Les Travaux et les Jours : Éphémérides

Il faut, pour cela remonter assez avant dans le temps. Jusqu’au XVIIe siècle, et, par son intermédiaire, jusqu’au XVIe siècle même, puisque le Père Bouhours [1628-1702], dans ses fameux Entretiens d’Ariste et d’Eugène [1674], démarquant maladroitement Claude Fauchet et Étienne Pasquier, consacrait alors un long passage de son ouvrage à exposer de quoi était faite la langue française, et de quels éléments gaulois, latins et germaniques elle se composait.

Au XVIIIe siècle, Bonamy, dans un Mémoires Sur la langue des Serments de Strasbourg et sur Les causes de la cessation de la langue tudesque en France, textes publiés dans les Mémoires de Littérature tirés des Registres de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres [1756], prolongeait cette impulsion en fournissant des remarques sur la forme linguistique des monuments, au même instant d’ailleurs où Turgot, dans l’Encyclopédie, fixait les principes modernes de l’étymologie. En 1796, La Tour d’Auvergne donnait le modèle de cette recherche dans la publication de ses Origines gauloises des plus anciens peuples de l’Europe puisées dans leurs vraies sources.

Au début du XIXe siècle, enfin, l’Académie celtique spécialisée à l’origine [1804] dans les origines gauloises du français devint Société des Antiquaires de France [1813] pour l’étude et l’édition des antiquités nationales. Le texte comme document, et non la langue comme objet, intéressait alors le chercheur au premier chef. Mais, à partir de là, il est possible de dégager une chronologie mettant en évidence la translation progressive des intérêts de la communauté des amateurs, des savants et des chercheurs du littéraire au linguistique. Ce terme même — d’origine germanique — ayant été acclimaté en France entre 1812 et 1816 [Comte Jean-Denis Lanjuinais], jusqu’à être largement diffusé, par Nodier notamment, à partir de 1828, et officiellement entériné en 1834 dans les fameuses Notions élémentaires de Linguistique, ou histoire abrégée de la parole et de l’écriture. Compte tenu de la diversité des intérêts convergeant sur cette question et de l’impossibilité de désolidariser les événements affectant le domaine français de ce qui se déroule concomitamment au-delà des frontières, je propose ci-dessous les repères les plus marquants de cette évolution, accompagnés — lorsque besoin est — de quelques commentaires. Les analyses des faits caractéristiques de la constitution de la philologie moderne, appuyée sur la présentation de documents souvent inédits, seront développées à la suite :

 

1794 :

— Le 8 Pluviôse [an II] = 27 janvier, condamnation des patois par la Convention, qui établit un instituteur dans chaque commune.

— Le 9 Prairial = 28 mai, présentation du rapport de l'Abbé Grégoire.

1796 :

— La Tour d'Auvergne publie ses Origines gauloises des plus anciens peuples de l'Europe puisées dans leurs vraies sources.

1802 :

— E. Villa, Nouveaux gasconismes corrigés [Montpellier].

1803 :

— J. Boinvilliers, Corrigé de la cacologie [Paris].

— E. Molard, Dictionnaire grammatical du mauvais langage [reprise des Lyonnaisismes corrigés de 1792].

1804 :

— Création de l'Académie Celtique.

— Fabre d'Olivet, Dissertation sur la langue occitanique [le provençal en tige commune du français, de l'espagnol et de l'italien].

1805 :

— Volney [1757-1820], après avoir publié en 1795 une Simplification des langues orientales ou méthode nouvelle et facile d’apprendre les langues arabe, persane et turque avec des caractères européens, fait rapport à l’Académie celtique sur l’ouvrage du Professeur Pallas, 1805.

1806 :

— Publication du Mithridates oder allgemeine Sprachenkunde mit dem Vater Unser als Sprachprobe in bey nahe fünfhundert Sprachen und Mundarten [Berlin] de J. Chr. Adelung.

— N. Poyart, Flandricismes et Wallonismes corrigés [Bruxelles].

1807 :

— Début de l'enquête sur les matériaux des Mélanges sur les langues, dialectes et patois, de Coquebert de Monbret [achèvement vers 1830].

— J.-F. Michel, Dictionnaire des expressions vicieuses [Nancy].

— G. Peignot, Petit dictionnaire des locutions vicieuses [Paris].

— Anonyme, Recueil de quelques barbarismes [Liège].

1808 :

— J.-B. B. Roquefort, Glossaire de la langue romane, 3 vol. et Supplément, 1808

— D'Hautel, Dictionnaire du bas langage [Paris].

— Anonyme, Manières allemandes de parler Français [Heidelberg].

1809 :

— Publication dans Mémoires de l'Académie Celtique [t. III, p. 315-319] de l'analyse d'Éloi Johanneau "Origine des choses par les mots : de l'étymologie du nom de la chemise en français, en latin, en grec, et en breton, et quelle étoffe était chez les Gaulois".

— J.-J. Champollion-Figeac : Nouvelles recherches sur les patois ou idiomes vulgaires de la France et en particulier sur ceux du département de l'Isère... [Paris].

— J.-M. Rolland, Dictionnaire des expressions vicieuses des Hautes et des Basses Alpes [Gap].

1811 :

— R. Rask, Grammaire Islandaise [une grammaire doit décrire comment sont formés les mots, et comment ils changent].

— G. Letellier, Nouvelle Cacographie [Paris].

1812 :

— J. Grimm prend publiquement la défense des patois : " […] toute individualité doit être tenue pour sacrée, même dans le langage ; il est à souhaiter que chaque dialecte, fût-ce le plus petit, le plus méprisé, soit abandonné à lui-même, que toute violence lui soit épargnée, car il a certainement ses supériorités cachées sur les plus grands et les plus estimés ".

— N. Munier, Recueil des locutions vicieuses [Metz].

— Gabriel Henry, Histoire de la langue françoise, Paris, Leblanc, Libraire à l'abbaye Saint-Germain-des-Près.

1813 :

— J.-F. Rolland, Dictionnaire du mauvais langage [Lyon].

— Anonyme, Dictionnaire des locutions communes les plus vicieuses [Paris].

1814 :

— Parution du Mémoire sur le patois poitevin et sa littérature de Claude François Etienne Dupin, repris en 1817 dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de France [t. I, pp. 195-228]. C'est en 1814 que la Société Royale des Antiquaires donne des instructions pour l'étude des patois, et que Dupin affirme : " il est possible de suivre sur une carte la dégradation des teintes et de voir les patois se fondre avec les nuances des départements voisins " [p. 17]. Virtualités à cette date des cartes de Géographie linguistique.

1815 :

— P. Cuisin, Les Nymphes du Palais-Royal [dictionnaire argotique et érotique] [Paris].

1816 :

— François-Just-Marie Raynouard [1761-1836] Choix de poésies originales des Troubadours, 6 vol., 1816-1821 : " Rassembler les traditions historiques et les preuves matérielles qui attestent l’existence de la langue romane à des époques très reculées, remonter à son origine et à sa formation, offrir les éléments de sa grammaire avant l’an 1000, et donner enfin les règles complettes de cette langue perfectionnée et fixée dans les ouvrages des Troubadours, tels sont les travaux préliminaires qui rempliront ce premier volume de la collection [...] " [p. v]

— Anonyme : Colloque français-breton ou nouveau vocabulaire français-breton [Saint-Brieuc].

1818 :

— August-Wilhelm Schlegel, Observations sur la langue et la littérature provençale des Troubadours, 1818

— J.-B. Caville, Les périgordinismes corrigés [Périgueux].

1819 :

— Stalder publie les versions de la Parabole de l'enfant prodigue dans tous les parlers de la Suisse.

— Premier volume de la Grammaire allemande de Grimm qui expose une minutieuse description de divers patois teutons.

— Henri Pascal de Rochegude, Essai d'un glossaire occitanien [Toulouse].

1820 :

— F. Gaudy, Glossaire genevois [Genève].

— F. Munier, Cacographie méthodique [Metz].

1821 :

— Fondation de l’École des Chartes.

— Coquebert de Monbret présente à la Société Royale des Antiquaires de France une carte délimitant les jargons ou patois [sic] parlés dans le pays.

— F. Raynouard, Grammaire comparée des langues de l'Europe latine dans leurs rapports avec la langue des Troubadours, travail qui influence Diez.

— J.-C.-P. Desgranges, Petit dictionnaire du Peuple [Paris].

— B. Sajus, Essai sur les vices du langage destiné à la jeunesse des Basses-Pyrénées [Pau].

1822 :

— Création de la Société Asiatique et de son organe de diffusion, le Journal Asiatique.

— Lenief de Laignes, L'Art de parler purement [Paris].

— P.-H. Mulson, Vocabulaire Langrois [cacologie], [Langres].

1823 :

— Désiré Monnier, correspondant de la Société Royale des Antiquaires de France, dans Vocabulaire rustique et populaire du Jura [Mémoires, t. V, pp. 246-309, et t. IV, 1824, pp. 150-219] envisage la rédaction de cartes linguistiques d'ordre phonétique : " On pourrait, d'une manière assez précise, marquer sur une carte géographique l'étendue de pays où domine l'a ; celle où la plupart des mots ont leur désinence en o "...[p. 252].

— Ph. Albert, Recueil de phrases vicieuses [Agen].

— J. Blondin, Manuel de la pureté du langage [Paris].

— E. Garcin, Nouveau dictionnaire provençal-français [Marseille].

— Le Gonidec, Extrait du glossaire breton ou recueil d'expressions vicieuses usitées en Bretagne [Paris].

— F. Lequien, Cacographie [Paris].

— L. Remacle Dictionnaire Wallon-Français avec la correction des idiotismes vicieux [Liège].

— J.-M. Rolland, Dictionnaire des expressions vicieuses les plus communes dans les départements méridionaux [Toulouse].

— Anonyme, Les gasconismes corrigés particulier à la Gironde [Bordeaux].

1824 :

— J.-F. Béronie, Dictionnaire patois bas-Limousin [Tulle].

— Le Mière de Corvey, Liste alphabétique des mots en usage à Rennes [Paris].

— J.-C. Poisle-Desgranges, Le rectificateur de la conversation [Paris].

— Richard des Vosges, Extrait d'un glossaire des patois des Vosges [Paris].

— Publication des résultats de l'enquête lancée en 1807 par Coquebert de Montbret [Mémoires de la Société Royale des Antiquaires de France, t. VI, pp. 221-276].

1825 :

— A. Gaudy, Le dialecte neuchâtelois [Neuchâtel].

— Sauger-Préneuf, Dictionnaire des locutions vicieuses [Limoges].

1826 :

— G. Hécart, Dictionnaire Rouchi-Français [Valenciennes].

— Anonyme, Biographie des journalistes, avec leurs mots d'argots [Paris]. Cet ouvrage contient quelques dialectalismes recensés.

— A. Balbi, Atlas ethnographique du globe ou classification des peuples anciens et modernes d'après leurs langues, précédé d'un discours sur l'utilité et l'importance de l'étude des langues appliquée à plusieurs branches des connaissances humaines ; d'un aperçu sur les moyens graphiques employés par les différents peuples de la terre ; d'un coup d'oeil sur l'histoire de la langue slave, et sur la marche progressive de la civilisation et de la littérature en Russie, avec sept-cents vocabulaires des principaux idiomes connus... [Paris, in-folio]. L'ouvrage, fortement influencé par le géographe danois Conrad Malte-Brun, contient des Observations sur la rédaction des vocabulaires des voyageurs [208 demandes]. E.-F. Jomard, dans une lettre à Balbi, affirme avoir préparé un double vocabulaire de 160 mots principaux, et de 1000 mots classés suivant leur nature, rangés par ordre alphabétique, et sémantiquement classés par couples de contraires, afin que " les voyageurs interrogent méthodiquement et non au hasard. " [pp. XLVIII-XLIX].

1828 :

— G. Fallot, Recherches sur les patois de Franche-Comté, de Lorraine et d'Alsace [Paris].

— Lévi-Alvarès, Les omnibus du langage [Paris].

1829 :

— J. Boinvilliers, Petit vocabulaire du bon et du mauvais langage [Paris].

— Bras de Fer, Nouveau dictionnaire d'argot [Paris].

— J.-B. Cocquempot, Cacologie [Lille].

— J.-F. Régnier, Corrigé raisonné des fautes de langage de la bonne société de Provence [Marseille].

— Anonyme, Fautes de langage particulières à la Suisse Romande et à Neuchâtel [Neuchâtel].

1830 :

Conrad von Orelli, Altfranzösisch Grammatik vorin die Conjugation Vorzugsweise berücksichtigt ist Zürich, 1830

Anonyme, Jargon ou langage de l'argot [Beaucaire].

— Anonyme, Locutions et prononciations vicieuses usitées à Nantes et dans plusieurs villes occidentales [Nantes].

— F. Dethier, Les Omnibus montois [Mons].

— Gourjon frères, Glossaire ou statistique du langage de Condé sur Noireau [Caen].

1831 :

— Avant de mourir, Coquebert de Monbret affirme encore qu'une frontière linguistique n'a que peu à voir avec une ligne. L'occasion d'un cours en Sorbonne permet à Claude Fauriel d'affirmer l'importance de la littérature provençale pour le développement de la littérature française, et de souligner la spécificité de son langage.

— L. Diefenbach, Über die jetzigen romanischen Schriftsprachen, die spanische, portugiesische, rhätoromanische [in der Schweiz], französische, italienische und dakoromanische [in mehreren Ländern des Östlichen Europas] mit Vorbemerkungen über Entstehung, Verwandschaft u.s.w. dieses Sprachstammes [Leipzig].

1833 :

— Publication du premier fascicule de la grammaire de Franz Bopp [1791-1867], Vergleichende Grammatik des Sanskrit, Zend, Armenischen, Griechischen, Lateinischen, Litauischen, Altslavischen, Gotischen und Deutschen, Grammaire comparée des Langues indo-européennes de Franz Bopp [le dernier sera publié en 1852]. C’est dans ce texte que Bopp formule sa conception générale de la philologie.

— Création en juin de la Société de l’histoire de France.

— Eugène Burnouf [1801-1852], " Observations sur la partie de la Grammaire comparée de M. F. Bopp, qui se rapporte à la langue zend ", Journal des Savants, 1833.

Considérations sur les patois de Charles Nodier : les patois sont la langue vivante et nue du peuple, tandis que le beau langage n'est qu'un " simulacre ou un mannequin ". Il souhaite la constitution d'une Académie pour les préserver.

— F. Cordier, Vocabulaire des mots patois de la Meuse [Paris].

— A. Delvart, Le Réformateur du mauvais langage [Paris].

1834 :

— Création des Comités Guizot [18 juillet 1834] destinés à fédérer toutes les recherches philologiques. Composition : Villemain, Daunou, Naudet, Guérard, Mignet, Champollion-Figeac, Fauriel, Vitet, Jules Desnoyers, Granier de Cassagnac, Fallot. Le comité doit se réunir " au moins une fois tous les quinze jours ". Le 10 janvier 1835, le comité est modifié par adjonction de nouveaux membres : Cousin, Auguste Leprévost, Mérimée, Victor Hugo, Ch. Lenormant, Albert Lenoir, Didron.

— Claude Fauriel [1772-1844], chargé par Guizot de publier et traduire sur le texte provençal l’Histoire en vers de la Croisade contre les hérétiques Albigeois. Il donnera ultérieurement l’Histoire de la Gaule méridionale sous la domination des conquérants germains, Paris, 1836, 4 vol.

— Francisque Michel [1809-1887], chargé par Guizot de copier à Londres la Chronique en vers des ducs de Normandie, par Benoît de Sainte-More, texte écrit en langue normande du début du XIIIe siècle. Publiera ensuite l’édition princeps de La Chanson de Roland, 1837.

— Ch. Nodier, Notions élémentaires de linguistique, ou histoire abrégée de la parole et de l'écriture [Bruxelles] : " Le patois composé plus naïvement et selon l'ordre progressif des besoins de l'espèce, est bien plus riche que les langues écrites en curieuses révélations sur la manière dont elles sont formées. [...] Jamais la pierre-ponce de l'usage et le grattoir barbare du puriste n'en ont effacé le signe élémentaire d'un radical" [p. 222].

— Bescherelle aîné, Bescherelle jeune, Litais de Gaux et Roze Céphas-Simon, Grammaire nationale, ou Grammaire de Voltaire, de Racine..., renfermant plus de cent mille exemples, Paris, Bourgeois-Maze, 2 vol. [15e éd., 1877].

— Romieu, Dictionnaire des locutions vicieuses dans le code de la conversation [Paris].

— J.-M. Heilmaier, Über die Entstehung des romanischen Sprachen unter dem Einflusse fremder Zungen [Aschaffenburg].

1835 :

— G. Cornewall-Lewis, Essai sur l'origine et la formation des langues romanes [Oxford].

— F. Biscarrat, Usages, proverbes et anciens mots d'Argentan [Alençon].

— L. Platt, Dictionnaire critique et raisonné du langage vicieux [Paris].

— M. Pomier, Manuel des locutions vicieuses les plus fréquentes en Haute-Loire et dans le midi [Le Puy].

1836 :

— F. Diez commence la publication de sa Grammatik der Romanischen Sprachen dont l'achèvement sera réalisé en 1844 [Bonn]. Cet ouvrage comparatif, assorti ultérieurement d’un Etymologisches Wörterbuch der romanischen Sprachen [Bonn, Marcus, 1853] sera traduit en français par Brachet et Gaston Paris [1874-76]. Il est l’oeuvre d’un savant de cabinet, qui a déjà beaucoup lu de textes littéraires médiévaux, et d’études faites sur ceux-ci, mais qui reste conscient de l’importance de l’étude concrète des dialectes : " Die Volksmundarten bieten der Forschung ein unschätzbares nie zu erschöpfendes Material, welches haüfig über Buchstabenverhältnisse und Begriffsentwicklung überraschenden Aufschluß gibt : ich habe sie daher überall zu Rathe gezogen, so weit die mir gestatteten Hülfsmittel ausreichten, ihnen auch zuweilen Beispiels halber kleine Artikel vergönnt. Schade, daß wir nicht über recht viele derselben so einsichtige und gewissenhafte Untersuchungen besitzen wie über das Wallonische " [xi].

Schade... dommage, en effet! Les condamnations portées par Diez à l’encontre d’une étymologie fantaisiste, et non contrôlée [vii-viii], opposée aux principes sains d’une étymologie critique, procèdent incontestablement de ce constat et ont vivement contribué à faire de la linguistique romane une branche spécifique de la grammaire comparée indo-européenne, ayant par elle-même — et en raison de la proximité et de la multiplicité des documents ou monuments légués — une valeur méthodologique exemplaire. De sorte que l’étude diachronique s’y trouve simultanément portée à un degré inégalé d'exemplarité, et être le domaine sur lequel s'exercent de manière optimale les capacités de recréation et de restructuration d'un état de langue variable ; d’où la possibilité de maîtriser l'histoire complexe de langues constituant un ensemble plus ou moins unifié, défini par sa constitution historique même et permettant de distinguer entre des phénomènes généraux "pan-romans" et des caractéristiques localement réduites à une aire spécifique.

— De Gabrielli, Manuel du provençal [Aix-en -Provence].

1837 :

— Anonyme, Manuel du provençal ou des provençalismes corrigés [Aix].

1838 :

— Paul Ackermann : Essai sur l’analyse physique des langues, ou de la formation et de l’usage d’un alphabet méthodique, Paris, Terzuolo, 1838

— Comte Jaubert, Vocabulaire du Berry et de quelques cantons voisins, 2nd. tirage [cf. Paris 1833].

— J. La Bouderie, Vocabulaire du patois de la Haute-Auvergne [Paris].

— F. Raynouard, Lexique roman ou dictionnaire de la langue des Troubadours [Paris].

1839 :

— Gustave Fallot [1807-1836], Recherches sur les formes grammaticales de la langue française et de ses dialectes au XIIIe siècle, 1839, posthume. Le secrétaire de la commission Guizot meurt à 29 ans, en laissant inachevé le manuscrit de l’étude précédente, qui sera publié trois ans plus tard par Paul Ackermann, avec une notice préfacielle de B. Guessard, membre de l’Institut et Président de la dite Commission.

— J. Avril, Dictionnaire provençal-français [Apt].

— L. Diefenbach publie les premiers éléments de Celtica [matériaux des dialectes celtes modernes].

— É. Egger inaugure un enseignement de grammaire comparée à l’École Normale Supérieure, qu’il abandonnera en 1861.

1840 :

— J.-F. Schnakenburg : Tableau synoptique et comparatif des idiomes populaires ou patois de la France ; contenant des notices sur la littérature des dialectes ; leur division territoriale, ainsi que celle de leurs sous-espèces ; des indications générales et comparatives sur leurs formes grammaticales ; le tout composé d'après les meilleures sources et les observations faites sur les lieux, et accompagné d'un choix de morceaux en vers et en prose dans les principales nuances de tous les dialectes ou patois de la France [Bruxelles, imprimé à Berlin] ; influences perceptibles de Champollion-Figeac, Nodier et Coquebert de Montbret ; la révolution dans la littérature française au début du XIXe siècle, tend à abolir l'autorité et à émanciper la parole ; le romantisme, nouvelle école, en se jetant tête baissée dans l'archaïsme, y rencontra, à moitié chemin, le patois qu'il exploita également pour ses buts...

— G. Spano pratique l'enquête par correspondance pour son Dictionnaire sarde.

— Ch. Poudra, Dictionnaire complet des locutions vicieuses [Paris].

— S. Honnorat, Projet d'un dictionnaire provençal-français [Digne] [rééd. en 1846]

— Anonyme, Nouvelle cacographie [Paris].

1841 :

— Anonyme, Locutions vicieuses rectifiées [Paris].

— Francisque Mandet : Histoire de la langue romane (roman provençal), Paris, Dauvin & Fontaine, 1841.

— Jean-Bernard Mary-Lafon : Tableau historique et comparatif de la langue parlée dans le midi de la France et connue sous le nom de langue romano-provençale, Paris, A. René, 1841.

— Pierquin de Gembloux, Histoire littéraire, philologique et bibliographique des Patois [il y parle de son Langatlas de la France, de la Belgique Wallonne et de la Suisse Romande] ; il faudrait rétablir l'Académie néo-celtique [fondée sous Charles le Bel par sept citoyens de Toulouse, 1323].

— B. Biondelli, Atlas linguistique de l'Europe [influence de Balbi].

— A. Bruce-Whyte, Histoire des langues romanes et de leur littérature, depuis leur origine jusqu'au XIVe siècle.

— Jean-Jacques Ampère [1800-1864], Histoire de la formation de la langue française, Paris, Tessier.

1842 :

— L. Petin, Dictionnaire patois-français [Lorrain à l'usage des Ecoles Normales] [Nancy].

1843 :

— Castor, L'interprète provençal [Apt].

— A. Dupleich, Dictionnaire patois-français de l'arrondissement de Saint-Gaudens [Saint-Gaudens].

— Gillard de Najac, Dictionnaire des homonymes, des locutions vicieuses ; et des difficultés de la langue française [Paris].

— H. Lamarche, Extrait d'un dictionnaire du patois des arrondissements de Cherbourg, Valognes et Saint-Lô [Cherbourg].

— E. Thomas, Vocabulaire des mots romans-languedociens [Montpellier].

1844 :

— H. Nabert établit la limite entre le gaélique d'Écosse et l'Anglais.

1845 :

— François Génin [1803-1856], Variations du langage français depuis le XIIe siècle.

— N. St. des Étangs, Liste des noms populaires des plantes de l'Aube [Troyes].

— Gary, Dictionnaire patois-français à l'usage du département du Tarn [Castres].

— E. Saubinet, Vocabulaire du bas-langage rémois [Reims].

1846 :

— C. Ayer, Phonologie de la langue française [Neuchâtel]. Application de la méthode historique inaugurée par Diez dans sa Grammaire Romane [1836-1842].

1847 :

— L.-L. Bonaparte, Vocabularium comparativum omnium lingarum europarum [Paris].

1848 :

— Francis Wey, Histoire des révolutions du langage en France.

1849 :

— A. Fuchs, Die Romanischen Sprachen und ihre Verhältnisse zum Lateinischen [Berlin].

— É. A. Duméril, Dictionnaire du patois normand [Caen].

— Eliçagaray, Le mauvais langage rectifié [Paris].

1850 :

— Ph. Abadie, Dictionnaire du dialecte gascon [Toulouse].

— Couzinié, Dictionnaire de la langue romano-castraise [Castres].

1851 :

— Escallier, Remarques sur les patois [Douai].

— P. Tarbé, Recherches sur les patois de Champagne [Reims].

1852 :

— F. Diez, Etymologisches Wörterbuch der romanischen Sprachen [Bonn].

— Edélestand Du Méril, Essai philosophique sur la formation de la langue française.

— J. Decorde, Dictionnaire du patois de Bray [Paris].

— J. Humbert, Nouveau glossaire genevois [Genève].

— B. Jullien, Le langage vicieux corrigé [Paris].

— Benedikt Hase est nommé professeur titulaire d’une chaire de grammaire comparée à la Sorbonne.

1853 :

— Burguy, Grammaire de la langue d’oïl ou grammaire des dialectes français aux XIIe et XIIIe siècles.

— Alban de Chevalet, L’Origine et la formation de la langue française, 1853-1857

— B. Biondelli, Saggio sui dialetti gallo-italici [Milano].

— Fondation de la revue Die Deutschen Mundarten.

— J. K. Zeuss, Grammatica Celtica [Berlin].

— P. Legrand, Dictionnaire du patois de Lille et de ses environs [Lille].

1854 :

— Création du Félibrige.

— Charles Grandgagnage, Dictionnaire étymologique de la langue wallonne, 1854, terminé en 1880 par Adolphe Scheler.

— Début de la publication du Deutsches Wörterbuch de J. Grimm.

— Jaclot de Sauny, Vocabulaire patois du pays messin [Paris].

— J.-M. Lobet, Dictionnaire wallon-français [Verviers].

1856 :

— Création en Suède de sociétés scientifiques destinées à étudier la langue et les traditions populaires...

— François Génin [1803-1856], éditeur de L’éclaircissement de la langue française de Palsgrave, suivi de la Grammaire du Giles du Guez.

— L.-F. Dubois, Glossaire du patois normand [Caen].

— Cte Jaubert, Glossaire du Centre de la France [Paris].

— Salaberry, Vocabulaire des mots basques-français [Bayonne].

— J. Travers, Glossaire du patois normand [Caen].

1857 :

— Ch. Grandgagnage, Vocabulaire wallon-français des noms d'animaux, de plantes et de minéraux [Liège].

— F. Linossier, Dictionnaire gaga-françois du patois de Saint-Etienne [Vienne].

— Ch. Montesson [de], Vocabulaire des mots usités dans le Haut-Maine [Paris].

1858 :

— V. Lespy, Grammaire béarnaise avec un vocabulaire béarnais [Pau].

— Simonet, Vocabulaire du patois d'Uchon [Autun].

— J.-M. Toullec, Manuel breton-français classé par ordre alphabétique des matières [Châteaulin].

— Anonyme, Guide des Gascons, dictionnaires patois-français avec un recueil des gasconismes corrigés [Paris].

1859 :

— Laugier de Chantarousse, Nomenclature patoise des plantes des environs d'Arles [Arles].

1860 :

Cuvier, Notes sur le patois de Montbéliard [Montbéliard].

1861 :

— August Schleicher : Compendium der vergleichenden Grammatik der indogermanischen Sprachen, Weimar, Böhlau.

— Gaston Paris [1839-1903], Étude sur le rôle de l’accent latin dans la langue française, 1861-1862.

— P. Callet, Glossaire vaudois [Lausanne].

— F. Mège, Essai sur les idiotismes du Puy-de-Dôme [Paris].

— J.-B. Onofrio, Essai d'un glossaire des patois du Lyonnais, Forez et Beaujolais [Lyon].

— L. Vermesse, Vocabulaire du patois lillois [Lille].

— Anonyme, Glossaire du patois rochelais [Paris].

— Anonyme, Les mauvaises locutions corrigées [Paris].

1862 :

— Adolphe Scheler, Dictionnaire d’étymologie française d’après les résultats de la science.

— A. Baudrimond, Vocabulaire des Bohémiens du pays basque français [Bordeaux].

— É. Le Héricher, Histoire et glossaire du normand; de l'anglais, du français d'après les méthodes historiques [Avranches].

— A. Troude, Nouveau dictionnaire pratique français-breton [Brest].

— L. Vasnier, Petit dictionnaire du patois normand de Pont-Audemer [Rouen].

1863 :

— Émile Littré [1801-1881], Histoire de la langue française, 2 vol.

— Premier volume du Dictionnaire de Littré.

— Gaston Paris, Histoire poétique de Charlemagne.

— G. Azaïs, Dictionnaire des idiomes languedociens [Béziers].

— Cénac-Moncaut, Dictionnaire gascon-français [Paris].

— L. Grangier, Glossaire fribourgeois [Fribourg].

— L. Gras, Dictionnaire du patois du Forez [Lyon].

1866 :

— H. Schuchardt, Vokalismus des Vulgärlateins [Linz] : les dialectes s'enchevêtrent et s'entrecoupent de telle sorte qu'il est impossible de fixer des limites reconnues.

— Auguste Brachet [1845-1898] : Du rôle des voyelles latines atones dans les langues romanes. Publie ensuite une Grammaire historique de la langue française, 1867, et un Dictionnaire des doublets…, 1868. C'est très probablement de cette époque que date en France l’avènement de la seconde philologie française. Gaston Meyer, Paul Paris en modèlent la forme scientifique en proclamant la double nécessité de manipuler désormais des corpus de documentation aussi complets et fiables que possible, et d'employer une méthode historico-comparative qui respecte la régulation du développement des langues. Ainsi sera désormais délivré l'enseignement de l'École Pratique des Hautes Études et de l'École des Chartes. C'est la mort de la philologie impressionniste.

1867 :

Revue de Linguistique et de Philologie comparée.

— A. Brachet, Grammaire historique de la langue française [Paris]

1868 :

— Gaston Paris entre à la Section des sciences historiques et philologiques de l'École Pratique des Hautes Études. Dans le cours de grammaire historique de la langue française, qu’il professe parallèlement à la Sorbonne, il écrit : " [...] le développement du langage est dirigé par des lois qui lui sont propres, mais rigoureusement déterminé par des conditions historiques ". Mais sa position est relativisée par la conscience de la valeur métaphorique du terme de loi : " J’hésiterais davantage à assimiler les lois de mutation phonétique aux lois naturelles : celles-ci agissent toujours de même dans les mêmes conditions; celles-là ne peuvent subir cette épreuve, les conditions où elles agissent n’étant jamais deux fois les mêmes : elles ne sont que le résultat de constatations faites dans le passé; elles ne peuvent être appliquées à l’avenir. Il faut donc prendre ici le mot de lois dans un sens particulier et restreint (on trouverait des faits analogues dans la géologie, par exemple); mais nier qu’il en existe ce serait admettre dans une évolution naturelle des faits fortuits, c’est-à-dire des effets sans cause, ce qui est absurde "

— A. Pelissier, Précis d’histoire de la langue française.

Mémoires de la Société de Linguistique de Paris.

— A. Brachet, Dictionnaire des doublets ou doubles formes de la langue française [Paris]

— C. Chabaneau, Histoire et théorie de la conjugaison française.

1869 :

— Création de la Société pour l'étude des langues romanes [Montpellier].

— Julien Tell, La transformation permanente de la langue française.

1870 :

Revue des langues romanes.

— Revue Celtique.

1871 :

— Publication des Romanische Studien.

— Réédition par les soins de Ch. Daremberg et de P. Meyer de l’Histoire de la formation de la langue française pour servir de complément à l’Histoire littéraire de la France, par Jean-Jacques Ampère, 3e éd., Paris, Didier et Cie, Libraires-Éditeurs, 449 p. Ouvrage, comme le souligne l’avant-propos, qui " dès son origine, avait pris place parmi les manuels les plus estimés pour l’étude archéologique de notre langue " [iv]

1872 :

— Gaston Paris succède à son père — Paulin Paris — dans la chaire de Langue et littérature françaises du Moyen Age au Collège de France.

— G. Paris et P. Meyer publient la Romania.

1873 :

— Première grande enquête française pour déterminer la limite entre le français et le provençal [Ch. de Tourtoulon et O. Bringuier].

— Création de l'English Dialect Society.

— L.-F. Meunier, Les Composés qui contiennent un verbe à un mode personnel en latin, en français, en italien et en espagnol, partage le prix de Linguistique au Concours Volney avec Joseph Halévy. L’auteur y réfute les hypothèses de Bopp, Curtius, Justi, Roediger, Clemm, Corssen, Aufrecht, Kirchhoff, Meyer et Benfey... " Ces composés sont nés de phrases complètes, dont on a laissé de côté quelque chose, tantôt le sujet, tantôt le régime direct, tantôt le régime indirect en totalité ou en partie. Le problème consiste à retrouver la phrase mère. Cette phrase retrouvée, rien de plus facile que de dire à quel mode est le verbe du composé et si le substantif est sujet ou régime " [p. xi]

1874 :

— Enquête par correspondance en pays lorrain, lancée par l'Académie Stanislas.

— G. I. Ascoli, Schizzi franco-provenzali [in Archiv. glot. ital. t.III, p. 61-120]. Problème de la délimitation des limites dialectales.

1875 :

— G. Paris et P. Meyer fondent la Société des anciens textes français.

1876 :

— A. Leskien reprend le principe des lois phonétiques sans exception de Grimm, Die Deklination im Slawisch-Litauischen und im Germanischen.

— E. Sievers, Lautphysiologie [Berlin].

— C. Chabaneau, Grammaire Limousine [Limoges].

1877 :

— Publication de Zeitschrift für romanische Philologie [G. Gröber].

1878 :

— A. Boucherie et C. Chabaneau inaugurent à Montpellier le premier enseignement de Philologie romane dans le Midi.

— F. Mistral, Trésor dóu Felibrige.

— P. Sébillot, carte linguistique de la Bretagne présentée à l'Exposition Universelle de Paris.

1880 :

— La philologie romane et la linguistique historico-comparative subissent à cette date une réorientation qui les fera définitivement changer de perspective; il en découle une réarticulation méthodologique fondamentale. La documentation dialectale étant désormais à disposition, la variation géographique conduit à postuler que la dispersion dans l’espace peut être corrélée avec des couches chronologiques — les patois étalent leur histoire dans l’espace — et que pour comprendre les changements linguistiques du passé, il convient d’examiner aussi les processus qui se déroulent sous nos yeux, à l’époque contemporaine.

— J. Gilliéron, Le Patois de la commune de Vionnaz [Bas-Valais]; Paris Wieweg.

1882 :

— Brachet-Dussouchet : Grammaire française complète, rédigée conformément aux programmes de l’enseignement secondaire des jeunes filles, de l’enseignement spécial, et de l’enseignement primaire supérieur.

— C. Ayer, Grammaire comparée de la langue française, 3e édition entièrement refondue.

1883 :

— Création, à l'École des Hautes-Études de Paris, de la première conférence de dialectologie de la Gaule Romane. Jules Gilliéron est nommé dans cette conférence le 14 janvier 1883, selon le désir exprimé par M. Bréal et M. Dumont ; selon l'expression ultérieurement employée par Gaston Paris, Gilliéron apparaît de plus en plus comme " l'homme qui a inauguré en France l'étude scientifique des patois "

1884 :

— Gaston Paris éreinte Henri Bordier, qui avait attaqué dès 1850, la méthode philologique de Diez, auteur d'un Philippe de Remi, sire de Beaumanoir, jurisconsulte et poète national de Beauvaisis : " Quant aux étymologies de ce glossaire, outre qu'elles reposent le plus souvent sur une traduction erronée, elles dépassent en fantaisies déréglées tout ce qu'on avait jamais lu. Je regarde le point de vue où vous êtes comme aujourd'hui tout à fait dépassé (pardon du pédantisme que je suis obligé d'étaler, mais je ne sais pas parler autrement que sérieusement et sincèrement), et il me paraît inutile de le combattre. Nous formons des élèves qui sauront la phonétique, et, pour ceux-là, les étymologies hasardées seront condamnées d'avance "

1885 :

— Gaston Paris, en collaboration avec Paul Meyer, édite Les plus anciens monuments de la langue française publiés avec un commentaire philologique.

1887 :

— Léon Clédat, Grammaire élémentaire de la vieille langue française. Le même auteur publiera en 1889 sa Nouvelle grammaire historique du français..

— Publication de la méthode d'enquête de l'abbé Rousselot : " Introduction à l'étude des patois " in Revue des patois gallo-romans, t. I, 1887, pp. 1-22].

1888 :

— Samedi 26 mai , conférence de Gaston Paris, " Les parlers de la France ", [éditée in Revue des Patois Gallo-Romans 1888, pp. 161-175], dans laquelle il soutient qu'il n'y a pas à proprement parler de langue mère et de langue fille ; importance en français de l'élément gaulois. Projet d'un Atlas phonétique de la France; une monographie pour chaque commune.

1889 :

— Édouard Bourciez, Précis de phonétique française, réédité jusqu’à nos jours...

1890 :

— Arsène Darmesteter [1846-1888], Cours de grammaire historique : phonétique, morphologie, formation des mots, syntaxe, posthume p.p. L. Sudre, 4 vol., Paris, Delagrave.

 

Au regard de cette chronologie, il n'est certainement pas indifférent que l'évolution perceptible en France s'insère dans un mouvement d'ensemble plus général qui affecte simultanément l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Suisse et l'Italie, c'est-à-dire les nations qui se trouvent alors à la pointe du développement de la recherche en linguistique historique. Il est aussi très significatif qu'en France même l'émergence de la dialectologie et la reconnaissance de la légitimité des patois et dialectes soient concomitantes de la naissance de la phonétique et de la sémantique. On passera ainsi, progressivement, d’une philologie du texte et du mot écrits à une philologie du discours et du mot oral.

[Suite] – [Table]