lives south of the U.S.-Canadian border.
This presentation will consider some of the ways in which the migrants' understandings of gender influenced their decisions regarding whether, and how, to become “American” and/or remain “French Canadian.” The disparate ways in which the migrants viewed American manhood versus American womanhood highlight the gendered distinctions in the migrants' understandings of the links between national identity and individual identity. For these migrants, becoming and being an American meant very different things for men and women. Because of this, French Canadian men and women had very different perceptions of the opportunities life in New England afforded them. To French Canadian male migrants, American manhood, defined largely in civic terms, involved many of the same qualities that made for a good French Canadian man. As a result, men's choices regarding how to adapt to life in the United States did not necessarily redefine their identity as men.
In contrast, French Canadian migrant women found it much more difficult to balance their identities as French Canadians with the possibility of being American. Both the migrant communities and individual migrants defined womanhood in terms that were more cultural than civic. Furthermore, their impressions of American women ran counter to everything they understood French Canadian femininity to be. As a result, navigating a path between American womanhood and French Canadian womanhood often meant choosing between two diametrically opposed understandings of what it meant to be a woman. Not surprisingly, tensions often resulted from the choices individual migrants made; in particular, the stark contrasts between the migrants' definitions of American and French Canadian womanhood meant that women's choices carried much graver consequences, both for individual women and for the migrant population as a whole, than men's choices did.

10h15-12h15 Atelier : Le genre des migrations universitaires/Academic migrations (Salle 131, bat D, site Jourdan)

Présidence et discussion Natalia Tikhonov (Institut des hautes études européennes, Robert Schuman, Strasbourg)

Pierre Moulinier, Les premières femmes docteurs reçues à la Faculté de médecine de Paris (1870-1914) : des étrangères qui ne passent pas inaperçues. [The First Females Doctors Graduated from the Paris University (1870-1914) : Unforgetable Foreigners] [Texte]

Boris Czerny, Université de Caen, L’association des étudiants russes en France au début du XXe siècle [The Russian Students’ Association in Paris at the beginning of the XXth century] [Texte]

Nazarska Georgetta, Université de Sofia (Bulg), The University Education and Bulgarian Women. [Les femmes bulgares et les formations universitaires] [Texte]

Vinciane Godfrind, Université catholique de Louvain, «Les étudiantes russes à l’Université libre de Bruxelles de 1905 à 1914». [Russian women at the Free University of Brussels, 1905-1914]. [Texte]

Le sujet que je souhaite aborder est novateur pour la Belgique. En effet, les étudiantes russes sont perdues au milieu des travaux consacrés aux premières étudiantes dans les universités belges. Certains travaux ont mis l’accent quantitatif sur leur présence, notamment pour l’Université de Liège, mais jamais une étude qualitative n’a été réalisée.
Le sujet serait présenté en 4 parties.
D’abord, une brève présentation des sources entamerait notre propos ; ces sources sont lacunaires et cela induit certaines limites.
La deuxième partie serait consacrée à un survol de la situation politique et sociale en Belgique (l’importance du socialisme est une des clés d’explication), de l’immigration dans ce pays et des relations Belgique/ Russie qui pourraient inciter à choisir la Belgique comme terre d’accueil.
La troisième partie abordera les données biographiques des étudiantes russes. Nous observerons l’importante migration venue de la Russie d’Europe, principalement des villes, parmi laquelle on notera une forte présence de Juives. Nous parlerons ensuite des principaux quartiers bruxellois où elles ont résidé et qui sont soumis à une influence migratoire de l’Est et des Juifs.
Nous présenterons leur origine sociale et signalerons les membres de leurs familles qui les ont accompagnées en Belgique. Nous mentionnerons les mariages et leurs conséquences (naissance des enfants, arrêt des études, séparations…). Enfin, nous constaterons les peu nombreuses participations aux mouvements révolutionnaires et aux meetings socialistes.
Les études réalisées nous occuperont essentiellement. Après avoir émis des généralités (âge des études, année d’entrée à l’université, diplômes obtenus…), nous aborderons plus en détails le choix des études de médecine et de sciences naturelles. Nous nous attarderons sur les sciences sociales, cas particulier à l’Université libre de Bruxelles.
Nos propos seront illustrés par des cas concrets, tels que des témoignages de contemporains et des informations dénichées dans les dossiers de la police des étrangers.
Un parallèle avec la situation à l’Université de Liège sera effectué.
Enfin la dernière partie sera une comparaison avec des données recueillies pour l’Allemagne et la Suisse. Nous pourrons observer des similitudes entre les trois pays (origine géographique, choix des études) mais avec des particularités propres à l’Université Libre de Bruxelles.

 

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