Histoire/Genre/Migration
Sessions du Lundi 27 mars matin Ecole Normale Supérieure,
grande salle, Ens, 48 boulevard Jourdan 75014 Paris.
Résumé
9 h – 10 h Approches théoriques/ Theoretical Approaches
• Philippe Rygiel,
Introduction
• Donna
R. Gabaccia, Immigration History Research Center, University of Minnesota
(USA), Gender and Migration: History in an Interdisciplinary Field of Study,
[Genre et Migration : un objet d’histoire au carrefour de plusieurs
disciplines]
Like the study of immigrant women that preceded and still partially
overlaps with it, scholarship on gender and migration has developed over
the past two decades not only in history but in a wide variety of
disciplines. The 1990s were a period of intensive ìinterdisciplinary
field
buildingî for those generally interested generally in migration; for
those
interested in gender and migration more specifically a cross-disciplinary
dialogue had emerged already by the mid-1990s. By the late 1990s it was
beginning to generate theoretical work that promised as way to begin to
link hundreds of specialized studies of particular migrant groups in
particular times and places.
Still, specialists in some disciplines (notably anthropology and
the less-quantitatively-oriented researchers in sociology) were far more
active participants in this dialogue than were specialists in other
disciplines, such as political science or economics). Unlike these more
quantitatively-oriented disciplines, historians were relatively open to
gender analysis and generated a great deal of work on gender and migration.
In this paper I ask and attempt to answer three related questions. To what
extent have historians participated in the cross-disciplinary discussions
of gender and migration? What might historians best contribute to this
dialogue and how? Finally, what can historians expect to gain by drawing
on
work on gender and migration in other disciplines?
• Anne Morelli, Université libre de Bruxelles (Belgique), Jalons
pour une histoire des femmes migrantes en Europe [Toward
an history of female migrants in Europe]
Jalons pour une histoire des femmes migrantes en Europe
La féminisation actuelle des migrations est largement reconnue mais
on oublie trop souvent que les migrations du passé ont, elles aussi,
touché les femmes. Que ce soit parce qu'elles encourageaient ou subissaient
les migrations des hommes ou parce qu'elles-mêmes voyageaient, les
femmes ont été concernées par les départs. Mais
si les femmes ont toujours pris part aux migrations, leur participation
a rarement été visible et encore moins mise en valeur par
les historiens
Une histoire souterraine hors de l'histoire qui les envisageait seulement
comme victimes
L’heure est donc venue de retracer la part diversifiée que
les femmes ont prise dans les migrations, mais l'histoire des femmes migrantes
n'est encore qu'à ses premiers balbutiements. Une pionnière,
Donna Gabaccia, a établi dès 1989 une bibliographie de 300
pages sur les femmes migrantes aux Etats-Unis mais les travaux d'histoire
y sont très minoritaires par rapport aux autres disciplines.
En effet, si les femmes migrantes sont l'objet de nombreux éclairages
sociologiques, psychologiques ou même médicaux, leur histoire
n'a, jusqu'à présent, fait l'objet que de très peu
d'études. Ce n'est pas étonnant si on pense que cette histoire
se situe au point de rencontre de trois domaines historiques ayant eux-mêmes
émergé récemment : l'histoire des pauvres, l'histoire
de l'immigration et l'histoire des femmes, trois domaines qui ne figurent
encore qu’en pointillés dans les cursus classiques d’histoire.
Le cadre théorique de l'histoire des femmes migrantes se situe donc
à l'intersection de l'histoire de classe, de genre et de race, où
les dominations possibles se superposent, la femme riche et blanche ayant
des possibilités de domination supérieures à la femme
pauvre provenant d'un pays ayant été colonisé. À
moyen terme, le Groupe d'étude sur l'histoire de l'immigration et
le GIEF de l'ULB comptent mettre sur pied un réseau européen
qui se penchera sur l'histoire des migrations de femmes aussi bien vers
l'Europe qu'à partir de l'Europe et qu'à l'intérieur
de l'Europe. L'étude de ces trois aspects est nécessaire à
une étude qui se veut comparatiste, tant dans le temps que dans les
formes que ces migrations de femmes ont prises. A terme nous voulons donc
étudier tant l'effet " push ", qui a obligé des
femmes à quitter l'Europe (ou certaines régions d'Europe)
que l'effet " pull " qui a attiré d'autres femmes en Europe.
A ce titre, la migration des femmes européennes vers les Amériques,
l'Afrique ou l'Australie nous intéresse d'un point de vue de l'histoire
européenne pour comprendre quels sont les éléments
- religieux, économiques, sociaux, voire politiques- qui les ont
motivées à partir. Ainsi nous sommes hautement intéressées
par ces femmes irlandaises qui, au XIXe siècle, quittent nombreuses
leur pays via le port de Cork, pour aller se marier avec des inconnus (souvent
d'ex-bagnards) en Australie. Comprendre leurs mobiles serait bien évidemment
se pencher aussi sur la détresse économique et sociale de
l'Irlande au XIXe siècle et découvrir quels étaient
les attraits de la situation matrimoniale vers laquelle elles partaient.
Nous n'avons pu jusqu'à présent intégrer pleinement
à la première phase de nos travaux cette dimension des Européennes
quittant l'Europe mais elle reste présente dans nos projets.
Des sources et une méthodologie spécifiques
Nous avons finalement centré nos travaux sur une approche méthodologique
des difficultés de l'enquête historique sur les femmes migrantes,
et sur l'étude d'un certain nombre de cas. La question qui traverse
en effet tous les exposés est bien celle des sources et de la méthode.
Si les sources orales sont fondamentales dans les enquêtes actuelles,
elles manquent cruellement pour les périodes plus reculées
où il n'y a plus de protagonistes en vie. D'un point de vue méthodologique,
l'histoire des femmes migrantes oblige les historien(ne)s à faire
preuve d'inventivité et d'innovation. En effet, les femmes ont toujours
participé aux migrations mais elles sont absentes d'un grand nombre
de sources "classiques", ce qui oblige donc à en "
pressurer " d'autres pour les rendre visibles.
Dans le volume que nous avons récemment publié(1) Sarah Losego
a montré brillamment comment des dossiers de naturalisation peuvent
nous éclairer sur l'histoire de femmes migrantes. D'autres sources
pour l'histoire des femmes migrantes sont les enquêtes parlementaires,
des sources notariales, des archives judiciaires, des documents d'entreprises
ou de missions religieuses, des témoignages, de la correspondance
privée. Certaines oeuvres de fiction elles-mêmes devraient
être prises en compte pour retracer l'histoire des femmes migrantes.
Ainsi la nouvelle de Leonardo Sciascia, intitulée "L'examen"
met en scène des recruteurs suisses sillonnant la Sicile dans les
années 1960, à la recherche de jeunes filles aux doigts fins
et habiles, qu'ils entendent embaucher pour l'industrie helvétique
de précision. Comme pour toute histoire des femmes, on ne connaît
généralement l'histoire des migrantes que par des documents
que des hommes ont produits. Si pour le moyen-âge notre connaissance
des femmes est irrémédiablement liée au regard lointain
des hommes sur les femmes (les documents émanent la plupart du temps
de médecins, juristes ou théologiens qui, étant souvent
des clercs, ne peuvent même pas approcher les femmes), l'histoire
des migrantes n'échappe pas à ce schéma. Les rares
sources historiques les concernant ( conventions bilatérales, de
sécurité sociale, articles de presse, photos) sont produites
très généralement et très longtemps par des
hommes.
Les migrations de femmes apparaissent en outre souvent comme suspectes tant
il est clair que leur place est au sein de la famille. Le simple fait, pour
une femme, de se déplacer seule apparaît souvent, dans le contexte
de l'époque, comme dangereux. L'émigrante est perçue
comme une proie facile pour les rabatteurs de tous genre ; le spectre de
la prostitution est toujours sous-jacent et fait naître un contrôle
soutenu. Mais même dans ce cas, les sources ne sont pas aussi généreuses
qu'on pourrait le croire : ainsi, dans ses travaux sur les prostituées
étrangères à Bruxelles au XIXe siècle , Sophie
De Schaepdrijver s'est basée sur les archives de police mais elle
a dû procéder à divers croisements : les archives donnaient
l'adresse des bordels et à ces adresses on trouvait les coordonnées
des filles. C'est à de telles "gymnastiques" que l'on doit
fréquemment procéder pour approcher l'histoire des femmes
migrantes.
Ainsi pour aborder la condition des servantes étrangères,
les assurances " gens de maison " peuvent être une source
intéressante. En Belgique cette assurance est anonyme (c'est-à-dire
qu'il ne faut pas donner le nom de la personne pour laquelle on la contracte
et que l'assurance couvrira) et elle est donc très largement contractée
par les personnes occupant du personnel domestique, même non déclaré.
En cas d'accident, les dossiers du Fonds des accidents de travail révèlent
l'identité des victimes et permettent donc de repérer les
femmes étrangères, alors même qu'elles ne sont par ailleurs
pas officiellement déclarées comme travailleuses.
Un miroir pour comprendre les migrantes d'aujourd'hui
Nous aimerions évidemment que ces travaux d'histoire soient d'utiles
références pour comprendre des phénomènes liés
aux migrations féminines et qui ne sont pas propres à une
époque. Les sociologues ne manqueront pas de relever de nombreuses
similitudes entre des situations et stratégies sociales passées
et actuelles. Ainsi, par un effet évident de miroir, on saisira rapidement
que les femmes irlandaises partant à l'aventure en Australie pour
s'y marier ont à notre époque de nombreuses correspondantes
en ces femmes bulgares, ukrainiennes, africaines ou Sud-américaines
qui comptent aussi sur un mariage (avec un Européen cette fois) pour
améliorer leur statut social et espèrent ainsi garantir à
leur progéniture (existante ou future) un avenir meilleur. L'étude
des femmes d'émigrés restées dans leurs villages italiens
au XIXe (les " veuves blanches ") trouve un écho évident
dans la situation actuelle des Marocaines restées sans hommes dans
les montagnes de Taourirt, une vie en suspens dont les hommes sont absents
mais qui ne peut se résumer aux seuls aspects négatifs de
la dislocation familiale, parce qu'elle est aussi, dans une certaine mesure
émancipatrice.
Quant à l'étude des oeuvres de protection des jeunes servantes,
ceux qui imaginent la réalité qu'elle décrit pour le
XIXème siècle comme définitivement et heureusement
dépassée, devront se pencher sur la situation des jeunes migrantes
rurales qui arrivent aujourd'hui dans
les mégapoles chinoises, pour découvrir qu'un " Club
des femmes migrantes " tente actuellement de limiter leur surexploitation
et le harcèlement sexuel dont elles sont l'objet, absolument comme
au XIXème siècle en Europe.
L'émigration/émancipation ?
L'équation est loin d'être automatique. Mais certaines femmes
trouvent leur émancipation dans le départ de leur mari (ce
n'est pas automatique car le contrôle social de la famille peut rester
étroit) et d'autres peuvent la trouver en émigrant et spécialement
lorsqu'elles sont autonomes financièrement, que ce sont elles qui
partent en pionnières et font venir leur mari ou quand elles assument
une part des dépenses familiales. L'exemple des ouvrières
espagnoles au travail dans des usines allemandes, développé
par Monika Mattes, nous montre qu'une situation a priori subordonnée
peut finalement générer une conscience de classe et des actions
collectives qui révèlent chez certaines migrantes des capacités
d'organisation et de résistance insoupçonnées. La grève
des six cents ouvrières espagnoles de la fabrique de biscuits Bahlsen,
qui se solde par trois cent cinquante licenciements, pourrait être
utilement comparée à celle que menèrent en Belgique
les ouvrières de la Fabrique Nationale d'Herstal, elles aussi pour
beaucoup immigrées et qui s'étaient mobilisées autour
du mot d'ordre" A travail égal, salaire égal ".
Mais il n'est pas sûr, par ailleurs, que ces farouches grévistes
aient réussi pour autant à bouleverser la dissymétrie
des rapports de genre dans leur sphère privée.
Les structures de genre ne sont pas automatiquement remises en cause par
les migrations mais elles le sont parfois. Les niches d'activités
spécifiquement réservées aux femmes migrantes (services
domestiques, petit commerce, soins aux personnes, services sexuels) sont
certes des emplois dévalorisés mais, même dans le cas
décrit ici par Daniela Perco, celui des nourrices qui vendent leur
lait pour les enfants des classes dominantes, la migration peut être
l'occasion pour ces femmes de découvrir un autre milieu géographique
et social, d'autres horizons, d'autres valeurs, sans que cela ait été
leur but initial.
La migration féminine peut donc exacerber la dépendance de
certaines mais être libératrice pour d'autres et elle peut
finalement changer, peu ou prou, les rapports de genre au sein du couple
et de la famille.
Des questions spécifiques à la migration féminine
Parmi les spécificités de la migration féminine, on
retiendra la proportion plus grande de femmes que d'hommes louant leurs
services sexuels et la présence de questions qui se posent en d'autres
termes pour les femmes que pour les hommes. Hommes ou femmes, les migrants
qui ont des enfants souffrent de ne pouvoir dans certains cas les emmener
avec eux. Mais les mères ayant laissé des enfants au pays
ressentent sans doute différemment des hommes cette déchirure.
Daniela Perco, dans son article sur les nourrices aux XIXe et XXe siècles,
pose avec acuité cette question : " Comment peut-on être
mère à distance ? ".
Comment peut-on aussi organiser simultanément deux " chez soi
" ? Cette question, les femmes migrantes, faisant des projets à
la fois pour ici et là-bas, se la sont posée très concrètement.
Pour les migrantes portugaises en France, Carolina Leite nous a donné
à ce propos leurs réponses concernant ces deux foyers dont
elles supervisent la construction ou l'aménagement simultané
alors que l'espace les sépare. De même le lien très
spécifique que les femmes migrantes entretiennent à la nourriture
ne fait que commencer à être étudié dans une
perspective historique. Les " qualités " généralement
exigées des femmes migrantes sont différentes de celles exigées
des hommes. Certes elles doivent, comme eux, être robustes et saines,
mais en outre on exige d'elles une moralité irréprochable
et un aimable caractère. Par ailleurs, lors de crises, si le marché
du travail se ferme aux hommes étrangers il reste néanmoins
ouvert aux femmes étrangères, par exemple pour y exercer comme
domestiques, gardes-malades ou infirmières.
D'importantes prospectives
Bien d'autres sujets, à peine abordés aujourd'hui sont promis
à des études historiques. Les formes et les motivations des
migrations féminines sont extrêmement variées, allant
des migrations économiques classiques aux migrations matrimoniales
(qui peuvent elles-mêmes revêtir des formes différentes,
on songe notamment au flux d'Européennes qui épousèrent
un Anglais ou un Américain à la Libération et s'expatrièrent
), en passant par les migrations missionnaires. La problématique
des femmes réfugiées politiques nous semble un sujet prometteur,
d'un intérêt tel qu'il sera très probablement l'objet
à part entière d'un autre séminaire conjoint du Groupe
d'étude sur l'histoire de l'immigration et du GIEF. En effet, ce
type de migrations peut sembler à première vue échapper
aux questions de méthodologie et de sources spécifiques qui
concerneraient plutôt des femmes invisibles socialement et politiquement.
Les réfugiées politiques étant des femmes actives,
elles auraient dû laisser d'importantes traces historiques. Pourtant
l'étude que j'ai réalisée avec mon collègue
Jean-Philippe Schreiber et qui aborde, encore superficiellement, cette problématique
à travers un cas, celui de la militante juive communiste Yvonne Jospa,
montre que même ces migrantes atypiques n'échappent pas complètement
à l'invisibilité caractéristique de toutes les migrantes.
En nous centrant sur la question des sources et de la méthodologie
spécifique de l'étude historique des migrations de femmes,
nous avons espèré en tous cas stimuler les historiennes (et
les historiens) à aborder davantage cette matière, encore
enfouie sous de trop nombreux préjugés. D'ores et déjà,
il élargit le questionnement sur les rapports de genre car l'émigrée,
si elle est femme, subit aussi un statut qui la distingue clairement, toutes
classes confondues, des femmes de la société d'accueil. L'émigration
trace une hiérarchie entre les femmes elles-mêmes, qu’il
convient d’étudier.
Enfin, si les études sur les sources spécifiques à
l'étude de l'histoire des femmes migrantes sont pionnières
elles permettent cependant de dégager déjà de premières
conclusions. De manière générale, les femmes qui se
déplacent sont plutôt jeunes et proviennent le plus souvent
de régions rurales. La révolution industrielle, qui a déplacé
le flux des richesses de la terre aux villes sort ici pleinement ses effets.
Ce qui est valable pour le XIXe siècle l'est encore aujourd'hui,
sauf que les aires de migration se sont considérablement étendues.
Les migrations mettent donc en présence des femmes urbaines et des
femmes rurales et leurs relations influencent les nouvelles venues qui adaptent
leur comportement, ce qui peut se répercuter dans leurs relations
avec leur milieu d'origine.
La question des motivations est aussi au cœur des recherches historiques
sur l'histoire des migrantes. Le simple " besoin économique
", qui demeure un moteur indéniable, est loin de suffire à
tout expliquer. On perçoit une gamme nuancée de stratégies
sous-jacentes, allant de l'espoir diffus d'une vie meilleure à celui
d'échapper au contrôle social, ou à celui de s'émanciper.
L'histoire des migrations féminines met en lumière une variété
de motivations : les formes d'exil non voulu, non négociable et ressenti
douloureusement coexistent avec des stratégies d'éloignement
qui restaurent des femmes dans un rôle d'actrices, pleinement responsables
de leur vie.
(1) Pour une histoire européenne des femmes migrantes. Sources
et méthodes, Anne MORELLI et Eliane GUBIN (éd) Groupe
interdisciplinaire d'Etudes sur les Femmes, ULB, Bruxelles 2004, 294 pages.
10 h 15 - 12 h 15 Genre et frontières/Crossing Boundaries.
Discutante : Nancy L. Green Ecole des
hautes études en sciences sociales, Centre de recherches historique
(Paris, France)
• Mary Romero, Arizona State University, School of Justice and Social Inquiry (USA), Motherhood, and the Globalization of Reproduction: The Hidden Costs of Paid Care Work. [La mondialisation du travail reproductif et la maternité. Les coûts cachés de la domesticité dans le monde contemporain].
Contrasting motherhood and childhood in the employer and employee family,
the divisions of work and family are revealed as social issues that transcend
the purely personal. Both employer and employee families have childcare
needs but their purchasing power present completely different options placing
the children of domestics at an enormous disadvantage. Stories of domestic
service from the perspective of the daughter of a live-in maid accentuate
the unequal distribution of reproductive labor at the societal level. Using
her narrative of growing up in the employer's house during the school year
and living in Mexico in the summer, she juxtaposes the processes of globalizing
reproduction and the changes in motherhood in her family. The system of
privileges available to employers and employees determines childrearing
and socialization while reproducing class differences. Immigrant mothers
employed as live-in nannies are restricted to the most basic "mothering"
agenda of sending money home to house, feed, and clothe their children;
while they simultaneously, sell their labor as caregivers to middle-class
women who engage in intensive mothering. Under these conditions, "quality"
time and mother-child activities that enhance the cognitive development
becomes a privilege, not a right. Social scientists have restricted their
analysis to the family unit which does not capture the ramifications that
poorly paid domestic labor and childcare have on other sectors of society,
particularly workers' families. Caring for children is not priceless in
our society but usually relies on the cheapest labor available. Immigration
policies and declining welfare benefits assure professionals of a ready
pool of low-wage workers. Childcare policies and programs that are not inclusive
of all mothers, regardless of class, race, or citizenship, maintain a system
of privileges that relies on subordination.
•
Dolores E. Janiewski,
Victoria University of Wellington, School of History, Philosophy, Politics
and International Relations (New Zeland)
American Possession, American Dispossession: Gender, American Frontiers
and the Interaction between Indigenous Peoples and Europeans in the 19th
Century US [Spoliations américaines. Genre, frontières
américaines et interactions entre Européens et populations
indigènes au XIXe siècle.]
Usually discussed in American historiography as the settlement of the
‘West’ separated from Immigrant history, the U.S. is the result
of a series of settler colonies populated by Euroamerican emigrants who
spread across the continent. These emigrants entered ‘stateless’
areas displacing the indigenous inhabitants. These American settler states
thus began the process to statehood once 5,000 white male adult settlers
had established their residence in a specific location so that an officially
recognised territory could be organised. This paper is the product of a
research project aimed at rethinking the U.S. as a continental and colonizing
power in the l9th Century as the structural platform for its imperial and
global reach in the 20th & 2lst centuries. Rather than the ‘American
freedom, American slavery’ paradox analysed by Edmund Morgan, this
is a study of ‘American possession, American dispossession’.
Gender, as well as race, are both products of this history.
My research looks at Euroamerican settler immigrants and the indigenous
Indian refugees or coerced emigrants displaced by the arrival of the settlers
during the process of consolidation in which indigenous patterns of gender
relations began to be transformed through the actions of the representatives
of settler society--missionaries, the military, government agents, and the
settlers themselves-- into ‘frontier’ societies and then into
settler states with private property, patriarchal gender relationships,
and ‘race’ relationships which denied the indigenous peoples
citizenship in the new settler state.
Thus it will examine the ‘side’ of the frontier unnoticed by
Frederick Jackson Turner with his references to ‘free’ land
and the expansion of democracy as the product of the ‘frontier’
and build upon previous publications including ‘Gendering, Racializing
and Classifying: Settler Colonization in the United States, l590-l990,’
in Daiva Stasiulis and Nira Yuval-Davis,(eds) Unsettling Settler Societies:
Articulations of Gender, Race, Ethnicity and Class , ‘Gendered
Colonialism: The ‘Woman Question’ in Settler Society’
in Ruth Roach Pierson and Nupur Chaudhuri, (eds). Nation, Empire, Colony:
Historicizing Gender and Race, and ‘Making Women into Farmers’
Wives: The Native American Experience in the Inland Northwest’, in
Wava G. Haney and Jane B. Knowles (eds), Women and Farming: Changing
Roles, Changing Structures.
The paper will discuss how the process of frontier and settler transformation
gave Euroamerican women greater rights vis a vis men while simultaneously
stripping Indian women of their freedoms through a process of coerced domestication.
Similarly settler men gain new status as landowners while Indian men lost
their position as hunters and warriors. The unevenness of this kind of gender
transformation was replicated in the racialised society that emerged simultaneously
in which race functioned as a marker of power and of location as settler
or uprooted migrant. Thus the ‘West’ could be described by Turner
as the crucible of American democracy and become the region where Euroamerican
women first gained full political rights while also being the area where
indigenous women and men lost their their way of life, their livelihood
and their ability to live outside the market, the U.S. state and the gender
patterns associated with both.
These people in the act of becoming settlers used the term ‘emigrants’
to describe themselves but the historiography on the process of settler
colonization in the trans-Mississippi, as is often the case with the kind
of specialization that divides history into diverse fields, has tended to
forget this self-identification. Calling their field ‘Western history’,
many scholars operate within a teleological paradigm that reads the history
back from the establishment of self-governing settler colonies rather than
recognizing the emigrant status of those who entered these already occupied
territories. This history diverged from the themes and emphases of ‘Immigrant
History’ as studied in the U.S. with its focus on European immigrants,
who arrived in the already self-governing states and cities of the l9th
century U.S.
The issue of power is one of those salient elements that can be analysed
once the teleological distortions have been removed. Turner’s ‘frontier
thesis’ needs to be reconceived as the history of Anglo-American emigrants
who used military force and technological advantage so successfully as to
erase their status as immigrants. After this historical revision, the actions
of the modern-day U.S., itself now politically guided by the manly heirs
to two settlers colonies --Texas and Wyoming—can be better understood
as deeply rooted in the history of a nation state composed of settler colonies
that grew out of a largely forgotten history of emigration, invasion and
military occupation.
This revises the usual approach to immigrant history that focuses on the
growth of ethnic enclaves and assumes the immigrant as relatively powerless,
poor, and thus needing to accommodate to the political forms and police
power of a nation state and the dominant economic, cultural, and social
context established by those who arrived earlier. In this case it is those
who arrived earlier who made the sorts of cultural and material concessions
that ‘immigrant history’ usually attributed to the later arrivals.
This process then produces a new emigration, in turn, by displaced Indian
peoples, a process already underway in the l600s, as the beginnings of a
diaspora, a coerced emigration of many uprooted peoples into smaller and
smaller enclaves far away from their homelands. This examination, thus raises
questions not included within the conventional scope of immigrant history.
Rather than ethnic identity, usually assumed to become gradually less important
this case shows how the boundaries of ‘race’ grew more rigid
as racialised cultures emerged from this kind of settler emigration/immigration
while gender relations altered on both sides of the frontier.
• Terry-Ann
Jones, Fairfield University, Department of Sociology and Anthropology
(USA), Changing Gender Roles: West Indian Migration to the United States
and Canada, [Transformation des rôles genrés.
Migrations caraibéennes vers les Etats-Unis et le Canada dans le
monde contemporain.] [Texte]
Introduction
Migration is embedded in West Indian history to such an extent that international
movement has become a part of the consciousness of the people. Emigration
from the West Indies and the transnational flows that have developed between
the islands and their primary destination countries have become not only
an economic strategy for West Indians, but also a culturally and socially
desirable practice. Evidence of this is reflected not only in the large
numbers of West Indians who emigrate annually, but also in the large percentage
who express the desire to emigrate. Migration has become a channel through
which Caribbean people have been able to achieve socioeconomic mobility.
With the development of a capitalist economy headed by the elite, migration,
according to Thomas-Hope (1998:190), “was one of the few means open
to the masses to improve their material circumstances and thereby also enhance
their social status.” Migration was for many West Indians a means
by which they could escape the hierarchical structure of their home country
and realize higher socioeconomic status through improved opportunities for
education and employment.
Patterns of emigration have changed over the course of West Indian history,
and have usually been related to such factors as the colonial past as well
as contemporary economic opportunities. While there has been constant demand
for West Indian labor in the United States and Canada throughout the second
half of the twentieth century, this demand has shifted between sectors.
Much of the labor demand has been concentrated in low-skilled fields such
as farm working or domestic work. More recently the trend has shifted toward
health care to such an extent that there is an overrepresentation of West
Indians, particularly women, in health care professions in the United States
and Canada. While health care professions are not gender-specific, most
West Indian nurses and nurse’s aides tend to be women. Similarly,
farm workers are predominantly men, while domestic workers are almost exclusively
women. This paper examines the changing roles of men and women in West Indian
migration to the United States and Canada during the second half of the
twentieth century. A central question of this paper is: to what extent do
West Indian women adopt a leadership position when migrating to the United
States and Canada? What are the implications of this shift in domestic power
relations? Does the changing role of migrant women stimulate greater autonomy
for women in the household?
Background
During the mid-1950s female West Indian migrants to the United States and
Canada were employed as domestic workers under a program through which they
were obligated to work for a one year period, after which they could apply
for permanent residency and sponsor close relatives. Beginning in 1955,
the Canadian government admitted 100 Jamaican and Barbadian domestic workers
annually. These workers were all single women age 21 to 35 years. Under
this policy, West Indian domestic workers were required to work for one
year as domestics, and they were eligible to apply for citizenship after
living in Canada for five years. They were also able to sponsor close relatives
to join them in Canada. This system proved to be a means by which many young
women, some of them educated, were able to enter Canada and provide their
families with access to Canada and its wealth of opportunities. After their
mandatory year of domestic work, many of these West Indian women sought
training and employment in professions such as nursing. By 1960 the number
of West Indian women permitted to enter Canada as domestic workers was raised
to an annual total of almost three hundred and women from other West Indian
islands were also included..
Major changes in Canadian immigration policy in 1962 enabled more black
foreigners to enter the country. The new policies emphasized education and
employment potential, and proclaimed that each immigrant would be judged
“entirely on his own merit, without regard to race, colour, national
origin, or the country from which he comes.” Following these policy
changes black immigrants, especially West Indians, began to arrive in large
numbers. The employment opportunities were attractive to both single and
married women who took advantage of the high demand for women in domestic,
child care, and nursing positions. Although in some cases the women were
joined by their families, this livelihood strategy in some cases led to
the fragmentation of the family. The result is gender imbalance among West
Indian immigrants. For example, of Jamaicans living in the United States,
56.3 percent are female and 43.7 percent are male. In contrast, among the
total American population 50.9 percent are female and 49.1 percent are male.
More recently, West Indian women have continued to migrate in search of
employment, leaving spouses and children in the care of other family members
at home. Remittances are sent home to support the children and their caregivers,
usually aunts, uncles, or grandparents. Although this is often initially
a temporary move, many of these immigrant women remain permanently, later
sponsoring their children and spouses to migrate once they have settled
in the destination country. Women, particularly those from the Caribbean,
have tended to lead the family migration process because of the relative
ease with which they find employment. The demand for female-dominated professions
such as elementary school teachers, nurses, and domestic workers also facilitates
this gender bias. This paper will explore these trends in West Indian migration
to the United States and Canada, and the changing gender roles that accompanied
them.
Elizabeth Thomas-Hope, “Globalization and the Development of a
Caribbean Migration Culture.” in Mary Chamberlain, ed. Caribbean
Migration: Globalised Identities. New York: Routledge, 1998.
Robin W. Winks, The Blacks in Canada: A History. Second Edition.
Montreal and Kingston: McGill-Queen’s University Press, 1997
Winks 1997:443
U.S. Bureau of the Census, Public Use Microdata Sample, Florida, Five Percent,
2000 Census of Population, Washington, D.C. 2003.
U.S. Bureau of the Census, Public Use Microdata Sample, Florida, Five Percent,
2000 Census of Population, Washington, D.C. 2003.
Nancy Foner, “Race and Color: Jamaican Migrants in London and New
York City.” International Migration Review. Vol. 19, No.
4. 1985.
• Florence
Mae Waldron, Franklin & Marshall College (USA), The Gendered Worlds
of New England's Quebecois Migrants, 1870-1930, [Les mondes
genrés des Québécois de la Nouvelle Angleterre (1870-1930)].
[Texte]
As many as a million French Canadians - one-third of the province's population
- migrated from Quebec to New England from the mid-nineteenth century through
the early twentieth century. Nearly three-quarters of them made this journey
between the years 1870-1930. While men and women traveled the same routes
and settled in the same cities, the two sexes experienced migration in very
different ways. The migrants' beliefs regarding what it meant to be a man
or a woman shaped every aspect of the migration process; most notably, these
beliefs colored their perceptions of life in the United States and determined
how individuals acculturated to their new lives south of the U.S.-Canadian
border.
This presentation will consider some of the ways in which the migrants'
understandings of gender influenced their decisions regarding whether, and
how, to become “American” and/or remain “French Canadian.”
The disparate ways in which the migrants viewed American manhood versus
American womanhood highlight the gendered distinctions in the migrants'
understandings of the links between national identity and individual identity.
For these migrants, becoming and being an American meant very different
things for men and women. Because of this, French Canadian men and women
had very different perceptions of the opportunities life in New England
afforded them. To French Canadian male migrants, American manhood, defined
largely in civic terms, involved many of the same qualities that made for
a good French Canadian man. As a result, men's choices regarding how to
adapt to life in the United States did not necessarily redefine their identity
as men.
In contrast, French Canadian migrant women found it much more difficult
to balance their identities as French Canadians with the possibility of
being American. Both the migrant communities and individual migrants defined
womanhood in terms that were more cultural than civic. Furthermore, their
impressions of American women ran counter to everything they understood
French Canadian femininity to be. As a result, navigating a path between
American womanhood and French Canadian womanhood often meant choosing between
two diametrically opposed understandings of what it meant to be a woman.
Not surprisingly, tensions often resulted from the choices individual migrants
made; in particular, the stark contrasts between the migrants' definitions
of American and French Canadian womanhood meant that women's choices carried
much graver consequences, both for individual women and for the migrant
population as a whole, than men's choices did.
10h15-12h15 Atelier : Le genre des migrations universitaires/Academic migrations (Salle 131, bat D, site Jourdan)
Présidence et discussion Natalia
Tikhonov (Institut des hautes études européennes, Robert
Schuman, Strasbourg)
• Pierre Moulinier,
Les premières femmes docteurs reçues à la Faculté
de médecine de Paris (1870-1914) : des étrangères qui
ne passent pas inaperçues. [The First Females Doctors
Graduated from the Paris University (1870-1914) : Unforgetable Foreigners]
[Texte]
• Boris Czerny, Université de Caen, L’association des étudiants
russes en France au début du XXe siècle [The
Russian Students’ Association in Paris at the beginning of the XXth
century] [Texte]
• Nazarska Georgetta,
Université de Sofia (Bulg), The University Education and Bulgarian
Women. [Les femmes bulgares et les formations universitaires]
[Texte]
• Vinciane Godfrind, Université catholique de Louvain, «Les
étudiantes russes à l’Université libre de Bruxelles
de 1905 à 1914». [Russian women at the Free
University of Brussels, 1905-1914]. [Texte]
Le sujet que je souhaite aborder est novateur pour la Belgique. En effet,
les étudiantes russes sont perdues au milieu des travaux consacrés
aux premières étudiantes dans les universités belges.
Certains travaux ont mis l’accent quantitatif sur leur présence,
notamment pour l’Université de Liège, mais jamais une
étude qualitative n’a été réalisée.
Le sujet serait présenté en 4 parties.
D’abord, une brève présentation des sources entamerait
notre propos ; ces sources sont lacunaires et cela induit certaines limites.
La deuxième partie serait consacrée à un survol de
la situation politique et sociale en Belgique (l’importance du socialisme
est une des clés d’explication), de l’immigration dans
ce pays et des relations Belgique/ Russie qui pourraient inciter à
choisir la Belgique comme terre d’accueil.
La troisième partie abordera les données biographiques des
étudiantes russes. Nous observerons l’importante migration
venue de la Russie d’Europe, principalement des villes, parmi laquelle
on notera une forte présence de Juives. Nous parlerons ensuite des
principaux quartiers bruxellois où elles ont résidé
et qui sont soumis à une influence migratoire de l’Est et des
Juifs.
Nous présenterons leur origine sociale et signalerons les membres
de leurs familles qui les ont accompagnées en Belgique. Nous mentionnerons
les mariages et leurs conséquences (naissance des enfants, arrêt
des études, séparations…). Enfin, nous constaterons
les peu nombreuses participations aux mouvements révolutionnaires
et aux meetings socialistes.
Les études réalisées nous occuperont essentiellement.
Après avoir émis des généralités (âge
des études, année d’entrée à l’université,
diplômes obtenus…), nous aborderons plus en détails le
choix des études de médecine et de sciences naturelles. Nous
nous attarderons sur les sciences sociales, cas particulier à l’Université
libre de Bruxelles.
Nos propos seront illustrés par des cas concrets, tels que des témoignages
de contemporains et des informations dénichées dans les dossiers
de la police des étrangers.
Un parallèle avec la situation à l’Université
de Liège sera effectué.
Enfin la dernière partie sera une comparaison avec des données
recueillies pour l’Allemagne et la Suisse. Nous pourrons observer
des similitudes entre les trois pays (origine géographique, choix
des études) mais avec des particularités propres à
l’Université Libre de Bruxelles.