0. Introduction

Par lexique, nous entendons « ensemble indéterminé des éléments signifiants stables (mots, locutions...) d'une langue, considéré abstraitement comme une des composantes formant le code de cette langue » (PRob 1993); par français, ce qui au XVIe siècle était considéré comme français, avec, en plus, les usages régionaux; par lexique du XVIe siècle, ce qui s'employait au XVIe siècle et était considéré comme tel par les lexicographes du temps. Comme témoins métalinguistiques contemporains des usages qu'ils répertoriaient nous prendrons les différentes éditions du Grand dictionaire françois-latin (1593-1628) -- surtout celles de Marquis (1609) et de Poille (1609), et secondairement les éditions de Stoer (1599-1603-1606) --, ouvrage encore trop peu connu, qui corrige et complète le très cité dictionnaire de Cotgrave et ceux d'Estienne et de Nicot.[1] Le choix du FEW (W. v. Wartburg, Französisches etymologisches Wörterbuch, Tübingen/Basel, dep. 1922) comme témoin métalinguistique moderne du lexique français du XVIe siècle nous a été suggéré par Jean-Paul Chauveau comme sujet de conférence dans le cadre d'un stage de formation sur le FEW.[2]

Notre examen portera sur un choix de mots enregistrés par le GDFL illustrant différentes propriétés linguistique ou représentatifs de quelques champs conceptuels et il étudiera ce qui est dit, et ce qui n'est pas dit, sur les unités lexicales prises individuellement et dans leurs relations avec d'autres unités.[3] Les données citées dans le corps de notre étude sont reprises en détail dans l'annexe. Nous commencerons par une brève discussion des options méthodologiques des dictionnaires du corpus.

1. Les méthodes de description

Le GDFL, continuateur du Dictionaire françois-latin d'Estienne, travaille sur une nomenclature d'unités françaises dans laquelle les mots sont rangés, avec quelques imperfections, par familles dérivationnelles à l'intérieur d'une organisation alphabétique des mots chefs de famille. Sont ainsi facilités les regroupements morpho-sémantiques et, puisque le dictionnaire pratique à l'occasion une approche onomasiologique, la réunion des synonymes et parasynonymes. Dans le FEW, en revanche, les unités du lexique français se trouvent dispersées, d'abord par la nomenclature, fondée sur les étymons, ensuite par la microstructure, qui procède par regroupement de formes dialectales dont le français; dans les volumes onomasiologiques, la rencontre d'unités du lexique français d'une synchronie donnée n'est que fortuite. Dans ces conditions, le FEW peut difficilement rendre compte de familles lexicales fonctionnelles ou de microsystèmes morphologiques ou sémantiques.[4] Dès le départ donc, nous sommes amené à parler du traitement accordé par le FEW au vocabulaire du XVIe siècle plutôt qu'au lexique.

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Notes

1. Sur le GDFL, voir T.R. Wooldridge, Le Grand dictionaire françois-latin (1593-1628): histoire, types et méthodes, Toronto, Éditions Paratexte, 1992.

2. T.R. Wooldridge, « Le FEW et les lexique/lexicographie français du XVIe siècle », Stage de formation permanente sur le FEW, Nancy, 5 octobre 1994.

3. Voir aussi T.R. Wooldridge, « Le lexique français de la Renaissance dans les textes et dans les dictionnaires » (in Actes du XXIe Congrès de linguistique et philologie romanes, Palerme, 1995, à paraître), où il est question de Vitruve (trad. Martin, 1547), Du Fouilloux (1561), Ronsard, Vigenere, Amyot et des termes de marine, tels qu'ils sont traités par Estienne, Thierry, Nicot et le GDFL.

4. La seule façon de mettre au jour ce qui concerne le français du XVIe siècle dans le FEW serait d'informatiser les 25 volumes... puis de les interroger à partir de repères comme "fr.", "mfr.", "16e s.", etc.