1. Le Contexte et les acteurs

Après les travaux déterminants de Douglas Kibbee, il semblera prétentieux de revenir une fois encore sur le cas de Palsgrave et de ses Éclaircissemens, ma seule défense sera ici que mon objectif est moins d'étudier le travail du grammairien et lexicographe anglais que de présenter et commenter le contexte et les conséquences du travail d'édition auquel Génin soumet cet ouvrage, dans cette période que je caractériserai comme celle d'une première philologie française au XIXe siècle.

Il est nécessaire pour cela de projeter un rapide éclairage rétrospectif sur les origines de cette dernière. Dans les premiers temps de la recherche linguistique, Bopp, Diez, les modèles germaniques, et Raynouard isolèrent le langage de ce qui l'entourait dans l'expérience humaine. Ils raisonnèrent sur des lettres, des mots, des étymologies, dont ils retraçaient le parcours à travers l'histoire. Dans un second temps, en référant ces formes à l'usage littéraire des troubadours, ils permirent de voir dans la langue le reflet des vérités humaines originelles, ancestrales et fondamentales. On ne s'étonnera donc pas, dans ces conditions que, deux ou trois décennies plus tard, la même philologie, appliquée à la langue nationale, et assurant le passage de l'anthropologie universalisante du langage à une ethnographie linguistique appuyée sur des témoignages documentaires principalement littéraires, ait pu ouvertement servir à soutenir une idée politique. C'est bien là ce que présente la préface de Génin.

Dans un XIXe siècle traversé de crises socio-politiques fortes, et secoué par les soubresauts d'une économie rurale que subvertissent progressivement les grosses machines de l'industrie, tous les arguments susceptibles de freiner le schisme social en préparation latente servent à proposer et soutenir des aménagements de la partie de la langue la plus superficielle et déjà la plus figée – son écriture, et la phonétique contrainte qui en dérive – par laquelle s'affichent spontanément au demeurant l'origine sociale et la qualité culturelle des interlocuteurs. La fixation d'une grammaire destinée à légitimer ainsi les règles et aberrations de l'orthographe ne saurait ainsi être déconnectée du travail de recherche des plus anciens documents de la langue, et du désir de justifier par l'histoire les errements du présent. En quoi cette philologie – en sa propre dimension politique – pouvait bien prétendre à une fonction de discrimination sociologique. S'adressant au Roi, six mois après la création de la Société de l'histoire de France, le 31 décembre 1833, Guizot écrivait :

" Depuis quinze ans environ l'étude des sources historiques a repris une activité nouvelle. Des hommes d'un esprit clairvoyant, d'une science rare, d'une constance laborieuse, ont pénétré, les uns dans le vaste dépôt des archives du royaume, les autres dans les collections de manuscrits de la bibliothèque royale ; quelques-uns ont poussé leurs recherches jusque dans les bibliothèques et archives des départements. Partout il a été prouvé dès les premiers essais, en fouillant au hasard, que de grandes richesses étaient restées enfouies. […] Depuis que ce fait est constaté, il ne se passe pas un jour sans que les hommes jaloux des progrès de la science et de la gloire littéraire de la France n'expriment le regret de voir l'exploitation d'une mine si riche abandonnée à des individus isolés, dont les plus grands efforts ne peuvent produire que des résultats partiels et bornés. [...] Au gouvernement seul, il appartient, selon moi, de pouvoir accomplir le grand travail d'une publication générale de tous les matériaux importants et encore inédits sur l'histoire de notre patrie. […] Mais chaque jour de retard rend la tâche plus difficile : non-seulement les traditions s'effacent et nous enlèvent en s'effaçant bien des moyens de compléter et d'interpréter les témoignages écrits ; mais les monuments eux-mêmes s'altèrent matériellement. Il est une foule de dépôts, surtout dans les départements, où les pièces les plus anciennes s'égarent ou deviennent indéchiffrables, faute des soins nécessaires à leur entretien. "(3).

Ce texte expose donc sans ambage l'intérêt décisif à entreprendre sur les matériaux langagiers des études historiques. Et Guizot, de préciser encore, lors de la publication de son texte, en 1835:

" Le 18 juillet dernier [1834], j'ai formé, auprès du ministère de l'instruction publique, un comité où se réunissent quelques-uns des hommes les plus considérables par leur savoir et par le mérite de leurs travaux historiques. Ce comité sera spécialement chargé de surveiller et de diriger, de concert avec moi, tous les détails de cette vaste entreprise".

De fait, le comité créé à l'instigation du Ministre de l'Instruction publique avait pour mission de rassembler toutes les bribes dont la récollection contribuerait à la composition de la grande rhapsodie historique et nationale :

" Puiser à toutes les sources, dans les archives et les bibliothèques de Paris et des Départements, dans les collections publiques et particulières ; recueillir, examiner et publier, s'il y a lieu, tous les documents inédits importants et qui offrent un caractère historique, tels que manuscrits, chartes, diplômes, chroniques, mémoires, correspondances, œuvres mêmes de philosophie, de littérature ou d'art, pourvu qu'elles révèlent quelque face ignorée des mœurs et de l'état social d'une époque de notre histoire "(4).

C'est ainsi que Victor Cousin retrouvera près d'Avranche, et éditera, le Sic et Non d'Abailard. Que Sainte-Beuve est chargé

" d'un travail spécial, destiné à servir en quelque sorte d'introduction aux publications du comité chargé de la recherche de nos monuments littéraires. […] Ce travail doit consister en un compte rendu précis et complet des développements successifs qu'ont reçus en France, durant les trois derniers siècles, l'étude et l'histoire critique de notre ancienne littérature. "(5)

Sur le détail paléographique des études sollicitées par le Comité, et à la suite des enseignements dispensés depuis 1821 à l'École des Chartes, de précieux renseignements éclairant les conditions techniques de la naissance de la philologie sont aussi révélés par la lecture du document de Guizot:

" 3° Si le manuscrit n'est pas daté, on examinera si les raies sur lesquelles s'appuient les lignes d'écriture sont tracées à la pointe sèche (avant 1200); au plomb (du XIe au XIVe siècle) ou en rouge (du XIVe au XVe siècle); si les i simples sont accentués (après 1200) ou pointés (après 1400); si l'u est surmonté d'un ou deux accents aigus (du Xe au XIIe siècle); si les mots sont séparés entre eux ou non; si l'æ est formé d'un a et d'un e conjoints (avant 1200) ou d'un e simple (du XIIIe au XVe siècle), ou d'un e pointé par dessous (avant 1100); si les chiffres sont arabes (après 1200); à quelle distance les signatures des cahiers, si toutefois il y a des signatures, sont placées au-dessous de la ligne inférieure "(6)

Parmi les disciplines dont la sauvegarde de l'histoire est envisagée à cette date, la littérature jouit ainsi d'un traitement explicatif spécial, conforme à l'optique précédemment évoquée de Raynouard, et distinct de celui concédé aux textes de Sciences exactes et naturelles, voire de Philosophie. On voit bien là s'opérer un glissement de la littérature à la langue, nationale, et de cette dernière aux patois infâmes et décriés; ceux-ci étant – comme on l'a vu plus haut – le déploiement géographique obsolescent d'un état antérieur de la langue locale :

" En ce qui concerne la littérature, [...] j'appellerai d'abord particulièrement votre attention sur ce qui pourrait éclairer les origines de notre langue, et la culture qui s'est développée dans les divers genres de composition, à partir du XIe siècle jusqu'au XVIe, durant cette période qui comprend la naissance, le premier emploi et le premier éclat de notre langue vulgaire, jusqu'à l'époque tout à fait moderne. Il importe, pour combler une grande lacune dans notre histoire littéraire, de connaître et de recueillir de plus en plus complètement les monuments de cette période, que les Bénédictins et leurs savants continuateurs n'ont fait qu'entamer. Vous voudrez donc bien rechercher ce que vos collections manuscrites pourraient contenir en fait de longues compositions épiques et chevaleresques, chansons dites de geste, romans en vers ou en prose, se rapportant aux cycles de Charlemagne, d'Arthus, d'Alexandre, ou de la guerre de Troie, ou à toute autre variété de sujets. [...] Il serait précieux de retrouver des romans en prose antérieurs au XIVe et XVe siècles. Vous noteriez , dans les romans en vers, si les vers sont rimés par tirades monorimes, s'ils sont de douze, de dix ou de huit syllabes. [...] Les chroniques en vers, qu'il faut distinguer des romans, et dans le genre du Rou ou du Brut, vous offriraient une valeur historique étroitement unie à la curiosité littéraire. Vous ne rechercherez pas avec moins d'intérêt ce qui se pourrait découvrir en fait de miracles, mystères, moralités, farces, sottises [sic], dialogues et débats, plets, etc., en un mot, tout ce qui se rapporte aux compositions et représentations dramatiques de ces temps. [Idem pour Bibles, Volucraires, Lapidaires, Apologues allégoriques, etc.]. Vous attacher[i]ez un prix tout particulier aux grammaires, glossaires et traités sur la langue, composés dans ces siècles, si vous en découvr[i]ez. [...]. Des écrits, en apparence très-étrangers à l'histoire littéraire, peuvent s'y rattacher par quelque point. Des traités en langue vulgaire sur les divers arts et métiers, sur diverses parties des sciences d'alors, des livres de compte même, peuvent devenir précieux pour l'histoire des origines et des progrès de la langue, par leur date, par leur terminologie. [...] Les manuscrits de poëmes ou chroniques en langue romane provençale ne sont nullement exclus de votre recherche. Tout ce qu'on en pourra découvrir et recueillir sera porté à l'information des personnes savantes qui se sont occupées plus particulièrement de cette branche de notre littérature, et qui sont désormais maîtres reconnus en pareille matière. Les ouvrages en langue trouverre [sic] qui ont été composés dans un dialecte provincial particulier méritent attention; on pourrait en éclairer l'étude par la connaissance du patois moderne correspondant "(7) [pp. 77-81]

C'est ici qu'à la suite de Raynouard entrent en scène les membres d'une jeune troupe d'érudits impatients : énergumènes policés par l'instruction, et chargés de [re]constituer ce patrimoine historique et littéraire national. Trois noms s'imposent rapidement :

Gustave Fallot [1807-1836], tout d'abord, auteur de Recherches sur les formes grammaticales de la langue française et de ses dialectes au XIIIe siècle, publié posthume par Ackermann en 1839, avec une notice préfacielle de B. Guessard, membre de l'Institut et Président de la Commission royale. Secrétaire de la Commission Guizot, mort à 29 ans, en laissant inachevé un manuscrit qui osait sonder les profondeurs de l'histoire de la syntaxe. Une célèbre polémique l'opposa précisément à ce sujet, dans les derniers mois de sa vie, à François Génin.

Francisque Michel [1809-1887]. Chargé par Guizot, en 1834, de copier à Londres la Chronique en vers des ducs de Normandie, par Benoît de Sainte-More, texte écrit en langue normande du début du XIIIe siècle, Michel fait quotidiennement preuve d'un appétit de défrichage et de déchiffrement qui – aujourd'hui – laisse encore pantois : édition princeps et publication de La Chanson de Roland [1837], transcription de la Chronique rimée des ducs de Normandie, par Benoît de Sainte-More, Histoire des rois Anglo-Saxons, de Geoffroi Gaimar ; le poëme désigné par le savant abbé de la Rue sous le titre de Voyage de Charlemagne à Constantinople :

" Je profitais des jours où le Musée était fermé pour me livrer à des recherches sur Tristan, dont l'histoire romanesque répandue dans toute l'Europe en fit les délices du XIIe au XVe siècle. J'avais surtout à cœur de retrouver le poëme de Chrestien de Troyes, qu'il m'en coûte beaucoup de croire irrévocablement perdu. Mes peines à cet égard n'ont pas été couronnées de succès. Quoi qu'il en soit, je suis parvenu à rassembler trois poëmes complets, deux fragments de deux autres, un long morceau relatif à Tristan, extrait d'un grand ouvrage ; deux ballades espagnoles, un fragment grec de 306 vers politiques, et une ballade islandaise ; j'ai fait de tout cela un recueil, précédé d'une introduction et suivi de notes et d'un glossaire des mots les plus difficiles "(8)

Quoique fort décrié, le travail de Francisque Michel ne mérite certainement pas le discrédit dans lequel il est tombé. Michel cite des sources scientifiques valides : Jakob Grimm pour le Museum für altdeutsche Literatur und Kunst, vol. II, pp. 284-316, à propos de l'histoire du roi Horn ; Adelung – Altdeutsche Gedichte in Rom, vol. II, pp. 55-68 et 92-97 – à propos du poëme d'Ogier le Danois . Et enfin :

François Génin [1803-1856], peut-être la plus importante figure de ce triptyque. Auteur, dès 1845, d'un ouvrage qui fit sensation en opposant aux conceptions poëtiques de Raynouard et de Fallot un systématisme répudiant tout anomalisme en langue, et permettant d'expliquer en ancien français l'opposition flexionnelle des cas sujet et régime : Des Variations du langage français depuis le XIIe siècle. Ouvrage dans lequel était déjà abordé par la bande le travail grammatical de Palsgrave. Mais, pour l'heure, c'est la fonction de Secrétaire du Comité historique de la langue et de la littérature française, qui me retient ici, car c'est dans ce rôle que Génin dresse dès le 1er décembre 1838 un Rapport au Roi sur les activités du Comité :

" Le premier Comité historique a reçu beaucoup de propositions tendantes [sic] à publier sous ses auspices des ouvrages d'une date reculée et d'un intérêt plus ou moins réel pour l'histoire de la langue et de la littérature françaises. […] M. le Président du Comité a pensé que le caractère et le travail consécutif de la langue paraîtraient surtout dans une série de textes exprimant exactement les mêmes idées à des époques différentes, et que, sous ce rapport, il serait utile de réunir une série de versions successives d'une même portion de la Bible, et d'en former un tableau comparatif, à partir, par exemple, de la fin du XIIe siècle jusqu'au commencement du XVIe. M. Leroux de Lincy a été chargé de rechercher les éléments de ce travail, et d'en offrir un spécimen. […]. Le travail de M. Leroux de Lincy formera un volume divisé en deux parties.

La première comprendra le manuscrit de Barbazan, c'est-à-dire les quatre livres des Rois, qui en sont la moitié la plus intéressante, avec le texte latin et le commentaire en langue vulgaire. Dans la seconde partie, les spécimens des versions successives de la Bible seront réunis synoptiquement. Le texte suivi par le traducteur sera mis en regard de la version, de manière à faire ressortir les infidélités de l'interprète par des blancs ménagés suivant l'occurrence, tantôt dans le latin, tantôt dans le français. La version et le commentaire seront complètement séparés. Des notes courantes seront placées au bas des pages. Enfin un essai de glossaire devra être présenté, d'après lequel le comité jugera s'il y a lieu de terminer cette publication par un glossaire renfermant non seulement les expressions d'origine autre que latine, ou bien d'une forme difficile et peu connue. D'après le désir unanimement exprimé, M. Villemain veut bien se charger d'exposer dans des observations préliminaires les idées et le but du comité. […]

Telles sont, monsieur le Ministre, les mesures prises pour donner à la France un ouvrage qui deviendra la base de tous les travaux critiques sur l'histoire de notre langue. Ce livre, qui n'a de modèle nulle part, peut rendre à la linguistique un service immense en invitant nos voisins à réunir aussi dans de semblables répertoires les preuves généalogiques de leurs divers idiomes.

[…] M. Nodier a été prié de vouloir bien se réunir à M. Fauriel pour l'examen des poésies bretonnes. "(9)

Et l'on voit bien dans ces remarques se mettre en place un triple dispositif cumulatif : historique, littéraire et linguistique, visant à fournir les preuves d'un lignage, les éléments constitutifs d'une généalogie fondée sur des faits irréfutables. J'y reviendrai. À la même génération, sans qu'il soit ici possible de s'arrêter sur eux, appartiennent également Paulin Paris [1800-1881], longtemps titulaire de la chaire de Langue et Littérature du Moyen Âge au Collège de France, Émile Egger [1813-1885], directeur de l'École Normale Supérieure, Ernest Renan [1823-1892], et Jean-Jacques Ampère dont l'Histoire de la formation de la langue française pour servir de complément à l'Histoire littéraire de la France [1841, 18713] a révolutionné les méthodes d'approche du texte médiéval en permettant la constitution d'une grammaire effective de cette langue " exotique " au bourgeois du XIXe siècle(10). On pourrait aussi y adjoindre les figures d'un intérêt plus marginal pour mon propos de Claude Fauriel, Philarète Chasles, tous deux précurseurs d'un certain comparatisme littéraire, ou de Xavier Marmier, l'un des premiers promoteurs français de l'étude scientifique du folklore, et enfin de Francis Wey [1812-1882], que nous retrouverons en conclusion, polygraphe abondant et historiographe des révolutions du langage en France du moyen-âge au Lumières...Tous sont les hérauts du nouveau savoir de la langue et du langage qui se met alors en place.

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Notes

3. Guizot in Collection de documents inédits sur l'Histoire de France, publiés par ordre du Roi et par les soins du Ministre de l'Instruction publique, Paris, 1835 ; pp. 1, 4-5].

4. Ibid., note rédigée le 27 novembre 1834, p. 10, 12-13.

5. Ibid., p. 35.

6. Ibid., p. 66.

7. Ibid. p. 77-81.

8. Ibid., pp. 42-43.

9. François Génin, in Collection de Documents Inédits sur l'Histoire de France, publiés par ordre du Roi et par les soins du Ministre de l'Instruction Publique, Paris, Imprimerie Royale, 1839, pp. 308-312.

10. L'avant propos de Ch. Daremberg à la réédition de 1871 mentionne fort explicitement : " La première édition de l'Histoire de la formation de la langue française pour servir de complément à l'Histoire littéraire de la France a paru en 1841. Ce fut alors un véritable événement littéraire. Depuis quelques années, MM. Fauriel, Raynouard, Paulin Paris, Guessard, Francisque Michel, A. Jubinal, Le Roux de Lincy, Méon, Chabaille, et quelques autres avaient attiré l'attention d'un public encore peu nombreux, sur les textes français du moyen-âge; les préjugés, formés au dix-septième siècle et propagés au dix-huitième, contre cette vieille littérature nationale, commençaient à s'effacer; mais pour la plupart des lecteurs, le langage des anciens textes restait un langage barbare, sans lien bien marqué avec notre langue actuelle. Pendant ce temps, de l'autre côté du Rhin, on avait trouvé en partie les origines du vieux français et suivi ses transformations régulières d'âge en âge. En d'autres termes, nos voisins avaient une histoire et une grammaire de notre idiome primitif, tandis que nous ne possédions que des textes isolés. Sans une grammaire, sans cet instrument indispensable, les efforts de nos érudits demeuraient impuissants et l'étude de la langue de nos pères ne pouvait pas se répandre. Le premier en France, si nous ne nous trompons, M. Ampère a tenté de combler cette lacune en un livre où, profitant de tous les textes publiés soit en France soit à l'étranger, et confondant ses propres recherches philologiques avec celles des Allemands, de Diez, en particulier, il présentait, sous une forme vraiment littéraire, l'état présent des connaissances grammaticales relatives au vieux français " [p. i-ii]. Texte évidemment sans commentaire autre que celui qui s'impose de lui-même, et qui montre bien l'alliance étroite du littéraire et du linguistique dans les origines de la recherche universitaire sur la langue française. Une étude ultérieure, débordant le cadre de cet article, s'attachera à dégager les particularités épistémologiques et techniques de cet ouvrage.