FRE 345H5
Teaching and Learning French Since the 1970s
Notes de la semaine 2
1. Typologie différentielle des trois types d'immersion linguistique dans L2.
- Le bain linguistique : il a lieu à tout âge, méthode naturelle non systématisée ; elle fonctionne selon les mêmes paramètres de base que l'acquisition de la langue maternelle ou langue première (L1) : l'ordre peu prévisible des éléments appris est déterminé par celui des besoins ressentis (installation, achats, travail, rencontres, loisirs, etc.).
- Le cours intensif : il s'adresse généralement aux adultes en stage, aux élèves en rattrapage ou aux étudiants des cours d'été ; l'apprentissage est institutionnalisé et l'ordre des éléments appris est déterminé par le programme du cours. (À noter que les séjours-stages d'été combinent souvent le bain linguistique (vie en famille) et le cours intensif.)
- L'immersion "à la canadienne" : elle vise premièrement les petits enfants de l'école primaire ou élémentaire, et secondairement les adolescents de l'école secondaire ; elle est institutionnalisée et l'ordre des éléments appris est déterminé par le programme scolaire, qui prend en compte l'âge des apprenants, l'interaction sociale, la culture et la vie personnelles des apprenants, les saisons avec leurs manifestations et fêtes, les sujets jugés importants à apprendre (dont les matières scolaires comme le cours d'histoire, le cours de musique, le cours de géographie, etc.).
2. Les conditions menant à l'adoption de l'immersion au Québec
- Après la "Révolution tranquille", l'État a pris en charge l'enseignement et les conditions de travail contrôlés jusque là par l'Église (éducation) et les patrons anglophones (économie). L'anglais était la langue des maîtres et le français celle des travailleurs ; donc celui-ci était senti comme inférieur c'était la langue sociale, la langue de famille, mais pas celle des "choses sérieuses".
- La plupart des études faites auparavant suggéraient que l'enfant bilingue était intellectuellement moins avancé que l'enfant unilingue (on dit aussi monolingue), mais une étude déterminante menée à Montréal en 1962 par Elizabeth Peal et Wallace Lambert démontrait au contraire que le bilinguisme favorisait le développement cognitif.
- Dans les années 1960, plusieurs commissions, soit provinciales, soit fédérales, étudient la place du français dans la province du Québec ou plus généralement au Canada. La commission d'enquête dite Commission Gendron, sur la situation de la langue française et sur les droits linguistiques au Québec, recommande, entre autres choses, d'augmenter le pourcentage des francophones québécois aux niveaux moyens et supérieurs des fonctions administratives et techniques des entreprises. Suite à la création en 1964 d'un ministère de l'Éducation, la Loi pour promouvoir la langue française au Québec établit, en 1969, les conditions pour favoriser l'utilisation du français comme langue de travail et des affaires. La même année au niveau fédéral, la Loi sur les langues officielles fait de l'anglais et du français les deux langues officielles du Canada ; cinq ans plus tard, la Loi sur la langue officielle adoptée par le Québec établit le français comme seule langue officielle de la province et aussi comme langue d'enseignement. Trois ans plus tard encore, avec l'avènement au pouvoir du Parti québécois (1976), on adopte au Québec la Charte de la langue française, qui fait du français la langue de la justice et des lois, la langue de l'administration publique et des organismes parapublics, la langue du monde du travail, du commerce, des affaires, des entreprises et de l'enseignement. On est près pour l'introduction de programmes d'enseignement du français nouveaux, dont l'immersion.
3. L'implantation de programmes d'apprentissage de la langue immersifs au Québec et dans le reste du Canada
- Il s'agit avant tout de ce qu'il est convenu d'appeler l'immersion française. Le français, subordonné à l'anglais dans plusieurs domaines (voir ci-dessus), a besoin de renforcement au Québec. Avec l'adoption officielle du bilinguisme au niveau fédéral, on juge que le français, minoritaire dans le reste du pays, a besoin d'être enseigné et appris de façon plus efficace dans les autres provinces.
- C'est donc dans la première moitié des années 1960 que l'on voit apparaître des programmes d'immersion française dans plusieurs écoles au Québec ou ailleurs : entre autres, dans la Toronto French School et en milieu protestant anglophone à Montréal. Il s'agit de créer de nouveaux programmes d'enseignement de la langue, de les introduire dès la maternelle ou la première année de l'école élémentaire et de les maintenir au moins jusqu'à la fin des études élémentaires sinon plus loin. Une partie au moins des autres matières scolaires, comme la géographie, l'histoire, les sciences ou la musique, est également assurée en français dans ces nouveaux programmes d'immersion. Petit à petit les programmes d'immersion française s'étendent à l'ensemble du pays dans les années 1960 et 1970. À partir du début des années 1970 le gouvernement fédéral donne de l'argent aux provinces pour introduire ou soutenir de nouveaux programmes de français.
- Les parents d'élèves y voient non seulement une amélioration de la maîtrise de la langue mais aussi des bienfaits culturels, intellectuels et sociaux.
- D'après JR, on assiste à une croissance exponentielle dans les effectifs des programmes d'immersion française : au Québec, par exemple, le nombre d'élèves inscrits dans ces programmes passe de 700 en 1971 à 18 500 en 1981. Il faut noter en même temps l'effet opposé de la Charte de la langue française (1977) obligeant les immigrants à envoyer leurs enfants à une école de langue française plutôt que de les inscrire dans une école protestante anglophone. En 1980 un rapport du commissaire aux langue officielles notait : "En 1969, cette méthode s'appliquait au stade expérimental à quelques centaines d'enfants de la région de Montréal, et, dix ans plus tard, quelque 15 000 participent à des programmes d'immersion dans le Québec et quelque 26 000 dans huit autres provinces." (citation prise dans JR).
- JR note que l'immersion française ne touche qu'une relativement petite minorité d'écoles et d'enfants et qu'il y aussi des programmes de français de base, de français enrichi, des programmes de français dits intensifs, aussi bien que des programmes d'immersion anglaise, ukrainienne, chinoise, etc. Au Québec il y a également le fait que des secteurs de la population qui pendant un temps inscrivaient leurs enfants dans des programmes d'immersion française offerts par des écoles protestantes anglophones les envoient maintenant dans des écoles de langue française (voir paragraphe précédent).
- [Une observation sur la terminologie employée par JR. On y lit le mot expérimentation, alors qu'en français standard on dit normalement expérience pour exprimer l'anglais experiment. C'est-à-dire le mot français expérience est polysémique, correspondant à la fois à l'anglais experience et à experiment. Pour ce qui est des verbes, l'équivalent du mot anglais to experience est connaître, éprouver, ressentir, etc., selon le contexte ; l'équivalent français de l'anglais to experiment est expérimenter.]
4. Un survol de différentes méthodes d'enseignement de la langue employées depuis 1970
Approche grammaire/traduction, méthode audio-linguale, approche suggestopédique, méthode communautaire, approche communicative, approche cybernautique. Voir le document de C. Elkabas sur "Articulation des théories et de la pratique".