2006-2007
L'argument de vente:
« Nous assistons actuellement, en Amérique de Nord,
à une grande campagne pour l'apprentissage des langues par le
biais du micro-ordinateur. Les conseils scolaires, les
départements de langues s'y lancent parfois aveuglément
sans trop s'interroger sur la valeur pédagogique de cet outil.
Les fabriquants de quincaillerie (hardware), quant à eux, ne
peuvent que se réjouir du vaste marché à
exploiter et semblent formuler aux enseignants, propagateurs
éventuels de ce nouvel équipement, cette unique
prescription pour leurs étudiants: "branchez-les!" »
(Elkabas, 1995, 9 [Note de R.W.: manque de référence bibliographique])
Le défi pour l'enseignement:
Il s'agit donc d'examiner la variété de didacticiels
disponibles, et d'esquisser une typologie de ces outils. Il faut en
outre considérer que, malgré le grand nombre de
logiciels sur le marché, la qualité de ces derniers
laisse souvent à désirer: « ... celles et ceux qui
utilisent présentement l'ordinateur nous disent que les
logiciels éducatifs sont de mauvaise qualité, que leur
nombre est insuffisant, que le soutien technique et
pédagogique de même que le perfectionnement ne sont pas
adéquats. D'ailleurs, les collègues habitués aux
logiciels éducatifs ne manqueront pas de reconnaître
dans ces griefs leurs propres préoccupations » (Id., ibid.,
10).
La nouvelle fonction de l'enseignant-e:
« ...l'enseignant qui fera sans cesse appel à
l'ordinateur, devra en bon pédagogue s'initier à
l'informatique. Non seulement celui-ci sera en meilleure position de
choisir l'équipement nécessaire pour atteindre ses
objectifs pédagogiques, mais il saura évaluer
adéquatement les logiciels éducatifs qu'on lui
soumettra et y apporter des changements si ces derniers s'y
prêtent » (Id., ibid., 10).
2. La situation en 2007 (R.W.):
Le marché des didacticiels (CD-ROM et DVD-ROM payants) se voit concurrencer et remplacer de plus en plus par les applications didactiques disponibles, le plus souvent gratuitement, dans le World Wide Web. C'est ce dernier médium qui sera mis de l'avant dans les exemples qui suivent.
Ce qu'on disait au XXe siècle : « La création de didacticiels fait intervenir des compétences diverses: scientifique (il faut être expert du sujet), didactique (il faut savoir comment organiser le contenu à enseigner), pédagogique (il faut prendre en compte les caractéristiques des apprenants), informatique (il faut dominer l'outil informatique), audiovisuelle (il faut savoir présenter), compétences auxquelles il faut ajouter la capacité d'utiliser au mieux les caractéristiques propres de [l'ordinateur] pour créer des situations interactives motivantes », O. Adra & P.-J. Lahourcade, "Diffusion de SDM 98", 1999-2000 (document en format PDF)
D'après Parole d'ordinateur (voir le texte "L'informatique et la pédagogie" étudié dans la semaine 2), huit « moyens d'apprentissage » ou modes d'enseignement/apprentissage sont envisageables, chacun ayant sa « réalisation informatique ». Dans la perspective que nous voulons adopter ici et qui est fortement influencée par la prédominance actuelle du Web l'analyse est placée immédiatement après l'information au lieu de se trouver dans la dernière position que lui accorde Parole d'ordinateur. Est ajouté ici également, en septième position, un neuvième moyen et type de réalisation correspondant qui semble manquer au tableau : l'interprétation et sa réalisation linguistique dans l'aide à la compréhension.
Moyens d'apprentissage | Réalisations |
---|---|
tutorat | enseignement programmé |
entraînement | exercice programmé |
conceptualisation | programmation pédagogique |
expérimentation | simulation pédagogique |
information | base de données |
analyse | aide au calcul |
interprétation | aide à la compréhension |
production | aide à l'expression |
organisation | aide à la gestion |
Voyons maintenant des applications didactiques spécifiques qui exemplifient chaque moyen et type de réalisation. Les liens du tableau ci-dessus permettent d'aller directement à la section traitant de chaque moyen/réalisation.
« Un exerciseur a pour but de compléter l'enseignement régulier. Il constitue un moyen d'approfondir les concepts présentés et développés en classe. Il vise donc essentiellement à améliorer les habiletés des élèves dans les domaines d'enseignement qui s'y prêtent, tels la grammaire, le vocabulaire, etc. Toutefois, la forme de ses exercices est peu variée (questions-réponses, exercices à trous et choix multiples). [...] Parmi...100 didacticiels répertoriés, plus de la moitié étaient des exerciseurs. [...] ...nous avons dénombré plus d'un jeu, ceux-ci ayant généralement pour buts de vérifier l'acquisition de connaissances, de mesurer des objectifs d'apprentissage spécifiques ou de favoriser l'apprentissage d'éléments nouveaux relatifs à une matière donnée. Il faut souligner toutefois que certains d'entre eux manquent d'originalité, par exemple les mots croisés ou le jeu du bonhomme pendu, mais il semble que la situation de jeu et l'interaction sociale qu'elle implique créent une atmosphère de détente ayant un effet de motivation chez l'apprenant » (H.-Lemonnier, 42)
Voir aussi les nombreux sites mentionnés dans les French Language Resources du Département de FGI de UTM offrant des exercices de grammaire.
Nota (RW). Il y a peu de différences entre l'enseignement programmé et l'exercice programmé. Les mots croisés et les jeux du pendu (cf. Lemonnier), tout comme le pêle-mêle, foisonnent dans le Web ; voir, par exemple : <http://www.adomonde.qc.ca/jeux_new/le_pendu/index.php>, <http://hilarion.amo.qc.ca/cgi-bin/jqpf/jeuPM.out>, <http://www.parc-internet.com/cgi-bin/pub/BHF/GESTDH/pass.out?*nnone*pnone*mp*mf>.
« Enfin, le système-expert, très peu répandu pour l'enseignement des langues assisté par ordinateur, possède en mémoire les connaissances d'experts dans un domaine particulier (médecine, chimie, mathématiques, grammaires, etc.) et il est programmé pour utiliser ces connaissances d'une manière analogue à celle des spécialistes, à partir de "règles d'inférence". Il permet donc d'effectuer un diagnostic ou de proposer une réponse à une question, en adoptant une démarche heuristique, proche de la démarche humaine. Il utilise, en fonction du cas étudié, la somme des connaissances dont il dispose ainsi que des raisonnements déductifs et/ou inductifs » (H.-Lemonnier, 42).
Exemple: Entretien avec Dr. Staf (ressource en ligne).
« Vous avez un problème technique? Relationnel? Personnel? Parlez en au Dr Staf... Bonjour, je suis Dr. STAF, votre partenaire de conversation électronique, je suis là pour vous conseiller si vous avez des problèmes avec certains aspects du diplôme... Posez vos questions, essayez d'être concis, j'ai l'esprit vif: »
Nota (RW). Comme la traduction automatique, les systèmes experts de l' "intelligence artificielle" appartiennent à l'époque utopique où on croyait que l'ordinateur était capable de tout, y compris la reproduction par la machine des capacités du cerveau humain en matière de langage et de raisonnement. Aujourd'hui les réalisations dont on dispose sont assez rudimentaires, bien qu'on continue dans nombre de laboratoires à travailler sur des projets ambitieux dont des automatisations de processus sémantiques et syntaxiques.
4. Expérimentation --- simulation pédagogique
« Les simulateurs conçus pour l'enseignement des langues semblent cependant plus rares, puisque sur les cent didacticiels répertoriés, aucun ne rencontrait les caractéristiques de la simulation. Un simulateur vise en effet à faire interagir l'apprenant avec les données du monde réel, et pour lesquelles l'expérience réelle est impraticable. On peut l'utiliser pour illustrer l'application de concepts ou de principes, ou pour vérifier l'acquisition et l'habileté à les utiliser (Ex. Flight Simulator) » (H.-Lemonnier, 42).
« The instructional goal of approximating real-life situations serves to define the first major reason why we choose to use technology in the service of language learning. That is, technology is most usefully deployed when it helps create more realistic language learning environments » (Mitterer, 135 [Note de R.W.: manque de référence bibliographique]).
Les deux premières conditions d'une bonne simulation (selon Robert E. Morgan [Note de R.W.: manque de référence bibliographique]):
Il y a les simulations sur CD-ROM, DVD-ROM ou cassette vidéo. Dans Quel avenir pour les musées? (sept. 1999; document en format PDF), on lit : « Une autre conséquence du développement du musée virtuel est le développement de l’edutainment, c’est-à-dire d’une approche de présentation d’un contenu muséal qui combine la production d’une information à visée éducative avec un environnement ou un mode d’exposition ludique. Un exemple de cette combinaison est fourni par un jeu video qui propose une visite du château de Versailles par le biais d’une enquête policière. »
Dans le domaine de l'apprentissage de la langue, et justement par le biais de l'enquête policière, on peut mentionner deux sites :
Mentionnons aussi quelques applications de simulations dans d'autres domaines.
Nota (RW). La simulation a explosé avec l'avènement du Web, ce qui contraste avec la situation décrite par Lemonnier, Mitterer et al. (voir ci-dessus). En fait, il devient difficile de distinguer entre simulation et réalité : on peut, par exemple, simuler un voyage en train en regardant en ligne l'horaire des trains de la SNCF (Société nationale des chemins de fer), mais on peut aussi acheter son billet sur le site de cette compagnie française en préparation d'un voyage réel.
5. Information --- base de données
(RW) Depuis l'avènement du World Wide Web, on parle de Révolution informationnelle. C'est que le Web lui-même est la plus grande base de données qui ait jamais existé. Le terme de base de données date du moment où, dans le monde de l'informatique, les données engrangées dans l'ordinateur deviennent accessibles, soit en lecture linéaire (exemple du traitement de texte qui dispose un texte linéairement pour lecture "normale"), soit en lecture (ou consultation) tranversale ou catégorielle (par exemple, selon les champs auteur, titre, sujet, date, lieu de publication, etc. d'un tableur ("spreadsheet") représentant un catalogue de bibliothèque). C'est la possibilité de faire une lecture transversale et catégorielle qui transforme le texte ou ensemble de textes en base de données. Par exemple, on demande au moteur de recherche de trouver dans le Web tous les documents qui contiennent l'expression base de données (lecture transversale) en limitant la recherche aux noms de domaines en .ca (restriction catégorielle: il s'agit de sites canadiens).
Le Web contient aussi des bases de données particulières, dont nous allons regarder quelques types. Dans le domaine de la langue vue sous l'angle de l'enseignement ou de l'apprentissage, on trouve dans le Web des dictionnaires, que l'on consulte comme des bases de données.
Voisines des dictionnaires sont les bases de données littéraires, lexicaux, lexicologiques et textuelles.
6. Analyse --- aide au calcul
(RW) Les bases de données, dont il a été question dans la section précédente, livrent automatiquement des calculs. Par exemple, si j'interroge le Web à travers les pages francophones de Google, les résultats d'une interrogation faite le 26 septembre 2004 comprennent l'information que le mot pourriel a été trouvé dans « un total d'environ 14 500 pages en français », alors que le mot spam se trouve dans « un total d'environ 700 000 pages en français ». C'est ensuite à l'interrogateur d'affiner ces résultats en éliminant, par exemple, les occurrences de spam qui se trouvent dans un scénario des Monty Python sans qu'il y ait une indication de cette origine du spam du courriel.
De même, les bases d'ARTFL et du TLFQ indiquent la fréquence d'occurrence de tel ou tel mot ou expression. Nous donnons ci-dessous deux autres exemples de bases de données textuelles accessibles en ligne qui offrent différents types d'analyses statistiques :
7. Interprétation --- aide à la compréhension
(RW) Le Web foisonne d'outils d'aide à la compréhension de l'écrit à commencer par le Web lui-même comme corpus d'usages linguistiques (nous y reviendrons plus tard dans le cours). La langue orale est moins bien servie. Commençons par l'écrit.
Lorsqu'on est en train de lire un texte et qu'on rencontre un mot ou une expression que l'on ne comprend pas, ou que l'on ne comprend qu'à moitié ou qui frappe d'une façon ou d'une autre (expression imagée ou qui semble nouvelle, par exemple), le premier réflexe que l'on a aujourd'hui est de vérifier le mot ou l'expression dans le Web, d'y étudier le concept quand il s'agit d'une chose ou d'un processus.
Tous les exemples suivants sont des ressources à accès libre en ligne.
Dans les sections 5 et 6, nous avons vu l'utilité des bases de données textuelles pour la recherche de mots ou expressions. L'exemple d'application suivant offre un certain nombre de textes à la fois en mode de lecture normale et aussi en lecture transversale.
Ces contextes nous montrent que le mot pièce peut concerner l'argent, la pièce d'une maison ou une pièce de théâtre.
Une autre ressource que nous avons déjà vue dans la section 1 propose différents types d'aide à la compréhsion de l'écrit et de l'oral :
Deux autres exemples d'aide à la compréhension de l'oral par une transcription écrite des paroles :
8. Production --- aide à l'expression
(RW) Le traitement de texte offre quelques outils linguistiques simplistes comme l'incise ("hyphenation") et la vérification de l'orthographe ("speller"). Le Web contient quelques outils de ce genre :
Comme l'intelligence artificielle (cf. ci-dessus) et la traduction automatique, mais à un degré moindre, l'idée d'une automatisation de l'analyse syntaxique a fait rêver plus d'un. La recherche dans ce domaine a toutefois donné lieu à quelques didacticiels utiles payants comme Hugo ou Correcteur 101. Regardez l'article "Le correcteur grammatical : un auxiliaire efficace pour l'enseignant ? Quelques éléments de réflexion" publié en ligne en 1998 dans la revue ALSIC.
Parmi d'autres outils utilisés pour l'expression langagière, mentionnons aussi les dictionnaires dont il a été question dans la section précédente.
Encore une fois, l'écrit est mieux servi par les nouvelles technologies que l'oral. Pour ce qui est de l'expression orale, rien n'est encore et vraisemblablement ne le sera jamais venu remplacer l'essentiel face-à-face humain du vécu quotidien du séjour dans une région où on parle la langue que l'apprenant veut maîtriser.
9. Organisation --- aide à la gestion
(RW) Cette dernière catégorie n'a rien qui intéresse spécifiquement l'enseignement/apprentissage d'une langue, outre le fait que souvent on organise les choses dans des catégories nommées par des mots. On peut organiser son courriel en ligne ou sur son ordinateur personnel ; on peut gérer ses comptes et opérations bancaires en ligne ; on organise les fichiers de son ordinateur à l'aide d'un gestionnaire de fichiers ("file manager") ; on peut se servir d'un tableur ("spreadsheet") pour gérer une liste d'étudiants avec les notes du cours ; on peut organiser le programme d'un cours à partir d'un site web (exemple du cours FRE 335) ; etc.